Posté le 7 juillet 2017 - par dbclosc
Le LOSC à Surprise sur prise
Diffusée en France à partir de la fin des années 1980, l’émission de caméras cachées Surprise sur prise a connu un grand succès d’audience. Parmi ses séquences les plus drôles figure probablement le piège dont a été victime Thierry Lhermitte, en 1992. Avec le concours involontaire du LOSC.
Initialement diffusée au Québec, sous la houlette de son producteur Marcel Béliveau, l’émission Surprise sur prise est l’une des premières à piéger des célébrités à la télévision, en caméra cachée, en sollicitant l’aide de proches des « victimes ». Importée en France en 1989, elle a laissé quelques séquences mémorables.
En 1992, c’est au tour de Thierry Lhermitte d’être piégé. Chez des amis, l’acteur regarde un match de foot quand un autre de ses amis, Richard, l’appelle pour lui indiquer de bien observer son écran durant la mi-temps, au moment d’un spectacle de samba organisé sur la pelouse. Première surprise, l’une des « danseuses » est Richard. La séquence est déjà drôle, mais les rebondissements s’enchaînent et montent en intensité : depuis le Parc, l’ami chevelu annonce par téléphone des événements à venir : le téléspectateur attend donc avec délectation, en compagnie de Lhermitte, les futurs rebondissements. Et on n’est pas déçus : entrée sur le terrain de l’ami, qui parvient même à mettre un but, et envahissement nu en mode « striker ». Lhermitte, entre gêne et hilarité, apprécie le moment.
Mais là n’est pas l’essentiel. En prêtant l’oreille aux commentaires de Thierry Roland et Jean-Michel Larqué, ainsi qu’en regardant les quelques séquences du match qui apparaissent, on comprend que le match que regarde Thierry Lhermitte oppose le PSG au LOSC. Et plus précisément, il s’agit du PSG/LOSC de la saison 1991/1992 : les noms et les visages qui apparaissent à l’écran ne laissent guère de doute, qu’il s’agisse des statistiques relatives aux joueurs, aux plans sur Nadon, Frandsen, ou à la présence de Jacques Santini sur le banc. Et idem côté PSG, avec Le Guen, Jorge, ou Bats dans les buts.
Ce PSG/LOSC est un match de championnat de la 10e journée, avancé au vendredi 13 septembre 1991, entre les deux meilleurs défenses du championnat jusqu’alors ; Lille n’a encaissé que 5 buts, et Paris 4. Avant ce match, le LOSC est 7e (11 points) et Paris 4e (12 points). La suite sera plus médiocre pour les Dogues, qui terminent le championnat à la 13e place.
Voici la composition lilloise : Nadon ; Leclercq, Friis-Hansen, Nielsen, Rollain (Da Silva, 29e) ; Buisine, Fiard, Fichaux, Frandsen (Brisson, 20e) ; Assadourian, Sauvaget. L’arbitrage est assuré par le sympathique M. Pauchard, qui n’a pas jugé bon d’expulser des Parisiens alors que deux des nôtres sortent blessés avant la demi-heure de jeu. À l’arrivée, Paris s’impose 2-0 avec des buts de Daniel Bravo (41e) et de Christian Pérez (89e).
La séquence appelle quelques observations :
_En ce temps-là, Canal + était l’unique diffuseur du championnat de France, à raison d’un match par journée, le vendredi ou le dimanche. Or, on voit apparaître le logo de la chaîne TF1, et on entend son duo de commentateurs. Il faut bien sûr y voir la complicité de la chaîne, qui diffuse Surprise sur prise, et a intérêt à placer ses vedettes. Pour les habitués, on remarque assez facilement que Roland et Larqué parlent différemment que lors d’un vrai direct.
