Archiver pour mai 2016
Posté le 31 mai 2016 - par dbclosc
Aux origines du LOSC (1/4) : Comment le LOSC s’est fait un nom
Lille Olympique Sporting Club. Tu ne t’es jamais dit que ça sonnait bizarrement ? Qu’aucun autre club de foot n’avait pareille appellation ? Entre stratégie sportive mondiale, régionale puis locale, développement du football comme sport de masse, influence anglaise et conséquences de la seconde guerre mondiale, retour sur les origines d’un nom pas très commun.
C’est bien connu : le Lille Olympique Sporting Club est né le 10 novembre 1944. Il est le résultat de la fusion de deux clubs voisins et longtemps ennemis : l’Olympique Lillois et le Sporting Club Fivois. Mais ça ne nous dit pas encore grand chose de ces dénominations assez incongrues. L’histoire de la dénomination du LOSC passe donc d’abord par l’histoire de la dénomination de ces deux clubs.
Une ville en forme olympique
On sait que la ville de Lille était candidate pour l’attribution des Jeux olympiques d’été de 2004. Finalement préférée à Lyon (piteusement éliminée par la suite), Lille n’a pas vu les JO, mais l’histoire de son club de football y est très lié. L’Olympique Lillois (OL), l’un des ancêtres du LOSC, a été créé en 1902, un temps que les moins de 120 ans ne peuvent pas connaître. À sa tête, André Nicodème, initialement président de L’Iris Club Lillois, un club omnisports (mais principalement centré sur le rugby) déclaré en Préfecture le 10 Octobre 1898, que l’OL ne tarde pas à absorber, dès 1907. Originellement, l’OL est donc une sorte de superstructure (comme aurait pu dire K.Marx) qui comprend, entre autres, un club de football du même nom. Mais il existe d’autres sections sportives au sein de l’OL, dont certaines ont d’ailleurs été championnes de France dans l’entre-deux-guerres (hockey sur gazon dans les années 1920, basket-ball – sous statut amateur – dans les années 1930), ou championnes du Nord (rugby à XV dans les années 1920). L’OL rejoint très rapidement l’Union des sociétés françaises de sports athlétiques (USFSA), fédération omnisports fondée en 1887, initialement consacrée à l’athlétisme, puis ouverte à d’autres sports dès 1889, puis au football en 1894. Si les équipes lilloises se regroupent sous l’appellation olympique, c’est parce que les premiers jeux olympiques modernes, très récents (initiés en 1894 par Pierre de Coubertin et réalisés en 1896 à Athènes), organisés sous l’égide d’une nouvelle organisation, le Comité international Olympique, s’appuyant lui-même sur les fédérations nationales naissantes, sont le premier événement international majeur consacré au sport, et les structures qui se mettent en place dans son sillage reprennent cette appellation, le but ultime d’une carrière sportive étant alors considéré comme étant une participation aux Jeux Olympiques. L’USFSA, en collaboration avec le CIO, organise ainsi les Jeux Olympiques à Paris en 1900.
Surtout, parmi les premiers dirigeants de l’OL figure un certain André Billy dit « L’Empereur » et non « The Kid » (ci-contre), administrateur de la Compagnie Française de Stérilisation des Farines (ne nous demandez pas ce que c’est, mais c’est sans doute très prestigieux), et haut fonctionnaire, conseiller au commerce extérieur de la France. Il prend le titre de président de l’OL en 1907 mais, avant cela, Billy a été le premier vice-président de l’USFSA, ce qui a grandement facilité l’intégration de l’OL dans la dynamique « olympique ». L’USFSA disparaît en 1920 et se divise en fédérations unisports telles que nous les connaissons aujourd’hui. Suite à une brouille avec Henri Jooris, les deux dirigeants manquent de se battre en duel et, finalement, Billy fonde un autre club, le Club Lillois, en 1910 : retenez bien ce nom, car on n’en a plus jamais entendu parler.
Il faut donc comprendre la dénomination d’Olympique lillois dans ce contexte d’émergence et de structuration du sport au niveau mondial et de l’élan suscité par l’enthousiasme autour de la rénovation des Jeux Antiques. C’est cet adjectif que l’on retrouve aujourd’hui au sein du Lille Olympique Sporting Club.
Bienvenue au sporting club
Si l’OL est multisports, c’est particulièrement sur le football que les dirigeants concentrent leurs efforts : ce sport est en effet en plein essor dans la région, avec notamment les créations du Racing Club de Roubaix en 1895, de l’Union Sport de Tourcoing en 1898, de l’Amiens Athlétic Club, du Sporting Club Fivois et du Racing Club d’Arras en 1901, puis du Racing Club de Lens en 1906. À la même période, la Fifa, dont le but est de gérer et de développer le football dans le monde, est créée (1904).
Si elles ne nous posent pas spécialement question aujourd’hui tant elles paraissent naturelles, on peut toutefois s’interroger deux minutes sur ces dénominations : pourquoi donc des équipes françaises incluent-elles dans leur nom officiel des « club », « racing », « sporting », ou « athlétic » ? Comme c’est le cas de nombreux équipes de football créées à cette époque, les dénominations révèlent une forte influence britannique, terre d’origine du football (qui, rappelons-le tout de même, est un terme anglo-saxon), et la volonté de ces nouveaux clubs de s’aligner sur les modèles de l’époque qu’étaient le Racing club de France au niveau national et le Racing Club de Roubaix au niveau régional, parmi les premiers à avoir adopté l’appellation « racing ». C’est de cette manière qu’il faut comprendre l’origine des RC Lens, Strasbourg (1906), ou de Toulon, en rugby (1908). C’est aussi dans cette logique d’anglicisation qu’il faut comprendre le nom du Sporting Club Fivois (SCF), deuxième ancêtre du LOSC. Le SCF avait pourtant initialement choisi une terminologie « française », en se dénommant éclair fivois à sa création en 1901, grâce au soutien de la Société Anonyme des automobiles Peugeot, devenue Compagnie Lilloise des Moteurs en 1928.
L’apparition du mot « club », utilisé « comme second élément de substantifs composés », est aussi liée à l’influence britannique : le CNRTL raconte que l’un des sens qu’on donne aujourd’hui à ce mot (« association à caractère sportif ou à but touristique ») est issu du mot anglais désignant de façon chic un « cercle aristocratique » ou « une association dont les membres ont des goûts, des intérêts ou un but communs », dont on ne trouve pas trace en France avant la fin du XIXe siècle. Le « sporting club » de Fives se retrouve également aujourd’hui dans le Lille Olympique Sporting Club.
Du bon voisinage à la rivalité
Voilà pour une brève histoire de la dénomination des deux clubs qui fondent le LOSC. De leur création à leur fusion, les deux clubs ont connu des fortunes diverses, et ont aussi été de grands rivaux, parmi la pléthore de clubs régionaux qui se sont affrontés.
Dans les années 1900 à 1930, l’OL domine largement son voisin – et pas encore rival – fivois, qui n’émerge régionalement qu’en 1914, quand il rejoint le championnat Nord de la Fédération cycliste et athlétique de France. Entre-temps, l’OL a déjà pu se distinguer en allant en finale de coupes nationales aujourd’hui disparues (la coupe Manier, la coupe Sheriff Dewar) ou en participant à un ancêtre de coupe d’Europe, le challenge international du Nord, avec des Belges, des Néerlandais et des Suisses. Cependant, l’OL est lui même dominé dans la région par le RC Roubaix et l’US Tourcoing, qui raflent tous les titres du championnat du Nord et quelques titres USFSA dans les années 1900. Les deux décennies suivantes voient la consécration de l’OL , considéré comme le meilleur club de France avant-guerre, avec notamment un titre de champion de France USFSA (1914), un Trophée de France (1914 également), il poursuit sur sa lancée en étant champion du Nord à trois reprises (1921, 1922, 1929) et vice-champion régional quatre fois (1920, 1923, 1924, 1928). La légende raconte que, les soirs de victoires footballistiques de l’OL, le café Bellevue sur la Grand-Place (dont il ne reste aujourd’hui que la partie faisant hôtel, au-dessus du Furet), dans lequel le président Henri Jooris (ci-contre) avait quelques affaires, hissait un drapeau aux couleurs du club, rouge et blanc. De son côté, le SC Fives est champion de PH du Nord à quatre reprises, mais il ne s’agit que de la deuxième division régionale.
Tout s’accélère en 1932 : alors que le SCF vit toujours dans l’ombre du géant lillois, le professionnalisme est instauré dans le football. Le président lillois, Henri Jooris, hésite : il sait que cette évolution est inéluctable (d’ailleurs, il paye déjà ses joueurs depuis des années) mais, d’un autre côté, la ligue du Nord s’y oppose ; or, Jooris en est aussi le président ! C’est ainsi que, dans un premier temps, il ne propose pas la candidature de l’OL pour disputer le premier championnat de France de l’histoire. Deux dirigeants de l’OL, Gaston Decrane et Marcel Veroone, quittent alors le club et vont trouver Louis Henno, président du SC Fives, en lui expliquant la situation. En gros, ils lui racontent que se lancer dans le professionnalisme fera du SCF le premier club de la région. Henno n’hésite pas et c’est pourquoi, alors qu’il est un club mineur de la région, le SCF accède au professionnalisme le 22 juillet 1932 ! Finalement, Jooris prend peur et dépose à son tour un dossier de candidature, lui aussi accepté une semaine après, le 29 juillet. Il y avait donc deux clubs lillois dans le premier championnat de France professionnel, et l’OL en est le premier champion en 1933.
De la rivalité à la fusion
Les années 1930 sont l’âge d’or du foot nordiste. Outre les deux clubs lillois, se retrouvent régulièrement l’Excelsior Roubaix, le RC Roubaix, Valenciennes, Lens, ce qui donne lieu à de nombreux derbys. Comme on te l’a expliqué dans cet article, dans les années 1930, l’OL domine nationalement, mais si on s’intéresse aux confrontations directes entre les deux clubs, force est de reconnaître la supériorité régionale du SCF jusqu’en 1939, année où le championnat est arrêté en raison de la guerre. Celle-ci rend difficilement lisible les performances des uns et des autres : l’OL, sous le nom de l’Olympique Iris Club lillois (avec l’intégration de l’IRIS Club), et le SC Fives jouent en 1941-1942 le championnat de la zone interdite, puis en 1942-1943 le championnat de guerre du Nord, remportés tous deux par le RC Lens. Un premier projet de fusion est proposé en 1943, mais rejeté par les dirigeants du SCF. Quand Henri Kretzschmar, le président de l’Olympique Lillois, propose le projet à Louis Henno, celui-ci a répond : « Je ne marche pas. Notre verre est peut-être moins grand que le vôtre, mais je préfère continuer à boire dedans. C’est mieux que de se faire absorber1 ». Les dirigeants de chaque camp se détestent. Une fusion de fait – imposée par le gouvernement de Vichy - est tout de même réalisée pour le championnat 1943-1944 : une équipe de « Lille-Flandres » est créée (de même que « Rennes-Bretagne », « Nancy-Lorraine », « Grenoble-Dauphine », etc) à partir des effectifs de l’OL, du SC Fives, des clubs pros roubaisiens et de Valenciennes. Ce championnat est remporté par l’équipe de Lens-Artois, qui a décidément bien profité de l’Occupation.
Kretzschmar revient à la charge et précise à Henno : « C’est vous qui serez le président du nouveau club. Moi, je me contenterai d’un poste de vice-président ». Le 23 septembre 1944, l’accord est conclu entre les deux parties. Dans un premier temps, la fusion de l’OL et du SCF donne naissance au Stade Lillois. Cependant, cette appellation apparaît trop banale. Le Stade Lillois ne participe qu’à deux matchs amicaux et aux deux premières journées du championnat de guerre 1944-1945, pour 4 victoires, ce qui en fait la meilleure équipe lilloise de tous les temps. Deux mois plus tard, un autre nom, plus original, a été adopté, reprenant en partie les noms des deux clubs fusionnés le Lille Olympique Sporting Club. Le LOSC !
