Posté le 27 juillet 2016 - par dbclosc
Putain, mais Doukisor (1/2) ? Les flops du recrutement du LOSC
Dans leur dimension commerciale, les clubs de football aiment particulièrement attirer des joueurs inconnus sur lesquels miser pour pas un rond en espérant qu’ils parviendront à exploser afin d’être revendus au prix fort. Il s’agit alors bien souvent d’aller chercher des joueurs étrangers, soit jeunes, soit moins jeunes mais avec une petite expérience internationale dans un pays footballistiquement sous-côté. On espère alors une « bonne pioche », une « perle rare », ou une « pépite », comme on dit bêtement et à toutes les sauces. Mais, dans un premier temps, on appelle surtout ces joueurs des « Doukisor », car lorsque la presse se fait l’écho de l’intérêt du LOSC pour un type dont on n’a jamais entendu parler, le réflexe du supporter est de s’interroger en ces termes « mais d’où qu’y sort ?? ». Si le LOSC est souvent salué pour sa capacité à flairer les bons coups lors des mercatos, permettant de juteuses reventes (faut bien payer le stade), le club a aussi vu passer, et même dans une période récente, des joueurs dont on se demande bien comment ils ont pu se retrouver là. Avant un deuxième volet demain consacré demain aux bons coups du LOSC, cet article vise à recenser ces footballeurs qui, depuis le milieu des années 1990 – l’époque où j’ai commencé à m’intéresser au foot, donc au LOSC (puisque le LOSC est le foot) – sont arrivés à Lille de façon plus ou moins fracassante, avant de repartir sans que l’on ne s’en rende vraiment compte. Il ne s’agit donc pas d’évoquer tous les « ratés » du recrutement, mais seulement les ratés avec des inconnus (par exemple, on ne parlera pas de Youssef Sofiane, qui avait une petite réputation à son arrivée, ou d’Amara Simba).
Si, à notre avis, la plupart de nos lecteurs s’accorderont sur notre classification, il y a aussi sans doute une part de subjectivité que vous pouvez contester (et, dans l’article demain sur les bons coups, on aura un bonus « inclassables », car on est incapables de dire si ces Doukisor étaient bons ou mauvais), et on sait en outre combien les performances d’un joueur ne sont pas forcément liées à ses qualités intrinsèques. Présentations par ordre alphabétique.
Hicham Aboucherouane (2005-2006)
Après une belle saison 2004-2005 terminée à la deuxième place, Philippe Brunel, élément-clé de l’équipe (capitaine, 37 matches et 9 buts) n’est pas prolongé. Son remplaçant est trouvé sur les conseils d’Alain Fiard : un international Marocain de 24 ans venant du Raja Casablanca, plutôt un bon souvenir puisque c’est là-bas qu’on était allés chercher Abdelilah Fahmi. Pour le premier match de la saison, il marque les esprits avec son maillot floqué « Hicham », son nom étant trop long ; et surtout en envoyant un puissant coup-franc que le gardien rennais, Isaksson, repousse péniblement sur Makoun qui inscrit le seul but du match. Malheureusement, par la suite, Aboucherouane s’est montré très discret et, hormis un coup d’éclat avec un surpuissant coup-franc contre Saint-Etienne (qui fait dire à Claude Puel qu’Aboucherouane est « la plus grosse frappe du championnat de France » – peut-être vrai, mais insuffisant), il est de moins en moins aligné et ne participe qu’à 12 matches de championnat ; 3 de plus et il fallait lever l’option d’achat. Retour en Afrique.
Edgar Borges (1992-1994)
Edgar Borgès est un milieu offensif international uruguayen, arrivé en provenance du Nacional Montevideo à l’âge de 23 ans. Il ne joue au total que 18 matches, et parvient à inscrire un but. Deux ans après, il est à Beauvais, avant de retourner en Uruguay et au Chili. Il finit sa carrière à Liverpool. Liverpool Futbol Club, c’est en Uruguay. Il a, paraît-il, ensuite ouvert un restaurant, et quelques données publiques sur le net indiquent une activité d’enseignement dans le sport dans la région lilloise jusqu’à récemment. Edgar, si tu nous regardes…
Amada Cissé (1994-1995)
Pas de la tarte de trouver des infos sur Adama Cissé. Et pourtant, il a bel et bien existé : arrivé comme joker en janvier 1995, il ne figure donc pas sur la photo officielle, et malgré nos riches archives à DBC, nous n’avons pas trouvé de photo. Mais nous ne manquons pas de ressource : ainsi, la meilleure source que j’aie retrouvé sur ce joueur est un courrier de mon Papa datant de janvier 1995 : j’étais en CM2, en classe de neige, et c’est une carte postale qui m’informe de la venue de Cissé, en plus du résultat de l’affiche PSG-Nantes. Autres temps, autres modes de transmission des informations cruciales. Donc Adama Cissé est un « sénégalais connu de l’entraîneur » (Jean Fernandez). Impossible de savoir s’il a joué, mais je pense bien que non.
