Posté le 30 mai 2016 - par dbclosc
Joël Henry, c’était le temps des copains
Etrangement, Joël Henry n’a pas été cité lors de notre consultation pour la désignation du « 11 de cœur ». Pourtant, Joël Henry – Joël Depraetere lors de son premier match en D1 – est l’un des plus grands talents ayant joué au LOSC, pas si loin que ça dès Hazard et Karasi à en croire certains. Il est aussi quelqu’un qui véhicule des valeurs plutôt sympathiques : privilégiant les valeurs de l’amitié, n’exprimant aucun regret de ne pas avoir réussi une carrière à la hauteur de ce que son talent pouvait lui permettre d’espérer et se reconvertissant en dehors du football avec bonheur, illustrant par-là que le football est autre chose que la compétition forcenée qu’on nous vend souvent aujourd’hui.
Joël est ainsi lancé dans le grand bain le 18 août 1978 à Nantes par José Arribas. Il n’a alors que 16 ans et pas tout à fait quatre mois, lui qui est né à Armentières le 19 avril 1962. La saison suivante, il marque son premier but sous le maillot lillois lors d’un match contre le PSG (4-2), à seulement 17 ans et 7 mois. Joël Henry est incontestablement un talent précoce. A l’issue de la saison, Joël a joué 10 matches avec l’équipe première (2 buts marqués) et représente l’avenir du club.
Dans le cadre du recrutement de Merry Krimau en provenance de Bastia, Henry fait le chemin inverse et rejoint en prêt l’Ile de Beauté. Le milieu offensif ne part cependant pas dans la peau d’un titulaire mais les difficultés rencontrées par le club bastiais vont rapidement lui offrir du temps de jeu. En début d’année 1981, le coach Antoine Redin décide – avec bonheur – d’en faire un titulaire au poste de milieu offensif. Henry débute 13 des 15 matches de de janvier à mai 1981 en D1 avec Bastia, pour 4 buts et 2 passes décisives.
Mais c’est surtout avec la Coupe que Henry se fait un nom et connaît ses premières heures de gloires : à tout juste 19 ans, il remporte la finale contre le Saint-Etienne de Platini et est considéré par de nombreux observateurs comme le meilleur joueur de la finale, donnant la leçon à un Platoche fantomatique. Au total, il marque 6 fois au cours de la saison et, plus généralement, il joue un rôle offensif fondamental : le talent de dribbleur de Joël est désormais bien connu de la France du foot et c’est avec difficulté que le LOSC le fait revenir de son prêt.
Lille a indéniablement une pépite. Son début de saison tonitruant n’est pas sans lien avec l’excellent début de saison du LOSC. Après 12 journées, Henry a déjà marqué 6 fois et donné 2 passes décisives. Puis il connaît la première de ses nombreuses blessures, ne jouant plus de ce fait que deux matches (pour 117 minutes) après la 16ème journée.
Ben oui les Dogues montrent « les crocs », ils vont pas montrer leurs … non, laisse tomber.
La saison 1982-1983 s’annonce en revanche radieuse pour le LOSC qui recrute quelques vedettes : l’Algérien Kourichi et les internationaux français Didier Christophe et Albert Gemmrich signent ainsi au LOSC, rejoignant (entre autres) Bergeroo, Muslin, Verel et donc Joël Henry, au sein d’un effectif qui peut nourrir de légitimes ambitions. Christophe ne se plaira pourtant jamais à Lille et Gemmrich fût plus efficace comme fouteur ed’brin dans les vestiaires que devant les buts (0 but). Une excellente saison de Henry, notamment ponctuée de 8 buts – mais aussi de quelques pépins physiques – , sera insuffisante pour permettre au LOSC de terminer plus haut qu’à la 13ème place. Mais les Dogues auront cependant un sympathique lot de consolation en atteignant la demi-finale de la coupe : déjà une routine pour Joël, déjà vainqueur de l’épreuve deux ans plus tôt.
Henry n’a alors que 21 ans, mais il est déjà en fin de contrat à Lille
Brest et les copains
A l’été 1983, Joël est très courtisé, mais il fait le choix du cœur en rejoignant Brest où joue son pote Bernard Pardo qu’il a connu à Lille. Choix du cœur et, paraît-il, choix de la teuf : il se dit que Jojo ne rechignait pas à partager quelques pintes de chouchen avec son pote Nanard Pardo et ses autres co-équipiers brestois. Un écart de conduite de trop – lui et Pardo sont retrouvés dans la voiture de Jojo, la voiture dans le fossé, à 6 heure du mat’ quelques heures avant un match contre Metz – aboutit à sa mise à l’écart du groupe pendant une quinzaine de jours.
