Archiver pour mai 2020
Posté le 31 mai 2020 - par dbclosc
Le LOSC, pionnier des sociétés d’économie mixte
Mai 1980. Au terme d’une saison sans éclat, où le maintien n’a jamais été mis en danger et une place en Coupe d’Europe n’a jamais semblé accessible, le LOSC s’apprête à changer de statut juridique. Pour la première fois en France, un club professionnel sera doté d’une société d’économie mixte.
Au milieu des années 1970, diverses mesures sont engagées afin « d’assagir » le football. Inspirés par la réussite de l’AS Saint-Etienne, parvenue en demi-finale de Coupe d’Europe avec des joueurs majoritairement formés au club, ou contraints d’effectuer des économies en réponse à la situation financière (déjà) inquiétante de certaines équipes, les clubs de première division votent, lors de l’assemblée générale du 28 juin 1975, la limitation du nombre de mutations et d’étrangers.
Ces mesures sont décidées alors que le football professionnel français est devenu une activité économique importante et en essor constant. Sur la saison écoulée, les recettes de billetterie ont ainsi progressé de 30%[1]. Dans le même temps, une autre réalité marque les inégalités et ses déséquilibres : les clubs de première division cumulent 25 millions de francs de passif et le PSG réalise à lui seul 20% des recettes de billetterie de toute la division.
Un an plus tard, gros succès : le déficit s’est aggravé. Bravo les veaux. Plusieurs municipalités ont dû intervenir pour éviter des mises en liquidation judiciaire, notamment via des emprunts destinés à combler tout ou partie des déficits. C’était le cas à Reims, à Valenciennes, ou à Avignon… Et derrière ces soucis, la question du statut juridique des clubs est présente. A-t-on affaire à des associations sans but lucratif ? Des entreprises, à caractère commercial ?
La masse salariale des clubs est en effet la principale cause de ce déficit : elle a plus que doublé en l’espace de 3 ans, passant de 41,4 millions de francs en 1972 à 89,3 millions de francs en 1975[2]. A tel point que l’UNFP a signé, avec les présidents de clubs, le blocage de tous les salaires mensuels supérieurs à 6000 francs en D1 (4000 francs en D2). Des dérogations sont accordées aux équipes justifiant une gestion saine. Dopé par une subvention municipale délirante (près de 3 millions de francs par an), l’OGC Nice est perçu comme un des responsables de la surenchère sur les transferts. L’ambition démesurée de certaines municipalités est ainsi comparable à celles de certains présidents, persuadés que les collectivités supporteront les dépenses excédentaires. Le contrat de 6 ans accordé à Jean-Marc Guillou, trentenaire, symbolise ces dérives.

Jean-Marc Guillou, ici en 2017 après sa signature d’un contrat jusqu’en 2032. Le p’tit malin.
© OGCNISSA.COM
Le monde d’après
Ainsi, la remise du rapport de Philippe Séguin (« Sur certaines difficultés actuelles du football français », février 1973) exposait deux ans plus tôt les maux du football : « Le moment peut sembler venu de mettre un terme à une situation dont les ambiguïtés sont préjudiciables à toutes les parties intéressées ».
Fin 1974, Pierre Mazeaud, secrétaire d’Etat à la Jeunesse et aux Sports, annonce vouloir restreindre les transferts, jugés « scandaleux ». D’autant qu’au-delà de la moralité discutable de vente de joueurs, la régularité de certains transferts (tel celui de Michel Mézy de Nîmes à Lille) était remise en cause. Volonté entendue lors de l’assemblée générale des clubs en juin 1975 : afin de promouvoir la création de centres de formation et d’apprentissage, les transferts seraient effectivement limités à trois joueurs par équipe pour la saison à venir (1975-1976), puis deux pour la suivante (1976-1977). Exception faite des équipes promues qui, pour se renforcer, auront droit à cinq arrivées. Toutefois, il ne semble pas clair si cette mesure est juridiquement applicable. Mais s’il aime se faire taper sur les doigts, il ne serait pas un peu sado, Mazeaud ? Quant aux mesures limitant la présence d’étrangers dans les effectifs, elles se heurtent au traité de Rome et à la libre circulation des travailleurs à l’intérieur des frontières du marché commun[3]. Mais, aux yeux de l’UNFP, de la Fédération et du Groupement, tout semble alors « acceptable » pour sauver le football français et ses salariés. Dans tous les cas, que ces mesures soient imposables ou non, il est a minima conseillé aux clubs de faire preuve de sagesse.
En juin 1976, Pierre Mazeaud détaille les mesures adoptées ou envisagées afin de réduire le déficit du football professionnel. Parmi celles-ci, diverses aides à la formation, mais aussi une baisse du taux de cotisation des accidents de travail (de 35 à 25%), alors que les 600 footballeurs professionnels cumulent 11 000 journées d’arrêt de travail. Les déplacements seront également moins coûteux, puisqu’un voyage en train coûtera 50% de moins aux équipes.

A force de passer son temps au téléphone pour proposer des solutions au football français, le bras de Pierre Mazeaud a cicatrisé sur son visage. Un fâcheux handicap, qui rend son ascension de l’Everest en 1978 d’autant plus incroyable. A ce titre, il a tout notre respect.
Mais la mesure la plus marquante est la possibilité pour les clubs d’adopter un nouveau statut : les clubs de D2 peuvent opter pour le statut promotionnel, afin de réduire les charges. Auxerre et Brest, qui y jouent les premiers rôles, semblent montrer l’efficacité de la formule : les joueurs perçoivent des honoraires, permettant ainsi au club de ne pas verser de charges salariales et sociale. Les abus sont toutefois nombreux, notamment avec l’assurance-chômage, entraînant des sanctions de clubs et des suspensions de joueurs.
Autre formule possible, pour tous les clubs professionnels : les sociétés d’économie mixte sportive locale (SEMSL), version footballistique des sociétés d’économie mixte présente depuis quelques années dans l’immobilier. La SEMSL est une société anonyme dont la majorité de son capital doit être détenu par une association support (le club) et une collectivité locale. Outre l’apport de capitaux extérieurs, le principal avantage de la société d’économie mixte semble résider dans l’élargissement du contrôle de la gestion. Cette nouvelle formule comporte aussi des risques. Devenu minoritaire dans une telle société, le club peut difficilement s’opposer à la promotion de son équipe fanion au détriment, peut-être, des autres sections amateures. À ce risque s’ajoute la menace d’une aliénation plus grande au pouvoir municipal, donc politique, et aux capitaux privés.
Le décret d’application de la loi est soumis au Conseil d’Etat, mais deux clubs, Lille et Tours, seraient déjà prêts à opter pour cette formule.
Les expériences de sociétés d’économie mixte dans le bâtiment incitent pourtant à la prudence : le ralentissement de ce marché a mis en évidence les faiblesses structurelles d’un système qui masquait ses erreurs grâce à la forte croissance (en moyenne 5,3% par an entre 1965 et 1974). La récession de 1975 (-1%) ayant entraîné une chute de la demande, de nombreuses sociétés d’économie mixte, principalement en région parisienne, se sont retrouvés en cessation de paiement en moins de deux ans, plombant les comptes publics qu’ils étaient censés gérer avec plus de rigueur.
A jamais les premiers
Après avoir frôlé la disparition à la fin des années 1960, avec un abandon du professionnalisme durant une saison et la création d’un comité de soutien du football lillois, le LOSC semblait être reparti dans la bonne direction. Soutenu financièrement à un niveau inédit par la municipalité, le LOSC avait obtenu sa promotion en D1 en 1970, à peine un an après avoir été autorisé à rejoindre la D2. Une réussite qui ne tarda pas à prendre l’aspect d’un cadeau empoisonné, tant elle était prématurée. Les titres de champion de D2 obtenus en 1970, 1974 et 1978 montrent aussi bien la facilité pour une ville comme Lille d’avoir un club supérieur à tous ses concurrents de D2 (issus de communes plus modestes) que l’incapacité du LOSC à se stabiliser parmi l’élite avec un projet viable.
Ainsi, le 6 mai 1977 marque la fin de la présidence de Paul-Marie Delannoy. Son départ s’effectue alors que le LOSC a un déficit de 1,7 millions de francs et un passif près de trois fois plus important. Pour éviter le dépôt de bilan, deux membres du comité directeur (Jacques Amyot et Roger Deschodt) font le relais en attendant la prise de fonction de Jacques Dewailly. Ce dernier est le président de l’Association Pour le Développement et la Promotion du LOSC, qui se transformera en SEM dès que les décrets d’application auront été publiés au Journal Officiel. Une fois encore, la ville de Lille soutient l’opération : au-delà des 700 000 francs annuels de subvention et de l’entretien de Grimonprez-Jooris, la municipalité consent un effort de 2 millions de francs et, pour éviter de nouvelles dérives, Pierre Mauroy impose la rigueur. Un tournant.
