Posté le 22 janvier 2019 - par dbclosc
1949 : la douche froide
Le 29 mai 1949, le Stade de Reims et le LOSC s’affrontent à distance. Séparés d’un point au classement, les deux clubs se déplacent dans le Sud à l’occasion de la dernière journée. L’objectif est le même : repartir champions. Et alors que le trophée prend la direction du Nord, le vent tourne et le titre arrive chez les Champenois. Retour sur un complot météorologique.
Été 1948. Après quelques semaines de repos, le LOSC commence une nouvelle saison avec l’objectif de conquérir le titre de champion qui vient de lui échapper une deuxième fois de suite. Longtemps en tête, les hommes d’André Cheuva ont flanché en avril : la défaite à Strasbourg (2-0) est suivie d’un nul à domicile contre Rennes (1-1) et d’une branlée mémorable à Saint-Etienne (8-3). Le LOSC a beau retrouver la victoire lors des deux derniers matchs, il est trop tard : Marseille en a profité et est sacré champion.
L’intersaison est donc consacrée à donner un nouvel élan à un effectif dont l’harmonie s’est détériorée. Strappe est ainsi la principale arrivée et renforce une attaque pléthorique, également composée de Vandooren, Baratte, Tempowski, Lechantre, Carré et Walter. Dans l’autre sens, Roeder et Garcia partent trouver du temps de jeu au Havre, alors que Bigot devient recruteur du club.
À mi-saison, le LOSC est 4e à 1 point du trio de tête (Racing, Marseille, Reims). Il est ainsi plus proche du leader que la saison passée (alors 3 points de retard), mais en retard sur son temps de passage (22 points contre 24 à la mi-saison 1947/1948). Il présente un bilan honorable face aux concurrents directs (défaite contre le Racing, nul contre Marseille, victoire à Reims) mais va devoir accélérer le rythme s’il souhaite dépasser ces équipes. Quatre journées plus tard, le LOSC se retrouve en tête. Avec 7 points pris (la victoire est à 2 points) dont une victoire contre Reims et une autre 8-0 contre Colmar, les Dogues passent devant leurs concurrents : Marseille (2 victoires, 1 nul, 1 défaite), le Racing (1 victoire, 2 nuls, 1 défaite) et Reims (1 victoire, 3 défaites) marquent le pas.

Assis : Walter, Vandooren, Baratte, Strappe, Lechantre, Bigot (adjoint).
Debout : Dubreucq, Witkowski, Nuevo, Prévost, Jadrejack, Carré, Cheuva (entraîneur), Germain (gardien remplaçant).
Si le LOSC semble inaccessible quand il est dans un bon jour (l’équipe marque au moins 4 buts à 13 reprises cette saison-là), il connaît aussi quelques ennuyeux coups d’arrêt. Entre la 22e et la 30e journée, les larges victoires 5-0 contre Metz et Montpellier, 1-6 à Cannes, 6-2 contre Roubaix et 1-4 à Toulouse sont gâchées par des défaites face au Red Star, à Marseille, au Racing mais surtout face à Strasbourg, au fond du classement, pour le dernier match disputé au Stade Jules-Lemaire de Fives. Sur cette période de 9 journées, Lille perd 8 points sur Reims, qui vient de réaliser 10 victoires de rang et se retrouve seul en tête avec 4 points d’avance.
Mais en deux journées, l’écart tombe brusquement à un point : le 17 avril, alors que la France entière ne célèbre pas les 40 ans d’Alain Poher, Reims concède le nul à domicile face à Sochaux. Menés 0-2 très rapidement, les Rémois profitent de la blessure du gardien sochalien à la 28’. Forcés d’aligner le défenseur central de formation Louis Pirroni dans les buts, les Lionceaux laissent filer la victoire à la 85’. Dans le même temps, Lille écrase Nancy 4-0 grâce à Baratte (19’, 87’), Lechantre (24’) et Strappe (36’). Deux semaines plus tard, Reims tombe à Rennes. Les Rémois sont apparus fatigués. Et pour cause : l’équipe de France vient de disputer deux matchs (les 23 et 27 avril) face aux Pays-Bas (défaite 4-1) et à l’Ecosse (défaite 2-0 devant 125 000 personnes). Sur les 15 joueurs sélectionnés, 6 étaient Rémois : Marche, Prouff, Joncquet, Batteux, Flamion, Sinibaldi. Lors de cette même trêve internationale, Lille fournissait Baratte à l’équipe A (il marqua d’ailleurs lors du premier match), Strappe et Vincent à l’équipe de France B et allait gagner 1-3 à Sochaux en inscrivant tous ses buts dans la dernière demi-heure (Carré, Lechantre, Baratte). La prestation lilloise aurait subjugué le public sochalien, qui n’avait encore jamais vu cette saison « une équipe aussi complète, aussi dynamique et puissante que celle des Nordistes » (La Voix du Nord, mai 1949).