OL+ SCF = LOSC
Le nouveau club est né officiellement le 10 novembre 1944. Pour son premier match officiel, sous la direction de l’entraîneur anglais Georges Berry, le nouveau club écrase Le Havre 9-2. Six mois après sa création, le 6 mai 1945, il joue à Colombes sa première finale de coupe de France, qu’il perd malheureusement 3-0 contre le Racing Club de Paris. Mais la France connaît désormais le LOSC.
Georges Berry, premier entraîneur du LOSC. Ex-défenseur de Cambrai, Armentières et Bully-les-Mines, il signe à l’Olympique Lillois en 1926, puis signe professionnel au SC Fives en 1932, avant d’en devenir l’entraîneur en 1936. Connaisseur des deux clubs, Louis Henno l’appelle en 1944.
NB : Au fait, on s’est beaucoup attardé sur Olympique, Sporting et Club, et pas beaucoup sur Lille, mais on est partis du principe que ça ne nécessitait pas d’explication.
FC Note :
1 Ces dialogues sont issus du magazine « Légendes du foot », paru au printemps 2001
Volet 2 du dossier : http://droguebierecomplotlosc.unblog.fr/2016/06/01/aux-origines-du-losc-24-le-losc-prend-des-couleurs/
Volet 3 : http://droguebierecomplotlosc.unblog.fr/2016/06/02/aux-origines-du-losc-34-le-logo-motive/
Volet 4 : http://droguebierecomplotlosc.unblog.fr/2016/06/04/aux-origines-du-losc-44-lactualisation-de-lheritage/
Posté le 30 mai 2016 - par dbclosc
Joël Henry, c’était le temps des copains
Etrangement, Joël Henry n’a pas été cité lors de notre consultation pour la désignation du « 11 de cœur ». Pourtant, Joël Henry – Joël Depraetere lors de son premier match en D1 – est l’un des plus grands talents ayant joué au LOSC, pas si loin que ça dès Hazard et Karasi à en croire certains. Il est aussi quelqu’un qui véhicule des valeurs plutôt sympathiques : privilégiant les valeurs de l’amitié, n’exprimant aucun regret de ne pas avoir réussi une carrière à la hauteur de ce que son talent pouvait lui permettre d’espérer et se reconvertissant en dehors du football avec bonheur, illustrant par-là que le football est autre chose que la compétition forcenée qu’on nous vend souvent aujourd’hui.
Joël est ainsi lancé dans le grand bain le 18 août 1978 à Nantes par José Arribas. Il n’a alors que 16 ans et pas tout à fait quatre mois, lui qui est né à Armentières le 19 avril 1962. La saison suivante, il marque son premier but sous le maillot lillois lors d’un match contre le PSG (4-2), à seulement 17 ans et 7 mois. Joël Henry est incontestablement un talent précoce. A l’issue de la saison, Joël a joué 10 matches avec l’équipe première (2 buts marqués) et représente l’avenir du club.
Dans le cadre du recrutement de Merry Krimau en provenance de Bastia, Henry fait le chemin inverse et rejoint en prêt l’Ile de Beauté. Le milieu offensif ne part cependant pas dans la peau d’un titulaire mais les difficultés rencontrées par le club bastiais vont rapidement lui offrir du temps de jeu. En début d’année 1981, le coach Antoine Redin décide – avec bonheur – d’en faire un titulaire au poste de milieu offensif. Henry débute 13 des 15 matches de de janvier à mai 1981 en D1 avec Bastia, pour 4 buts et 2 passes décisives.
Mais c’est surtout avec la Coupe que Henry se fait un nom et connaît ses premières heures de gloires : à tout juste 19 ans, il remporte la finale contre le Saint-Etienne de Platini et est considéré par de nombreux observateurs comme le meilleur joueur de la finale, donnant la leçon à un Platoche fantomatique. Au total, il marque 6 fois au cours de la saison et, plus généralement, il joue un rôle offensif fondamental : le talent de dribbleur de Joël est désormais bien connu de la France du foot et c’est avec difficulté que le LOSC le fait revenir de son prêt.
Lille a indéniablement une pépite. Son début de saison tonitruant n’est pas sans lien avec l’excellent début de saison du LOSC. Après 12 journées, Henry a déjà marqué 6 fois et donné 2 passes décisives. Puis il connaît la première de ses nombreuses blessures, ne jouant plus de ce fait que deux matches (pour 117 minutes) après la 16ème journée.
Ben oui les Dogues montrent « les crocs », ils vont pas montrer leurs … non, laisse tomber.
La saison 1982-1983 s’annonce en revanche radieuse pour le LOSC qui recrute quelques vedettes : l’Algérien Kourichi et les internationaux français Didier Christophe et Albert Gemmrich signent ainsi au LOSC, rejoignant (entre autres) Bergeroo, Muslin, Verel et donc Joël Henry, au sein d’un effectif qui peut nourrir de légitimes ambitions. Christophe ne se plaira pourtant jamais à Lille et Gemmrich fût plus efficace comme fouteur ed’brin dans les vestiaires que devant les buts (0 but). Une excellente saison de Henry, notamment ponctuée de 8 buts – mais aussi de quelques pépins physiques – , sera insuffisante pour permettre au LOSC de terminer plus haut qu’à la 13ème place. Mais les Dogues auront cependant un sympathique lot de consolation en atteignant la demi-finale de la coupe : déjà une routine pour Joël, déjà vainqueur de l’épreuve deux ans plus tôt.
Henry n’a alors que 21 ans, mais il est déjà en fin de contrat à Lille
Brest et les copains
A l’été 1983, Joël est très courtisé, mais il fait le choix du cœur en rejoignant Brest où joue son pote Bernard Pardo qu’il a connu à Lille. Choix du cœur et, paraît-il, choix de la teuf : il se dit que Jojo ne rechignait pas à partager quelques pintes de chouchen avec son pote Nanard Pardo et ses autres co-équipiers brestois. Un écart de conduite de trop – lui et Pardo sont retrouvés dans la voiture de Jojo, la voiture dans le fossé, à 6 heure du mat’ quelques heures avant un match contre Metz – aboutit à sa mise à l’écart du groupe pendant une quinzaine de jours.
Contrairement aux allégations de cette photographie, Henry et les Brestois n’avaient rien de bouchers
Bref, Henry s’amuse bien à Brest et ses deux premières saisons brestoises sont assez correctes même si elles sont un gros poil en-dessous de ce qu’on aurait pu attendre étant donné le talent du bonhomme. Mais l’essentiel n’est pas là pour Joël …
Mais sa troisième saison est celle de trop, en tout cas footballistiquement. Henry n’est plus l’ombre du virevoltant milieu offensif qu’il était et finit sa saison avec la réserve du club finistérien.
Nice et Toulon
Joël s’en va alors pour la Côte d’Azur et pour Nice. Il fait des débuts canon, marquants 4 buts, faisant 2 passes décisives après 15 journées et marquant le jeu azuréen de son empreinte. Mais on assiste très vite à ce qui est finalement un « retour à la normale » pour Henry : il perd ensuite en influence et en efficacité sur le jeu azuréen.
Eté 1987, nouveau déménagement pour Joël qui s’en va rejoindre les anciens lillois rencontrés au centre de formation, Bernard Pardo et Jean-Pierre Mottet, ainsi qu’un futur dogue historique, Patrick Collot. Il y rejoint aussi par ailleurs Bernard Casoni, David Ginola et Laurent Paganelli. Il fait une saison globalement moyenne dans une équipe qui monte progressivement en puissance. Paradoxalement, Joël semble footballistiquement plutôt sur la pente descendante, mais il joue pour la première fois dans une équipe qui termine à la 5ème place en D1.
Fin de carrière nantaise
1988. Henry a désormais 26 ans et, après 10 ans de carrière, sa cote a légèrement pris du plomb dans l’aile. S’il trouve un contrat à Nantes, une équipe assez ambitieuse, il ne part pas comme titulaire, situation inédite pour lui depuis son prêt à Bastia alors qu’il avait alors 18 ans. Il doit faire ses preuves et ses débuts sont logiquement difficiles dans une équipe au jeu alors assez défensif.
Joël réussit pourtant son pari : il est en pleine bourre sur la fin des matches aller, marquant 1 but et faisant 2 passes décisives en 4 matches et réalisant de très belles prestations. Blessé en décembre, il loupe quelques matches, mais il revient bien fin janvier. Encore blessé en avril, il revient bien dans la dernière ligne droite. Arrivé sur la pointe des pieds, Joël remporte son pari et obtient une prolongation de contrat à Nantes qui termine 7ème et nourrit de belles ambitions.
Mais il s’agissait des derniers soubresauts dans la carrière chaotique de Joël Henry. S’il est titulaire pendant encore deux an et demi au FCN, il est un bon cran en dessous de ce qu’il a monté par le passé, à Bastia, Lille, Brest et même à Nice. Blessé au cours de sa dernière saison nantaise, il met fin à sa carrière professionnelle en 1992, à l’âge de 30 ans. Ses statistiques de ses trois dernières saisons nantaises sont très modestes : seulement 5 buts et 4 passes décisives en 86 matches, très loin de ses performances de la période 1980-1984 au cours de laquelle il inscrit 27 buts en 108 rencontres.
Quel bilan pour la carrière de Joël ?
D’un point de vue sportif, il est indéniable que le sommet de la carrière d’Henry se situe à son début, d’abord avec Bastia puis avec Lille. Quand il quitte Lille, à seulement 21 ans, il vient de réussir trois très belles saisons, ponctuées d’une finale de coupe remportée, d’une autre demi-finale, et de performances de très haut niveau qui en font alors un candidat très sérieux à l’équipe de France.
Henry garde de bons souvenirs de sa période lilloise et sans doute encore davantage de son année bastiaise. Mais, quand il évoque ses souvenirs de footeux, c’est sa période brestoise qu’il met le plus volontiers en avant : c’est le temps des copains et, pour lui, ça n’a pas de prix.
Et ça, il l’a payé Joël. Et On peut comprendre que ça ait dérangé. Mais Henry a fait un choix et a finalement un discours assez frais sur le football : pas de rancœur mal placée, pas de regrets exprimés sur sa carrière peut-être pas tout à fait au niveau de son talent. Non, Joël exprime surtout la joie d’avoir fait une carrière de footballeur pro et d’avoir fait de belles rencontres.
Le graphique ci-dessus, qui montre le déclin progressif de son ratio buts/50 matches, traduit le fait qu’il n’a pas été aussi haut que ses débuts pouvaient faire espérer. Aujourd’hui, on dirait qu’il a raté sa carrière : mais n’a-t-il pas au contraire compris que l’essentiel n’est pas là ?
Posté le 28 mai 2016 - par dbclosc
Lille 1965-1967 : la « André Guy dépendance » ?
Il y a un nouveau thème de polémique très con qui a été lancé il y a quelque temps dans la presse footballistique, c’est celui de la « quelqu’un dépendance ». Je te résume : en gros, il s’agit de souligner que quand un joueur particulièrement bon est absent, son équipe marche moins bien. Il en découle des polémiques du genre : « mais tu te rends pas compte ! Ils ont fait une grave erreur en le prenant, parce que quand il est pas là, leurs résultats sont moins bons ! ».