Fin mai, Mauroy dirige à Nantes la réunion « des maires socialistes des villes intéressées par le football professionnel ». Un consensus se fait sur l’inadaptation de la loi de 1901 pour la gestion des clubs professionnels. Les maires socialistes conviennent que leurs municipalités ne peuvent plus accorder de subventions aux clubs sans qu’elles aient, en contrepartie, un droit de regard sur la gestion, sur les rémunérations, sur les comptes et sur l’orientation de la politique sportive. Mauroy déclare :
« Les collectivités locales ont leur part de responsabilités dans la gestion des clubs professionnels. À partir du moment où elles apportent leur concours financier et qu’elles font ainsi usage des fonds publics. Il est normal qu’elles en contrôlent l’utilisation, qu’elles exigent une moralisation de la situation financière, qu’elles prennent des mesures pour que les clubs ne vivent pas au-dessus de leurs moyens. Dans la société d’économie mixte, la municipalité ne se substitue pas aux dirigeants de club puisqu’elle reste minoritaire, du moins chez nous, à Lille. Nous n’avons pas l’intention de municipaliser le football professionnel, ni de le commercialiser mais seulement de mieux l’intégrer dans nos activités sociales. »
À la demande du maire, les sept joueurs les mieux payés du club étaient remerciés à la fin de la saison. » Je ne suis pas contre les vedettes, mais une région comme le Nord-Pas-de-Calais est capable de fournir de bons joueurs. D’autre part, je suis contre les équipes composées presque exclusivement d’étrangers à la région qui restent une année ou deux avant de s’en retourner, à partir de considérations qui n’ont rien à voir avec le football. «
Après 18 mois de négociations, la SEM est officiellement créée le 1er janvier 1979. La société dispose d’un capital de 1,6 millions de francs, répartis ainsi : 49% à la Ville de Lille, 35% au LOSC et 16% venant du privé « par souscription publique », c’est-à-dire toute personne souhaitant détenir une action. Pionnier français en la matière, le LOSC semble enfin sur la bonne voie : les saisons 1978-1979 et 1979-1980 se terminent avec un bilan équilibré, et le centre de formation alimente l’équipe première : au cours d’une saison sportivement calme, le LOSC titularisait au Parc des Princes cinq joueurs passés par son centre de formation : Zagar, Grumelon, Dréossi, Plancque et Denneulin.
Interrogé sur le poids de cette gestion sur le sportif, le directeur sportif Charly Samoy explique : « en fait, c’est sans doute M. Mauroy qui déterminera ces rapports, estime M. Charles Samoy, le directeur sportif du L.O.S.C. Je ne crois pas que les sociétés d’économie mixte sportive puissent constituer une panacée pour les clubs professionnels. C’est encore sur le terrain que se louera la réussite ou l’échec de cette expérience. Il est toujours difficile de faire des prévisions de gestion dans le domaine sportif. En France, une équipe ne fait recette que si elle obtient des résultats. Or qu’y a-t-il de plus aléatoire qu’un résultat sportif ?[4] »
Samoy (qui n’est pas Niortais) en fait l’expérience un an plus tard. Au terme d’une saison 1980/1981 ratée et dont le maintien peut sembler miraculeux au vu du scénario de la dernière journée[5], le LOSC termine avec 1,2 millions de francs de déficit. En cause, la moyenne de spectateurs, autour des 11 000 spectateurs, quand le budget prévisionnel prévoyait un équilibre autour des 13 000 personnes.
La décennie qui s’annonce allait être morose pour le LOSC. Si la politique de formation porte ses fruits (35 à 40% du temps de jeu est effectué par des joueurs formés au club), les résultats sportifs sont sans intérêt en championnat. Les bons parcours en Coupe (deux demi-finales, trois quarts de finale) ne suffisent pas et le club s’enfonce petit à petit dans une crise économique, dont le club ne sortira qu’à la fin des années 1990 après le travail extraordinaire de Bernard Lecomte.
Par la suite, de nombreux clubs opteront pour la société d’économie mixte. Nice, qui a suivi le LOSC dès 1981, ne s’en sortira pas mieux. Relégué en 1982, le club retrouve la D1 en 1985 et effectue des saison inégales (entre la 6e et la 18e place) jusqu’en 1991 où, criblé de dettes et accusant un déficit de 58 millions de francs, l’OGC Nice est sanctionné d’une relégation administrative.
Délaissées par les clubs de D1 dans les années 1990 au profit des sociétés anonymes à objet sportif (SAOS), les SEMSL continuent d’exister principalement en D2, où environ 40% des clubs ont conservé ce statut. Ce statut disparaît en 1999, alors qu’un seul club de D1 (Guingamp) et quatre de D2 (dont Wasquehal) sont encore concernés.
[1] Le Monde, 9 août 1975
[2] Le Monde, 19 juin 1976
[3] L’arrêt Bosman repose sur le respect du Traité de Rome
[4] Le Monde, 8 mai 1980
[5] 16e avec 2 points d’avance sur le barragiste, le LOSC s’incline 3-2 lors de la dernière journée et voit les 18e et 17e gagner dans le même temps. Fort heureusement, le 15e, à égalité avec le LOSC avec la même différence de buts (mais devant selon le 3e critère de départage), s’incline 2-0 et termine donc derrière le LOSC.
Posté le 28 mai 2020 - par dbclosc
Les sans-gêne
Ils et elles vivent là, paisiblement, sous nos yeux, piétinant en toute impunité des décennies d’histoire et de trophées. Ce sont les inconscient(e)s qui ont choisi de vivre sur les vestiges de ce qui fut jadis la gloire du football nordiste : les anciens stades Jules-Lemaire, Henri-Jooris, et Grimonprez-Jooris.
Accepteriez-vous que des individus vivent sur les terres de vos glorieux ancêtres, qui ont combattu pour le prestige de votre famille, de votre ville ?
Accepteriez-vous que des individus vivant sur ce lieu n’aient aucune pensée pour ce passé, le piétinant chaque jour un peu plus ?
Accepteriez-vous qu’à la place de magnifiques gestes techniques propres au football, s’exercent désormais sur ces lieux de sports de merde comme du jogging ou du kayak, qu’on joue au molkky et que circulent des trottinettes électriques ?
Accepteriez-vous que, jour après jour, le souvenir fasse ainsi place à l’oubli ?
Non, bien sûr.
« Non » : c’est ce que disait déjà de Gaulle en 1940. Le natif de Lille avait des valeurs bien ancrées : non à la barbarie, non à l’occupation. Alors regardons ce qui se passe au quotidien, dans l’indifférence générale : là où le SCF, l’OL, puis le LOSC ont réalisé de grands exploits, sur le terrain même des plus grandes performances qui ont posé les bases de la grandeur et la renommée footballistique de Lille, là où le LOSC a construit sa première épopée en Ligue des champions habitent et passent aujourd’hui celles et ceux qu’il convient d’appeler les sans-gêne. Désinvolture, impolitesse, inculture : aucune excuse n’est valable. Autant nous avons écrit qu’il n’y avait aucun problème à habiter et à se promener en certains endroits marqués du sceau de l’identité footballistique lilloise, comme la rue Jean Baratte à Lambersart ou la rue François Bourbotte à Loison-sous-Lens, autant pratiquer ce qui s’assimile à de la profanation de cimetière mérite pour celles et ceux qui s’y adonnent une malédiction aussi terrible que celle qui frappe les scientifiques qui ont dérangé la momie de Rascar Capac dans Tintin. À ce jour, peu de personnes qui ont osé déranger l’esprit du foot lillois ont présenté des symptômes, mais ces derniers peuvent se réveiller à tout moment.
Revenons à des considérations plus historiques.
L’histoire est connue : le LOSC issu de la fusion entre deux clubs. D’un côté, l’Olympique Lillois ; de l’autre, le Sporting Club Fivois (Éclair Fivois de 1901 à 1910). L’OL, outre de nombreux titres régionaux, a remporté le championnat de France USFSA en 1914, ainsi que le Trophée de France la même année ; il est également le premier champion professionnel du foot français en 1932/1933. Le SCF était aussi de ce premier championnat professionnel, dont il termine deuxième la saison suivante. Jusqu’à la guerre (et même pendant, mais selon des formules bien diverses et avec des résultats dont la « valeur sportive » est à relativiser), les deux clubs de Lille, en dépit de la présence d’autres formations du Nord-Pas-de-Calais en D1, sont les deux grands rivaux du Nord, et offrent des derbies plein de passion. Puis, à la suite de diverses circonstances et, surtout, la croyance selon laquelle « l’union fait la force », les deux rivaux fusionnent en 1944 pour former le Lille Olympique Sporting Club.
