Posté le 13 mai 2019 - par dbclosc
Pickeu au LOSC : Olive étonne
Auréolé d’une belle réputation de buteur à Amiens, pour qui il vient de marquer 15, 13 puis 17 buts sur les 3 dernières saisons, Olivier Pickeu est lors de l’intersaison 1998 la recrue-phare du LOSC, qui doit permettre de retrouver la D1. Mais l’année va se révéler bien plus compliquée que ce que les promesses d’avant-saison avaient montré.
11 février 1998 : à Grimonprez-Jooris, le LOSC, 3e avec 6 points d’avance sur le 4e, reçoit Amiens, 10e. Alors que le LOSC domine globalement la partie et qu’il a même de bonnes chances en cas de victoire de doubler Nancy, 2e, il entame la seconde période de façon offensive avec la présence simultanée sur le terrain de Patrick Collot, Djezon Boutoille, Stephan Van Der Heyden, Frédéric Machado et Samuel Lobé. Mais il se fait surprendre en contre par une tête croisée de l’Amiénois Olivier Pickeu, dans le petit filet de Jean-Marie Aubry. Pickeu inscrit là son 12e but en 1997/1998 ; il en inscrira encore 5 autres pour parvenir à son meilleur total sur une saison : 17 buts. Parmi le lot de défaites à la con qui ont émaillé la saison, celle-ci tient une bonne place : elle inaugure une série de 7 défaites sur les 13 dernières journées, si bien qu’en mai 1998, le LOSC échoue de peu à remonter en D1, un an après l’avoir quittée.
Histoire de conjurer le mauvais sort, le LOSC recrute donc l’un de ses bourreaux, qui semble constituer une excellente recrue pour un club qui vise la D1 : depuis 1994, sur les 4 dernières saisons de D2, Olivier Pickeu a inscrit 53 buts.
Formé au LOSC
Plus qu’une arrivée, c’est un retour : Olivier Pickeu est né à Armentières et a été formé au LOSC, après des débuts au CS Erquighem puis à la Jeunesse Athlétique Armentièroise : « j’ai l’impression de revenir chez moi, confiait-il à la Voix des Sports en juillet 1998. J’ai commencé à jouer au football ici. Le LOSC, c’est mon club ! C’est une grande fierté pour moi de porter ce maillot ». Sollicité par des clubs de D1 comme Strasbourg, Rennes, Lorient, Sochaux, et plus encore par Nancy, il a privilégié la piste lilloise, à la grande joie de sa mère, Rosiane, à qui il a fait une bonne blague en lui annonçant dans un premier temps qu’il avait signé à Nancy, avant de lui décrocher une larme en lui disant qu’il avait en fait signé au LOSC et qu’il était de retour dans la région. Il aurait même ajouté que la devise du club lorrain serait alors devenue « Qui s’y frotteu s’y pickeu ».
_Président, voulez-vous que je raconte encore une fois ce que j’ai dit à ma maman ?
_Non c’est inutile, mais je me félicite de recruter un joueur à l’esprit-maison : figurez-vous que mes joueurs m’ont fait croire pendant 6 mois qu’on était en D1 alors que là on est en D2
Si l’on en croit ses paroles, outre ses qualités de buteur, son recrutement relève même d’une stratégie délibérée de la direction de jouer sur la « fibre régionale » : « l’amour du maillot fera la différence. Qu’il y ait beaucoup de joueurs issus du club est, à cet égard, important. Pierre Dréossi et le président cherchaient des joueurs ayant la fibre régionale. En ce qui me concerne, je ressens vraiment plein d’émotions dès que je remets ce maillot ».
En 1986, Olivier a 16 ans et évolue avec les Cadets nationaux du LOSC, dirigés par Charly Samoy. Il est alors promis à la 2e division de district (à l’époque la 3e équipe seniors gravissait les échelons du district Flandres), mais il préfère miser sur une hausse de régime à Vichy pour terminer sa formation à l’INF. En en sortant en 1989, un premier contrat pro l’attend, mais pas à Lille… « Charly Samoy avait laissé sa place à Bernard Gardon, qui ne me connaissait pas ». Plusieurs clubs le contactent et, après avoir craqué sur « l’atmosphère un peu britannique » de l’ancien stade de Venoix, l’entraîneur de Caen, Robert Nouzaret, l’appelle pour lui signifier son intérêt pour son profil. Il signe 3 ans à Caen.