Contrairement aux allégations de cette photographie, Henry et les Brestois n’avaient rien de bouchers
Bref, Henry s’amuse bien à Brest et ses deux premières saisons brestoises sont assez correctes même si elles sont un gros poil en-dessous de ce qu’on aurait pu attendre étant donné le talent du bonhomme. Mais l’essentiel n’est pas là pour Joël …
Mais sa troisième saison est celle de trop, en tout cas footballistiquement. Henry n’est plus l’ombre du virevoltant milieu offensif qu’il était et finit sa saison avec la réserve du club finistérien.
Nice et Toulon
Joël s’en va alors pour la Côte d’Azur et pour Nice. Il fait des débuts canon, marquants 4 buts, faisant 2 passes décisives après 15 journées et marquant le jeu azuréen de son empreinte. Mais on assiste très vite à ce qui est finalement un « retour à la normale » pour Henry : il perd ensuite en influence et en efficacité sur le jeu azuréen.
Eté 1987, nouveau déménagement pour Joël qui s’en va rejoindre les anciens lillois rencontrés au centre de formation, Bernard Pardo et Jean-Pierre Mottet, ainsi qu’un futur dogue historique, Patrick Collot. Il y rejoint aussi par ailleurs Bernard Casoni, David Ginola et Laurent Paganelli. Il fait une saison globalement moyenne dans une équipe qui monte progressivement en puissance. Paradoxalement, Joël semble footballistiquement plutôt sur la pente descendante, mais il joue pour la première fois dans une équipe qui termine à la 5ème place en D1.
Fin de carrière nantaise
1988. Henry a désormais 26 ans et, après 10 ans de carrière, sa cote a légèrement pris du plomb dans l’aile. S’il trouve un contrat à Nantes, une équipe assez ambitieuse, il ne part pas comme titulaire, situation inédite pour lui depuis son prêt à Bastia alors qu’il avait alors 18 ans. Il doit faire ses preuves et ses débuts sont logiquement difficiles dans une équipe au jeu alors assez défensif.
Joël réussit pourtant son pari : il est en pleine bourre sur la fin des matches aller, marquant 1 but et faisant 2 passes décisives en 4 matches et réalisant de très belles prestations. Blessé en décembre, il loupe quelques matches, mais il revient bien fin janvier. Encore blessé en avril, il revient bien dans la dernière ligne droite. Arrivé sur la pointe des pieds, Joël remporte son pari et obtient une prolongation de contrat à Nantes qui termine 7ème et nourrit de belles ambitions.
Mais il s’agissait des derniers soubresauts dans la carrière chaotique de Joël Henry. S’il est titulaire pendant encore deux an et demi au FCN, il est un bon cran en dessous de ce qu’il a monté par le passé, à Bastia, Lille, Brest et même à Nice. Blessé au cours de sa dernière saison nantaise, il met fin à sa carrière professionnelle en 1992, à l’âge de 30 ans. Ses statistiques de ses trois dernières saisons nantaises sont très modestes : seulement 5 buts et 4 passes décisives en 86 matches, très loin de ses performances de la période 1980-1984 au cours de laquelle il inscrit 27 buts en 108 rencontres.
Quel bilan pour la carrière de Joël ?
D’un point de vue sportif, il est indéniable que le sommet de la carrière d’Henry se situe à son début, d’abord avec Bastia puis avec Lille. Quand il quitte Lille, à seulement 21 ans, il vient de réussir trois très belles saisons, ponctuées d’une finale de coupe remportée, d’une autre demi-finale, et de performances de très haut niveau qui en font alors un candidat très sérieux à l’équipe de France.
Henry garde de bons souvenirs de sa période lilloise et sans doute encore davantage de son année bastiaise. Mais, quand il évoque ses souvenirs de footeux, c’est sa période brestoise qu’il met le plus volontiers en avant : c’est le temps des copains et, pour lui, ça n’a pas de prix.
Et ça, il l’a payé Joël. Et On peut comprendre que ça ait dérangé. Mais Henry a fait un choix et a finalement un discours assez frais sur le football : pas de rancœur mal placée, pas de regrets exprimés sur sa carrière peut-être pas tout à fait au niveau de son talent. Non, Joël exprime surtout la joie d’avoir fait une carrière de footballeur pro et d’avoir fait de belles rencontres.
Le graphique ci-dessus, qui montre le déclin progressif de son ratio buts/50 matches, traduit le fait qu’il n’a pas été aussi haut que ses débuts pouvaient faire espérer. Aujourd’hui, on dirait qu’il a raté sa carrière : mais n’a-t-il pas au contraire compris que l’essentiel n’est pas là ?
Laisser un commentaire
Vous pouvez vous exprimer.
0 commentaire
Nous aimerions connaître la vôtre!