Edit de janvier 2017 : on a trouvé une photo !
Daniel Gygax (2005-2007)
Sur sa page wikipédia, probablement écrite par un membre de sa famille, on peut lire : « Il garde une très bonne image auprès des supporters lillois lors de son passage au club, fervante popularité qu’il doit grâce à sa technique flamboyante et à sa classe naturelle ». V’là autre chose ! Arrivé en même temps que son compatriote Lichtsteiner, il est censé apporter sa vision du jeu au poste de milieu offensif, en plus pour jouer la Ligue des Champions. Hormis quelques buts, dont certains fort jolis, il n’a jamais eu le rayonnement au LOSC qu’il a pu avoir dans d’autres clubs ou en équipe nationale. Il s’est récemment fait remarquer par une sortie raciste, regrettant « la forte présence de footballeurs africains. Certains avaient beaucoup de peine à appliquer les consignes tactiques ». Signalons qu’au LOSC, le fantastique Gygax a fréquenté les joueurs africains suivants : Hicham Aboucherouane, Benoît Angbwa, Kader Keita, Jean Makoun, Matt Moussilou, Peter Odemwingie, et Tony Sylva. Hormis le premier nommé, plus discret comme évoqué plus haut, tous ont laissé un excellent souvenir. A l’inverse de la pépite Daniel, dont on ne se rappelle pas grand chose. Sauf si elles consistaient à jouer de façon médiocre, on se demande plutôt si lui-même n’avait pas du mal à « appliquer les consignes tactiques ».
Viktor Klonaridis (2012-2013)
Pour la modique somme de 800 000€, le LOSC recrute en juillet 2012 le milieu offensif belgo-grec Klonaridis, une opération qui sent fort le renvoi d’ascenseur entre agents de joueurs. Un an plus tard, il ne compte que 3 entrées en jeu en championnat, plus deux matches de coupe, au cours desquels il montre un niveau de jeu bien trop faible pour espérer s’imposer. Il est prêté à Mouscron la saison suivante avant de retrouver la Grèce, où il est un honnête joueur de championnat. Philosophe et assez modeste, Klonaridis garde un bon souvenir de son passage lillois.
Henrik Lykke (1994-1995)
Henrik Lykke est un Danois de 24 ans quand il arrive à Lille. Aujourd’hui, il est toujours Danois mais a 46 ans. Il a apparemment un homonyme célèbre. Ces longueurs inutiles sont là pour compenser le fait qu’on n’a absolument rien à dire sur lui. Contrairement à une petite filière danoise et scandinave qui a eu son succès à Lille avec notamment Frandsen et Friis-Hansen, lui ne joue que 11 matches, la plupart comme remplaçant, en milieu de terrain défensif. Ah si, un petit fait d’arme tout de même : il figure par accident sur la pochette de la cassette VHS « les plus beaux buts de la saison 1994/1995 », car il est au marquage de Patrice Loko. Enfin, on suppose que c’est fortuit, à moins que chez TF1 vidéo, on se soit dit « tiens, mettons une photo d’Henrik Lykke pour nous souvenir de cette belle saison. Ah merde on voit Loko ».
Sur le côté de la vidéo, on le voyait en entier.
Emil Lyng (2008-2011)
Avouons-le : nous avons un peu de honte à faire apparaître ici un si jeune joueur, arrivé de son Danemark natal à l’âge de 18 ans. De plus, à sa décharge, il évolue à une époque guère propice à l’émergence de jeunes talents. En tout cas, il n’a pas eu le temps de se montrer : seulement 4 apparitions lors de sa première saison, et une cinquième et dernière montée au jeu en 2010-2011, ce qui lui permet tout de même de revendiquer le titre de champion de France. Entre deux, il a été prêté à Zulte-Waregem. Actuellement joueur de Silkeborg au Danemark, on l’a revu récemment lors d’une confrontation contre Saint-Etienne en Europa League quand il jouait pour Esbjerg.
Marko Maric (2007-2009)
Présenté comme le successeur de Mathieu Bodmer en raison de sa polyvalence, le capitaine des espoirs croates est recruté en 2007 pour seulement 500 000€. Élégant et plutôt doué techniquement, Marko Maric marque dès son deuxième match, en offrant la victoire au LOSC à Metz à la dernière minute. Dès janvier, il est prêté à Mouscron. Par la suite, il est souvent blessé ou absent des feuilles de match. En deux ans, il ne joue que cinq matches de championnat, et un de coupe de la Ligue. Il repart en Grèce avant de rejoindre les États-Unis, et sa carrière n’a finalement eu aucun relief.
