Posté le 21 juin 2017 - par dbclosc
Cher Président Seydoux…
Il y a 6 ans, l’un de nous écrivait au Président Michel Seydoux. Le constat était le suivant : l’équipe du LOSC était agréable à voir jouer, ce qui l’avait incité à retourner voir tous les matches de son équipe favorite dans des bars. Problème : ça coûtait cher en bières. L’objet du courrier visait donc à demander une participation financière de la direction du LOSC, jugée directement responsable de ces dépenses excessives, en raison d’une politique sportive qui portait ses fruits. C’était aussi l’occasion de présenter au Président le rapport affectif entretenu avec son club. La lettre est malheureusement restée sans réponse. Nous vous la proposons désormais en ligne, dans sa version d’origine. Nous avons juste inséré des liens, car certains des souvenirs évoqués dans cette lettre sont devenus des articles sur ce blog, et des photos. Magie des réseaux sociaux, peut-être que cette fois le Président Seydoux nous lira et nous répondra. Et après tout, l’arrivée de Marcelo Bielsa pourrait bien actualiser le problème. Tiens, on va écrire à Gégé !
Lille,
Le 31 mars 2011
Cher Président Seydoux,
« Puel et Garcia, c’est deux styles de jeu différents, c’est évident. Puel a développé un jeu plus défensif à un moment où on était en construction, aujourd’hui c’est devenu plus pétillant. C’était du cidre, c’est devenu du champagne », déclariez-vous le 18 janvier dernier sur RMC. Je ne saurais vous contredire. Supporter lillois depuis mon enfance, c’est avec grand plaisir que je j’observe depuis bientôt trois ans les performances de mon club favori, performances coïncidant avec l’arrivée au club de M. Rudi Garcia. Ainsi, aux brillants résultats s’ajoute une indéniable qualité de jeu apportée par l’entraîneur, m’ayant réconcilié avec le suivi fidèle et en direct des matches du LOSC.
Pour vous raconter ma vie – une partie du moins -, j’ai commencé à m’intéresser au football vers l’âge de 10 ans, soit vers 1994, à une époque où, disons-le, il n’était pas franchement valorisé socialement de se déclarer supporter du LOSC, d’autant plus que le voisin lensois tournait bien mieux. Mais, proximité géographique et héritage paternel obligent, c’est vers Grimonprez-Jooris et son panneau d’affichage à points lumineux incompréhensibles que je me dirigeai, tout ça pour voir des rencontres au cours desquelles égaliser contre Martigues à la 83e minute sur un but de raccroc était considéré comme une performance honorable, dans la mesure où elle permettait de remonter à la 14e place et de prendre ses distances avec Le Havre. C’était également la période des vaches maigres offensives (souvenons-nous de ces 10 victoires 1-0 à domicile sur la seule saison 1994-1995, dont une fameuse contre Caen sur un but d’Arnaud Duncker à l’issue d’une belle action collective). Mais, quand on est jeune, on ne s’arrête pas aux performances sportives, et il restait plaisant de venir au stade pour sentir l’ambiance indescriptible d’un match de ventre mou entre nos favoris et le FC Metz, pendant lequel il n’était guère farfelu d’avoir 3 bagarres générales au cours du match et si, par chance, l’arbitre s’appelait Colombo, on rigolait bien rien que pour ça. Surtout, c’était gratos pour les moins de 12 ans à l’époque, pour peu qu’on prenne un air naïf à l’entrée du stade, ce que mon père faisait très bien. Il y eut quand même une éclaircie au début de la saison 1996-1997, avec un début de saison tellement canon qu’on est descendus en Division 2 à son issue, comme pour compenser un trop-plein d’exposition médiatique durant 3 mois. Ces années furent donc celles d’un football médiocre, bien encouragé par des joueurs au standing douteux (c’était quoi, Joël Germain ? Une blague refourguée par Caen pour se venger de leur avoir refilé Keneth Andersson ? La ligne d’attaque Pingel/Simba en 1995, c’était pour légitimer a posteriori le fait que Samuel Lobé fut l’homme providentiel ?), et l’inexorable départ des rares joueurs qui permettaient d’envisager un avenir meilleur (Sibierski… et puis c’est tout en fait). Les seuls moments de joie, c’était des petites performances ça et là (une victoire-accident au Parc des Princes en 1996 sur un centre raté de Patrick Collot et une intervention encore plus ratée de Bernard Lama, pendant que les parisiens cherchaient à rentrer avec le ballon dans notre but pensant que ce serait facile, et ce trois jours avant que le PSG ne gagne la C2 ; ou ce match à Lyon ou notre gardien Nadon regarde le ballon taper 5 fois ses poteaux et revient avec un miraculeux 0 à 0). Nous étions donc bien loin du « football-champagne » que nous pouvons revendiquer désormais.