Quelques buts en D1…
Au cours de cette première saison professionnelle en Normandie, il entre en jeu à 8 reprises (pour la première fois, c’est à Toulon, en août 1989) sans avoir l’occasion de se mettre en valeur. Il est alors prêté en D3 en 1990/1991, à Tours, où il inscrit en championnat 6 buts. Il participe aussi au beau parcours tourangeau en coupe (élimination en 1/8ème) en marquant le 2ème but contre le Red Star en 1/32ème (2-1) et le seul but du match contre la D1 toulousaine en 1/16ème. Sur l’année civile 1990, il obtient même 5 sélections en équipe de France Espoirs.
De retour à Caen lors de l’intersaison 1991, sa carrière semble cette fois décoller : il inscrit son premier but en D1 lors de sa 3e apparition, contre Marseille en août 1991 (1-3). Cette première réalisation lui permet d’obtenir sa première titularisation en D1 la semaine suivante, à Lyon, où il marque encore (2-2). Ce bon début de saison le propulse titulaire pendant quelques semaines, reléguant Xavier Gravelaine sur le banc. Il en profite pour inscrire 2 nouveaux buts avant la fin de l’été, puis reste calé à ce total de 4 buts jusqu’à la fin de la saison (plus un en coupe de France), alternant titularisations et entrées en jeu, mais contribuant à la belle saison caennaise (5e) qui emmène le club en coupe d’Europe. En 1992, il est transféré à Montpellier, où il emmène Sophie, rencontrée à Caen et qu’il a épousée à Deauville.
Pickeu débute en trombe à Montpellier : il remporte d’abord l’ancienne version de la coupe de la Ligue durant l’été 1992 contre Angers en finale (3-1), en inscrivant le troisième but. En championnat, il inscrit un doublé dès la première journée contre Caen, marque à Toulouse lors de la deuxième journée, puis contre… Lille, lors de la troisième journée. S’il ne tient pas ce rythme toute la saison (ce qui l’aurait amené à un total de 50 buts), il inscrit très honorablement 8 buts en D1 lors de cette saison 1992-1993. Il est transféré à Toulouse, toujours en D1, où il réalise une saison blanche en 1993-1994. Il ne joue qu’un match sur deux et, quand il joue, c’est seulement une fois sur deux comme titulaire. Comme souvent, le TFC est relégué en D2.
Toulouse 1993/1994
Explosion en D2
Titulaire cette fois trois fois sur quatre sous la direction de Rolland Courbis, Olivier Pickeu inscrit 8 buts pour sa première saison en D2 : pas suffisant pour le garder. Il prend alors la direction d’Amiens où, dès sa première saison avec comme coach l’ancien lillois Arnaud Dos Santos, il se révèle être un redoutable buteur. En février 1996, il inscrit un mémorable triplé au Red Star pour une victoire 4-1, dont 2 buts marqués sur des volées lointaines en pleine lucarne. 15 buts pour sa première saison en Picardie, 13 pour sa deuxième, et donc 17 pour sa troisième, dont ce fameux but à Lille, au cœur d’une période qui le voit marquer 5 buts en 10 jours, puisque le match à Grimonprez s’intercale entre deux doublés inscrits contre Martigues et Beauvais, pour deux victoires 2-1. Revient donc à Lille un joueur formé au LOSC, qui a ensuite fait ses premières armes en D1, avant de se révéler comme buteur « made in D2 », au même titre que d’autres noms auxquels les auditeurs des multiplex radio des années 1990 sont familiarisés : Jean-Pierre Orts, Yannick Le Saux, Tony Cascarino, Samuel Michel, Réginald Ray, Guilherme Mauricio ou… Samuel Lobé, l’avant-centre du LOSC, qui vient d’achever cette saison 1997/1998 avec 19 buts marqués, et avec qui il va falloir cohabiter quelques temps.
Une attaque qui pèse lourd
En fait, sur le papier, Samuel Lobé a de meilleurs statistiques qu’Olivier Pickeu. Outre son total de buts sur la saison écoulée, on évoquait plus haut les 53 buts d’Olive en D2 entre 1994 et 1998 : sur la même période, Lobé en a inscrit 68… auxquels il faut ajouter 22 buts inscrits en D3 en 1996-1997 avec Créteil ! Si l’on ajoute à Lobé et ses 19 buts, Pickeu et ses 17 buts, le recrutement de Valois et ses 11 buts, et la présence de Peyrelade (7) et de Boutoille (10), l’attaque de Lille pèse 64 buts sur la saison 1997/1998. C’est 2 buts de plus que ce que le LOSC a marqué lors de l’exercice écoulé, et on n’inclut même pas la présence de joueurs peu connus pour leur maladresse devant le but, comme Renou ou Collot.
