Posté le 6 septembre 2017 - par dbclosc
Toni-truant Verel. Sur la carrière d’Engin Verel
A l’été 1981, arrive en provenance d’Anderlecht un milieu de terrain turc nommé Engin Verel. « Angine » et « Vairelles ». Une maladie et un Lensois. Redondance diraient les plus hargneux d’entre nous. Et, voudrions-nous ajouter, on se demande comment l’officier d’état civil a pu accepter ça sans broncher. Surtout le nom de famille. Bref, Engin Verel n’avait a priori pas grand chose pour plaire aux Lillois, même si, quant au nom de famille, on ne le savait pas encore en 1981 quand il signe. Ce qui est d’autant plus vicelard.
Un talent précoce
Né le 15 septembre 1956 à Istanbul, Engin Verel se révèle précocement au football. Formé dans le petit club de Davutpasa, Engin est repéré par le grand Galatasaray avec lequel il signe en 1973. Il débute très rapidement avec l’équipe première au milieu de terrain club turc et attire le regard du sélectionneur national. Il n’a encore que 17 ans et 7 mois quand il dispute son premier match en sélection à l’occasion d’une belle défaite des Turcs en Bulgarie (5-1) le 8 mai 1974 lors de la Coupe des Balkans. Encore titulaire avec Galatasaray la saison suivante, Engin l’est également avec la sélection alors qu’il n’a encore que 18 ans. Deuxième du championnat à l’issue de la saison 1974/1975, il est transféré pendant l’été au Fenerbahçe, champion au cours des deux dernières saisons.
Le 1er octobre 1975, il fait ses débuts européens en coupe des champions contre Benfica, pour une victoire de prestige (1-0) et Engin marque le seul but du match. Victoire toutefois légèrement insuffisante après les petits pépins rencontrés au match aller (défaite 7-0). Cette saison-là, le Fener abandonnera le titre à Trabzonspor, comme la saison qui allait suivre, réaffirmant le statut de Poulidor du football turc d’Engin Verel. Il rompt avec ce statut la saison suivante, reprenant le titre à Trabzonspor, puis, remportant la coupe de Turquie la saison suivante. Arrive alors l’été 1979, Engin a alors 22 ans et déjà 23 sélections au milieu de terrain de l’équipe de Turquie.
Engin Verel, lors de sa participation au stage « Aldo Maccione » (1976)
Le plus souvent milieu de terrain, Engin joue parfois attaquant. C’est par exemple le cas le 1er août 1976, lors de la victoire des siens en coupe d’Istanbul contre Adnaspor, rencontre au cours de laquelle il marque quatre buts, dont trois en 14 minutes à la manière de notre bon vieux Matt Moussilou contre Istres une petite trentaine d’années plus tard. D’ailleurs, ses talents de buteur, Engin n’en a fait la démonstration que de manière relativement épisodique et, caractéristique particulière, de manière beaucoup plus nette en coupe qu’en championnat. Avec Galatasaray et Fenerbahçe, Verel ne marque ainsi que 17 buts en 146 matches de première division turque entre 1973 et 1979. Ses statistiques offensives sont en revanche nettement plus coquettes dans les autres compétitions : 14 matches et 6 buts en coupe d’Istanbul et 33 matches et 12 buts en coupe de Turquie.
Les difficiles débuts à l’étranger
Selon les médias turcs, c’est en 1979 que Engin signe son premier contrat à l’étranger. C’est de toute évidence une erreur, puisque la Turquie c’est à l’étranger et qu’il joue déjà en pro depuis plusieurs années. Bref, il signe au Herta Berlin, 14ème de la Bundesliga la saison précédente connaissant le deuxième championnat étranger de sa carrière. Las, son club est relégué à l’issue de la saison 1979/1980, échouant à la 16ème place, à égalité de points avec le Bayer Uerdingen mais avec un goal-average déficitaire de deux buts. On ne peut pas dire que cette descente doive grand chose aux mauvaises performances d’Engin : titulaire au milieu de terrain pour les deux premiers matches, il disparaît ensuite de l’équipe première, se contentant ensuite de trois nouvelles entrées en jeu, d’ailleurs semble-t-il peu convaincantes.