L’avant-dernière journée mène au statu quo : Reims s’impose 6-1 face à Nice. Lille s’impose 3-0 face à Rennes. Au terme d’un excellent match face à une équipe qui avait battu Reims quelques semaines auparavant, le LOSC inscrit son 100e but de la saison. C’est la première fois qu’une équipe de Première Division y parvient. Depuis, Reims (1960), le RC Paris (1960), le PSG (2016, 2018) et Monaco (2017) ont réédité cette performance. La 34e et dernière journée de la saison s’avère donc décisive pour l’obtention du titre. Les deux prétendants n’ont jamais été séparés de plus de 4 points au classement depuis le début de saison.
La situation est simple : Reims ne doit pas gagner à Sète et Lille doit forcément faire mieux que Reims. A égalité de points, le LOSC sera champion grâce à son goal average.
Le voyage se fait en deux étapes : les joueurs partent le mercredi, à 4 jours du match. Un arrêt est effectué à Valence, où un match amical contre une sélection Drôme-Ardèche est disputé le jeudi. Le LOSC s’impose 7-0. Puis, le LOSC reprend la route le vendredi et atteint Nice à 48h du coup d’envoi.
Le dimanche à 15h, le coup d’envoi est donné. 6ème au classement, Nice est un adversaire coriace. Les Aiglons l’ont prouvé en Coupe, ayant poussé le LOSC en prolongations lors des quarts de finale (2-1 le 20 mars 1949). Le LOSC ne trouve pas la faille et rentre au vestiaire sur le score de 0-0. Et à Sète ? Le match n’a toujours pas commencé. Sur la commune héraultaise, le bel azur se met en rage et les pompiers arrivent en renfort pour évacuer l’eau du Stade Bisset.
Le match commence enfin alors que plus loin sur la côte méditerranéenne, Niçois et Lillois refont leur apparition. Et à la 57’, Lille trouve enfin le chemin des filets grâce à Marius Walter ! Virtuellement champion, le LOSC ne l’est plus quand Alphonse Rolland égalise à la 76’. Les Dogues poussent et à la 86’, Baratte est à la réception d’un centre de Walter pour le but de la victoire ! Le LOSC a fait le travail malgré une excellente équipe niçoise. Le gardien niçois, Favre, a semble-t-il bien aidé les Lillois sur les deux buts. Mais où en est-on à Sète ? La mi-temps a été sifflée. Sète mène 1-0, grâce à un but inscrit après 22 secondes de jeu. Reims doit donc marquer deux fois s’il souhaite être champion. Mais les conditions de jeu sont déplorables et s’apparentent à du flotteball.
A la reprise, l’arbitre constate que la pluie a repris. Vingt minutes plus tard, alors que Sète mène 2-1, il juge le terrain impraticable et arrête le match. Le match sera rejoué.
Alors que les Lillois sont fêtés à leur retour de Nice le 31 mai (les supporters organisent un vin d’honneur au siège du club et invitent les joueurs), rendez-vous est pris au mercredi 1er juin. Sous un grand soleil, Sète et Nice repartent à 0-0. En l’état, Lille est alors toujours champion. Mais Reims dispose d’une nouvelle arme : l’international Flamion, absent trois jours plus tôt pour cause de blessure, est de retour parmi les titulaires. Il ne faut que 3mn aux Champenois pour ouvrir le score. Les locaux égalisent à la Sètième minute, mais Petitfils inscrit le 2e but rémois avant la mi-temps. Malgré une cage rémoise (oh hisse) acculée, les Sétois, privés en 2e mi-temps de leur meilleur élément offensif sorti sur blessure, ne prennent plus le Stade à défaut. Reims est champion de France pour la première fois de son histoire.
À Lille, cette nouvelle place de dauphin est accueillie avec déception. Si le championnat n’était pas un objectif affiché en début de saison, il était la dernière occasion de remporter un trophée. En effet, trois semaines plus tôt, le LOSC s’était incliné contre le Racing Paris (5-2) lors de sa cinquième finale de Coupe de France consécutive.
Pour terminer la saison sur une note plus positive, le LOSC organise un match amical contre les nouveaux champions de France. Devant le sélectionneur de l’équipe de France, les Lillois s’imposent 5-3. Mais cette consolation n’efface pas totalement la déception. Le LOSC vient de vivre une saison record : meilleure attaque (102 buts) et meilleure défense (40 buts), il possède aussi dans son effectif le meilleur buteur de la saison (Baratte, 26 buts) et place deux autres avants dans le top 10 de ce classement : Strappe est 6e (20 buts) et Walter 9e (17 buts). Mais au terme de cette saison 1948-1949, aucun trophée ne rejoint la vitrine du club.
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