Ce à quoi t’as envie de répondre : « non ? Sans rire ? Quand tu recrutes un super joueur, ton équipe elle a de meilleurs résultats avec lui que sans lui ? » (Bordel, c’était donc à ça que ça sert de recruter de bons joueurs ! Avoir de meilleurs résultats avec eux que sans eux !). Et, au passage, d’un coup tu comprends vachement mieux le petit gamin bourge qui était privé de piscine privée par ses parents et qui était triste : c’est parce qu’il était piscine-privée dépendant ! Et en fait, tu te dis d’un coup, les riches ils ont pas d’bol.
La polémique a quand-même de quoi faire un peu rigoler. Les mecs – parce que c’est surtout des mecs qui viennent commenter ça – ils arrivent à te trouver des problèmes là où il n’y en a pas, c’est terrifiant. Rappelle-toi, en début de saison, on a eu droit à cette polémique avec Sofiane Boufal. On nous a mis en garde contre la « Boufal dépendance ». Tu remarqueras en plus que, vu nos résultats de l’époque, on avait quand-même un peu de mal à croire dans la « Boufal dépendance » : franchement, sans lui, je suis pas persuadé qu’on aurait fait une entame bien plus pourrie (1).
En plus, quand tu regardes les résultats du LOSC, la Boufal dépendance ne s’est pas trop vérifiée. Avec Sofiane titulaire, le LOSC a pris 1,48 point par match. Sans lui, 1,82 (2). Alors, à part vendre du papier, les polémiques sur la « Boufal dépendance », je vois pas trop à quoi ça sert.
Bref, tout ça pour dire que y’a pas de raisons. Si certains vendent du papier sur la « quelqu’un dépendance », pas de raison qu’on n’en profite pas. D’où ce papier sur la « André Guy dépendance » du LOSC entre 1965 et 1967.
André Guy, le buteur coquet aux 46 buts en 2 ans
André Guy arrive au LOSC en 1965, de Saint-Etienne où il vient d’inscrire 45 buts en deux saisons. Il a 24 ans, et 3 sélections et un 1 but avec les Bleus. Incontestablement, c’est une bonne pioche pour les Lillois qui viennent de terminer à la 9ème place du championnat pour leur première année en D1 après la remontée. Soit dit en passant, il ne sera pas de trop, puisque le LOSC vient de perdre son trio Ehrardt-Magny-Lachot auteur de 37 buts en 1964-1965.
Bienvenue André … enfin Guy … enfin … pfff … je sais plus à la fin …
Au LOSC, Guy marquera 22 puis 20 buts. Il reste à ce jour le dernier joueur à avoir atteint la barre des 20 buts en une saison deux fois de suite avec le LOSC, même s’il est vrai que Pierre Pleimelding fût ensuite tout proche de cette performance. 42 buts en deux championnats, et 4 en coupe de France, André marque près de la moitié des buts de son club sur la période, soit exactement 46 sur 110 (42%).
La « Guy dépendance » 1
Forcément, avec une telle importance dans le total de Lille, Guy est nécessairement le joueur dont un club est un peu dépendant : avec lui, ça sera particulièrement vrai. Sur les 34 journées au cours desquelles il marque au moins un but, le LOSC gagne à 22 reprises, pour 2 nuls et 10 défaites ; quand il ne marque pas, Lille gagne seulement 5 fois, fait 12 nuls et perd 25 fois. Quand André marque, le LOSC gagne dans 65 % des cas (et prend 1,35 pts/match), mais seulement dans 12 % des cas (0,52 pt/match) quand il ne marque pas.
D’ailleurs, cet article de l’époque te montre que cette question de la Guy dépendance, on se la posait à l’époque, mais sous d’autres termes.
Certes, c’est logique que Lille gagne plus quand son buteur marque. Mais le contraste est cependant particulièrement marqué. A titre de comparaison, depuis que Boufal est arrivé au LOSC, les Dogues ont gagné 58% des 12 matches au cours desquels il marque (2 pts/match) et 43 % des autres (1,53 pts).
La « Guy dépendance » 2
Autre illustration de la « André Guy dépendance » du LOSC :
Le 19 mars 1967, des buts des deux André (Guy et Houen) donnent la victoire au LOSC dans le derby contre Lens. A dix journées de la fin, les Dogues se retrouvent quatrièmes, soit leur meilleur classement depuis 1958.
C’est à ce moment qu’André, mais pas que lui, commence à cafouiller : il ne marque qu’un seul but lors des 10 dernières journées et cela se ressent dans les résultats de son équipe : Lille ne gagne qu’un match (le jour de son dernier but) contre Monaco, fait trois 0-0, et s’incline 6 fois, marquant 4 fois pour 16 buts encaissés. Lille perd à Sedan (4-1), contre Bordeaux (1-2), à Nantes (4-0) puis retrouve le chemin de la victoire contre Monaco (2-1). Lille se retrouve alors 6ème, et le 3ème est à quatre longueurs. Restent alors à jouer Valenciennes (11è), le Stade Français (dernier), Sochaux (13è), St-Etienne (1er), Nîmes (17è) et Rennes (12è). Sauf avec le leader stéphanois, le tableau apparaît alors assez dégagé : Mais Lille échoue à Valenciennes (0-3), contre la lanterne rouge (0-0), à Sochaux (0-1), contre le leader (0-1) comme contre les Nîmois (0-0) et les Rennais (0-0).
Le dernier buteur lillois est André Guy, 607 minutes avant la fin de cette saison. Lors de la première journée de la saison suivante, Claude Petyt mettra fin à la série après 63 minutes de jeu. André Perrin vient de Lyon pour remplacer André Guy. Il marque 9 buts (dont 4 en 5 matches sur les 7 premières journées). André Breuval arrivera aussi, d’Abbeville. Il inscrira 4 buts.
Est-ce que c’est vraiment une si bonne idée que ça d’échapper à la « Guy dépendance » ?
Donc, bon, voilà : oui, c’est vrai, le LOSC était un peu « Guy dépendant », mais franchement, on va pas s’en plaindre, ça veut dire qu’on avait André Guy à l’époque. Comment aurait-on pu éviter cette « Guy dépendance » ? Pour te l’expliquer, j’ai imaginé un dialogue entre Jean Denis et Jules Bigot, respectivement président et entraîneur du LOSC en 1965.
Jean Denis : Wesh, Jules. Bien ? Là j’ai un bon contact avec André Guy, il pourrait signer pour nous.
Jules Bigot : Pfiou ! Pfiou ! Pfiou ! je sais pas … si on le prend, il va nous marquer plein de buts, je sais pas si c’est une bonne idée …
JD : hein ?
JB : Ben oui, s’il marque plein de buts, on va se retrouver « Guy-dépendant » et après, si on se retrouve avec un gars genre Perrin à sa place, ça va faire mal.
JD : …
JB : en plus, avec André Houen, on a déjà un André devant, ça ferait deux André, ça serait le bordel quand un joueur crierait « passe à André ! » ou « t’as André sur le côté ! » …
JD : Ah ouais, t’as ptet raison. Je fais quoi alors ? Je prends tout de suite Perrin ?
JB : Ouais, c’est mieux, comme ça on prépare bien la D2.
JD : Ouais, c’est vrai que André Guy pour préparer la D2 c’est pas terrible.
JB : Tope-là président ! Au fait, c’est quoi son prénom à Perrin ?
JD : Ben … André …
JB : euh … ben, oublie mon argument sur les André alors.
Voilà, voilà … comme quoi, c’était possible d’éviter la « Guy dépendance ».
(1) Après 12 journées, seul un but lillois avait été marqué par un autre joueur que Boufal. Franchement, vous vous imaginez vraiment que si on l’avait pas eu on se serait coltiné une moyenne de 1 but tous les 12 matches tout au long de la saison ???
(2) Même si on ne retient dans le décompte que les matches où Boufal n’a pas joué du tout, la moyenne reste de 1,55 points/match sans lui.
Posté le 26 mai 2016 - par dbclosc
Vote pour ton 11 de cul du LOSC
Nous te proposons de voter pour l’élection du 11 de cul du LOSC : c’est le principe inverse du « 11 de coeur ». C’est bien pour les joueurs que tu n’aimes pas, voire ceux que tu détestes, que tu dois voter, joueurs du LOSC ou adversaires méprisables. Cela peut bien entendu être lié à leur niveau sportif, mais cela ne doit sans doute pas être le critère principal : une mentalité foireuse (réelle ou supposée, n’hésite pas à fournir des expériences malencontreuses) ou un comportement de raclure hors des terrains, voilà de bon motifs.
Pour t’aider, voici une liste de joueurs (qui, signalons-le à tout hasard, comprend Pascal Nouma, qui rappelons-le n’a cessé de cracher sur nos gueules) : https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_joueurs_du_LOSC_Lille
Vote dans les commentaires ou sur le post sur notre page Facebook
- Tout le monde (même toi !) peut désigner son « 11 de cul » du LOSC. Mais tu n’as droit qu’à un vote (c’est à dire 11 joueurs) !
- Le critère principal de désignation est le fait de ne pas aimer le joueur. Ne vote pas pour un joueur que tu trouves très mauvais mais pour lequel tu éprouves une certaine sympathie.
- Les joueurs pour lesquels tu votes n’ont pas forcément dû jouer au LOSC ! Ils peuvent l’avoir fait, mais cela peut aussi être un joueur qui n’a cessé de faire preuve d’une sale mentalité quand on jouait contre lui.
- Tu n’es pas obligé de respecter un schéma tactique « classique ». Evite quand-même autant que possible de voter pour une équipe avec quatre arrières droits et si avant-centres, même si tu fais ce que tu veux.
- Chaque joueur désigné bénéficie d’un point. Le « 11 de cul » sera composé des joueurs qui ont le plus de points
- Une fois le vote terminé, on sollicitera certains votants (dont peut-être toi si tu es joignable, par exemple par Facebook !) pour leur demander d’expliquer pourquoi ils ont voté pour tel ou tel joueur et ces témoignages seront intégrés à l’article de l’annonce officielle du « 11 de cul du LOSC »
- Ce vote est éminemment subjectif : tu peux même mettre le lauréat du « 11 de coeur », Fernando D’Amico, dans ton équipe. Mais bon, on serait curieux d’en savoir la raison.
Posté le 25 mai 2016 - par dbclosc
Rupture de banc. Retour sur les années 1980 où les effectifs étaient beaucoup moins fournis.
Aujourd’hui, tout club de L1 a dès le début de saison un effectif de joueurs de grosso modo une bonne vingtaine de joueurs considérés comme pouvant jouer. En gros, on double chaque poste. Bien sûr, selon les moyens, le niveau des joueurs n’est pas le même, mais il est une constante de disposer d’un effectif en quantité importante composé de joueurs confirmés ou, a minima, de jeunes jugés aptes à disputer le haut niveau.
Il y a 25 ou 30 ans, c’était très différent. La norme était de composer un onze-type (à partir de onze types) et de se constituer une réserve, d’ampleur variable, mais dont la norme était d’environ cinq à six joueurs. En gros, on n’avait pas deux joueurs par poste comme aujourd’hui, mais plutôt un joueur et demi (ou trois pour deux si tu préfères, on découpait pas les joueurs, hein, même si c’était une époque barbare).
Le LOSC de la fin des années 1980, c’est ça. Pour te donner une idée de ce que ça veut dire, sache que le LOSC a débuté la saison 1986-1987 avec seulement cinq défenseurs dans son effectif quand, en 2015-2016, le club en disposait de huit.
Des effectifs beaucoup plus réduits, cela expose les clubs à des difficultés certaines en cas d’aléas. Les clubs doivent alors bien calculer, pour ne pas se planter dans le recrutement et pour trouver les joueurs polyvalents en cas de blessure. La preuve que c’est difficile avec l’exemple du LOSC 1988-1989.
