Posté le 10 octobre 2018 - par dbclosc
Coupe de France 1996 : le LOSC éliminé par un gros coup de mistral
Au cours de la très médiocre saison 1995-1996, Lille réussit un beau parcours en coupe de France en atteignant les quarts de finale, une performance qu’il n’avait pas réalisée depuis 1988. Mais au stade Vélodrome, le LOSC va tomber sur un os : le vent s’associe au complot et donne le pénalty vainqueur aux Marseillais.
Alors que le LOSC, à ses origines, avait basé sa prestigieuse réputation notamment par ses performances en coupe de France (5 finales consécutives de 1945 à 1949, dont 3 remportées en 1946, 1947 et 1948, puis deux nouvelles victoires en 1953 et en 1955), on ne peut pas dire que, par la suite, la coupe nationale ait été une solide alliée des Dogues. Après cette époque dorée, le LOSC n’a pas pu faire mieux que deux demies-finales, en 1983 (éliminé par Nantes, 0-1 ; 1-1), puis en 1985, notamment après le coup d’éclat réalisé contre Bordeaux en 1/16e (1-3 ; 5-1), où Lille est malheureusement éliminé par Monaco (0-2 ; 1-0). Après 1955, on ne compte que 8 présences en quarts de finale : les deux années précédemment évoquées, bien entendu – puisque si on est arrivés en demies, c’est qu’on est passés par les quarts – et les années 1957, 1960, 1979, 1981, 1987 et 1988. À l’orée de la saison 1995-1996, voilà donc 7 ans que les Dogues n’ont pas fait mieux qu’un quart de finale. Entre-temps, ils ont même pris l’habitude de se faire sortir par des équipes de divisions inférieures (Valenciennes en 1992, Rouen en 1993, Rennes en 1994)
Une bonne saison de merde
Et difficile d’imaginer que le LOSC rompra cette année avec cette triste tradition. La saison est pénible : après 9 journées, le LOSC ne comptait que 2 petits points, et il a fallu attendre la venue du Havre lors de la 10e journée pour signer un premier succès (2-0). En août, Jean Fernandez a été remplacé par Jean-Michel Cavalli ; Frank Pingel, annoncé comme le buteur que le LOSC attendait, est reparti au Danemark en payant un supplément pour excès de poids ; Amara Simba ne marque pas ; Philippe Périlleux n’a plus son éclat d’antan ; le joker Becanovic, malgré des débuts en fanfare, est en méforme ; et Joël Germain, Thierry Rabat et Geza Mesoly sont sur la pente descendante. Seules satisfactions : Patrick Collot et Jean-Marie Aubry (qui a remplacé dans les buts un Nadon, lui aussi défaillant). Après que l’automne a permis au LOSC de sortir provisoirement de la zone de relégation grâce à une solidité retrouvée, l’équipe poursuit laborieusement soit au-dessus soit en-dessous de la ligne de flotaison, et on se dit qu’on serait bien avisés de se faire éliminer au plus vite des coupes nationales pour se concentrer sur le maintien en D1. Mais comme on fait tout à l’envers, c’est finalement en coupe de France qu’on va trouver quelques satisfactions.
Nadon impeccable
Le 13 janvier 1996, le LOSC entre en lice et se rend chez l’ogre Saint-Leu, dans le Val d’Oise, où le club local joue en National. Vraiment, attention : ces gars-là sont parvenus à éliminer le magnifique champion nantais la saison précédente, en 16e de finale (1-1, puis 4-2 aux tirs aux buts), avant de se faire sortir par Strasbourg au tour suivant. Mais l’obstacle est franchi sans trop de problème, grâce à un pénalty obtenu et transformé par Patrick Collot (71e).