Noël 1994 chez Papy et Mamie : une grande fierté
Puis je fus abonné de 1997 à 2003. Soudainement, à l’échelon inférieur, nous étions devenus des favoris. Tu parles ! 1997-1998 : 4e ; 1998-1999 : 4e ! Quand seulement trois équipes peuvent monter, c’est ballot, surtout lorsqu’il s ‘agit en l’occurrence des trois premières. En dépit de quelques accidents (notamment cette victoire 7 à 3 sur Martigues), en deux ans, on parvient à se faire devancer par Sedan, Troyes, Lorient (inconnus à l’époque)… et à faire gagner chez nous Amiens (deux fois !), Cannes, sans oublier de belles défaites à Mulhouse ou Beauvais, et, point d’orgue et symbole de l’époque Thierry Froger, cette épique défaite face à Toulon à Grimonprez en avril 1998 sur un but de Didier Rabat dès la 2e minute qu’on fut incapable de surmonter (faut dire que l’entraineur s’entêtait à laisser deux milieux défensifs à domicile alors qu’Hitoto courait pour trois), ce qui, conjuguée à la défaite du match aller, faisait de nous les généreux donateurs de 6 points au Sporting Toulon, lui permettant de ne finir cette saison-là que 5 points derrière le premier non-relégable.
Oui, Président, difficile à croire, mais j’ai adoré ces joueurs : Samuel Lobé, Bob Senoussi, Christophe Landrin, Djezon Boutoille, Frédéric Machado, Frédéric Dindeleux, Gaël Sanz, Jean-Marie Aubry, Clément Garcia, Cédric Anselin.
Par la suite, miracle, l’entraineur suivant, est aussi compétent que son nom est imprononçable. Heureusement, parce que « Halilhodzic, démission ! », ça aurait été plus difficile à chanter que « Froger, démission ! » – ceci est au passage une petite astuce quand vous recrutez des entraineurs : favorisez les noms à plus de trois syllabes pour éviter l’animosité des tribunes. Une saison et demie plus tard, nous revoici en première division grâce à un ensemble de circonstances soudainement favorables et des scénarios « à la Vahid ». Ainsi, durant 4 ans, nous avons eu droit à quelques souvenirs mémorables révélant un sens tactique hors du commun : épuiser la défense pendant 85 minutes avec deux gars costauds aux avant-postes qui ont les pieds carrés, puis faire entrer des gamins de 18 ans qui permettent de l’emporter sur le fil 3 à 0 ; entrainer son gardien de but à détourner deux pénalties consécutifs (ce même gardien qui marquait contre son camp deux mois auparavant) ; recruter sur cassette vidéo un Argentin qui a douze poumons ; faire de joueurs moyens de Division 2 des stars de D1 qui amènent le club en ligue des Champions ; gagner un derby sur un but contre son camp du lensois qui avait adressé un doigt d’honneur au kop lillois avant le match ; refaire le coup des cinq poteaux ET du pénalty adverse raté à la dernière minute à Troyes, de surcroît en ayant marqué en contre grâce à une molle reprise de Sterjovski (un de ces types qu’on ne connaissait pas avant qu’il arrive à Lille et dont on n’a plus jamais entendu parler après) ; s’amuser à attendre la 94e pour mettre les buts vainqueurs. Bref, c’était tiré par les cheveux mais c’était bien.
Ensuite, votre arrivée couplée à celle de Claude Puel inaugurait une nouvelle ère : sachez déjà que, dans un premier temps, avoir pour président une personne qui avait le prénom d’un joueur lensois, c’était pas très malin de votre part. Fort heureusement, vous eûtes l’intelligence de recruter Kader Keita, histoire que l’alliance « Seydou (x)/Keita » soit davantage associée à Lille qu’à Lens. Au niveau communication, je dois reconnaître que c’était bien joué. La première saison fut laborieuse. Conjuguée à d’autres raisons, elle m’incitait à ne pas renouveler mon abonnement pour la saison 2003-2004, qui fut elle-même en demi-teinte. Les deux saisons suivantes furent assez brillantes, tant en championnat qu’en Coupe d’Europe, mais mon intérêt pour les matches était très intermittent, car si les résultats étaient là, la manière laissait souvent à désirer. Ainsi, n’étant pas adepte des tactiques où la titularisation d’un unique attaquant est considérée comme audacieuse, je délaissai progressivement les matches du LOSC, sauf pour quelques évènements de taille, comme la victoire à Milan, ou quelques coups du sort rigolos, comme le Lille/Lens de mai 2008, au cours duquel nous envoyons Lens en Ligue 2, comme une revanche sur une enfance à être le seul supporter lillois à l’école primaire, face à ces opportunistes qui ne faisaient que tenir pour les vainqueurs, sans s’y intéresser plus que ça. Hé hé.