De la difficulté à faire avec les aléas quand on a un effectif réduit
Été 1988. Le LOSC a bien terminé la saison précédente même si son calamiteux début de saison l’a empêché de finir au-dessus de la 11ème place. L’effectif de la saison 1987-1988 apparaît bien équilibré, avec deux gardiens, six défenseurs, six milieux de terrain dont deux offensifs et trois attaquants. En gros, il y a un joueur et demi par poste, un bon équilibre.
L’objectif est de conserver l’ossature de l’équipe qui reste sur une bonne dynamique. Rudi Garcia s’en va à Caen, mais il avait peu joué la saison précédente. Jean-François Daniel et Jean-Luc Ribar laisse vide la place de meneur de jeu, mais leur impact limité la saison précédente – quoique Ribar arrivé en cours de saison ait montré des choses intéressantes – laisse penser qu’il ne devrait pas être trop difficile de trouver un remplaçant équivalent. José Pastinelli s’en va, mais il jouait à des postes – défenseur central ou milieu défensif – a priori assez bien pourvus. Seul le départ de Dominique Thomas, l’indiscutable titulaire au poste d’arrière-droit, parti chez le vice-champion de France bordelais, apparaît comme un joueur difficile à remplacer.
Sur la légende, deux joueurs ont été inversés sauras-tu trouver lesquels ?
Le recrutement traduit pourtant un changement dans l’équilibre de l’effectif. Au poste de milieu offensif, seul le Rennais Philippe Barraud arrive en provenance de Rennes et apparaît un peu tendre pour endosser le rôle de meneur titulaire. En défense, un autre Rennais, Alain Doaré arrive en lieu et place de D. Thomas. Da Silva vient densifier le milieu de terrain déjà pourvu d’Angloma, Fiard et Périlleux. Le jeune Roger Boli arrive en prêt d’Auxerre et complète une attaque qui a fière allure avec Desmet, Vandenbergh et Mobati, ce dernier restant sur une extraordinaire seconde partie de saison 1987-1988, ponctuée de 13 buts, dont 3 en coupe.
L’effectif est très intéressant, mais l’équilibre des postes n’est pas parfait puisque seuls cinq défenseurs sont présents pour quatre places, ce qui apparaît un peu léger. Mais, après tout, l’équipe de 1986-1987 en avait autant et a géré cela sans encombre. De plus, Jocelyn Angloma a déjà joué – plutôt bien – latéral droit la saison précédente, quand Thomas était absent. Le milieu de terrain semble suffisamment fourni mais peut-être insuffisamment équilibré puisque seul Barraud, encore peu confirmé, peut jouer milieu offensif. L’attaque est en revanche le point fort de l’effectif.
La saison commence bien avec une victoire à Laval (1-2) puis une autre, à l’arrachée, contre l’OM de Bernard Tapie (2-1). Le remplacement de Doaré par Prissette au poste de latéral droit dès la journée suivante montre les doutes de Heylens quant à ce poste : Eric Prissette, qui disait lui-même en 2014 qu’il était un joueur « moyen, limité techniquement » n’est en effet pas une assurance à ce poste, ce qui montre les limites de l’effectif derrière. Cinq journées plus tard, pour un seul point pris et deux buts marqués, les limites de l’effectif semblent se complexifier. Le match de Cannes (7è journée) confirme les carences défensives de l’effectif : privé de Buisine suspendu et de Zappia blessé, Heylens se résout à aligner une défense expérimentale Galtier, Doaré, Prissette avec le jeune et inexpérimenté Soumah. Mais, les derniers matches ont surtout mis en lumière le manque d’un meneur faisant le lien entre le solide milieu de terrain et l’attaque, le jeune Barraud étant peut-être un peu limité.
Période étrange où Lille dispose d’un effectif de joueurs confirmés mais d’un équilibre instable. Les problèmes se confirment les journées suivantes avec le besoin d’un meneur mais aussi de soucis en défense. L’arrivée du joker, en l’occurrence Abédi Pelé, est une très bonne nouvelle car le LOSC vient de recruter le joueur parfait au poste de meneur. Mais l’équipe alignée le jour de ses débuts, lors de la 12è journée, montre bien les problèmes rencontrés par l’effectif : privés de Galtier, Buisine et Doaré, Heylens aligne une défense très expérimentale : Angloma qui descend côté droit, Zappia, Prissette et le quasi-novice David Guion. Et il manque également Vandenbergh et Desmet blessés. Une belle hécatombe en fait. Donc, ce 0-0 contre Toulon, ça n’est finalement qu’un moindre mal.
Lille n’a alors marqué que cinq buts sur les neuf derniers matches et se retrouve 15ème au classement, très loin de ses ambitions initiales. Mais les Dogues ont alors mangé leur pain noir. Les blessés reviennent très vite, à l’exception de Buisine, qui manquera plus de quatre mois, et Lille enchaîne : sur les 7 matches suivants, Lille gagne 5 fois, fait un nul et s’incline une fois, marquant 14 buts pour 5 encaissés. A la fin des matches aller, le LOSC se retrouve septième.
A ce stade, l’effectif lillois a enfin trouvé sa cohérence : « forcé » d’aligner le jeune David Guion, Georges Heylens y trouve une nouvelle solution, David faisant mieux que sauver les meubles. Buisine revient bientôt, et Lille se trouve alors avec un effectif au complet, composé de deux gardiens, six défenseurs, six milieux de terrain dont deux offensifs et quatre attaquants. Les Lillois se maintiennent avec une belle constance aux alentours des septième et huitième places, pour finir huitième, son meilleur classement depuis 1979. Et pourtant, ce classement final peut laisser un peu d’amertume, car il y avait la place pour faire (un peu) mieux.
Le bal des occasions manquées (intertitre qui a reçu le « label qualité des publicitaires »)
Lille termine donc huitième. Mais à seulement un point du sixième et avec un même goal-average. Autrement dit, il aurait suffi de marquer un but de plus lors de l’un des matches non gagnés (sauf pour les défaites par deux buts d’écart contre Metz, Monaco et Sochaux) pour que Lille se retrouve deux places plus haut. A un cheveu, quoi.
Sérieux ? Huitième avec cette équipe ?
A y regarder de plus près, on se dit que ce classement est somme toute modeste au regard de la qualité de l’effectif qui termine la saison et que l’on peut aussi bien chercher les causes de ceci dans certains facteurs difficiles à maîtriser que dans ses propres occasions ratées.
On l’a souligné, le LOSC a rencontré des difficultés en début de saison en raison des blessures en défense et de l’absence d’un meneur de jeu efficace. Si cela tient en partie à un facteur que l’on nommera le « facteur pas-de-bol » pour aller vite, on peut également pointer quelques choix stratégiques discutables. En effet, si l’occurrence de blessures concentrées sur un poste spécifique a quelque chose de rageant, on peut tout de même souligner que c’est en partie la conséquence d’une stratégie raisonnée : Lille aurait sans doute pu recruter un défenseur supplémentaire plutôt qu’un milieu de terrain ou un attaquant, postes qui ont moins souffert des blessures.
Le cas du meneur de jeu est également particulier. Les Lillois ont débuté sans réel meneur si ce n’est l’inexpérimenté Barraud. A posteriori on peut certes regretter que Pelé ne soit pas arrivé plus tôt. Mais il n’y a rien d’évident à ce que ce transfert ait pu se faire dès le début de saison : c’est aussi parce qu’il constate qu’il joue peu à Marseille que Pelé veut s’en aller et qu’il est prêté à Lille. Recruter plus tôt, ça aurait certainement voulu dire recruter un meneur de moins bonne qualité. Alors, certes, on a manqué d’un bon meneur en début de saison. Mais c’était peut-être la condition sine qua non pour en avoir un de cette qualité pendant les deux-tiers de la saison.
Au croisement du « facteur pas de bol » et de la responsabilité dans ses propres échecs, le cas du match contre Caen lors de la 27ème journée est un bel exemple. Ce soir-là, nos Dogues obtiennent trois pénaltys dans un match qu’ils dominent outrageusement. S’ils transforment le premier, ils échouent sur le second, Montanier arrêtant le tir de Mobati ainsi que la reprise de Desmet, ainsi que le troisième, de Desmet. Le hic c’est que, entre les deuxième et troisième pénos, les Caennais ont égalisé. Un peu de la faute aux joueurs – parce qu’un but ça se met – on peut quand-même se dire que Montanier a fait ce soir-là le match de sa vie.
Et puis, enfin, la faute à une fin de saison mal gérée. A trois journées de la fin, le LOSC est septième, deux points devant Nice qui a un calendrier bien chargé, quand Lille n’a plus comme adversaires que Strasbourg, le Matra Racing et Laval, soit trois des cinq équipes larguées en bas de classement. A priori de quoi cumuler pas mal de points. Or, si les Lillois font le festival contre Laval lors de l’ultime journée (8-0), ils s’étaient inclinés la semaine précédente contre le Matra (1-0) et s’étaient résolus au partage des points à domicile contre Strasbourg, eux qui s’étaient imposés deux fois en Alsace cette saison-là, au match aller (1-3) et en coupe de France (0-3).
Bref, la somme de tous ces détails a fait que le LOSC de cette saison-là, une équipe très séduisante et parfois emballante, a terminé huitième, là où une quatrième place apparaît tout à fait à sa portée.
Le parcours en coupe de France
Le parcours en coupe cette saison-là est à l’image du championnat : parfois d’une efficacité glaciale, les Dogues peuvent rater le plus facile. Ils passent ainsi les 32ème de finale grâce à une victoire cinglante à la Meinau contre Strasbourg (0-3), puis assurent dès le match aller des 16ème leur qualification pour le tour suivant en écrasant Rouen (4-0), s’autorisant à jouer pépère – et à perdre 1-0 – le match retour.
Et puis arrive Mulhouse, un adversaire dont Lille devrait ne faire a priori qu’une bouchée : impuissant à domicile (0-0), les Lillois s’inclinent au retour (3-2) après avoir accusé un retard de trois buts après une bonne demi-heure de jeu.
Mais revenons à nos moutons …
Back to our sheep
Bref, la saison 1988-1989 s’achève. Georges Heylens quitte le club, remplacé par Jacquot Santini. Une nouvelle saison commence avec la même interrogation : comment former un effectif cohérent avec seulement 16 ou 17 joueurs confirmés ?
Dix-neuf joueurs en comptant les jeunots
A priori, ça devrait être faisable pour Jacquot. Il garde alors ce qui est peut-être le « meilleur milieu de France », avec Pelé, Périlleux, Angloma et Fiard, sans oublier Victor Da Silva. Derrière, Zappia et Buisine s’en vont, mais Doaré, Guion, Galtier et Prissette restent. Sans compter le jeune Decroix qui a fait de premières apparitions assez satisfaisantes. Lama s’en va. Et devant, Boli retourne de son prêt à Auxerre quand Desmet retourne en Belgique. En gros, il manque un gardien, un ou deux défenseurs, éventuellement un milieu, et un ou deux attaquants.
Dans les buts, c’est Jean-Claude Nadon qui arrive de Guingamp. Un choix qui s’avérera judicieux. Derrière, Dominique Thomas revient au bercail, et Jakob Friis-Hansen arrive. Au milieu, Frédéric Lafond vient pour jouer les doublures au poste de milieu offensif. Devant, c’est Patrice Sauvaget qui arrive d’Angers.
L’effectif semble très cohérent et pouvoir poursuivre l’œuvre de la saison précédente. Seule l’attaque apparaît un peu affaiblie, puisqu’elle perd Desmet et son supersub Boli qui sont remplacés par le seul Sauvaget, un attaquant pas particulièrement prolifique de D2. Sauf qu’en fait, ça pas été terrible …
Alors, soyons clairs, ça a couillé, mais ça n’est pas la faute au milieu de terrain. Pelé est resté fidèle à lui-même, Périlleux a été le joueur de champ qui a récolté le plus d’étoiles France Football de toute la D1, Fiard a fait du Fiard, et Angloma de l’Angloma, voire mieux, mais à part ça, ça a été compliqué.