Mais voilà aussi un premier problème : cette attaque pèse lourd, trop lourd, et il n’y a manifestement pas de place pour tout le monde. Les matches amicaux le montrent : Samuel Lobé n’a plus sa place dans le 11 titulaire, et le club aimerait s’en séparer. Or, malgré quelques touches en Angleterre, Lobé ne trouve pas de porte de sortie, et se traîne dans l’effectif. Mais pourquoi donc se séparer d’un tel joueur, pour le remplacer par un autre aux stats manifestement moins spectaculaires ? Il faut bien le dire : en dépit de ses buts, Samuel Lobé n’a jamais convaincu à la pointe de l’attaque du LOSC. 19 buts oui, mais 6 pénaltys et, à l’image de l’équipe, une grande difficulté à marquer à l’extérieur, parce qu’il a du mal à faire la différence autrement qu’en marquant des « buts d’avant-centre », c’est-à-dire laids, de près, quand l’équipe joue haut. Pour ainsi dire, Lobé ne participe pas vraiment au jeu. En outre, son manque de mobilité agace. Accessoirement, Lobé a déjà 31 ans, Pickeu en a 3 de moins. Alors, quoi de mieux qu’un attaquant qui court – et, de surcroît, chevelu, donnant une impression de vitesse – pour le remplacer ? Dans sa présentation de l’effectif du LOSC à la veille de la reprise, La Voix du Nord semble faire une gaffe, en attribuant le n°9 à Olivier Pickeu, tandis que Samuel Lobé, titulaire du n°9 en 97/98, se voit accorder le n°10, entre parenthèses bizarrement. Finalement, Pickeu débutera la saison avec le n°10, mais on a bien compris que le n°9 était à prendre.
Pickeu-Viseux
12 ans après son départ, Olivier Pickeu est donc de retour au LOSC. Il est la deuxième recrue du club après la signature de Frédérik Viseux. Les deux hommes, amis, se sont connus à Amiens et ont joué 2 ans ensemble, de 1995 à 1997. Depuis, ils passent régulièrement leurs vacances ensemble et s’appelaient très souvent. Pour Fred, « la signature d’Olivier m’a fait énormément plaisir. Je connais ses qualités de buteur. Nous avons senti au sein du staff lillois une réelle volonté de nous faire signer. Moi, j’ai connu une montée en D1 avec Sochaux, mais je n’y étais pas heureux. J’espère revivre ce moment avec le LOSC et y rester, pour évoluer à l’étage supérieur ».
« Alors Fred, ça t’étonne (de me voir là) ? »
Sportivement, maintenant que toutes les dettes du club ont été effacées depuis le 30 juin, l’objectif est en effet de faire remonter le club, et ainsi éviter de renouveler les erreurs de la saison précédente, avec cette fin de saison en quenouille (c’est pour pas dire en couille), au sujet de laquelle Roger Hitoto nous parlait même d’« erreur professionnelle » : « l’objectif est clair et défini. Il n’est pas insurmontable. J’aimerais tant contribuer à écrire une nouvelle page de l’histoire du club ». Olive a un avis sur ses nouveaux équipiers : « pour les avoir rencontrés, je sais que le groupe avait de la qualité. Non, quand vous avez 6 points d’avance si près du but et que vous échouez, le problème est forcément d’ordre psychologique. C’est une question d’état d’esprit. S’aimer permet de se transcender. C’est ce qui a dû manquer au groupe dans les matches capitaux (…) Je suis agréablement surpris. Les vacances ont fait du bien. Je n’ai pas senti une grosse démobilisation. Je crois surtout que personne n’a envie de répéter les mêmes erreurs et a compris que l’on avait plus de temps à perdre ». Des propos qui corroborent les déclarations des uns et des autres, comme Fabien Leclercq qui, à propos de la dernière saison, évoque de façon lapidaire « trop de divergences ». L’entraîneur Thierry Froger insiste lui aussi sur « l’état d’esprit ». Et il y aura fort à faire, avec la concurrence annoncée de Guingamp, qui a recruté Papin, de Saint-Etienne, Châteauroux ou encore Cannes. En outre, la D2 passe de 22 à 20 clubs : tout le monde s’accorde pour dire que le niveau en sera meilleur ; nous n’avons pas trouvé d’arguments étayant ou infirmant cette croyance.
Quoi qu’il en soit, Lille fait bien partie des favoris pour la montée, et Olivier Pickeu est attendu comme le buteur-vedette. Onze mondial ne s’y trompe pas en le mettant en Une de l’édition régionale ; et la campagne publicitaire du LOSC autour du slogan « Une nouvelle énergie ! » place Pickeu en évidence sur l’une de ses deux affiches.