S’ouvre alors une période particulière pour le football lillois, dont le club-phare a deux stades ! En effet, le SCF et L’OL jouaient dans leur propre stade. Pour l’OL c’est, initialement, le stade connu sous le nom de terrain de l’avenue de Dunkerque, du fait de sa localisation, inauguré en octobre 1902 pour recevoir les matches des sections football et hockey sur gazon de l’omnisports OL. D’une capacité d’environ 17 000 places, il est renommé stade Victor-Boucquey (du nom d’un ancien vice-président du club) dans l’entre-deux-guerres, puis stade Henri-Jooris peu après la Libération. Le SCF évolue de son côté dans le stade Virnot dès sa création en 1901, du nom de son mécène, l’homme d’affaires Albert Virnot. D’une capacité équivalente à celle du stade de l’OL après des travaux à l’occasion de la professionnalisation en 1932, il est par la suite rebaptisé en 1937 stade Jules Lemaire, d’un nom d’un dirigeant du club décédé cette année là. Ce stade est situé à Mons-en-Baroeul.
Le stade Henri-Jooris dans les années 1960
Dès lors, quand le LOSC est né, pour ne froisser aucun des anciens rivaux désormais unis, il a joué en alternance dans l’un et l’autre stade. Puis à partir de 1947, le LOSC se sédentarise dans le stade de l’ex-OL : Henri-Jooris a en effet été rénové et a ringardisé Jules-Lemaire. Une rénovation forcée due à la chute du toit d’une des tribunes lors de Lille/Lens, en février 1946. Le nouveau stade Henri-Jooris, d’une capacité plus grande, est inauguré le 31 août 1947. À cette occasion, le journaliste de L’Équipe, Jacques de Ryswick, écrit : « d’un stade vétuste, [les dirigeants lillois] ont fait une arène moderne et accueillante ». Du coup, en 1947-1948 puis en 1948-1949, Henri-Jooris s’impose comme la résidence du LOSC : il ne se joue que 4 matches sur ces deux saisons à Jules-Lemaire, qui est démoli à partir de 1959. Henri-Jooris, lui, survivra jusqu’en 1975.
Fives/Sochaux en novembre 1936 au stade Virnot (Le Miroir des Sports) En arrière plan, des façades de l’avenue Cécile : on y revient plus bas
1975, c’est l’année où est inauguré le stade Grimonprez-Jooris. Henri-Jooris était considéré comme trop vétuste (et en bois) et, surtout, la Deûle devait être mise au format « grand gabarit ». Or, vous le constaterez plus bas, la voie fluviale la plus large passe aujourd’hui pile à l’endroit de l’ancien terrain. Grimonprez-Jooris a été construit en un temps record : 10 mois ! Le maire, Pierre Mauroy, annonce en effet la décision de construire un nouveau stade de 25 000 places en 1974, a moment où le LOSC retrouve la D1. Sur le site choisi existait déjà depuis l’entre-deux-guerres une plaine où il était possible de faire du sport ; cette plaine s’est transformée à partir de 1956 en un petit stade d’athlétisme de 1 200 places. La décision de Pierre Mauroy est une surprise car, depuis 1964, un autre stade appelé « Complexe olympique », financé par la communauté urbaine, est programmé dans la Ville nouvelle de Lille-Est (aujourd’hui Villeneuve d’Ascq). Mais les rivalités politiques1 entre Mauroy et Arthur Notebart, président de la communauté urbaine, ont conduit à ce choix qui, à l’époque, n’a fait l’objet « d’aucun recours ni d’aucune contestation publique2 », et qui porte en germe les contestations liées à l’agrandissement de Grimonprez-Jooris. En mai 2004, le LOSC joue son dernier match à Grimonprez-Jooris, avant de migrer pour 8 ans au Stadium Nord.
Grimonprez-Jooris juste avant son inauguration
Où étaient ces stades ?
Le stade Henri-Jooris était à Lille, à la frontière avec Lambersart. Ci-dessous, à gauche, une photo aérienne actuelle ; à droite, une une photo aérienne de 1957, sur lesquelles est entouré en rouge son emplacement. Comme évoqué plus haut, une partie du stade serait aujourd’hui dans l’eau, là où le canal à grand gabarit passe désormais. En outre, un quartier a été construit, composé de l’avenue Léo-Lagrange (qui existait déjà quand le stade était là) et de l’allée Carolus, nouvelle.
En cliquant sur la photo, normalement ça devient plus gros et donc plus lisible
(On fait ça grâce au site de l’IGN)
Le stade Virnot/Jules-Lemaire était à Mons, entrée côté avenue Virnot (aujourd’hui, la station de métro la plus proche, à 5 minutes est Mons Sarts). Le stade était situé entre ce qui est aujourd’hui l’avenue Virnot à l’ouest, la rue Rousseau à l’est, l’avenue Cécile au nord et le boulevard du général Leclerc au sud. Après le dernier match qu’y a joué le LOSC en 1949, le stade en est devenu le terrain d’entraînement, jusqu’en 1954. Détruit en 1959, le stade a laissé place à un nouveau quartier en 1960, traversé par le rue Saint-Exupéry.
Quant au stade Grimonprez-Jooris, il était donc situé sur le « stade » d’athlétisme, qu’on peut apercevoir ici sur une photo de 1957 (on aperçoit aussi un tout petit bout d’Henri-Jooris en bas à gauche) :
Et désormais, suite à la démolition du stade en 2011, l’emplacement, baptisé officiellement « plaine Grimonprez » en 2019, est devenu une plaine de jeux, de pique-nique et de diverses activités.
Que reste-t-il de ces stades ?
Un pèlerinage sur les trois sites vous apportera rapidement la réponse : il ne reste rien. Si : il reste le monument Henri-Jooris sur la plaine Grimonprez, monument qui était lui-même précédemment à proximité du stade Henri-Jooris, on en a parlé ici. Hormis pour le stade Grimonprez-Jooris, dont les alentours verdoyants n’ont guère changé, si on ne les a pas connus du temps où il y avait un stade, il est même difficile d’imaginer quelle a pu être la configuration des lieux.
Alors, c’est tout ?
Non, car on a quand même essayé de s’y retrouver, aidés de quelques photos d’époque.
Il faut faire un effort d’imagination, mais si on reprend la photo d’Henri-Jooris postée plus haut, l’espèce de carrefour qu’on voit en bas est désormais le pont Léon-Jouhaux, sous lequel passe la Deûle. Le petit bras de Deûle qu’on voit en haut à gauche de la photo correspond au quai Géry Legrand, où on trouve aujourd’hui la péniche « L’Eldorado ».
Ci-dessous, Ici, une photo actuelle de l’avenue Léo-Lagrange, avec une rangée de maison qui existait déjà à l’époque d’Henri-Jooris. Le stade était situé derrière, et en tout cas une partie était située sur l’emplacement du bâtiment blanc qu’on aperçoit.
Photo depuis le pont Léon-Jouhaux, où passe désormais le tronçon percé dans les années 1970, où était précédemment le stade :
Concernant le stade Jules-Lemaire, c’est assez facile de repérer précisément l’emplacement du stade car, comme évoqué auparavant, il est parfaitement délimité par quatre rues qui existent toujours. En revanche, une bonne part des habitations aux alentours est postérieure à la destruction du stade. On a toutefois pu faire quelques rapprochements. Partons de cette célèbre photo de l’entrée du stade Virnot/Jules-Lemaire :
Cette entrée est réputée être avenue Virnot. Et en effet, on a pu déterminer qu’on était au croisement avec l’avenue Cécile, grâce aux maisons sur la droite, et notamment la forme de leurs cheminées. On ne voit pas très bien à cause de la végétation mais, hormis équipements plus modernes (fenêtres et volets notamment), on a clairement vu « en vrai » qu’on était à l’endroit où la photo d’époque a été prise.
Il existe une photo prise du bas de la rue :
Idem, ce n’est peut-être par flagrant en photo, mais la forme des maisons (à gauche) ne fait aucun doute. Ce qui est toujours là, ce sont les arbres, probablement les mêmes.
En revanche, sur la partie droite de cette photo (sur la partie gauche pour la photo précédente), on ne sait pas si c’étaient des logements (ça y ressemble) ou la tribune, mais il ne reste rien de cela, on ne trouve que des maisons plus modernes.
On a également sous la main cette photo, prise lors du derby SCF/OL de septembre 1934 :
Les maisons que l’on aperçoit dans le fond sont situées avenue Cécile, et elles restent parfaitement identifiables aujourd’hui (numéros 10 à 18) :
On aperçoit le prolongement (vers la droite) de ces maisons sur cette photo non datée sur laquelle apparaît l’équipe de l’OL :
Et si on reprend la première photo de l’article prise au stade Virnot/Jules-Lemaire (celle de SCF/Sochaux), on y voit de façon plus claire l’ensemble de ces maisons.
Sur ce plan d’ensemble pris en 1960, le stade est déjà détruit. À droite, c’est la rue Sainte -Cécile, avec les 4 maisons vues juste avant, et au fond c’est l’avenue Virnot (avec, plus loin, une cheminée et un gros bâtiment qui ont disparu) :
La grande maison au (presque) bout de l’avenue Cécile est elle aussi rapidement identifiable :
Après avoir ravivé ces souvenirs et vous avoir peut-être foutu le cafard pour une période que vous n’avez même pas connue, voilà de quoi interpeller : est-il normal, acceptable, légitime, de fréquenter ces lieux en faisant comme s’il ne s’y était rien passé, voire – pire – en détournant le regard ?