D’abord devant : dès le début de saison, Vandenbergh, orphelin de Desmet, veut partir. Son transfert pour Malines avorte finalement et il est réintégré mais avec des pieds de plomb qui ne le quitteront pas de l’année. Mobati est pour sa part rapidement en froid avec Santini et se retrouve vite placardisé puis transféré à l’arrivée de l’hiver. Devant, le LOSC a alors fait l’essentiel de sa saison avec Sauvaget et un quart de Vandenbergh.
Derrière, David Guion n’a pas confirmé sa saison précédente, Dominique Thomas a été à des années lumières de celui qui arpentait le couloir droit de la défense lilloise avant son départ de 1988, Friis-Hansen est encore alors très loin d’être convainquant et Prissette et Doaré sont placardisés. Bref, des six cadres initiaux de la défense, deux ne jouent plus et seul Galtier tient à peu près son rang. Nadon fait pour sa part ce qu’il peut, ce qui est quand-même moins que Lama …
Lille finit 17ème, à un cheveu de barragiste. Les paris osés dans la construction de l’équipe apparaissaient a priori tous légitimes. Et pourtant, sur chacun d’entre eux, au moins à court termes, ça a été la plantade totale et magnifique. Mais pouvait-on vraiment prévoir tous ces plantages ? On sait qu’il y a toujours un joueur un peu moins bien une saison donnée. Il était en revanche plus difficile d’anticiper que cela concernerait cette saison-là à la fois D.Thomas, J.Friis-Hansen, David Guion, Erwin Vandenbergh et Gaston Mobati. Et quand on a un effectif de 16 ou 17 joueurs, on ne peut que se planter quand de tels talents se plantent.
Bref, ça pouvait être compliqué, ça avait un gros côté « bricolage », mais c’était finalement plutôt sympathique …
Posté le 23 mai 2016 - par dbclosc
Les fins de saison en boulet de canon, c’est le LOSC.
Tu te dis que la fin de saison du LOSC est extraordinaire ? Ben, faut pas. Soit t’as la mémoire courte, soit tu ne comprends pas bien le sens du mot extraordinaire.
Extraordinaire, littéralement, ça veut dire qui sort de l’ordinaire. Et, en fait, le LOSC qui fait une fin de saison canon, ça n’a rien de plus commun. Au moins depuis 2007.
Les fins de saison canons, c’est Frankie et Rio
Et oui ! Ça fait maintenant neuf ans que le LOSC finit mieux ses championnats qu’il ne les entame. Depuis l’arrivée de Franck Béria (à l’été 2007) et celle de Rio Mavuba (en janvier 2008), c’est ça. Les fins de saisons en boulet de canon, c’est Frankie et Rio. Note au passage, « Frankie et Rio », ça ferait un super nom de groupe (1).
Depuis cette date, le LOSC termine toujours dans les huit premiers. Mais si tu te souviens bien, ça n’a pas toujours été une évidence pour nous. Ça commence d’abord en 2007-2008, dernière saison de l’ère Puel : à 10 journées de la fin, le LOSC est 11ème, c’est-à-dire un schéma très proche de celui d’aujourd’hui. Le LOSC avait alors 36 points, soit seulement 2 de plus que le LOSC de 2015-2016 au même stade. L’issue est, certes, moins mémorable puisque les Dogues terminent 7ème. Mais rappelons-le, seulement à un point de Saint-Étienne, 5ème, qui a le même goal-average que Lille. Et sur les 10 dernières journées, Lille est le 3ème club français, terminant à un rythme de candidat au titre (2,1 point/match) après avoir passé le reste de la saison à l’allure d’un club du ventre mou.
Pas vraiment une spécificité de l’ère Garcia
Cette tendance à finir les saisons en trombe se poursuit ensuite avec l’arrivée de Rudi Garcia. Ceci étant, contrairement à une idée répandue, ceci n’a rien de spécifique à la période où il a entraîné le LOSC. On a ainsi beaucoup parlé de la particularité de la préparation physique lilloise de l’époque, associée à des débuts de saison poussifs puis à une montée en puissance. S’il est exact que les débuts de saison de l’ère Garcia ont souvent été délicats, la véritable caractéristique de cette époque consiste plutôt au fait que le LOSC se distingue au cœur du championnat, c’est-à-dire ni au début ni à la fin.
Des neuf dernières saisons, c’est d’ailleurs avec Rudi Garcia que le contraste est le moins fort entre les deux premiers tiers des saisons et la dernière ligne droite. Sous sa direction, il n’y a finalement qu’en 2013 que le contraste est réellement saisissant : 10ème après 23 journées, le LOSC est la deuxième équipe française – derrière Paris – sur les 15 dernières journées.
A l’inverse, ce cas de figure est extrêmement fréquent sur les quatre autres saisons : on a déjà évoqué le cas de figure de la dernière saison de Claude Puel, on a bien en tête celui de la saison 2015-2016, mais on n’a peut-être moins conscience que le LOSC de 2014-2015 est encore 12ème après 26 journées et que seul un bel enchaînement de victoires – faisant de Lille la 4ème équipe française sur les 12 dernières journées – a permis au LOSC de finir 8ème.
L’étrange fin de saison 2014-2015
En même temps, on peut facilement trouver des raisons qui expliquent qu’on ait oublié que le LOSC est l’un des meilleurs en France sur la fin de saison dernière : il est en effet peu commun de faire « une belle fin de saison » en se prenant 15 buts sur les 5 derniers matches, surtout quand on sait qu’on a Vincent Enyeama dans les buts.
Cette saison-là, les matches du LOSC, comme c’est encore le cas cette saison, étaient peu prolifiques. Enfin, sur les 33 premières journées : 1,82 buts/match. Les cinq derniers matchs, perdus à Paris (6-1), Toulouse (3-2), contre Marseille (0-4) ou gagnés, contre Lens (3-1) et à Metz (1-4) font bondir cette moyenne. Et malgré ces quelques branlées mémorables, la fin de saison lilloise reste des plus correctes : les Dogues avaient alors eu la bonne idée de gagner 6 des 7 précédents matches.
Même en 2010-2011 la fin de saison est nettement meilleure
Cette spécificité des fins de saison du LOSC est également vraie pour la saison 2010-2011, celle du dernier titre. Certes, Lille est déjà en tête après 25 journées, mais l’écart est alors très réduit avec ses concurrents. Les Dogues sont alors à égalité de points avec leur dauphin, Rennes (2), un point devant Marseille, deux devant Paris et quatre devant Lyon.
Sur les 13 derniers matches, ils reprennent une avance considérable pour une si courte période sur ces quatre concurrents : 7 points de plus que Marseille, 8 que Lyon, 14 que Paris et même 20 de plus que Rennes !
Bon, d’accord, une fin de saison 2015-2016 quand-même « extraordinaire »
Bon, allez, je l’admets, la fin de saison qu’on vient de vivre est quand-même « extraordinaire ». Certes, c’est une habitude depuis 9 ans de mieux finir les saisons, mais c’est bien cette saison que le contraste est le plus saisissant : la moyenne de points acquis sur les dix dernières journées cette saison est ainsi 2,15 fois supérieure à celle observée jusqu’alors. A titre de comparaison, le ratio le plus élevé au cours des huit années précédentes était au maximum de 1,63 (en 2007-2008 et en 2014-2015).
La moyenne de point acquis sur les dix dernières journées de championnat est également assez sensationnelle : 2,60/match contre 2,45 pour les onze derniers matches de 2011-2012, deuxième moyenne de fin de championnat la plus élevée sur la période (3).
De bon augure (4) pour la suite : ça veut dire que même si à l’avenir nous étions quasi-foutus, on aurait encore des chances d’espérer.
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Voir encore le groupe « Rio goes to Hollywood » qui pourrait interpréter « Si tu vas chez Frankie », « vas-y Rio c’est bon » et « The Sochaux must go on ». Tiens, d’ailleurs « The Sochaux must go on » ça sera le titre d’un prochain article de qualité supérieure sur le déclin de la place des classes populaires dans le foot.
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Imagine cet étrange animal : le dauphin-renne. Si tu veux en dessiner un, nous serions ravis de le voir.
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Si l’on compare deux périodes strictement identiques, on peut plus vraisemblablement dire que le niveau de performance est équivalent : la génération 2011-2012 l’emporte sur les 11 derniers matchs (2,45 points contre 2,36) mais s’incline sur les 10 derniers (2,40 contre 2,60).
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As-tu déjà employé le mot « augure » autrement qu’avec l’expression « de bon augure » ?
Posté le 22 mai 2016 - par dbclosc
Les trois âges du football professionnel dans le Nord-Pas-de-Calais
Depuis la création du premier championnat de football professionnel, en 1932, le football régional a connu des fortunes diverses. On peut schématiquement distinguer trois âges : le premier, celui du football nordiste triomphant, se caractérisant avant tout par la domination du football de la métropole urbaine lilloise et consacrée à travers les titres de l’Olympique Lillois (1933), du LOSC (1946, 1954) et du CO Roubaix-Tourcoing (1947) ; le deuxième, celui du déclin, à partir des années 1950, se caractérise par une baisse globale du niveau des clubs régionaux, qui trouve son point d’orgue à la fin des années 1960 – quand Lille et Lens deviennent brièvement amateurs – et au début des années 1970 (il n’y a parfois aucun club en D1 à l’époque) ; le troisième, c’est celui des années 2000 : Lille prend alors son essor, Lens et Valenciennes réalisent alors des performances honorables en première division. La question est : sommes-nous désormais entrés dans un quatrième âge, celui du monopole lillois sur le foot nordiste ?
Les trois âges en images
Pour présenter synthétiquement l’évolution de la place des clubs nordistes dans le football professionnel, nous avons constitué un indice qui se calcule en attribuant pour chaque saison de 1 à 15 points pour chacun des clubs nordistes finissant dans les 15 premiers : le premier à 15 points, le second 14, le troisième 13, etc.
Un indice similaire sur deux années données peut en réalité correspondre à des cas distincts : ainsi, si un club nordiste est champion et qu’aucun autre club régional n’est dans l’élite, l’indice est strictement équivalent à un cas où un club nordiste finit 7ème et un autre 10ème. Sa valeur dépend alors de deux choses : d’une part, du nombre de clubs régionaux finissant dans le top 15 national et, d’autre part, du classement final (1).
Voilà cette évolution.
L’âge d’or du foot régional
L’âge d’or du foot régional se situe indéniablement au cours des années 1930 et continue jusqu’au début des années 1950. A titre d’exemple, si le titre est remporté par le FC Sète en 1934, Fives, l’Olympique Lillois et l’Excelsior terminent dans le top 5 national.
Au-delà de cette saison, le palmarès régional sur la période 1932-1955 (17 championnats ont eu lieu) est éloquent : 4 titres national, 6 titres de vice-champion, 6 coupes de France, 6 finales perdues. La finale de coupe 1933 est d’ailleurs la seule de l’ère professionnelle à opposer deux clubs de la même ville : L’Excelsior de Roubaix au Roubaix AC.
Mais ça va très vite partir en sucette …
Les heures les plus sombres (du foot nordiste)
Le LOSC, tête de prou du foot nordiste perd très rapidement de sa superbe, et si Lens prend (vite fait) sa suite à la fin des années 1950, il va suivre le même chemin que son auguste voisin (qu’on soit clair, il s’agit du LOSC et non pas d’un voisin prénommé Auguste, même si nous n’excluons pas qu’un certain Auguste ait pu faire de même). Valenciennes connaîtra certes son âge d’or au cours des années 1960, mais va également décliner. Si bien qu’en 1969-1970, quand Lens et Lille prennent le statut amateur, Valenciennes, dernier de D1, est le club dominant dans la région, devant Boulogne, 6ème de D2, et Dunkerque, 9ème dans la même division.