_Il y a quelques problèmes dans l’ordre des événements : si la séquence démarre à la mi-temps avec la samba, on ne devrait pas voir ensuite la blessure de Frandsen, qui survient à la 20e minute (à 6’26), ni le ralenti du premier but, inscrit à la 41e. Pour ce dernier cas, on comprend que ça arrive après la samba, pour monter en intensité dans le gag ; en revanche, s’agissant de Frandsen, on ne sait pas si c’est dû à un montage initial (ce qui est retransmis à Lhermitte via un magnétoscope on suppose) ou au montage de l’émission elle-même. On peut en tout cas en conclure que Thierry Lhermitte n’est pas un féru de football, sinon il aurait rapidement remarqué l’anomalie d’une retransmission d’un match de championnat sur TF1.
_La séquence du but marqué résulte évidemment d’un montage grossier, mais qui passe bien car il ne dure qu’un instant. Cependant, le début de l’action, avec le centre en retrait de Le Guen depuis le côté gauche, et le ralenti depuis la cage de Nadon montrent de vrais morceaux du premier but parisien de Daniel Bravo.
_Aucune des scènes réalisées avec l’ami de Lhermitte n’ont été jouées durant le match : on voit qu’il n’apparaît que sur des plans resserrés.
_Bien entendu, il n’est pas venu à l’esprit des concepteurs du gag que le copain ait pu enfiler une tunique du LOSC et marquer contre le PSG.
En utilisant comme support d’une caméra cachée un match perdu, la France entière a ri aux dépens du LOSC : nouvelle preuve, s’il en était besoin, du complot.
Le Guen/Nielsen, septembre 1991
Quand le complot masque un autre complot
Drôle de complot. Mais, après tout, n’est-ce pas l’arbre qui cache la forêt complotiste ? Quand on y regarde bien, ce que l’on vient de raconter est loin de résumer l’ampleur du complot qui fût alors ourdi à l’occasion de ce PSG-Lille. En fait, notre hypothèse, c’est qu’il s’agissait du versant rigolo du complot, le caractère humoristique visant à détourner notre regard d’un complot encore plus large.
Resituons le contexte. La saison précédente, Lille avait terminé 6ème, échouant à deux points de sa première qualification européenne. La performance est alors remarquable, puisque les Dogues avaient perdu en deux marchés d’été des joueurs de la trempe de Pelé, Vandenbergh, Desmet, Lama, Angloma et Galtier sans qu’aucun nom ronflant ne vienne les remplacer. C’est donc avec de faibles moyens que le LOSC réussit alors ce tour de force.
La saison 1991/1992 repart alors sur les mêmes bases, c’est à dire sur celles d’une équipe fort solide à défaut d’être géniale. Avant le match de Paris, Lille a les yeux tournés vers le haut du classement : en 9 matches, a gagné 4 fois, fait 3 nuls, et perdu 2 matches. Et encore, précisons-le, ces deux défaites l’ont été, sur la plus petite des marges (1-0) sur les terrains des ogres marseillais et monégasques. Et le LOSC a aussi déjà joué à Nantes, alors 3ème, où il s’était imposé (1-2).
On l’a dit, la suite fût ensuite un peu moins belle, même si les Dogues sont encore 9èmes à trois journées de la fin avant de lâcher l’affaire quand l’Europe ne semble plus accessible. Ce complot, coach Jacques Santini nous le résume en fin de saison. « J’aime bien quand l’équipe lilloise occupe le terrain avec justesse, quand elle change brutalement de rythme, quand elle ne perd pas le ballon. Mais le LOSC n’a pas les moyens de crier trop fort. Pourtant, nous aurions pu nous rapprocher de la 5ème ou 6ème place si nous n’avions pas perdu trois titulaires le même soir, en septembre dernier à Paris : Frandsen, notre homme de bas, Fichaux et Rollain. C’était trop pour nous. »
Ce soir-là, le complot ne se limita pas à une blague, mais fût complété par la perte de trois cadres sous le coup des bouchers parisiens, Antoine Kombouré en tête (on comprend alors mieux pourquoi il entraîna ensuite le voisin du Racing) : deux mois pour Rollain, trois pour Frandsen et quatre pour Fichaux. Et encore, dans le cas de Rollain, il faut aussi remarquer qu’il rechuta deux matches après son retour, pour une nouvelle absence de deux mois.
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