Pour le tour suivant, en 16e de finale, le LOSC se rend à Nancy, en tête du championnat de D2. Jean-Michel Cavalli, qui avait écarté Jean-Claude Nadon en septembre après un match calamiteux à Gueugnon, redonne du temps de jeu l’ex-capitaine du LOSC. Et bien lui en prend, puisque Nadon réussit une performance de haute volée au stade Marcel Picot, en repoussant tous les assauts nancéiens, et notamment un pénalty de Stéphane Capiaux en première période, que la douce voix d’Olivier Hamoir, sur Fréquence Nord, va vous faire revivre dans cet extrait audio :
À l’arrivée, Nadon préserve le 0-0 et deux nouveaux arrêts durant les tirs aux buts permettent au LOSC de passer (4-2). Sa performance est telle que la Voix du Nord s’interroge : à trois jours d’un derby au stade Bollaert, Jean-Michel Cavalli ne serait-il pas avisé de redonner sa chance en championnat à celui qui compte plus de 200 matches en D1 avec le LOSC ? L’intéressé garde la tête froide, et pas seulement parce que la température était négative à Nancy : « on n’arrête pas de me demander si je pense avoir marqué des points dans l’esprit de l’entraîneur avant le derby. Je réponds tout simplement que je n’ai fait que mon métier, le mieux possible. Depuis que je ne suis plus titulaire, je n’ai jamais baissé les bras. J’ai gardé le moral et j’ai continué à travailler le plus possible aux entraînements. Beaucoup d’autres joueurs professionnels ont vécu cette situation. C’est la loi de la compétition (…) Sur le pénalty de Capiaux puis sur le tir au but de Correa, je savais qu’il ne fallait pas anticiper trop rapidement. J’avais travaillé à l’entraînement, c’est tout ». Finalement, Jean-Marie Aubry gardera le but lillois à Bollaert, d’où le LOSC repart avec un bon point (1-1). Mais on retrouve Jean-Claude Nadon au tour suivant, en huitièmes, contre Monaco.
Jean-Claude Nadon et Jean-Pierre Lauricella au stade Marcel Picot
Le 24 février 1996, tandis que Roger Hitoto fête ses 27 ans, Grimonprez-Jooris accueille Monaco, pour les huitièmes de finale. Quelques semaines auparavant, il y avait eu la même confrontation en championnat, et le match s’était achevé sur un 0-0 confus, avec l’expulsion précoce de Patrick Collot qui a confondu terrain de foot et ring de boxe, puis celle, incompréhensible, de Sonny Anderson en deuxième mi-temps : après avoir tiré un pénalty sur le poteau, Jean-Marie Aubry s’est jeté sur lui, a simulé avoir pris un coup de tête du Brésilien, et l’arbitre est tombé dans le panneau. « C’est vrai qu’il y a peut-être un peu de provocation de ma part », commente sobrement notre gardien.
Sans Leclercq suspendu, Périlleux blessé, Abed non qualifié, et Boutoille ménagé en vue du match de championnat contre Montpellier 3 jours après, le LOSC va avoir fort à faire. Mais il ouvre le score très rapidement par Antoine Sibierski, reprenant une frappe de Simba repoussé par Porato : « je vois Amara qui accélère dans l’axe. Je décale un peu sur la gauche et me démarque. Il préfère y aller seul, alors que je m’attendais à une passe. Je crois qu’il a bien fait, puisque le gardien a relâché le ballon, et comme j’étais à l’affût… ». En début de seconde période, Enzo Scifo égalise, un but contesté par les Lillois : pour Philippe Lévenard, « le but égalisateur nous a semblé entaché d’une main. Cela nous a donné un sentiment d’injustice ». Les équipes ne parviennent pas à départager et filent en prolongation : une bien mauvaise affaire a priori. Durant la dernière demi-heure, Rabat et Cygan souffrent de crampes. Les tirs aux buts vont désigner le vainqueur.
Alors que le public lillois chante « Le LOSC à Paris ! », les tireurs Dogues ne tremblent pas : Sibierski, Dindeleux, Becanovic, Rabat et Collot transforment tous leurs tirs. Côté monégasque, le dernier tireur approche. C’est Sonny Anderson, et comme il rate tous ses pénos contre Lille, Jean-Claude Nadon plonge sur sa gauche et offre la qualification aux Lillois. Le président Lecomte est ravi : « je suis très content pour le public et pour le club. Bien sûr, le championnat reste le plus important, mais désormais, nous n’avons qu’une envie, aller le plus loin possible. Au départ, quand j’ai entendu les gens qui scandaient « Lille à Paris », ça m’a fait sourire. Mais maintenant, je l’espère fortement ». Bah, au pire, Lille sera à Paris le 27 avril pour le championnat.
En quarts à Marseille
Nous nous rendons donc à Marseille en quarts, mais aussi en avion. Marseille est alors en D2 suite à sa rétrogradation administrative deux ans plus tôt, et va probablement retrouver l’élite dans quelques semaines. Événement : le match est retransmis sur TF1 en fin d’après-midi, et commenté par le duo Larqué/Mathoux, avec Marianne Mako comme journaliste de terrain. Du coup, Arnaud Duncker, qui n’est pas du déplacement, peut regarder le match chez lui en toute sérénité.