En amical, Olive détonne
Avec deux nouvelles recrues offensives (lui-même et Jean-Louis Valois) et le maintien des attaquants de la saison précédente (seul Frédéric Machado est parti, prêté à Valence), reste à savoir à quoi va ressembler l’attaque lilloise, où on risque de se bousculer : « la concurrence fait partie du métier. Le tout, c’est de la gérer dans la plus grande intelligence. Je sais qu’on me jugera sur mon efficacité et sur rien d’autre. Aux attaquants, on ne demande pas comment, mais combien ». Si concurrence il y a, elle ne semble pas vraiment concerner Olivier Pickeu, en qui Thierry Froger semble avoir pleine confiance. Dès le premier match amical de la saison contre Courtrai à Linselles le 11 juillet, Pickeu est titularisé, avec Laurent Peyrelade. Et il marque même le premier but lillois de la saison, à la 45e minute. En seconde période, Lobé entre… et inscrit un doublé ! Collot parachève le succès lillois (4-0).
Après un stage de quelques jours à Samoëns, les Lillois jouent un deuxième match amical à Amnéville, contre Metz, vice-champion de France. Devant, Froger a de nouveau choisi la paire Pickeu/Peyrelade. Et à la 39e minute, reprenant un centre de Valois, Pickeu ouvre le score. Rodriguez égalise (55e) avant que Kastendeuch n’offre la victoire, sur pénalty, aux Messins (77e). En seconde période, Pickeu a joué 10 minutes avec Lobé, quand celui-ci a remplacé Peyrelade (64e), avant qu’il ne sorte lui-même pour laisser entrer Boutoille (73e)
Vient ensuite le 22 juillet le Challenge Emile-Olivier qui, pour la première fois, va se jouer en une soirée avec d’abord deux confrontations en 45 minutes (Lille/Valenciennes et Wasquehal/Boulogne-sur-mer), puis, soit un match de classement sur le même format, soit une finale en 2 fois 25 minutes. Lens, fraîchement champion, décline avec dédain l’invitation, préférant se mesurer à des adversaires « étrangers ». Contre Valenciennes, l’ouverture du score est signée… Pickeu (16e), avant que Cuvier n’égalise (30e). Finalement, les Dogues s’imposent aux tirs aux buts (7-6). En finale, Lille bat Boulogne 1-0 et, pour la première fois, Olivier Pickeu ne marque pas : le seul buteur du match est son compère d’attaque Djezon Boutoille (33e). Le LOSC conserve donc son titre et, jusqu’à preuve du contraire, il en est toujours le détenteur.
Enfin, les deux derniers matches amicaux confirment la côte du duo Pickeu/Peyrelade, encore aligné d’entrée contre l’Antwerp (3-1, buts de Boutoille entré à la mi-temps 56e, Pickeu d’une volée 72e, Coulibaly 83e, alors que le LOSC est en infériorité numérique après l’expulsion de Collot en première période), puis au Mans (2-2 après avoir été mené 0-2, Coulibaly 65e et Boutoille 89e sur une passe de Pickeu qui « a pesé » selon La Voix des Sports).
335 minutes en amical, 4 buts et une passe décisive, c’est très encourageant pour Olive qui, surtout, semble avoir la garantie d’une place de titulaire, soit aux côtés de Boutoille, soit aux côtés de Peyrelade, avec le soutien de Valois et Coulibaly, les plus testés en position de milieux offensifs. Mais sur le plan collectif, c’est plus compliqué. Froger souligne déjà (encore) que son équipe a deux visages, et l’effectif tarde à se modeler. Si Pickeu, Viseux, Koot et Valois ont intégré le groupe assez tôt, Camara n’est apparu que contre l’Antwerp après l’essai infructueux d’un arrière gauche espagnol ; ce n’est également qu’après ce match que Carrez, sur lequel Froger ne compte pas, est prêté à Nice, et que Jean-Marie Aubry, qui a un bon de sortie, rejoint Monaco. Bref, ça traîne, sans compter que Lobé est bon pour continuer à se chercher une porte de sortie qu’il ne trouve pas. Ah, et donc on n’a plus de gardien : durant la préparation, la doublure d’Aubry était Grégory Legrand. On parle de Valencony, Petereyns, Boumnijel, et même de… Nadon. Finalement, à quelques heures de la reprise du championnat, Grégory Wimbée débarque. Bref, on a encore le sentiment que ça bricole.
En championnat, Olivier atone
Le championnat offre d’emblée au LOSC un gros morceau : Guingamp, qui nous arrive tout droit de D1. Comme prévu, Pickeu est titulaire, assisté de Boutoille et soutenu par Valois et Coulibaly. Dans la tribune Secondes, une affiche « Pickeugoal », signe des espoirs placés en Olivier et de sa réputation digne d’un Batigol (toutes proportions gardées), 5 fois buteur avec l’Argentine lors de la coupe du monde en France.