Carlos Alberto Lisboa dit « Nenem » (1998-1999)
Charles Albert Lisbonne arrive de Rio de Janeiro, en D2 brésilienne, en janvier 1999 lors du mercato hivernal. Durant l’automne précédent, ce milieu offensif avait déjà passé une semaine en compagnie de l’effectif lillois et avait séduit Vahid Halilhodzic : « bonne technique, bons enchaînements, bon organisateur« , dit-il de lui. Il entre en jeu pour la première fois le 30 janvier pour un match au Mans, sans pouvoir éviter la défaite. La semaine suivante, il réussit son principal (son seul ?) fait d’armes avec le LOSC : dans le match au sommet contre Troyes, il délivre une superbe passe décisive à Laurent Peyrelade qui inscrit le seul but du match à un quart d’heure du terme. Un bilan de 6 matches, dont seulement 3 titularisations ; des qualités techniques évidentes mais très faible physiquement ; une forte propension aux grigris inutiles et aux passements de jambe pour rien… Il n’a en revanche jamais inscrit de bicyclette, ni autre chose, avec le LOSC, comme l’indique à tort sa page wikipédia. En fait, Nenem est un joueur particulier : sa passion, c’est le football de plage. Dès son départ de Lille, il s’y consacre entièrement et demeure à ce joueur le meilleur buteur de l’histoire de l’équipe de Brésil de plage, avec 336 buts. Une des plus belles intrigues de l’histoire du LOSC.
Luis Yanes Padilla (2007-2008)
Encore un renfort de ce fabuleux mercato 2007. Venu de l’Independiente Santa Fe Luis Alfredo Yanes Padilla est un international colombien (5 sélections) de 24 ans, qui vient de disputer la Copa Libertadores, et est recruté pour compenser le départ à Lyon de Kader Keita. Claude Puel le définit comme « un joueur offensif polyvalent qui peut évoluer sur tout le front de l’attaque, un droitier rapide, puissant, explosif et percutant, capable de faire la différence en dribble et par ailleurs doté d’un jeu de tête de qualité. Il a encore une bonne marge de progression ». En fait, il joue la plupart du temps avec l’équipe réserve, et n’apparaît que trois fois avec l’équipe première. Son contrat est résilié à l’issue de la saison. Un moment convoité par Strasbourg, fraîchement relégué en Ligue 2, il retourne en Colombie et, hasard ou pas, Ingrid Betancourt est libérée dans la foulée.
Frank Pingel (1995-1996)
Alala. Le flop le plus monumental que j’aie vu. Juillet 1995 : l’attaque est à reconstruire après les départ de Garcia, Farina et Assadourian. Les dirigeants vont chercher un attaquant de 30 ans, qui fut un temps international, avec un bilan fort honorable de 5 buts en 11 matches. On en avait un peu parlé dans notre article sur le bilan de la saison 1995-1996. Pourtant, les matches amicaux avaient été encourageants non seulement à titre individuel, mais aussi quant à son entente avec Amara Simba. Les matches de championnat tournent à la catastrophe. Ah, se taper dans la main, ça va, mais pour marquer des buts, y a plus personne. L’équipe ne tourne pas, et Pingel est manifestement en surpoids. Sa vivacité ressemblait « à celle d’un 38 tonnes » écrivions nous aussi ici. Il prend part à 5 matches en début de championnat et repart sans avoir rien montré, laissant le LOSC avec deux points et 2 buts marqués en 6 matches. Le LOSC prend alors Miladin Becanovic comme joker. Littéralement, un gros bide.
John Jaïro Ruiz (2012-2015)
Cet attaquant arrive en janvier 2012 pour un peu plus d’un million d’euros. Jean-Michel Vandamme explique : « Un membre de la cellule recrutement assistait au mondial des moins de 20 ans en Colombie. John Jaïro Ruiz était le plus jeune joueur de la compétition. Il avait alors 17 ans et avait été surclassé. Cet attaquant du Costa-Rica a fait une très bonne impression à notre représentant. Il a fait valoir ses qualités : tonique, rapide, capable de faire des différences. Il y avait une forte concurrence sur ce joueur. L’Inter, le Barça et le Rubin Kazan notamment étaient sur lui. C’est un vrai ailier de débordement. Il a une bonne frappe de balle et est capable de tirer les coups francs. Quand il sera réglé, il pourra faire des différences par sa vitesse. Il peut jouer à droite comme à gauche. C’est un pur ailier comme il n’en existe plus guère, un peu comme Djezon Boutoille ». Diantre, voilà qui en jette. Il y a des joueurs que le patronyme sert : « Ruiz », ça fait petit, rapide et buteur, ne me demandez pas pourquoi, je le sens comme ça. D’abord mis à la disposition de la réserve, il parvient à inscrire 3 buts en 13 matches, ce qui permet de faire un peu parler de lui. Seulement 18 ans, costaricain, ça peut laisser augurer de belles promesses quand il sera complètement à l’aise. Il est prêté la saison suivante à Mouscron, en D2, où ses 18 buts en championnat masquent un côté brouillon dans la surface adverse, en dépit d’une grande générosité. En 2013/2014, René Girard lui offre quelques entrées en jeu, qui se révèlent très quelconques. Pourtant, une bonne partie des supporters croit toujours en cette « pépite« , prêtée ensuite à Ostende, pour 6 buts en championnat, confirmant son statut de joueur correct de Jupiler league. Il quitte définitivement le LOSC en 2015 pour le Dnipro Dnipropetrovsk sans avoir jamais confirmé les espoirs placés en lui.