Peut-on décemment habiter, circuler, pique-niquer ou faire du sport sur la terre de nos exploits sans qu’une malédiction ne s’abatte sur ces inconscient(e)s ?
L’oubli fait partie du complot contre le LOSC. Pour l’éviter, il convient d’interpeller les politiques, et de leur faire brandir la menace de la malédiction. En 2011, Dominique Strauss-Kahn, déjà fragilisé par une autre affaire que nous avons évoquée, était interrogé après avoir fait un « pique-nique » sur la « plaine Grimonprez », où se situait le stade Grimonprez-Jooris. Il avait fait amende honorable en évoquant une « faute morale » :
La thématique des anciens stades du LOSC, l’absence de mémorial, la présence des sans-gêne avait, quelques mois après, été un thème central de la campagne présidentielle en France. Le président-candidat Nicolas Sarkozy avait ainsi déclaré :
Dès lors, dans le sillage de ces deux poids lourds,faisons nôtre la maxime suivante : là où il y a des sans-gêne, il n’y a pas de souvenir.
NB
A voir, ce reportage du LOSC sur Achille et ses souvenirs d’Henri-Jooris :
FC Notes :
1 En gros, ils sont tous deux socialistes, mais pas de la même tendance.
2 Nous citons ici Frédéric Sawicki, « La résistible politisation du football. Le cas de l’affaire du grand stade de Lille-Métropole », Sciences sociales et sport, 2012/1 (N° 5), p. 193-241.
Frédéric Sawicki est chercheur en science politique et par ailleurs membre dans les années 2000 de l’association « Sauvons la Citadelle » qui a beaucoup oeuvré pour que le stade du LOSC soit déplacé. Il en a tiré cet article qu’on peut consulter ici : https://www.cairn.info/revue-sciences-sociales-et-sport-2012-1-page-193.htm
Posté le 22 mai 2020 - par dbclosc
Des adversaires bien frileux
Sur le site du LOSC, nous avons récemment publié une série de 10 articles autour du thème « le jour où… ». Sollicités au début du confinement, nous espérions ainsi faire passer le temps durant une période sans football que nous n’avions pas imaginée aussi longue, en relatant quelques matches du LOSC qui, d’une manière ou d’une autre, ont été arrêtés, interrompus, reportés. Pluie, panne de courant, tempête de neige, envahissement de terrain, attentat, barre transversale cassée, adversaire absent, toit effondré : la liste n’est pas exhaustive et rappelle qu’exceptionnellement, un match de foot reste dépendant d’aléas très divers.
Ces courts articles sont toujours en ligne (les liens sont en bas), et nous ajoutons ici le bref récit de deux reports : deux cas assez similaires puisque leur point de départ est le gel ; le report vient clairement de l’adversaire, qui a plutôt intérêt à ne pas jouer ; le match est reporté vers l’année civile suivante ; et comme il y a une morale, l’affaire se conclut les deux fois par une victoire du LOSC.
Voici donc : Lille/Marseille 1992/1993, et Lens/Lille 2007/2008.
Lille-Marseille, 4 décembre 1992 : l’OM en froid avec le championnat
Le gel est déjà arrivé à Lille en ce début de mois de décembre : le match qui devait opposer les Dogues, en bien mauvaise posture, au leader marseillais est reporté en raison du danger que le terrain constitue pour les joueurs. Décision logique ? Cet intérêt soudain pour la santé des joueurs a le don de fâcher le coach nordiste, Bruno Metsu : « on a déjà joué dans des conditions bien plus difficiles que ça ! À Sochaux, personne ne s’est soucié de savoir s’il y aurait des blessés ou pas. Et ici, comme par magie, on a peur qu’il y en ait ». Et quand on voit la satisfaction des Marseillais, facile de deviner que ce report arrange plus une équipe que l’autre. Mais de quoi ont donc peur les Olympiens ? On les a pourtant vus moins farouches 10 jours avant à Ibrox Park, où ils ont affronté les Glasgow Rangers en Ligue des Champions, sous le déluge… Voilà l’explication : l’OM doit assurer dans sa phase de poule d’une coupe d’Europe à la formule bien différente d’aujourd’hui. Après avoir remporté deux doubles confrontations en 16e puis en 8e, l’OM se retrouve dans une poule de 4 qu’il doit terminer à la première place pour arriver en finale. Et l’élimination prématurée de Barcelone a ouvert une voie royale aux Phocéens pour y accéder, d’autant que le Milan AC se retrouve dans l’autre poule. 5 jours après, l’OM reçoit Bruges, et il serait dommageable que le groupe ne soit pas au complet… C’est en substance ce qu’a fait comprendre Tapie aux arbitres qui, dès leur arrivée à Grimonprez-Jooris, sont entrés dans des palabres entraînant une agitation indescriptible dans les couloirs du stade, sous les yeux ébahis de la presse française et belge.
Dommage pour le LOSC car, du côté de l’OM, Desailly, Deschamps et Casoni auraient été suspendus, et Rudi Völler est blessé. Signe que tout cela est le fruit de drôles de transactions, le président marseillais promet de ne pas les aligner lorsque le match sera rejoué !
L’affiche se joue finalement le 6 janvier. Bien évidemment, les suspendus de décembre sont là… Sur un terrain à peine dégelé et désormais boueux, les Marseillais ne rechignent pas à jouer. Grand bien leur fasse : le LOSC, pourtant relégable, s’impose 2-0 ! Emmenés par un trio d’attaque Assadourian/Nouma/N’Diaye, les Dogues ouvrent la marque par Oumar Dieng, reprenant de volée un coup-franc de Samba N’Diaye (65e), avant de doubler la mise grâce à une tête plongeante d’Eric Assadourian sur un centre de Per Frandsen (75e). Un bon coup de froid sur l’OM, et une petite éclaircie dans une saison lilloise bien morne.
Lens-Lille, 22 décembre 2007 : un problème de (ba)bâche
Le dernier match de l’année civile 2007, qui est aussi le dernier des matches de la phase « Aller » de cette saison 2007/2008, aurait dû être la première manche du derby, mais le gel a rendu la pelouse impraticable et dangereuse pour les joueurs. Pas de chance, le système de soufflerie, ainsi que la toute nouvelle bâche du stade Bollaert, ont dû être inefficaces… voire n’ont pas servi du tout. Les Lensois arguent, comme si c’était une excuse, qu’ils ont bâché alors que le terrain était déjà gelé, ce qui rend le bâchage inefficace. Pas de chance, hein : car si le match avait été joué, Aruna Dindane, le meilleur buteur des Sang & Or, était suspendu ; Yohan Demont et Olivier Monterrubio étaient incertains ; et Vitorino Hilton venait tout juste de reprendre. 4 joueurs absents ou incertains, la tuile… Quant à l’entraîneur lensois, Jean-Pierre Papin, qui joue sa place sur ce match, il préfère passer l’hiver au chaud et garantit qu’« on ne peut même pas enfoncer une clé » dans la pelouse lensoise (rappelons qu’enfoncer une clé dans la pelouse n’est d’aucune utilité pour marquer un but). Gervais Martel fait l’innocent : « que voulez-vous que je vous dise ? C’est toujours emmerdant de devoir reporter un match comme cela. On peut tout de même se satisfaire d’une chose : c’est de ne pas avoir du remettre cette rencontre à deux heures du coup d’envoi. Nous avions déjà eu le tour contre Sedan une fois. Imaginez un peu la catastrophe que cela aurait été si nous avions du le faire à nouveau sur un derby comme celui-là… »
Le président du LOSC, Michel Seydoux, n’est pas dupe : « ce qui m’étonne, c’est qu’on va jouer sur toutes les pelouses européennes sauf à Lens. Nous ne sommes pas bêtes, le climat à Lens est le même qu’à Lille. La bâche chauffante de Bollaert doit avoir quelques problèmes. Mais ce n’est pas pour ça qu’on va déterrer la hache de guerre entre Lille et Lens ». Le match est reporté à 2008.
Pas de chance pour les Lensois, déjà assez secoués par un début de saison marqué par l’échec de Guy Roux : en mars 2008, s’ils ont récupéré leur buteur, ils se trainent désormais dans la zone de relégation, et reçoivent leur voisin la peur au ventre. A l’inverse, les Lillois, qui ont démarré très doucement après un été marqué par de nombreux départs (Keita, Bodmer, Tavlarisids, Chalmé, Odemwingie…), vont bien mieux en 2008. De plus, Frau et Mavuba sont arrivés au mercato hivernal ; ils ne sont toutefois pas qualifiés pour ce match. Après un premier but refusé à Bastos, le Brésilien donne l’avantage au LOSC en ouvrant le score (du droit !) à la 17e minute. En fin de match, Béria ajoute logiquement un second but, après un déboulé d’un Mirallas en feu (83e). Hilton parvient à scorer in extremis, mais les Dogues reviennent victorieux de Bollaert. Ils planteront une autre banderille à leur voisin lors de la 37e journée, en les battant de nouveau 2-1, les expédiant quasiment en L2, comme une revanche de 1997. Pas de quoi réchauffer les relations avec le voisin.