Ce qui était moins prévu, c’est l’hostilité du public à l’égard de son équipe, signe que l’échec de la saison précédente n’a pas été digéré. L’entraîneur est déjà sifflé et le virage des DVE est vide en première période. Seule une affiche « Phénomène D2 » est visible. En seconde période, le retour des supporters s’accompagne d’une nouvelle affiche : « Phénomène D1 ». Sur le terrain, ce n’est pas brillant : Lille est mené 0-1 à la pause, et Olivier Pickeu est très discret, et il est même remplacé à la 69e par Laurent Peyrelade… qui égalise immédiatement (70e). Mais Lille s’incline finalement (1-2) et démarre bien mal sa saison. À Niort (0-0) puis contre Caen (0-0), inutile de préciser qu’il n’a pas davantage marqué, ni à Wasquehal, en dépit de la première vicoire du LOSC (1-0). Contre Cannes, pour la 5e journée, la défiance du public vis-à-vis de son équipe est maximale. Le LOSC s’incline encore (0-2), et Pickeu est remplacé de façon précoce (59e), tandis que Lobé, de retour, joue tout le match. La Voix du Nord n’est pas tendre avec l’attaquant lillois : « à l’image d’une équipe lilloise bien faible, Olivier Pickeu ne pesa guère sur la rencontre, ne réussissant que très rarement à aller au bout de ses actions. Il va falloir réagir ». Enfin, à Beauvais, pour la dernière de Froger, le principal fait d’armes de Pickeu est de prendre un jaune à la 1ère minute, mais il ne marque toujours pas. Lille a encore perdu, et Froger est viré : « je savais qu’il y aurait des difficultés, du fait du passé mouvementé de cette équipe. Pourtant, les matches, on les attaque pied au plancher. Seulement, on n’a pas de réussite. On avait fait une bonne préparation. Ce qui est arrivé à Thierry Froger me désole, quand on voit le travail qui a été accompli. Malheureusement, il a fait les frais de notre mauvais départ ».
Son prénom, son numéro 10, sa coiffure, son poste, la couleur de son maillot… Olivier Pickeu a beaucoup de points communs avec Olivier Atton, le serial buteur de la série Olive et Tom, mais pour le moment c’est Olivier atone. Donnez-nous encore un T !
RT pour Olivier atone, FAV pour Olivier Atton
Olivier tâtone
Merci pour le « T », mais il n’est pas encore bien placé. L’arrivée de Vahid Halilhodzic, un ancien avant-centre, va-t-elle être bénéfique pour l’attaque de Lille, qui n’a inscrit que 2 buts, et pour Olivier Pickeu en particulier ? On sait que Vahid a beaucoup parlé à son arrivée, consacrant 40 minutes à chaque ligne de son équipe. Pickeu parle au sujet de l’arrivée du nouvel entraîneur de « bouleversement, dans les méthodes et le discours ». La première impression à son égard est positive : « Halilhodzic, c’est quelqu’un. Son palmarès parle pour lui. Quand j’étais gamin, c’était une référence. On pouvait difficilement trouver mieux que lui pour savoir ce que ressent un attaquant qui ne marque pas. Je suis à l’écoute de tout ce qu’il peut m’apporter, pour en prendre le maximum. C’est à toute m’équipe d’emmagasiner ce vécu, de sen servir et de s’imprégner de l’état d’esprit qu’il dégage. Une partie du dernier championnat est morte avec le changement d’entraîneur. Il est important d’enterrer cette grosse déception. Il faut être fort mentalement. C’est ensemble qu’on marquera ou qu’on ne prendra pas de but. Je continue de travailler. Je suis très fier d’être revenu ici. J’en avais très envie, pour relever le défi ». Pour la première d’Halilhodzic contre Le Mans, le résultat est peu satisfaisant mais la manière est encourageante, puisque les Dogues ont remonté 2 buts en fin de match (3-3). Vahid a opté pour une attaque Lobé/Pickeu, pas beaucoup plus satisfaisante, puisque c’est surtout l’entrée de Peyrelade à la place de Lobé à 15 minutes de la fin qui a transcendé les Lillois. Un point positif cependant : sur l’égalisation de Koot à 1-1, c’est Pickeu qui se détend au premier poteau pour dévier le centre de Patrick Collot.