Si ce document sortait, il ferait l’effet d’une bombe : il est la preuve que la région dominait la coupe de France, et ça, ça dérange en haut lieu (comme en haut de la Tour Eiffel, par exemple)
Assez vite, les historiques Lensois (un peu) et Lillois (surtout, hein, faut pas déconner) reprennent du poil de la bête. On n’espère plus de titres, mais les deux se maintiennent avec un statut d’habitués de la D1, sans plus. A partir du milieu des années 1990, le Racing prend l’ascendant sur son voisin lillois, à tel point que Gervais Martel, le président artésien, nous promet une belle mort, jugeant qu’il n’y a pas de place pour deux clubs nordistes d’élite. L’avenir ne lui donnera pas complètement tort.
La renaissance
Le titre de champion acquis par Lens en 1998 avait montré que le football nordiste n’était pas mort. La remontée lilloise de l’époque Vahid, et la qualification en C1, traduit un virage en la matière. En 2002, pour la première fois depuis tellement longtemps qu’on saurait même plus te dire, deux clubs de la région terminent dans le top 5 national. L’embellie nordiste se confirme avec la remontée de Valenciennes en L1, lequel terminera souvent au milieu de tableau tandis que ses deux voisins terminent habituellement dans la première partie de tableau (enfin surtout le LOSC).
Et maintenant ?
La saison 2011 semble pourtant traduire un autre virage : si le LOSC retrouve le titre de champion pour la première fois depuis 57 ans, Lens est relégué en L2, confirmation du déclin qu’avait marqué la précédente relégation (en 2008). Lens remontera encore, mais pour redescendre aussitôt (2015). Valenciennes les avaient précédés dans l’antichambre de l’élite (2014).
Bref, tout ça pour dire que la tendance actuelle, ça a l’air d’être un club d’élite et pas grand chose derrière. Et ça c’est triste pour les derbys.
Posté le 20 mai 2016 - par dbclosc
Jean Baratte : 167, 170 ou 218 buts avec le LOSC ?
dEn se renseignant sur le nombre de buts marqués par Jean Baratte avec le LOSC, on trouve les chiffres de 167, 170 et 218 buts marqués. A quoi correspondent ces chiffres ? Qu’en est-il en réalité ? Notre équipe de 250 brillants chercheurs bénévoles et néanmoins précaires s’est penchée sur cette question et apporte quelques réponses.
167 et 170 buts, ça va, on sait à quoi ça correspond
On entend souvent le nombre de 167 buts à propos de Jean Baratte. Ce chiffre ne fait pas grand mystère : il s’agit en effet du nombre de buts officiels marqués par Jean Baratte en première division avec le LOSC et dont on peut trouver le détail aisément, par exemple simplement en allant voir sa fiche sur Wikipédia.
Ok. 167 buts, c’est réglé. Mais 170 ? Pourquoi 170 ? Là, encore, pas très compliqué à comprendre : c’est le nombre de buts totaux marqués avec le LOSC en championnat D1 et D2 comprises. En plus des 167 buts en D1, Baratte en marque 3 en D2 en 1956-1957.
Le LOSC, à l’époque, avait l’habitude de marcher sur ses adversaires. Littéralement. Ici contre Rouen en Coupe (1949)
Très bien, le total de 170, c’est réglé. Mais à quoi correspond le nombre de 218 comme on le voit parfois indiqué ? Ça, on n’en a aucune idée : ceux qui citent ce total ne disent jamais sur quelle base il est calculé. Et pourtant, à Drogue, Bière & Complot, on a de bonnes raisons de penser que c’est le nombre le plus proche de la réalité.
1944-1945 : le championnat oublié
La seconde guerre mondiale a fait beaucoup de mal. Tellement de mal qu’elle en a même fait au total officiel de buts de Jean Baratte en D1. En effet, cette saison n’est pas comptabilisée comme officielle en raison de problèmes organisationnels dans le groupe sud. Bref, si ça s’est relativement bien passé dans le groupe Nord, celui du LOSC. Du coup, si on comptabilisait les 10 buts en 14 matches de Jeannot cette saison-là, Baratte passe à un total de 177 buts en D1 et à 180 en D1 et D2 compris.
Le mystère du nombre de buts en coupe de France
Mais la plus grande difficulté pour déterminer le nombre total de buts de Baratte avec le LOSC réside dans la difficulté à savoir le nombre de buts inscrits en Coupe de France. C’est déjà parfois coton de trouver les scores des matches de 32ème ou de 16ème de finale, alors les buteurs, j’te dis pas.
Bref, on s’est laborieusement coltiné un travail sur des archives pour reconstituer le nombre de buts inscrits par Jeannot dans la compét’.
Et un péno de Jeannot. Contre Angers (Coupe de France 1948)
Et ben, c’est pas folichon : sur 170 buts inscrits en Coupe par le LOSC entre 1944 et 1953, on a réussi à en trouver le buteur qu’à 49 reprises. Et 10 de ces buts ont été marqués par Baratte.
Ce qui nous permet d’établir l’affirmation suivante : Jean Baratte a marqué au moins 190 buts avec le LOSC.
Mais combien, en tout, bordel ???
C’est bon, c’est bon, ne nous énervons pas. Comme on te l’a dit, on ne sait pas exactement combien de buts il a marqué, puisqu’il y a 121 buts marqués par le LOSC, comme par exemple les 12 passés à St-Quentin en janvier 1945, dont on ne connaît pas les buteurs.
Ceci étant, on peut se risquer à une évaluation approximative.
Déjà, sur les 121 buts manquants, franchement, il est quand-même extrêmement probable que le Jeannot en ait mis une blinde, vu que c’était un peu son habitude : 25,8 % des buts lillois en D1 entre 1945 et 1953 ont été marqués par Jeannot ; 20,4 % des buts en coupes recensés.
Bref, s’il marquait dans les mêmes proportions, il aurait marqué entre 25 et 30 des 121 buts manquants.
Et il nous manque justement 28 buts à notre total de 190 pour atteindre le total parfois évoqué – mais jamais justifié – de 218.
Donc, ouais, 218, ça colle. C’est en tout cas sûr et certain qu’il atteint les 190 et il serait très étonnant qu’il n’ait pas dépassé les 200. Et ce qui est vraiment, vraiment sûr, c’est que personne n’a marqué autant que lui avec le maillot du LOSC.
Bisous.
Posté le 19 mai 2016 - par dbclosc
La D1 derbys du Nord (1933-1939) et la D1 derbys de l’Agglo lilloise
Je t’ai parlé très récemment des derbys lillois, ces derbys qui opposaient jadis les deux clubs dont la fusion est à l’origine du LOSC, l’Olympique Lillois et le Sporting Club de Fives. Ce que je ne t’ai pas dit, c’est à quel point le football nordiste (et l’agglomération lillois en particulier) a dominé le football national au cours des années 1930. A l’époque, ce sont entre 3 et 6 clubs de la région qui jouent dans la première division à 16 clubs. De la mise en place du championnat pro (en 1932) au début de la Seconde Guerre Mondiale (je ne te fais pas l’insulte de te dire c’est quand), ce sont toujours au moins trois clubs de l’agglo lillois (l’Olympique Lillois, le SC Fives et l’Excelsior de Roubaix) qui jouent en D1 et même quatre entre 1936 et 1939 (avec le RC Roubaix). Autrement dit, un quart de l’élite footballistique française vient de l’agglo lilloise lors des trois années qui précédent la guerre.
Bref, une concentration de clubs du Nord particulièrement forte – jusqu’à 30 derbys en 1937-1938 - qui justifie particulièrement bien que l’on ressuscite la « D1 derbys du Nord », ce mini-championnat dont le vainqueur est déterminé à partir des confrontations directes en derbys. Présentons d’abord les classements entre 1933 et 1937.
1933-1934 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
Fives |
6 |
4 |
3 |
0 |
1 |
6 |
2 |
Excelsior |
3 |
4 |
1 |
1 |
2 |
5 |
6 |
O.Lillois |
3 |
4 |
1 |
1 |
2 |
5 |
8 |
1934-1935 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
Fives |
5 |
4 |
2 |
1 |
1 |
3 |
4 |
O.Lillois |
4 |
4 |
2 |
0 |
2 |
9 |
4 |
Excelsior |
3 |
4 |
1 |
1 |
2 |
2 |
6 |
1935-1936 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
O.Lillois |
11 |
6 |
5 |
1 |
0 |
15 |
5 |
Fives |
7 |
6 |
3 |
1 |
2 |
10 |
9 |
Excelsior |
4 |
6 |
2 |
0 |
4 |
10 |
14 |
USVA |
2 |
6 |
1 |
0 |
5 |
9 |
16 |
1936-1937 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
Fives |
8 |
6 |
4 |
0 |
2 |
15 |
11 |
Excelsior |
6 |
6 |
3 |
0 |
3 |
15 |
15 |
O.Lillois |
6 |
6 |
3 |
0 |
3 |
10 |
11 |
RC Roubaix |
4 |
6 |
2 |
0 |
4 |
9 |
12 |
Cette « D1-derbys du Nord », elle est d’abord dominée par le SC Fives qui l’emporte à trois reprises, contre une fois pour son prestigieux voisin de L’Olympique. Du côté de Roubaix, rien de mieux que deux 2ème place pour l’Excelsior (1934 et 1937).
En ces temps difficiles pour eux, rendons hommage aux Lensois …
Rendons donc hommage un instant au RC Lens, car, des morts, on ne dit que du bien. Parlons de cette saison 1937-1938 et du succès local du club au « meilleur public de France » (sic). Note bien que ce « sic » n’est en rien moqueur puisqu’il signifie littéralement « ainsi ». C’est en tout cas ce que je défendrais si j’étais pour ce sic poursuivi devant un tribunal, fût-il du rire. Mais, devais-je le préciser ? Un tribunal du rire n’est-il pas nécessairement futile ?
Bref, les saisons 1937-1938 et 1938-1939, c’est quelque chose, au moins pour la D1 derbys du nord.
1937-1938 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
RC Roubaix |
14 |
10 |
6 |
2 |
2 |
18 |
12 |
RC Lens |
12 |
10 |
5 |
2 |
3 |
17 |
17 |
O.Lillois |
11 |
10 |
4 |
3 |
3 |
15 |
11 |
Excelsior |
10 |
10 |
2 |
6 |
2 |
19 |
16 |
SC Fives |
7 |
10 |
2 |
3 |
5 |
16 |
17 |
USVA |
6 |
10 |
2 |
2 |
6 |
11 |
23 |
1938-1939 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
Lens |
13 |
8 |
6 |
1 |
1 |
19 |
7 |
O.Lillois |
8 |
8 |
3 |
2 |
3 |
12 |
13 |
Excelsior |
7 |
8 |
2 |
3 |
3 |
16 |
16 |
Fives |
7 |
8 |
3 |
1 |
4 |
14 |
18 |
RC Roubaix |
5 |
8 |
1 |
3 |
4 |
12 |
19 |
Les Lensois sont deuxièmes en 1938 puis premiers en 1939, à chaque fois devant les gros morceaux de l’agglo lilloise, l’OL, Fives et l’Excelsior. Comme quoi, la logique des derbys n’est pas nécessairement celle du championnat de France : 14ème du championnat de France en 1938, soit la 5ème équipe régionale.
Palmarès D1 derbys du Nord 1933-1939 :
3 titres : SC Fives
1 titre : RC Lens, RC Roubaix, Olympique Lillois
Quelle belle photo du SC Fives 1933-1934
Bref, la D1 derbys du Nord, c’est Fives qui l’a dominée. Mais, comme on a beaucoup de clubs de l’agglomération lilloise – au moins trois chaque saison – on peut aussi faire la « D1 agglo lilloise » !