Nos articles sur le site du LOSC :
Episode 1 : Le jour où le toit d’Henri-Jooris s’est effondré, Lille/Lens, février 1946
Episode 2 : Le jour où la barre transversale a cédé, Lille/Nîmes, mai 1959
Episode 3 : Le jour où le courant s’est coupé face au PSG, Lille/PSG, novembre 1985
Episode 4 : Le jour où l’OM n’est pas venu, Lille/Marseille, janvier 1997
Episode 5 : Le jour où LOSC/PSG a été interrompu à cause de la pluie, Lille/PSG, novembre 2000
Episode 6 : Le jour où les débuts européens du LOSC furent reportés, septembre 2001
Episode 7 : Le jour où LOSC/Lorient donna une avalanche de buts, Lille/Lorient, décembre 2010
Episode 8 : Le jour où le 12e homme fête une victoire mythique (envahissement de terrain), Lille/Bordeaux, mars 1985
Episode 9 : Le jour où le LOSC retrouve la D1 (envahissement de terrain), Lille/Valence, mars 2000
Episode 10 : Le jour où les plombs ont sauté, Lille/Caen, novembre 1997
Posté le 15 mai 2020 - par dbclosc
Le complot de DSK
Depuis quelques années, le 14 mai est le prétexte à un rituel festif chez les supportrices et supporters du LOSC : ce jour-là, en 2011, le LOSC remportait sa 6e coupe de France, ajoutant une nouvelle date-anniversaire à son incomparable palmarès. Beaucoup l’ont oublié, mais les heures qui ont suivi cet événement sont malheureusement une nouvelle démonstration du complot contre le LOSC.
Rappelons-nous. Nous sommes en 2011. DSK, dont la côte de popularité est au plus haut, prépare son retour en France. Certains sondages en font même le gagnant de l’élection présidentielle en 2012. Même s’il est favori, le chemin est encore long : il doit notamment, au préalable, écarter ses rivaux du Parti Socialiste, dont Martine Aubry, maire de Lille, qui représente « l’aile gauche » du parti, également pressentie pour briguer la candidature du parti.
14 mai 2011, New York. Il est 15h. À 6000 kilomètres de là, le coup d’envoi de PSG/LOSC, finale de la coupe de France, vient d’être donné (21 heures, heure locale). Dominique Strauss-Kahn allume la télé de sa chambre d’hôtel et regarde le spectacle. Sur le terrain, les Dogues semblent supérieurs. Il voit, régulièrement, les plans du réalisateur sur sa rivale Martine Aubry, qui risque de profiter de l’événement pour gagner en popularité.
89e minute : alors que, rappelons-le, les Lillois sont à 10 (Debuchy est sur la touche après être mal retombé sur le ballon et obtenu un coup-franc) Ludovic Obraniak, transforme un coup-franc excentré et inscrit le seul but de la finale. Quelques minutes plus tard, après que Mathieu Debuchy ait donné l’occasion à Coupet de finir sur une note moins ridicule en tirant son pénalty sur lui, le LOSC conquiert son premier titre majeur depuis 1955. 56 ans d’attente !
Joie dans le virage occupé par les Lillois, sur la place François-Mitterrand à Lille où le match était retransmis, et dans tous les foyers qui supportent les Dogues ; les témoignages de l’époque racontent une nuit de liesse en ville et sur l’autoroute du retour ; nos camarades de l’INSEE, avec qui nous nous sommes associés pour cet article, signalent d’ailleurs un pic de naissance dans la région lilloise en février 2012, soit 9 mois après mai 2011. Comme le résume de façon graveleuse, selon une formule de laquelle nous nous dissocions pour le maintien de la bienséance de ce blog, « ce soir-là, il n’y a pas qu’Obraniak qui l‘a mise au fond ». Voilà de quoi alimenter pendant des jours le retour du LOSC au sommet, pendant que se prépare parallèlement l’obtention du titre.
Hélas, ces scènes d’euphorie ne sont pas du goût de tout le monde. DSK, depuis sa chambre d’hôtel, est mal en point : sa rivale Martine Aubry a gagné le combat médiatique. Le but vient du gaucher Obraniak. Tout ce qui vient de la gauche le rebute : DSK pense que les Français vont confondre victoire du gaucher et victoire des gauchistes. Ce joueur qui vient de la gauche pour tirer à droite, ce ballon qui va de droite à gauche, cette équipe avec un droitier arrière-gauche, tout cela tourmente l’esprit du directeur du FMI, qui y voit un rappel de l’incohérence de son propre parcours politique. DSK a peur : il faut taire l’événement. Non, Lille n’a pas gagné la coupe de France. Non, la ville de Martine Aubry n’a pas gagné. Non, Martine Aubry ne peut représenter le PS à la présidentielle. Que faire ? Occuper l’espace médiatique.
Très vite, la machine complotiste anti-lilloise, furieuse d’avoir relâché son attention, se met en branle, depuis New York. Utilisant ses nombreux appuis, DSK se met en scène et parvient à mobiliser en quelques heures l’attention mondiale. Le but : que personne ne pipe mot de la victoire lilloise.
Alors que beaucoup de supporters des Dogues allument leur téléviseur en se préparant à regarder en boucle le but d’Obraniak, les médias taisent l’événement et font comme s’il n’avait pas existé. En lieu et place, nous avons droit à d’autres images en boucle : celles de l’arrestation, dans la nuit, de Dominique Strauss-Kahn, président du FMI. Journaux, télés, radios : il n’y en a que pour DSK. Oublié, le triomphe LOSC !
Odieux contre-feu ! Abjecte méthode ! Comme si le LOSC devait payer pour avoir gagné. D’aucuns, par le passé, avaient pourtant bien imaginé « DSK » tirant les ficelles de nombreux complots. Par anticapitalisme, par antisémitisme, ou parce que son épouse, journaliste en vue, représentait « le système médiatique ». Aveuglés par leur idéologie, ils se trompaient. Mais en partie seulement : car, vous l’aurez compris, DSK est probablement l’un des chefs du complot contre le LOSC. Le but d’Obraniak « le gaucher », la vision de Martine Aubry, la peur de perdre la présidentielle, ont réveillé ses plus bas instincts. Mais il ne fallait pas pour autant avouer la réalité du complot contre le LOSC, qui est un secret bien gardé. C’est pourquoi DSK, manquant un peu de lucidité, a préféré mettre en scène une autre histoire. À court terme, la stratégie de DSK a donc réussi : le succès du LOSC a été largement minoré ; mais à long terme, il a négligé le fait que sa mise en scène signait sa condamnation politique. Lui-même aveuglé par son idéologie anti-Losciste, confondant football et politique, il a commis « une faute morale », comme il le reconnaîtra plus tard.
Après un temps de silence médiatique qu’on peut a posteriori interpréter comme un temps de décence après ce mauvais coup porté au LOSC, DSK s’est exprimé sur TF1 en septembre 2011. à l’époque, peu de personnes portées à l’investigation s’étaient penchées sur l’hypothèse complotiste anti-LOSC. Bien entendu, nous le répétons : personne n’avouera jamais qu’il y a un complot contre le LOSC. Mais les plus initiés se doutent de quelque chose, et tentent de faire cracher le morceau à l’intéressé. Ainsi, au moment d’évoquer le match PSG/Lille, l’excellente Claire Chazal, connue pour déranger les puissants, tend une perche à DSK, qu’on sent déstabilisé à l’évocation du mot « complot » : il sait que son interlocutrice sait. Reprenant son self-contrôle, il botte en touche.
Accablant.
Ce triste épisode rappelle que, même en cas de moments heureux, le complot nous revient tôt ou tard à la figure.
Cette année 2011 a contrecarré les plans complotistes, qui se sont organisés dans la précipitation ce week-end des 14 et 15 mai. Une semaine plus tard, le titre du LOSC a lui aussi négativement atteint les forces du complot. La vengeance étant un plat qui se mange froid, c’est un an plus tard que le même DSK (et ses réseaux) déclenche « l’affaire du Vitorino Hilton » (un ex-lensois) pour jeter encore le discrédit sur Lille.
Posté le 8 mai 2020 - par dbclosc
Section féminine : de belles promesses
Le championnat 2019/2020 de deuxième division féminine est terminé, après avoir été suspendu depuis 8 semaines. On s’arrêtera donc à la 16e journée, et une troisième place pour les joueuses du LOSC. Si les filles ont pris du retard lors de la phase aller, l’interruption du championnat au moment où elle sont en pleine bourre laisse une pointe de regret.