Y avait pas foule à l’époque pour aller voir s’entraîner Roger Hitoto et compagnie.
À l’été 2008, l’Olympique lyonnais désire s’attacher les services de Claude Puel. Soit. Après plusieurs faux départs et un bilan globalement positif, il était de bonne guerre de ne pas fermer la porte à ce départ. A posteriori, c’était même une excellente décision, puisque c’est là que vous faites appel à Rudi Garcia. Surtout, vous faites pour la énième fois le coup de la vente des meilleurs éléments lillois qui perdent leur football ou ne jouent plus en arrivant à Lyon, nous permettant d’avoir encaissé en quelques années, entre Bodmer, Makoun, Keita, Puel et Bastos, une belle petite enveloppe pour, au final, recruter des Moussa Sow ou un employé municipal de Fréjus devenu international français pour 0 €.. Et que dire du recrutement de Florent Balmont pour 2,5 millions à un club qui avait déboursé 4 millions pour Moussilou deux ans auparavant ? Si ça, c’est pas du génie financier, ça y ressemble.
En tout état de cause, l’arrivée du nouvel entraineur m’a permis de renouer avec la tradition du suivi des matches du LOSC en direct, tant l’équipe est devenue plaisante à voir jouer, manifestement grâce à l’apport de M. Garcia. Ainsi, depuis trois saisons, et dès que j’en ai la possibilité, j’assiste aux matches de Lille. Je dirais même que les matches de Lille sont devenus une priorité dans l’organisation de mon emploi du temps. Cependant, pour différentes raisons que je vais vous exposer ci-après, je ne souhaite pas suivre ces matches directement au Stadium nord de Villeneuve d’Ascq. Premièrement, ce stade est tout pourri. Deuxièmement, les stades ne sont pas forcément les meilleurs endroits pour discuter à chaud (d’autant plus dans un stade ouvert à tous les vents) de ce que l’on voit sur le terrain ; troisièmement, les matches du LOSC sont un moment privilégié pour partager une bonne bière entre amis. Nous perpétuons ainsi la tradition régionale de la consommation de bières. Ainsi, nous vivons par procuration les mêmes sensations que les plus fidèles supporters. La qualité de jeu et les résultats semblant en outre s’améliorer à mesure que le temps passe, manquer un match dans un des bars de la ville s’apparente de plus en plus à une faute morale. C’est ainsi que depuis de longs mois, chaque match du LOSC est l’occasion de se retrouver entre amis (nous n’avons pas Canal +). Les enjeux étant de plus en plus élevés, conformément au plan ambitieux que vous proposez pour le club, je suis également dans l’obligation de suivre la plupart des rencontres de certains concurrents directs. Ainsi, ces dernières semaines, outre les matches du LOSC, j’ai assisté à Rennes/Marseille, Lyon/Rennes, Marseille/Paris…
J’en viens ainsi au coeur de mon courrier et de ma demande : à raison d’une pinte à 5€ par période et par personne, mon budget limité de jeune chercheur est fortement grévé par ces dépenses directement liées à la politique sportive réussie que vous menez depuis maintenant 9 ans à la tête du club. J’aimerais donc savoir si une participation du club dans ces dépenses est envisageable, et dans quelles proportions. Ainsi, vous qui ambitionnez le « football-champagne », vous remarquerez ma modestie en ne vous sollicitant que pour du « football-bière », ce qui révèle mon attention pour les finances du club, quoique bien alimentées par l’ami Aulas.
Je serais bien évidemment ravi de discuter des modalités de financement directement avec vous, si vous le souhaitez. Ce serait un signal fort à l’égard de l’ensemble des supporters qui, souvent plus que les joueurs, aiment avoir beaucoup de pression (s) les jours de matches !
Dans l’attente d’une réponse de votre part à laquelle je ne manquerai pas de porter un toast, veuillez recevoir, cher Président Seydoux, mes sentiments sportifs les meilleurs.
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