La D1 agglo lilloise
Comme de 1933 à 1935 et en 1936-1937 les seuls clubs du Nord en D1 sont de l’agglomération lilloise, les champions sont exactement les mêmes qu’avec la « D1 derbys du Nord ». Et hop ! Déjà trois titres pour Fives !
Et qu’en est-il le reste du temps ?
1935-1936 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
O.Lillois |
7 |
4 |
3 |
1 |
0 |
7 |
4 |
Fives |
3 |
4 |
1 |
1 |
2 |
5 |
6 |
Excelsior |
2 |
4 |
1 |
0 |
3 |
7 |
9 |
1937-1938 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
RC Roubaix |
8 |
6 |
3 |
2 |
1 |
7 |
5 |
O.Lillois |
7 |
6 |
2 |
3 |
1 |
7 |
8 |
Excelsior |
5 |
6 |
1 |
3 |
2 |
11 |
12 |
SC Fives |
4 |
6 |
1 |
2 |
3 |
10 |
10 |
1938-1939 |
Pts |
J |
V |
N |
D |
BP |
BC |
Fives |
7 |
6 |
3 |
1 |
2 |
14 |
13 |
Excelsior |
6 |
6 |
2 |
2 |
2 |
14 |
13 |
O.Lillois |
6 |
6 |
2 |
2 |
3 |
9 |
10 |
RC Roubaix |
5 |
6 |
1 |
3 |
2 |
10 |
11 |
La hiérarchie est assez proche de celle de la « D1 derby du Nord » à une nuance importante : en 1938-1939, c’est Fives qui termine premier, devant l’Excelsior et l’OL. Avec la « D1 derby du Nord », l’OL était 2ème, devant l’Excelsior 3ème et Fives, 4ème.
Palmarès D1 derbys du Nord 1933-1939 :
4 titres : SC Fives
1 titre : RC Roubaix et Olympique Lillois
Etonnamment, l’Excelsior de Roubaix ne remporte aucun titre de « D1 derby de l’agglo » quand Fives remporte quatre titres. En championnat de France, ces deux équipes avaient pourtant des résultats extrêmement proches.
Voilà pour ce retour très derby près de 80 ans en arrière.
Bisous et sois prudent.
Posté le 18 mai 2016 - par dbclosc
Le « 11 de cœur » de DBC LOSC et de ses lecteurs
A Drogue, bière & Complot contre le LOSC, cette élection on la prend au sérieux sans trop se prendre au sérieux. Bien sûr, elle ne peut prétendre à aucune représentativité, si ce n’est celle des votants en eux-mêmes. Bien sûr, il était couru d’avance qu’une telle élection favorise nécessairement les joueurs les plus récents. Mais elle n’en est pas moins très intéressante à regarder.
Vous avez été 37 à voter, dont 34 pour une équipe complète. Comme dirait ma mère, « c’est pas énorme dans l’absolu, mais pour un blog qui est animé pour l’essentiel par deux branleurs, ça commence quand-même à ressembler à quelque chose ». Donc, voilà, peu de chances que cette élection soit évoquée dans les colonnes de L’equipe ni même dans celles de La Voix du Nord mais c’est quand-même une élection bien sympa, vachement plus que nombre de prix pourris décernés chaque année dans le milieu du foot. Ne serait-ce parce que les lecteurs ont participé activement – il ne s’agissait pas simplement de cliquer dans une liste pré-remplie – parfois au-delà de la constitution d’une équipe : certains ont apporté leurs petits commentaires sympathiques, d’autres ont accepté de nous livrer les raisons de leurs préférences quand on les a sollicités. Merci à tou-te-s !
D’abord, soulignons la présence remarquée dans les votes de certains joueurs bien qu’ils n’aient finalement pas réussi à accrocher une place dans le 11 final. On se félicite ainsi de la présence de certains joueurs qui ont marqué durablement les esprits alors même que le contexte ne leur était pas nécessairement favorable.
A un cheveu de la consécration ultime
Comme on te le disait en intro, les joueurs les plus récents ont a priori un avantage de base : les souvenirs sont plus récents et les plus anciens sont parfois tout simplement inconnus (ou presque) de nombre de supporters. Le public de Drogue, Bière étant surtout (mais pas que) composé de plus ou moins trentenaires (même s’il l’on se gargarise d’avoir de tout), ça signifie en gros que les joueurs d’avant 1995 avaient un net désavantage.
Roger Hitoto fait partie de ces joueurs arrivés à Lille un peu avant, en 1994. Parti cinq ans plus tard, il ne fait pas partie de la belle épopée qui mène le LOSC en L1 puis jusqu’au podium. S’il échoue à se placer dans le « 11 de cœur », il n’a pourtant pas été oublié par nos votants : 6 voix quand on a quitté le club il y a 17 ans et qu’on a joué au cours de l’une des périodes les plus pourries du club c’est quand-même assez remarquable.
Belle cote aussi pour le duo belge Desmet-Vandenbergh, lesquels cumulent 5 voix chacun bien qu’ils aient quitté le club respectivement en 1989 et en 1990. Rappelons d’ailleurs au passage que Erwin, symbole de la classe belge, reste le dernier joueur ayant joué au LOSC à avoir fini à deux reprises dans le top 20 du Ballon d’or et que Desmet a été, entre autres choses, meilleur passeur du championnat de France en 1987 et demi-finaliste de la Coupe du Monde 1986 au Mexique.
Remarquons également la présence de Frédérik Viseux qui parvient à cumuler 5 votes tout en n’ayant joué que 37 matches de D2 avec nos Dogues. Note d’ailleurs qu’on a dû vérifier cette info : Fred Viseux nous paraît tellement associé au LOSC que 37 matches nous apparaissait un total ridiculement faible au regard des souvenirs laissés. Il a vraisemblablement donné aussi la même impression aux votants.
Dans le rayon « ancien qui laisse un grand souvenir », Jean Baratte réussit encore à cumuler 4 voix près de 60 ans après son dernier match de joueur avec le LOSC et à quelques semaines du trentième anniversaire de son décès. Rappelons-le, Jean est encore le meilleur buteur de l’histoire du LOSC en D1 avec « officiellement » 167 buts. « Officiellement », parce que comme on va te le révéler bientôt, son réel total est un peu plus élevé.
Patoche, c’est ça
Rendons un hommage spécialement appuyé au n°12 – en fait l’un des 12è ex-aequo - parce qu’il est à un poil de sa place dans le « 11 de cœur » et parce qu’on aurait bien aimé l’y voir : Patrick Collot cumule 7 voix. On se souvient bien sûr de son but marqué à Lama sur un centre-tir en 1996 qui marque le début de sa légende, de son doublé contre Lens en novembre 1996, et puis aussi et surtout de tout le reste : il participe à l’épopée lilloise jusqu’à la fin de sa carrière pro en 2002, reste au LOSC au recrutement et à la formation. On peut en outre supposer que l’attachement qu’on lui porte est aussi lié à son histoire personnelle, en l’occurrence le drame qu’il a vécu à l’été 1996, la pudeur avec laquelle il l’a évoqué, et la dignité avec laquelle il a repris son métier. Parti brièvement pour suivre Puel à Lyon, il revient au LOSC pour devenir entraîneur-adjoint : c’est d’ailleurs lui qui assure l’intérim après le remplacement d’Hervé Renard avant que Fredo Antonetti n’arrive.
Au rayon des joueurs pas loin, il y a eu aussi les excellents gardiens Vincent Enyeama (7 voix) et Jean-Marie Aubry (5 voix), le valeureux Stéphane Pichot (7 voix), l’ancien chouchou de Grimonprez Éric Assadourian (5 voix) et la terreur des fins de matches Dagui Bakari (6 voix).
Les absences surprises
On peut également souligner l’absence surprise de Florian Thauvin dont on sait pourtant qu’il a durablement marqué l’esprit des supporters : étonnamment, son œuvre lilloise, certes courte mais extrêmement dense, n’a pas suffi pour séduire les votants.
Déception également pour Gilles Hampartzoumian. Nous avions pourtant usé de nos ressources en sa faveur en mentionnant explicitement que l’on pouvait voter pour lui, incitant de ce fait à son élection. Cela n’a malheureusement pas suffi à celui qui était de son propre aveu meilleur que Thuram en qualités intrinsèques.
S’ils ont échoué au « 11 de cœur », gageons qu’ils auront davantage de succès si nous organisions un « 11 de cul », son envers.
Plus de joueurs cités que de Dalmatiens
Au-delà, remarquons le nombre très élevé de joueurs cités : 102, soit précisément un de plus que des célèbres Dalmatiens. Contexte défavorable en termes de résultats, faible exposition, ancienneté, voilà autant d’éléments qui font qu’il n’y avait rien d’évident que soient cités des joueurs comme Mathieu Mehailia (ancien goal au centre de formation), Cédric Carrez ou Hervé Rollain (qui était très marrant paraît-il). Nous, on se félicite de leur présence dans les joueurs cités !
Venons-en maintenant à ce « 11 du cœur ».
The Onze de cœur !
The 11, le voilà :
Te connaissant, j’imagine que tu voudrais bien avoir le détail des votes ? Parce que nous jouons la transparence, les voilà ces résultats détaillés :
Position |
Joueur |
Votes |
% des votants |
1 |
Fernando D’Amico |
25 |
68 % |
2 |
Pascal Cygan |
24 |
65 % |
3 |
Eden Hazard |
21 |
57 % |
4 |
Florent Balmont |
16 |
43 % |
5 |
Djezon Boutoille |
15 |
41 % |
5 |
Mathieu Debuchy |
15 |
41 % |
7 |
Franck Béria |
12 |
32 % |
8 |
Greg Wimbée |
11 |
30 % |
9 |
Laurent Peyrelade |
10 |
27 % |
10 |
Adil Rami |
8 |
22 % |
10 |
Arnaud Duncker |
8 |
22 % |
12 |
Patrick Collot |
7 |
19 % |
12 |
Vincent Enyeama |
7 |
19 % |
12 |
Stéphane Pichot |
7 |
19 % |
15 |
Roger Hitoto |
6 |
16 % |
15 |
Dagui Bakari |
6 |
16 % |
17 |
Jean-Claude Nadon |
5 |
14 % |
17 |
Frédérik Viseux |
5 |
14 % |
17 |
Éric Assadourian |
5 |
14 % |
17 |
Erwin Vandenbergh |
5 |
14 % |
17 |
Philippe Desmet |
5 |
14 % |
17 |
Jean-Marie Aubry |
5 |
14 % |
Remarquons d’abord la présence attendue de certains d’entre eux : personne ne sera surpris d’y trouver Fernando D’Amico, Pascal Cygan et Djezon Boutoille qui ont fait partie des chouchous de Grimonprez-Jooris et ont participé à la belle épopée de la fin des années 1990 au début des années 2000. Pour ceux-là, leur présence dans le 11 relève du quasi-consensus, en particulier pour Fernando et Pascal : 53 % des votants qui ont désigné entièrement une équipe ont cité à la fois Fernando et Pascal, 91 % en citant au moins l’un des deux.
On a d’ailleurs sollicité Fernando pour une réaction à ce vote. Avec sa gentillesse habituelle, il s’est prêté au jeu et voilà ce qu’il nous dit : « il est un plaisir d’appartenir à l’histoire de Lille et à la mémoire des fans de Losc. Il est une communion dans laquelle nous partageons les mêmes valeurs. Allez le Losc pour toujours!!!! » Puis « Merci beaucoup!!! Je jouais toujours avec le cœur !!! Merci les supporters ». Et oui, car si au foot on ne peut pas jouer avec les mains, fort heureusement on peut le faire avec le cœur. Et Fernando était un expert en la matière. C’est pas pour rien qu’on lui voue un quasi-culte.