Après la relégation de l’an dernier et un effectif largement renouvelé au cours de l’intersaison (seules 7 joueuses sont restées, tandis que 8 jeunes ont été « promues », et 5 autres ont été recrutées + Devlech’ en janvier) , le staff y est allé prudemment en début de saison, en ne fixant à aucun moment la montée comme un objectif vital pour le club, priorité étant donnée à la structuration de la section féminine (recherche de partenaires, coordination des équipes de jeunes, possibilités de proposer un accompagnement pour les joueuses). Même si le groupe restait sur le papier talentueux, plusieurs difficultés peuvent expliquer cette prudence :
_Evoluer en deuxième division limite les possibilités d’ajuster un effectif au plus proche des désirs du staff. Les contraintes réglementaires de la FFF limitent en effet le nombre de contrats fédéraux à 5. Pour attirer des joueuses, il faut donc avoir de l’imagination et, précisément, avoir une section structurée qui la rende attirante, et qui rende possible un accompagnement scolaire, universitaire, ou professionnel. La section aurait beau avoir des millions, le problème resterait entier : le cadre juridique ne permettrait pas de le dépenser comme on le voudrait pour garder ou attirer des joueuses (ça c’est pour répondre aux pages d’actu du LOSC pour qui les commentaires sur la section féminine se limitent à « gneugneu Lopez mets des thunes et achète »)
Ainsi, si la formation est en effet une ambition affichée et mise en pratique par la section féminine, on peut considérer qu’elle est une orientation raisonnable qui consiste à faire de nécessité vertu, je crois que c’est la première fois qu’on case cette expression sur le blog.
_La jeunesse du groupe, qui découle de son renouvellement : les 8 précédemment évoquées (Bamenga, Bouquillon, Frémaux, Innebeer, Jacaton, Lefébure, Mouchon, Sawaryn) sont nées entre 2000 et 2003 et n’ont aucune expérience en équipe première à l’aube de la saison.
En raison de blessures, les plus « âgées » (Caroline La Villa, 19921, Laëtitia Chapeh, 1987, et Marlyse Ngo Ndoumbouk, 1985) ont d’ailleurs peu joué et ont en quelque sorte obligé Rachel Saïdi à lancer plus tôt certaines filles ou à les faire jouer davantage que ce qui était prévu : on pense surtout à Noémie Mouchon.
_La deuxième division, qui compte deux poules, a offert un groupe relevé au LOSC, avec notamment la présence du Havre, de Saint-Etienne, de clubs historiques comme Vendenheim et Yzeure, ou encore de Grenoble, même affaibli durant l’été. À ce titre, il peut donc paraître prudent de ne pas crier sur les toits des objectifs qu’un tel niveau rendra difficile d’atteindre, de susciter des attentes inutiles et de mettre une pression inutile sur un jeune effectif.
Photo Allez Lille
Donc quelques contraintes (le premier point est bien entendu partagé par l’ensemble des équipes de la poule, et on peut même considérer que Lille n’est pas le club le moins doté de possibilités d’accompagnement pour les joueuses) qui permettent de relativiser l’idée fréquemment entendue après le mondial l’an dernier selon laquelle le football féminin roulerait désormais sur l’or, ou que le public et les sponsors afflueraient : structurellement, l’équilibre est fragile, et la descente n’a certainement rien arrangé. Prudence donc : il n’empêche, si la possibilité de pointer son nez dans le haut du classement se présentait, évidemment on ne s’en priverait pas. Rachel Saïdi avait annoncé un premier bilan et un ajustement des objectifs à la trêve.
Après ces présentations, une question s’impose :
Alors, sassépassé commeeeeent ?
Terminer 3e à 4 points du 2e (Saint-Etienne) et à 7 points du 1er (Le Havre) pourrait laisser penser qu’il n’y a pas grand-chose à dire et que le LOSC s’arrête là où il aurait probablement terminé si le championnat était allé à son terme. Plus exactement, la FFF a calculé le nombre de points pris par match, ce qui donne : Le Havre 2,5, Saint-Etienne 2,47, et Lille 2,2.
Mais à vrai dire il y a de quoi ressentir un peu de frustration. Revenons donc brièvement sur la trajectoire de l’équipe en championnat.
Le LOSC s’est vite placé dans la première partie de tableau en gagnant ses deux premiers matches à domicile, en faisant preuve de patience (le but vainqueur contre Evian a été marqué à la 79e, et contre Grenoble il a fallu attendre le temps additionnel pour prendre le dessus) et en prenant un point à Yzeure. Puis une défaite à Nancy, pour le premier choc de la saison, suivie d’un nul à domicile contre Vendenheim, ont laissé penser que le LOSC passerait la saison entre les 3e et 5e places, loin derrière Le Havre et Saint-Etienne, qui ont vite pris de l’avance (les Vertes ont gagné leurs 8 premiers matches). Ensuite, 3 victoires consécutives (dont une de prestige au stade Bollaert) avant d’affronter les deux équipes de tête ont placé les filles en embuscade. Même si Lille n’a pas gagné, le match contre Saint-Etienne a probablement été le plus beau de la saison : spectaculaire, offensif, riche en occasions et en beaux mouvements (et cela vaut aussi pour l’adversaire). Les Lilloises ont ainsi été les premières à faire perdre des points à l’ASSE. On attendait alors avec beaucoup d’espoirs une performance de niveau équivalent contre Le Havre : c’est malheureusement là que l’équipe est passée à côté, en s’inclinant 1-4 : les Havraises, sans être particulièrement impressionnantes, ont été plus réalistes et ont exploité quelques faiblesses aperçues lors de la phase aller, avec quelques erreurs qu’on peut imputer à la jeunesse du groupe, notamment en défense centrale. Les deux matches au sommet n’ayant donné qu’un point, on se dit alors de nouveau que le LOSC sera, au mieux, sur la 3e marche du podium.
Photo Allez Lille
Mais les filles ont ensuite montré suffisamment de qualités pour qu’on qualifie la défaite du Havre d’ « accident » : après ce 1-4, les Lilloises ont tout gagné en championnat, à commencer par Nice, si bien qu’en arrivant à la trêve 5e avec 21 points, avec une belle avance sur les 6es, le LOSC était dans une position ambivalente : avec de faibles espoirs, mais pas complètement décroché pour autant car les deux premières commençaient à perdre des points. Et finalement, l’actualisation des objectifs, promise en début de saison, n’est jamais arrivée ! Probablement parce que le classement a rendu difficile toute projection dans l’un ou l’autre scénario : annoncer qu’on se contentait d’une 3e place aurait déçu ceux qui auraient alors pointé un manque d’ambition ; et proclamer de jouer la montée aurait paru trop prétentieux.
En tout cas, cette série a montré diverses qualités qu’on avait aussi vu pointer en début de compétition: le réalisme (à Nice, si on en croit les retours qu’on a eus), du beau jeu (la première mi-temps contre Yzeure était très costaude), l’abnégation (deux buts à Vendenheim dans le temps additionnel pour arracher la victoire), ou la capacité à tenir un résultat, même laborieusement (la victoire à Grenoble). Une dernière victoire sans histoire contre Saint-Denis fait donc atteindre ce total de 33 points.
Comme on le voit au classement, le LOSC a un match de retard sur Le Havre (match contre Nancy reporté à cause du vent en février). En imaginant que ce match ait été gagné, nous voilà à 4 points du Havre (et de Saint-Etienne, qui a aussi un match en retard, donc donnons leur généreusement 3 points). Sachant qu’il fallait encore se déplacer chez ces deux adversaires, qui se seraient affrontés eux-mêmes (et donc au moins l’un des 2 aurait perdu des points), ça signifie que Lille avait quasiment son destin en main : en gagnant tout, il est probable que Lille aurait fini en tête (pour être sûr, il aurait donc fallu gagner chez ces deux adversaires et qu’un des deux perde au moins un point par ailleurs, mais d’autres scénarios étaient possibles pour finir en tête).
Alors, certes, il aurait fallu gagner chez les deux équipes de tête : mais, on l’a souligné régulièrement à partir de fin octobre, l’équipe du LOSC a semblé en progression constante, exception faite du match contre Le Havre : le jeu se diversifiait ; Noémie Mouchon restait sur une série où elle marquait but sur but ; l’arrivée en défense de Gwenaëlle Devlech’ a semblé apporter le surplus de sérénité et de calme qu’il manquait pour assister les jeunes Eva Frémaux ou Emeline Saint-Georges ; les retours de Marlyse Ngo Ndoumbouk et de Laëtitia Chapeh allaient aussi dans ce sens, tout en offrant un éventail de choix plus large pour Rachel Saïdi…
Bref, il y avait de quoi espérer coiffer tout le monde sur le fil, et sans pression car en venant de derrière. Quoi qu’il en soit, pour avoir échangé avec pas mal de spectateurs et de spectatrices, tout le monde s’accorde pour dire que le spectacle proposé a été très agréable, probablement au-delà de ce qu’on espérait en début de saison : le jeu était cohérent, collectif, on a vu de belles tentatives ; à ce titre, bravo au travail de la coach et de son encadrement.