Lors du match suivant, à Troyes, Pickeu est remplaçant pour la première fois de la saison. Lobé est aussi sur le banc. Olive remplace Peyrelade à la 70e, mais Troyes inscrit le seul but du match à la 77e…
Nîmes, la délivrance : Olive décolle
Jusqu’alors, on peut penser qu’Olivier Pickeu a appelé son épouse relativement tard après les matches. Sophie Pickeu précise : « je n’écoute jamais la radio, ça me crispe trop. Je suis avertie parfois par des amis quand Olivier marque un but. Ma principale référence reste l’heure. Olivier m’appelle toujours après un match. S’il téléphone entre 22h et 22h05, c’est que tout s’est bien passé. S’il est plus tard, généralement c’est mauvais signe ». Le 26 septembre 1998, Olivier est aligné avec Samuel Lobé contre Nîmes. Sa famille est présente. Sophie Pickeu : « quand Olivier a un peu la pression, il préfère que je reste à la maison. En revanche, quand tout va bien, je vais le voir jouer. Dire que je suis stressée est un doux euphémisme. Comme il est attaquant, il faut absolument marquer. Et quand c’est le poteau, là c’est terrible ! ». Et devant ses deux frères et sa sœur, Olive trouve enfin la faille. Lancé par Collot, il se présente seul face à Karwat (qu’elle préfère), et frappe en force sur le gardien, qui repousse dans ses pieds. Cette fois, le but est vide et le ballon termine au fond des filets. C’était laborieux mais c’est dedans. On sent tout le soulagement dans sa célébration : « si je dois me souvenir d’un but, je crois que ce sera de celui-là. Quand ça ne va pas, on peut se laisser aller, mais ce n’est pas mon genre. J’ai bossé, en me disant que c’était obligatoire que ça revienne ». à la mi-temps, Peyrelade remplace Lobé et Lolo signe un doublé: Lille s’impose 3-0 sous la pluie.
Dans la foulée, il signe un doublé au Red Star, et le LOSC enchaîne un deuxième succès consécutif (3-2). La Voix des Sports évoque le « réveil d’un buteur », tandis que l’entraîneur du Red Star souligne que « quel que soit le maillot qu’il porte, Pickeu nous fait toujours très mal ». Lille signe même une troisième victoire de suite, contre Gueugnon (1-0). Le LOSC s’est correctement replacé en milieu de tableau.
Arrive ensuite Saint-Etienne, le leader, à Grimonprez. Le LOSC ne résiste pas, malgré un but de Lobé 10 minutes après son entrée en jeu (1-2, 65e), son dernier sous le maillot lillois. Lors du match suivant à Nice, Lobé remplace Pickeu à la 87e, avant de quitter le club pour Troyes. De quoi soulager Olivier ?
Lors de la 15e journée, Pickeu, avec le n°9 laissé vacant par Lobé, donne la victoire au LOSC à Valence (2-1), en se jetant après une frappe contrée de Valois, avant de marquer à Amiens contre son ancien club (3-1), puis contre Châteauroux, un but à écouter ci-dessous.
Mine de rien, il vient d’inscrire 6 buts en 9 matches. Avec un collectif retrouvé fin novembre-début décembre, le LOSC n’est plus qu’à un point de la 3e place. À la trêve, le LOSC est 6e à 4 points du podium.
Ce résumé original de France 3 ne vous montre pas le troisième but lillois, signé Boutoille
Olivier Pickeu n’est pas là lors de la reprise début 1999. Blessé, il manque tous les matches du mois de janvier. On en conclut qu’il l’une des nombreuses victimes du « stage Vahid » de janvier dont nous a parlé Grégory Wimbée, un stage très éprouvant physiquement qui a causé pas mal de dégâts. Il revient en entrant d’abord en jeu à 3 reprises, sans marquer, à un moment où Laurent Peyrelade commence à enchaîner les buts. Après la 29e journée et une victoire à Gueugnon (1-0), Lille est de nouveau au pied du podium, à 3 points de Sedan. La 30e journée offre un match au sommet : un déplacement chez le leader stéphanois : Pickeu n’entre même pas en jeu, et Peyrelade marque encore 2 fois, malgré la défaite (2-3). Il retrouve une place de titulaire contre Nice la semaine suivante, et ouvre la marque d’une superbe volée à l’entrée de la surface. La Voix des Sports salue une attaque Peyrelade/Pickeu « libérée et inspirée » qui a illustré « l’esprit de conquête » du LOSC : « Peyrelade-Pickeu, c’était samedi l’expression la plus pure de la générosité dans sa version lilloise. Du travail d’abord, beaucoup de travail en première période, avant cette belle réussite à venir après la pause. Sur cette formidable reprise d’Olivier Pickeu, ponctuée d’un des buts les plus limpides de la saison du LOSC, on ne put s’empêcher de penser aux semaines de galère que le goleador avait traversées. Lui voulait surtout y voir la résultante de l’infaillible soutien de ses équipiers : ‘j’ai travaillé dur dans mon coin pour revenir, mais j’ai eu à mes côtés des gens que je tiens ici à remercier ».