Sur Pascal Cygan, André Bertaux souligne ainsi qu’« avec [lui] on ne passait pas. D’un arrière gauche qui souffrait terriblement à maintenir le ballon sur le terrain il est devenu un arrière central d’une grande qualité, sobre et efficace dur sur l’homme son jeu de tête défensif était excellent ». Pour notre part, on a en mémoire une intervention en particulier de Pascal : alors qu’il perd bêtement le ballon au milieu de terrain en tant que dernier défenseur – ce qui ne lui arrive pas d’habitude – Belmadi part tout seul en contre plein axe. Mal barré ? C’est sans compter sur Pascal qui revient, mais le pied sur le ballon dans un timing parfait quand Belmadi est à l’entrée de la surface et évite un but tout fait. Pour moi, quelque part, l’erreur initiale c’était fait exprès, juste histoire de montrer que c’était facile pour lui de faire ensuite l’impossible. Et, parfois, il nous inspire une chanson.
Djezon, un prénom à l’orthographe improbable mais un joueur probable : cela ne veut absolument rien dire. Formé à Calais, Boutoille a passé l’essentiel de sa carrière pro à Lille, et faisait la fierté des supporters, étant le seul à une époque à être appelé en équipe de France espoirs. Un indice indéniable : il a eu son fan-club. Rapide, buteur régulier, capitaine à l’époque Halilhodzic, sa fidélité au club l’honore (il ne part que quand Puel ne le fait plus jouer, alors qu’il a souvent été sollicité). Et, signalons-le car ce critère n’est pas anodin dans les vote (mais c’est d’ailleurs le cas de tous ceux qu’on trouve dans notre 11), particulièrement sympa et dispo avec les supporters.
On n’est pas non plus surpris de la présence des autres, mais ce ne sont certainement pas les mêmes causes qui justifient leurs présences respectives.
Franck Béria s’impose comme un joueur qui avait à la fois des contraintes et des atouts pour accéder à cette équipe. La principale contrainte, c’est que Frankie ne fait pas partie de ces joueurs clinquants qui attire le regard par ses buts et ses gestes techniques incroyables. Non, ce qui fait sa gloire, c’est sa fidélité aux Dogues à une époque où c’est peu tendance (déjà 9 ans à Lille !) et une extrême polyvalence (Il se dit que Béria peut jouer à absolument tous les postes, même gardien s’il le faut, voire, en cas de nécessité, il peut endosser le rôle de kiné). Extrême polyvalence également soulignée par Max Dum qui fait remarquer qu’ « il parait même que c’est lui qui lave les fringues des joueurs à Luchin ». Le même Max déplore d’ailleurs « une énorme injustice » quant à la carrière de Frankie. Pour lui, c’est sans doute à cette polyvalence, parfois forcée, qu’il doit de « ne jamais avoir été sélectionné en EDF. La faute à Rami qui se blesse en 2007 et qui l’oblige à jouer dans l’axe, la faute de Debuchy qui éclot dès 2009, la faute de Garcia qui le trimballe à tous les postes […]. Et moi, je n’aime pas les injustices, par contre j’aime forcément les gens qui les subissent. » Nous aussi, Max, on est comme Franck, on subit plein d’injustices. Donc, quelque part tu nous aimes aussi à Drogue, Bière par la même occase.
Florent Balmont est le deuxième joueur de l’effectif actuel à figurer dans notre onze de cœur. Comme Franck Béria, il est bien sûr associé au titre de 2011, et est un ancien du LOSC (il vient d’y achever sa 8e saison). Comme le disait une de mes ex qui s’intéressait pas trop au foot mais que j’arrivais à emmener de temps en temps dans un bar, vers 2009, « Balmont je vois qui c’est, c’est le petit teigneux qui court partout ». Exactement ! Florent, c’est une grande combativité, un gros travail de récupération et de relance, et puis des frappes pour les spectateurs. Comme quoi Dogues et pitbulls savent cohabiter.
Eden Hazard doit sans doute sa place à son extraordinaire technique : il faut bien le dire, Eden est indéniablement l’un des plus grands talents que le LOSC ait pu avoir dans son effectif et qu’il nous a gratifié de nombreux gestes techniques de grande classe. Ptet bien « un des meilleurs joueurs mondiaux » comme le fait remarquer André Bertaux. Et puis, aussi, il n’est généralement pas avare pour raconter les bons souvenirs qu’il garde de Lille.
Si Mathieu Debuchy a conservé une cote intacte à Lille, il n’en est pas même de ses côtes, cassées un soir de match contre Rennes, ce qui ne l’avait pas empêché de finir le match et d’être à l’origine du but décisif. Un guerrier en somme, à cette différence qu’un guerrier centre d’habitude beaucoup moins bien.
Adil Rami fait partie de la même équipe et peut-être est-ce sa belle histoire qui a fait son succès : venu de Fréjus comme amateur, il fait d’abord ses gammes en réserve, puis en L1. Il est enfin champion de France, international A avec les Bleus, pour enfin rejoindre l’Espagne, puis l’Italie et le mythique Milan AC, avant de revenir en Espagne.
Arnaud Duncker est peut-être la présence la plus surprenante. Non pas qu’il n’était pas bon et très apprécié du public, mais parce que c’est quand-même un petit exploit de bénéficier d’autant de votes quand on a quitté le club il y a près de 20 ans et qu’on doit faire avec la concurrence des joueurs de l’ère Vahid ou de l’équipe championne de France (1). Leader d’une équipe alors très modeste, Arnaud est pourtant bel et bien resté dans les cœurs des supporters. En tout cas de ceux qui suivent Drogue, Bière & Complot contre le LOSC !
Laurent Peyrelade, comme le rappelle Buro grâce à wikipedia, c’est « un joueur de football français né le 7 avril 1970 à Limoges et qui évoluait au poste d’attaquant ». Mais, comme il le souligne plus loin, c’est surtout parce qu’il « avai[t] l’impression de voir un gars normal prendre du plaisir comme si ça avait été un de [s]es potes » et qu’en plus « il est doué mon salaud ! » qu’il le kiffe. Et on dirait à peu près la même chose comme d’ailleurs sans doute nombre des votants. Lolo Peyrelade, c’est aussi l’histoire d’un coup de boule (qui aboutit à un but) un soir de doublé dont on a déjà parlé. Et c’est donc quelqu’un qu’on est content de voir dans ce « 11 de cœur ».
1 photo, 2 chouchous !
Si beaucoup de gardiens ont conservé une aura certaine (J.-M.Aubry, J.-C.Nadon, J.-P.Mottet et V.Enyeama faisant de beaux scores), c’est Greg Wimbée qui a remporté le plus de suffrages parmi tous. Greg, il est vrai, est très aimé, ce qui fait que Max Dum aime beaucoup de personnes, puisqu’il « aime tous ceux qui aiment Greg Wimbée ». Faut dire que c’est une belle histoire, Greg. Quand il arrive, il ne convainc pas immédiatement mais devient vite incontournable, d’abord après son double arrêt sur péno en D2 et surtout pour tout ce qu’il confirme ensuite en D1, prenant une belle revanche sur une presse régionale un peu trop critique à son encontre. Et comme le rappelle Buro, Greg Wimbée c’est beaucoup de choses : un « goléador » (contre Lens) et surtout « un mec attachant, simple doté d’une chevelure charmante et d’un pied droit hors du terrain »
Paroles de supporters
Ah, oui, au fait, on a sollicité des votants dont on avait les contacts pour leur demander de commenter leurs votes. On a déjà casé certains extraits dans le début du texte, mais voici les commentaires exhaustifs.
André Bertaux sur Eden Hazard
« Hazard sans nul doute le meilleur joueur que le losc a compté dans ses rangs. Accélération frappe et technique tous ses atouts lui permettent d’être un des plus grands joueurs mondiaux. »
André Bertaux sur Pascal Cygan :
« avec Cygan on ne passait pas. D’un arrière gauche qui souffrait terriblement à maintenir le ballon sur le terrain il est devenu un arrière central d’une grande qualité, sobre et efficace dur sur l’homme son jeu de tête défensif était excellent »
Max Dum sur Franck Béria :
« Pourquoi j’apprécie Franck Beria ? Une question du même calibre que « pourquoi tu préfères les personnes gentilles aux personnes méchantes, ou pourquoi tu préfères les filles bien gaulées aux planches à pain ? C’est simple, aimer Franck Béria, c’est une évidence, c’est comme aimer le LOSC Il arrive en 2007 avec un statut de meilleur latéral de Ligue 2, à partir de là (je crois que bon …) tu te dit que ce type-là va pas faire long feu au LOSC et que Papy Seydoux à déjà préparé son R.I.B. pour les gros clubs Anglais… Et la … 1ere saison impeccable. Un coup arrière droit, un défenseur central avec la blessure de Rami, et ça tient la route. Bonne pioche, au-delà de ça il met un but à Bollaert, ce qui n’enlève rien à notre plaisir. Béria, on doit l’aimer aussi, parce que sa carrière (aussi belle soit-elle) avec le LOSC, contient une énorme injustice : ne jamais avoir été sélectionné en EDF. La faute à Rami qui se blesse en 2007 et qui l’oblige à jouer dans l’axe, la faute de Debuchy qui éclot dès 2009, la faute de Garcia qui le trimballe à tout les postes (il parait meme que c’est lui qui lave les fringues des joueurs à Luchin …). Et moi, je n’aime pas les injustices, par contre j’aime forcément les gens qui les subissent. Et puis dernier point (peut-etre un peu démago et grand public footix) mais ça fait vraiment plaisir d’avoir un joueur représentant le LOSC et qui sache bien parler Français, qui sache manier l’auto-dérision autour de petites interviews assez sympas, un joueur qui à toujours la banane (RACISTE !) … pardon, le sourire ! Et dernière chose, il fait affaire avec Greg Wimbée en tenant un footsal à Lesquin, et j’aime tout ceux qui aiment Greg Wimbée. (Complètement débile ce dernier argument, mais bon …) ».
Laurent Peyrelade par Buro
« Laurent Peyrelade est un joueur de football français né le 7 avril 1970 à Limoges et qui évoluait au poste d’attaquant. Devenu entraineur, il dirige actuellement l’équipe CFA du Rodez Aveyron Football bla bla bla selon wikipedia, et selon moi c’est un attaquant qui m’a aidé à supporter ces années de D2, à me dire qu’on se fait bien chier face à Niort et Laval (pour moi ces deux villes sont synonymes d’antichambre de L1 à jamais) mais que grâce à ce type ça va être vachement sympa finalement, Je l’aime parce que j’avais l’impression de voir un gars normal prendre du plaisir comme si ça avait été un de mes potes, un mec qui sait répondre à des interviews de façon normale et qui n’a pas oublié que dans sport étude il y a le mot étude. Il représente la joie de vivre et en plus il était doué le salaud ! Biz mon lolo »
Greg Wimbée selon Buro :
« Greg Wimbée c’est 20G pour les tox,
Greg Wimbée c’est le goaléador !
Greg Wimbée c’est le Nord meme à l’est
Greg Wimbée c’est un divorce…
Greg Wimbée c’est mes potes
c’est un mec attachant , simple doté d’une chevelure charmante et d’un pied droit hors du terrain »
Au moment d’établir son équipe, Buro a vu les choses en grand et avec Greg Wimbée en défense centrale :
(1) Si les joueurs de l’ère pré-Vahid (1944-1998) sont plus nombreux il ne représentent que 21% des votes obtenus. Mais bon, comme on l’a dit y a une logique là-dedans.