La seule preuve existante qu’Engin a été joueur du Herta
La saison suivante, Verel part se refaire une santé à Anderlecht. Raté. Aucune titularisation, et quatre petites entrées en jeu, dont une en coupe de Belgique. Le Turc est prié de faire ses valises : dès le mois d’avril 1981, il trouve preneur et signe à Lille. Quand il arrive chez les Dogues, pour la saison 1981/1982, on ne sait pas trop quoi penser du joueur. En deux saisons en Allemagne puis en Belgique, le joueur n’a cumulé que 9 rencontres en club toutes compétitions confondues, et n’a plus été titularisé depuis le mois d’août 1979 si ce n’est une fois, en sélection, le 22 décembre 1979. De lui, on ne connaît finalement que la réputation d’un joueur volontiers râleur et se prenant parfois des cartons inutiles. Il bénéficie cependant aussi d’une certaine polyvalence, pas inutile dans une équipe qui vient de perdre son trio d’attaque Cabral-Pleimelding-Olarevic et qui ne dispose plus de véritables attaquant si ce n’est Pascal Françoise.
Trouve Engin sur cette photo
Des débuts tonitruants
Depuis les démêlés judiciaires de Tony Vairelles, on connaît « Tony Truand Vairelles ». Bien avant, au LOSC, on avait connu « tonitruant Verel ». Dès la première journée de championnat, Engin verel est titulaire en attaque, aux côtés de Jean-Paul Delemer et du nouveau venu en provenance de Lens, Pascal Françoise. D’entrée, Engin semble montrer qu’il est une bonne pioche, ouvrant son compteur but contre Brest (1-1). Dès la deuxième journée, il montre également que sa réputation de joueur se prenant des cartons n’est pas usurpée, se faisant déjà expulser bêtement.
Verel s’affirme cependant rapidement comme un pion essentiel de l’attaque lilloise. Pour son retour lors de la 5ème journée, il plante un doublé contre Nice (5-0). Il marque encore à Nantes, pour une victoire de prestige (2-1), encore une fois contre Montpellier (6-1). En 6 rencontres disputées, il a déjà inscrit 5 buts et a joué un rôle fondamental dans le beau début de championnat du LOSC, 3ème après neuf journées. Lille prendra même virtuellement la tête du championnat la journée suivante quand Muslin ouvre le score contre Saint-Étienne (10ème minute). Verel marquera encore, mais ne pourra éviter la défaite lilloise (3-4). Il confirme encore qu’il est un redoutable buteur en marquant à Bastia son 7ème but en 8 matches. Ensuite muet contre Tours, Verel se fait cette fois passeur décisif. Verel poursuit à un rythme effréné auquel on ne l’attendait pas et arrive à la trêve hivernale avec un total de 11 buts en 19 rencontres.
Engin Verel, contribuant activement au fort taux de moustaches du LOSC en 1982/1983
Et puis finalement, non, ça va
La suite sera en revanche nettement moins glorieuse pour l’attaquant turc. Après la trêve, Verel ne marquera plus que 2 petits buts au sein d’une équipe en souffrance offensivement : sur les 13 rencontres qu’il débute, Lille reste ainsi muet à 7 reprises.
Sa seconde saison lilloise est particulièrement dégueulasse. Engin marque certes assez vite (pour la 5ème journée, contre Lens, se faisant ensuite expulser suite à son deuxième carton jaune du match, le quatrième en quatre rencontres depuis le début du championnat), mais devra ensuite longuement patienter avant d’inscrire son second : 7 mois et 26 jours pour être précis quand il « sauve l’honneur » lillois en fin de match lors d’une mémorable branlée (4-1). Entre deux, il aura enchaîné 18 rencontres sans inscrire le moindre but. Verel finira alors sa saison avec 2 buts et 3 passes décisives.
A l’issue de la saison, Verel retournera là où il a connu ses plus belles heures de gloire, à Fenerbahçe où il jouera trois nouvelles saisons. Parti comme titulaire, il retrouve rapidement le banc des remplaçants. Engin n’a cependant pas tout perdu de ses bonnes habitudes lilloises : par exemple, contre Kocaelispor, il entre en jeu à la 63ème minute, se prend un premier carton à la 74ème puis un second à la 80ème. Bravo, on n’aurait pas fait mieux.
Engin remportera un dernier titre de champion de Turquie, en 1985, puis prend sa retraite footballistique l’été suivant. Il n’a pas encore tout à fait trente ans.
D’Engin Verel, à Lille on retiendra un nom qui, avec le recul, ne nous paraît pas très sympathique. On retiendra aussi un attaquant, tantôt buteur, tantôt créateur qui aura un temps tiré le LOSC vers le haut. On retiendra aussi un sacré caractère et des performances globales au final très mitigées. On retiendra, enfin, une photo de lui, devenue plus ou moins célèbre, quand complètement à poil dans le vestiaire lillois, il serre la main à Pierre Mauroy, alors premier ministre.
»Je vous félicite pour votre quéquette Monsieur Verel ! »
Laisser un commentaire
Vous pouvez vous exprimer.
0 commentaire
Nous aimerions connaître la vôtre!