Badaboum, c’est dedans, sous le regard incrédule de Laurent Peyrelade
Eh bien but eh bien d’Olivier eh bien Pickeu
Lille s’impose 2-0, mais est à 6 points du podium, et même à 9 après une nouvelle défaite, à Laval (0-1). Il reste 6 matches. La D1 semble bien loin.
Un intermittent du sprint final
Et pourtant, Lille ne va pas passer loin de l’accession, en profitant de l’écroulement de Troyes et de Sedan. Deux victoires contre Valence (2-1) puis à Ajaccio (2-0), avec Pickeu titulaire, font revenir le LOSC à 5 points de ses 2 concurrents. Malheureusement, le piètre sketch de la défaite contre Amiens avec comme buteur l’avant-centre chevelu se reproduit, avec envahissement de terrain en prime.
On a jusque là surtout parlé de la présence ou de l’absence de Pickeu dans le 11 titulaire, mais on a peu parlé de son jeu : il est temps de le faire, car le résumé vidéo ci-dessus offre un aperçu de quelques séquences intéressantes. Halilhodzic fait avec un effectif qu’il n’a pas choisi ; et on comprend assez vite que Pickeu fait partie de ceux sur lesquels il ne compte pas trop, non pas nécessairement à cause des qualités et caractéristiques d’Olive, mais plutôt en fonction du plan de jeu que Vahid considère comme idéal pour la D2. En l’occurrence, dans un championnat réputé physique, il a un plan : placer un grand attaquant devant qui pèse sur la défense adverse, avec des joueurs qui tournent autour et profitent de ce travail largement invisible. Or, ni Pickeu ni Peyrelade ne présentent ce profil de point d’appui ; ils sont plutôt ceux qui devraient bénéficier de son travail. On peut penser que Lobé présentait davantage ce profil mais, si lent et en fin de carrière, il ne présentait pas de perspective très intéressante. Dès lors, on le voit donc sur le résumé du match d’Amiens, Olivier Pickeu a souvent été employé dans un rôle auquel il n’a pas été habitué, et presque à contre-emploi : on le voit jouer ce rôle de pivot, de l’attaquant qui dévie de la tête, souvent dos au but. Bref, il n’est pas, comme il l’a été à Amiens, le dernier maillon de la chaîne, celui qui conclut, rôle qui échoit davantage à Peyrelade, et cela explique en partie son moindre nombre de réalisations. Car on n’a pas le souvenir que Pickeu ait vendangé devant : il était même très actif et donnait l’impression de se battre, mais il avait peu d’occasions. Contre Nice, les deux attaquants ont alternativement joué l’un et l’autre rôle, et il est intéressant de noter que la volée d’Olivier Pickeu arrive après que le rôle de pivot a été joué par Peyrelade. Lors de la 36e journée à Châteauroux, 20 minutes après son entrée en jeu, Pickeu initie l’attaque à 40 mètres du but adverse et sert Peyrelade qui inscrit le but de la victoire (1-0, 90e). Lolo salue le travail d’Olive : « j’ai vu qu’il allait me mettre une super balle dans l’intervalle. Contre Amiens, nous nous étions créé deux ou trois occasions similaires. Mais à chaque fois, on avait été signalés hors-jeu de 10 centimètres. Ce soir, ça a rigolé ! ».
De nouveau titulaire contre Sedan pour un match à enjeu tant ça n’avance pas devant, Pickeu est à deux orteils de reprendre le centre de Camara, mais le ballon revient sur la tête de Cheyrou, qui marque, et Lille gagne.
Pour le dernier match de la saison, au cours duquel Lille doit impérativement s’imposer en espérant que Troyes ne fasse pas de même à Cannes, Halilhodzic titularise Laurent Peyrelade et… Rudy Giublesi, pour la première fois de la saison. Un dernier message clair de l’entraîneur sur la confiance qu’il accorde à Olivier Pickeu. Mais un affront qui est aussi un énième signe que les intuitions d’Halilhodzic sont justes : sur le premier but lillois, c’est un pressing et une récupération de Giublesi qui permettent aux Lillois de filer au but ; Peyrelade n’a alors plus qu’à effacer le gardien. Olivier entre en fin de match, alors que la vedette lilloise de la soirée est Lolo, auteur d’un doublé. Et le héros de la soirée, c’est… Samuel Lobé, qui a marqué avec Troyes, en route vers la D1.