Photo Allez Lille
La coupe de France :
Beau parcours en coupe pour le LOSC, finaliste l’an dernier : les Lilloises ne sont tombées qu’en huitième de finale contre une équipe de D1, à cause d’un vieux pénalty (justifié), contre Dijon. Précédemment, les Lilloises avaient écarté Rouen (5-2), Strasbourg (3-0) et Orléans (2-0).
Quelques remarques en vrac
_Saint-Etienne a déposé un recours : en effet, les Vertes s’estiment lésées dans la mesure où elles comptent, comme les Lilloise, un match remis. Elles sont donc potentiellement en tête à égalité avec Le Havre, qu’elles ont battu 4-1. Il devait encore y avoir le retour Le Havre/Saint-Etienne. Et même en comptant la moyenne de points pris par match, ça avantage Le Havre, car cette moyenne ne se calcule évidemment pas sur la même base : en gros, plus on a de matches gagnés d’avance, plus la moyenne est forte (si Saint-Etienne avait gagné son match reporté, sa moyenne serait la même que celle du Havre ; donc si Le Havre est devant de 0,04 point, c’est bien au bénéfice d’un match en plus). Bref, dans ce cas comme dans d’autres, chacun a de bonnes raisons de défendre sa position.
Si les deux premiers et la FFF ne parviennent pas à s’entendre sur qui doit monter, nous proposons une commission de conciliation, que nous présiderons, et qui consistera à réaliser administrativement ce qui aurait dû se passer sur le terrain : le 3e coiffe tout le monde sur le poteau, et le LOSC monte en D1.
_Merci à la section féminine de nous avoir permis de retrouver la victoire au stade Bollaert, parce que ça nous manquait. On regrette de ne pas avoir eu le retour au stade Pierre-Mauroy, mais comme il n’y avait pas de match de l’équipe masculine ce week-end là, ça aurait été de toute façon compliqué. Et comme la fusion entre Lens et Arras semble compromise, il est possible qu’on ne retrouve pas ce plaisir l’an prochain, du côté des filles du moins. Qu’à cela ne tienne, les garçons se chargeront de reprendre leurs bonnes habitudes contre le voisin.
_Pour la deuxième saison consécutive, Elisa Launay a joué l’intégralité des rencontres, aussi bien en championnat qu’en coupe. Encore une saison comme ça et Jean-Claude Nadon sera égalé, puisque qu’il a joué l’intégralité des matches des saisons 1992/1993, 1993/1994 et 1994/1995 (avec davantage de matches, certes).
_Il est dommage qu’on ait si peu vu Marlyse Ngo Ndoumbouk, arrivée blessé puis qui a vite rechuté. Le peu qu’on a vu d’elle a montré une capacité à peser physiquement sur la défense adverse, et à être efficace. Son absence a en tout cas précipité le lancement dans le bain de Noémie Mouchon, du haut de ses 16 ans, qui, après quelques matches à prendre ses marques sans marquer, s’est montré d’une prometteuse efficacité. Son premier but, contre Saint-Etienne, d’un petit lob face à la gardienne, était un bel exemple de sang-froid
Les joueuses
Au regard de la moyenne de temps de jeu par match en championnat de chacune, on a constitué ce qui est à peu près l’équipe-type :
Evidemment, ce n’est pas entièrement satisfaisant car :
_Eva Frémaux se retrouve arrière droite alors qu’elle a joué en défense centrale ; mais entre les blessures de La Villa et de Chapeh et l’émergence de Sawaryn, le poste n’a pas été occupé de façon « fixe » ;
_Carla Polito est en défense centrale (c’est certes arrivé contre Vendenheim), mais elle est habituellement un cran plus haut ;
_On a placé Devlech’ parmi les titulaires car on a rapporté son temps de jeu à son temps de présence dans l’effectif ; mais Emeline Saint-Georges a, en valeur absolue, bien plus joué qu’elle ;
_certains « choix » de Rachel Saïdi n’en sont pas vraiment puisque des sélections ont par exemple privé Dufour et Frémaux du déplacement à Nice ;
_mais si vous n’êtes pas contents, vous n’avez qu’à faire vous-même des équipes !
Se dégage en tout cas un noyau dur de joueuses qui ont été utilisées en moyenne aux alentours de 75 minutes (et plus) par match de championnat. C’est un noyau dur qu’on retrouve aussi pour ce qui concerne les matches de coupe, mais avec un temps de jeu moindre, ce qui signifie que l’effectif a davantage tourné en coupe. Donc, en généralisant, le « noyau dur » (Launay, Ollivier, Demeyere, Paprzycki, Elisor, Dufour, Polito, Boucly) a été utilisée à peu près à la même fréquence dans les deux compétitions (mais un peu moins en coupe), là ou d’autres ont eu proportionnellement plus de temps de jeu en coupe (Sawaryn, Lefébure, Jacaton et Mouchon : pour cette dernière, ça s’explique en partie par ses rares apparitions en tout début de championnat), et où enfin certaines, les plus jeunes, ont même eu davantage de temps de jeu brut en coupe qu’en championnat (Vermessen, Ruffelaere, Bamenga, Fermon)
Voici les temps de jeu moyens par match de coupe, où on constate, hormis pour deux postes en défense, les mêmes joueuses avec un temps de jeu proportionnellement plus faible, signe d’une plus grande rotation :
Les coups de coeur
_La paire Demeyere/Paprzycki
Comme on l’a écrit dans un des résumés, citons-nous : « quand Aurore Paprzycki et Silke Demeyere s’y mettent à deux pour récupérer un ballon dans les pieds adverses avec tant de rage, c’est à la fois complètement inesthétique et très beau ». Pour ceux qui ne sont pas familiers de l’équipe, imaginez une association D’Amico/Balmont.
_Agathe Ollivier
Là aussi, on a souligné à plusieurs reprises qu’on est tout à fait séduits par notre arrière gauche, qui a une qualité de prise de balle qui la met systématiquement dans le bon sens. Son apport offensif est également précieux : on lui doit quelques passes décisives (et un but).
Photo Marc Van Ceunebroeck/LOSC
_Silke Demeyere
Pourquoi argumenter ?
_Les jeunes de l’effectif
Leur temps de jeu a été variable, mais on les a vues suffisamment pour apprécier les qualités de Charlotte Sawaryn, Emeline Saint-Georges, Eva Frémaux, Mégane Jacaton et Noémie Mouchon. De bon augure pour la suite.
D’autres remarques en vrac :
_Bravo à Salomé Elisor, qui a marqué pour son premier match de championnat, comme Ouleye Sarr il y a 2 ans. Et comme Victor Osimhen, Jonathan Bamba, Miladin Becanovic, Kenneth Andersson et bien d’autres : on a mis à jour notre article sur les buteurs/buteuses dès leur première en y intégrant les filles.
_Noémie Mouchon a réussi un triplé à Nice. Ce n’était pas arrivé depuis Ouleye Sarr, toujours contre Bordeaux en septembre 2017. Et précédemment, il fallait remonter aux triplés de Jana Coryn en D2.
_On est très contents d’être lus par le site footfeminin.fr, qu’on consulte de temps à autre car il regorge d’infos sur l’actualité du foot féminin, et son compte twitter est précieux pour suivre les résultats. Mais quand, le lundi, il fait un bilan de la journée de D2 avec un mini-résumé de chaque match, il faut penser soit à ne pas recopier mot pour mot notre description des actions, ou alors à nous créditer, soit à envoyer directement une personne pour relater le match.
_« Excellente, l’arbitre ! » ; « Afflelou, une deuxième paire gratuite » et autres fines remarques : Merci à Didier qui à lui seul parvient à faire rire tout une tribune.
Les rébus
Comme le twitter de la section féminine propose des rébus, on fait pareil. En voici trois : il s’agit de trouver des noms. Les réponses sont en bas d’article.
1.
2.
3.
La recette de cuisine :
Aujourd’hui, La prise en sandwich, par Silke Demeyere et Aurore Paprzycki
Ingrédients :
_un terrain de football
_un ballon
_deux milieux défensives
_une ou plusieurs adversaires approchant votre but
_une arbitre
Durée de l’action : quelques secondes
Qualités requises : coordination, acharnement, roublardise
Recommandation particulière : ne pas tester sous les catégories U16
Préparation :
1. quand votre adversaire a le ballon, montez au pressing
2. observez votre partenaire. Placez l’adversaire entre vous-même et votre partenaire
3. au signal que vous déterminerez, foncez l’une et l’autre sur l’adversaire
4. le contact avec l’adversaire doit se faire de façon simultanée
5. compressez l’adversaire contre le corps de votre partenaire, qui fait de même. L’adversaire ne peut plus se mouvoir : c’est le coeur de la prise en sandwich
6. mettez-vous d’accord pour que l’une d’entre vous tombe, vous pouvez ainsi espérer récupérer un coup-franc en votre faveur.