Emra Tahirovic (2007-2008)
Oui, vous l’aviez oublié celui-là, hein ? International suédois des moins de 21 ans, comparé à Zlatan Ibrahimovic en raison de son physique (1,90m ; 87 kilos), Emra Tahirovic débarque à Lille durant l’été 2007 (en même temps que Maric), avec un joli contrat de 4 ans, signe d’une belle confiance et, croit-on, du grand flair des recruteurs qui ont l’air de parier sur l’avenir avec lui. Il faut dire que d’autres clubs s’étaient positionnés sur lui. Ravi, Claude Puel déclare à l’époque : « C’est un beau gabarit, capable de prendre la profondeur, à l’aise techniquement des deux pieds. Il faut lui apprendre les bases et le métier, pour qu’il franchisse des paliers comme les autres jeunes joueurs de notre effectif ». Il en profite également pour saluer le travail de Jean-Luc Buisine au niveau du recrutement : « Ce réseau commence à bien fonctionner et nous donne des renseignements fiables, ce qui n’est pas évident car ce type de joueur, c’est rare sur le marché et la demande est forte, se félicite Puel. Les potentiels en devenir sont très prisés et il est donc important de se positionner sur ce marché là car nous sommes un club formateur, avant de s’inscrire par la suite dans la hiérarchie du football national et, je l’espère, international ». Mais dès janvier 2008, Tahirovic repart. Entretemps, il a eu l’occasion d’entrer en jeu contre Sochaux et d’être titularisé contre Strasbourg, deux matches au cours desquels il a affiché de sérieuses lacunes techniques et une maladresse assez effrayante pour un avant-centre. Par la suite, il n’a joué que dans des championnats mineurs (en Suisse et en Suède) ou des divisions inférieures (Pays-Bas, Espagne et Suisse). Ils nous a bien zlatanés.
Hector Tapia (2002-2004)
Intersaison 2002, le LOSC est en pleine restructuration. Vahid est parti, et avec lui une bonne partie du secteur offensif : Cheyrou, Beck, Bassir et Bakari. Le club recrute à tout va avec des fortunes diverses. Parmi les nouveaux arrivés, un international chilien sacré meilleur buteur du championnat de son pays en 2001 avec (Patrick-Patrick) Colo-Colo. Comparé à Ivan Zamorano, bien que plus petit gabarit, ses cheveux flottant au vent donnent une impression de vitesse. Mais contrairement à « l’hélicoptère », « la machine à buts » (dixit Puel) a du mal à fonctionner une fois passée la cordillère des Andes. Après Pérouse en 1999, d’où Totor était reparti après seulement 4 matches, Lille est sa deuxième expérience à l’étranger
[_Ah bon, Lille c’est à l’étranger ?
_Pour un Chilien, oui.
_Ah ok. ils sont fous ces Chiliens]
Ce sera un peu mieux mais nettement insuffisant. Si les premiers matches d’InterHitoto sont assez encourageants, avec notamment deux passes décisives pour Fernando D’Amico, Lille ne parvient pas à marquer lors des 4 premiers matches de championnat, et Tapia manque même un pénalty contre Troyes, avant de finalement ouvrir son compteur une semaine plus tard à Strasbourg. Deux autres buts suivront. Puis deux la saison suivante, dont un face au PSG de Vahid pour une victoire 1-0 sous la canicule de l’été 2003. Régulièrement affaibli par des blessures, il doit son temps de jeu surtout à la faible concurrence à son poste. Son contrat est résilié, et il repart en Amérique du Sud. Désormais entraîneur, il a été sacré champion du Chili avec son club de Patrick-Patrick.
Mais le LOSC, c’est aussi de bonnes pioches : à lire dans le deuxième volet de ce dossier « Doukisor ».
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