Deuxième départ
Vahid Halilhodzic peut désormais modeler un effectif à son image. Pour 2,5 MF, le LOSC acquiert Dagui Bakari, l’avant-centre du Mans, qui correspond bien davantage à ses intentions de jeu. Olivier l’a connu à Amiens en 1995/1996. Même s’il a repris l’entraînement avec le LOSC, Olivier ne croise pas Dagui puisque, après avoir repoussé une alléchante offre (financière) du FC Sion, qui est descendu en D2, il va faire le chemin inverse et retrouver Henriette (du Mans) : « avec Lille, le club de mes débuts, on a manqué la remontée de peu. J’ai été blessé une partie de la saison et je n’ai jamais pu revenir à 100%. De plus, Vahid Halilhodzic avait une façon de me diriger que je n’assimilais pas. À partir de là, je n’ai pas hésité, même si j’adore Lille, que je n’ai pas quitté en mauvais termes ». Dans la Sarthe, en deux saisons et 45 matches, Pickeu inscrit 9 buts, sans retrouver là non plus des performances similaires à celles qu’il a eues avec Amiens. Lors de son ultime confrontation contre Lille en mars 2000, il est passeur décisif pour David Charriéras, qui trompe Wimbée, avant que Landrin n’égalise. Il signe en 2001 au Portugal, à Varzim, où il joue (12 matches) et marque (1 but) peu. Il signe une dernière saison professionnelle en deuxième division en 2002-2003, à Reims, où il inscrit un dernier but, son seul de la saison, contre Saint-Etienne.
À l’arrivée, que retenir du passage d’Olivier Pickeu à Lille ? Globalement, une déception, bien sûr, si l’on se réfère au nombre de buts qu’il a marqués (7), un total bien en deçà de ses performances antérieures et donc du niveau auquel il était attendu pour aider le LOSC à retrouver la D1 dès 1999. Néanmoins, on peut trouver à ce manque de réussite bon nombre de facteurs explicatifs qui exonèrent largement le joueur de responsabilités qui lui seraient propres ou seraient directement liés à son niveau : une préparation marquée par de trop longues incertitudes quant à la composition de l’effectif, et notamment un effectif trop peu renouvelé avec la conservation de joueurs qui ont vécu bien trop d’expériences négatives avec le club, avec la descente puis la montée ratée ; la conservation de Lobé, un concurrent direct, alors que tout indiquait qu’il était invité à partir dès l’été 1998 ; le départ de l’entraîneur qui l’a fait venir et l’arrivée d’un autre qui basait son système offensif en demandant des qualités qu’Olive n’avait pas (complètement) ; une blessure en janvier qui lui a fait perdre une petite dynamique qu’il avait réussi à enclencher à l’automne… D’un autre côté, on garde de lui l’image d’un homme attachant, d’un joueur actif et dont le travail, sans nul doute, a largement profité à Laurent Peyrelade, auteur de 15 buts cette saison-là.
Aujourd’hui, et depuis 2006, Olivier Pickeu est directeur sportif du SCO d’Angers, une reconversion qu’il a imaginée très tôt, avec son frère Benoît. Sa longévité à ce poste ne trompe pas : il est unanimement reconnu (et très sollicité) pour le travail qu’il a accompli jusqu’alors. Si Angers n’est pas une équipe spectaculaire, c’est un club qui, avec ses moyens, fait de nécessité vertu pour (sur)vivre en L1, et il le doit en partie au travail d’Olive, à mi-chemin entre le sportif et l’administratif. Si vous avez l’occasion de l’entendre ou de le lire, indépendamment de ce qu’on pense du fond de sa pensée et de la stratégie politico-sportive du SCO, c’est passionnant ; voyez par exemple ces articles récents dans Libération ou Ouest-France.
Ainsi, aujourd’hui, si les joueurs du SCO d’Angrs tiennent la route en L1, c’est sans doute parce qu’Olivier tonne. Car quand Olivier tonne, ils sont toujours en forme.
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15 mai 2019
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gillosc a dit:
Petit « correctif » : Olivier n’a pas débuté au LOSC, mais dans le petit club de sa commune d’origine, le C.S. Erquinghem. J’étais son premier coach et me souviens très bien devoir lui proposer des exercices supplémentaires individualisés et plus difficiles que ses co-équipiers. Je l’ai vite encouragé à signer ensuite à la J.A. Armentières ! Olivier, si tu m’écoutes… De retour avec Angers ce samedi ?
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16 mai 2019
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dbclosc a dit:
Merci pour cette précision, nous allons rectifier dans l’article !
Et on imagine qu’Olivier sera présent en tribunes samedi !