TF1 place nos joueurs n’importe comment, donc on rectifie : Nadon est de nouveau aligné dans les buts. En l’absence de Frédéric Dindeleux, Philippe Lévenard joue à un poste inhabituel, dans l’axe, pour que Rabat reste en sentinelle devant la défense, tandis que Pascal Cygan est à l’époque arrière gauche. Devant, Becanovic, rarement titulaire en championnat, est aligné d’entrée. On note la présence de quelques barbes dans l’effectif, tradition de coupe qui a tendance à disparaître : Carrez, Lévenard et Cavalli présentent une petite barbichette du meilleur effet.
Voici la présentation du match, et quelques images du parcours des deux équipes dans la compétition avant qu’elles ne se retrouvent. Vous y verrez donc les buts de Collot à Saint-Leu, le tir au but victorieux de Dindeleux à Nancy, le but de Sibierski contre Monaco et l’arrêt décisif de Jean-Claude Nadon.
Pour être tout à fait honnête, on n’assiste pas à un grand match. Lille est en manque cruel de maîtrise technique et collective, tandis que l’OM s’en remet au jeu de tête de son grand attaquant irlandais Tony Cascarino, reconverti plus tard en chroniqueur pour le Times, et qui s’en était violemment pris à Claude Puel après le Lille/Manchester de 2007. Marseille a notamment deux grosses occasions, par Bernard Ferrer qui se heurte à un grand Nadon à bout portant (23e), puis par Cascarino qui reprend une tête de Hernandez, mais Leclercq sauve sur la ligne (33e). Entre ces deux actions, on vous a calé une petite interview de Christophe Galtier qui, visionnaire depuis le banc marseillais, évoque l’importance du vent. Quel beau gosse, regardez-moi ça. En fin de période, le LOSC pointe son nez avec une frappe lointaine de Sibierski suite à un raid de Becanovic, mais Alonzo détourne sur sa gauche (38e).
Désolés, on n’a pas pris le pack Gold.
À la pause, le score est de 0-0, et Jean-Claude Nadon est sur la lancée de ses belles performances lors des tours précédents. Du coup, Marianne Mako va l’interroger, et JCN répond systématiquement par « ah vous savez… ». Oui, nous le savons. De Marseille.
Mistral perdant
À la mi-temps, Boutoille, blessé, est remplacé par Simba. Croyez-le ou non, Amara se crée quelques occasions d’emblée, mais ne parvient pas à scorer, ça c’est plus attendu. Dans un match toujours aussi insipide, mais qui laisse toutefois des espoirs au LOSC, le complot va subitement se manifester à la 81e minute.
Libbra vous de le croire : il souffle un vent mauvais sur le Vélodrome. Suite à un hors-jeu lillois, Marquet envoie un long ballon dans le camp lillois vers Cascarino, à la lutte avec Pascal Cygan. Gêné par le grand Pascal, Cascarino se chie dessus et frappe à côté du ballon, qui file en 6 mètres. Mais l’arbitre, Pascal Garibian, siffle pénalty ! Tout le monde est pris de court, à commencer par Jean-Michel Cavalli qui, persuadé qu’il était impossible de siffler sur une action pareille, poursuit tranquillement son interview avec Marianne Mako. Du côté de TF1, on ne se mouille pas mais on comprend que les commentateurs sont également stupéfaits, comme Jean-Michel Larqué qui, quand Hervé Mathoux lui demande son avis sur l’action, déclare : « ne me mettez pas dans l’embarras ! Je dirais tout simplement que M. Garibian a décidé qu’il y avait pénalty (…) à TF1, on a un grand respect des arbitres ». Bernard Ferrer, qui avait fait un essai à Lille lors de l’été 1994 (il avait même marqué en amical contre Dunkerque) mais qui a finalement préféré rejoindre le sud, transforme le pénalty en force. Marseille mène 1-0.
Le LOSC se réveille, et pousse en fin de match, avec une redoutable attaque Collot-Simba-Becanovic, puis Machado. À la dernière seconde, Frédéric Machado a une occasion en or pour égaliser, mais il frappe à côté, une action qui méritait bien d’être classée n°1 de notre top dégueulasse.
Lille échoue donc en quarts après un match assez terne. En championnat, quelques semaines plus tard, l’équipe se sauve miraculeusement. Un an après, le LOSC tient sa revanche, en éliminant Marseille de la coupe de France en 32e. Et il faudra attendre 2006, 10 ans après, pour retrouver le LOSC en quarts de finale de coupe de France.
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