7. plaignez-vous d’avoir été bousculée
8. éventuellement, récupérez le ballon
9. saluez le public, très friand de ce genre d’action, et qui se régale
En cas de coup-franc sifflé en votre défaveur, nos joueuses nous offrent deux astuces :
L’astuce de Silke Demeyere : « râlez, de préférence en flamand, ça fait peur à l’arbitre »
L’astuce d’Aurore Paprzycki : « n’hésitez pas à frapper puissamment le ballon en direction de votre adversaire à terre »
L’astuce-bonus d’Aurore : « le p’tit coup de coude comme il faut »
Photo Marc Van Ceunebroeck/LOSC
Et maintenant ?
Sur un plan strictement sportif, on est largement confiants dans la capacité de l’encadrement actuel à faire se poursuivre la progression de ce groupe. Après une saison aussi encourageante, on a même hâte de voir les filles avec une année d’expérience en plus dans les jambes. Espérons seulement que le groupe reste stable, que le noyau dur évoqué précédemment reste et que la dynamique enclenchée depuis quelques mois perdure. Le départ de Julie Dufour est acté : réjouissons-nous d’avoir pu la garder une année en D2 pour apprécier ses qualités. Et voyons positivement les choses : ça libère un contrat fédéral. Il y a peut-être d’anciennes joueuses du club, qui n’ont pas trop joué cette année, qui aimeraient bien revenir… ?
Sur d’autres aspects, le football féminin n’a pas besoin de la situation sanitaire actuelle pour vivre avec des incertitudes. Il est à craindre que celles-ci se manifestent plus que jamais : les partenaires seront-ils toujours au rendez-vous ? Le président de l’association, Patrick Robert, s’est régulièrement manifesté au cours de la saison dans la presse et sur les réseaux sociaux pour pointer les aides insuffisantes de la fédération et la nécessité pour les clubs de « bricoler » pour survivre, bien loin des promesses de l’après-coupe du monde. En sport comme ailleurs, ce sont souvent les femmes qui trinquent en premier dans les situations de crise ; quelques articles récents s’en sont inquiétés.
Les nécessités de la structuration, évoquées en début d’article, se posent alors plus que jamais : il s’agit de trouver des secteurs sur lesquels l’association a encore de la latitude pour négocier tout ce qui peut permettre d’améliorer les conditions contractuelles, scolaires et professionnelles permettant d’attirer et de faire rester les joueuses : sponsoring, partenariats avec des secteurs qui ont la capacité de « professionnaliser » les filles tout en leur permettant des horaires aménagés à leurs contraintes de sportives…
La montée de Strasbourg en D2 sonne un avertissement : au moment où les clubs pro ont désormais l’obligation de créer leur section féminine, si ce n’est déjà fait, et risquent à terme de faire disparaître certains clubs féminins « historiques » qui ne pourront pas suivre le cahier des charges de la FFF (pour Strasbourg, on pense évidemment à Vendenheim, mais songeons aussi à Rodez, Albi, Soyaux, Yzeure…), le LOSC ne doit pas manquer le bon wagon.
Les solutions aux rébus :
1. Carla, polie tôt
Le saviez-vous ? Carla Bruni est l’épouse de Nicolas Sarkozy
2. Salaud – May – Elie sort
(il est possible que les plus jeunes ne connaissent pas le premier visage, ce qui est une bonne nouvelle pour eux : il s’agit de Marc Dutroux ; la deuxième image montre Theresa May ; et Elie Semoun, dehors)
3. Rachel – Sailly dit
Rachel, de Friends ; et Charlotte Sailly, ancienne joueuse du LOSC.
Les articles et comptes-rendus de la saison :
LOSC/Evian : Rentrée du LOSC, 3 bons points
LOSC/Grenoble : à la fin, c’est Lille qui gagne !
LOSC/Vendenheim : Rhin à signaler
Arras/LOSC : Au Nord, c’est Lille le patron
LOSC/Saint-Etienne : Des Vertes et des Lilloises bien mûres
LOSC/Le Havre : Gros hic contre le HAC
LOSC/Yzeure : Un LOSC atom-Yzeure
LOSC/Saint-Denis : Toujours le vent en poupe
Notre interview d’avant saison avec Rachel Saïdi
Note :
Posté le 2 mai 2020 - par dbclosc
Au bon souvenir de Vahid (2/2) : retrouvailles à Grimonprez-Jooris
Après avoir affronté le LOSC pour la première fois après son départ de Lille en novembre 2002, Vahid Halilhodzic retrouve les Dogues pour le match retour, le 3 mai 2003. Et cette fois, c’est devant le public qui l’a tant adulé.
Depuis les premières retrouvailles entre les Lillois et Vahid Halilhodzic, qui ont tourné au naufrage en Bretagne pour les Dogues, les clubs du LOSC et du Stade Rennais flirtent avec la zone de relégation. Loin du standing qu’il a connu avec l’entraîneur bosniaque depuis son retour en D1, le LOSC se traîne péniblement entre la 12e et la 17e place. Et la tendance est plutôt à un rapprochement avec la zone de relégation. Car depuis ce match à Rennes, Lille n’a gagné que deux fois (contre Le Havre juste avant la trêve, puis contre Montpellier). Voilà donc l’équipe de Claude Puel 16e avant ce match, 3 points devant Ajaccio, 19e, et un seul point devant Sedan, 18e et premier relégable.
Quant aux Rennais, ils sont un poil mieux lotis : une série de victoires fin 2002 a permis aux Bretons de sortir de la zone de relégation, mais sans pour autant aller bien plus haut depuis. Depuis deux journées, ils sont tout de même passés devant le LOSC, en se classant 14e, 1 point devant. Ils viennent en outre de se faire éliminer de la coupe de France, en demi-finales à Auxerre, à cause d’un but dans le temps additionnel : « nous sommes passés à côté de quelque chose car Rennes avait une chance de retrouver, à travers une finale de coupe de France, honneur et crédibilité » déplore Halilhodzic.
L’année 2003 est bien sombre pour le LOSC : de la reprise à début mars, les Dogues ont même enchaîné une série de 7 défaites consécutives, en ne marquant qu’un seul but. Et on comprend bien que Claude Puel n’est pas passé loin d’un licenciement. Sans marquer beaucoup de points, on sent pourtant pointer quelques améliorations dans le jeu : ainsi, à Sochaux, pourtant menés 0-2 à la pause, les Lillois sont revenus avec le point du nul (et auraient même pu gagner) en utilisant des circuits de jeu qu’on retrouvera ensuite régulièrement avec Claude Puel ; 15 jours avant ce match décisif contre Rennes, le LOSC est allé chercher un nul à Lyon (0-0), qui du coup a perdu la tête du championnat. Une trêve internationale a permis aux Lillois de travailler dans une ambiance entre insécurité mathématique et la certitude d’une meilleure consistance dans le jeu. Ils en ont également profité pour jouer un match amical contre Beauvais, 19e de Division 2, en 3 tiers-temps. Le score : 2-2, de quoi faire le plein de confiance ! Le LOSC menait pourtant 2-0 à l’issue du premiers tiers (Brunel 23e Sterjovski 26e)1. La Voix du Nord s’interroge : « Rennes déjà dans les esprits ? ».
Vahid, Vahid, Vahid
Comme pour le match aller, la presse régionale du Nord évoque le retour de Vahid Halilhodzic plusieurs jours avant le match, contribuant à polariser l’attention sur un duel Halilhodzic/Puel qu’elle présente pourtant dans le même temps comme un piège qui fait oublier l’essentiel : le maintien du LOSC en D1. La Voix du Nord consacre de nombreux articles au « marchand de bonheur d’une autre époque dont les tribunes du stade Grimonprez-Jooris gardent toujours un souvenir ému », au « docteur miracle , à « l’homme qui a redonné une fierté au football lillois », symbole d’une « époque dorée aux frontières de l’irréel ». Voilà donc « un match tellement particulier » d’une grande « charge émotionnelle » : « comment ignorer l’impact de la seule présence de Vahid Halihodzic ? ». Les lecteurs nordistes ont donc droit à un récit du parcours en Bretagne de Vahid. Vahid a fait ci, Vahid a fait ça, tel un « Martine » du football. On y apprend ainsi qu’il a boudé la presse bretonne pendant un mois (son adjoint Bruno Baronchelli l’a remplacé durant les points presse), tandis que des rumeurs persistantes l’envoient au PSG depuis que celui qui est encore son ami, Francis Graille, en a pris la présidence. Arrivé à Rennes faute de mieux alors qu’on l’attendait dans un club jouant l’Europe, il affirme de nouveau ses ambitions : « j’en ai marre des saisons galères. Je rêve d’entraîner un jour un grand club ». Le 30 avril, la Voix publie même une interview avec Halilhodzic. Au programme, bien entendu : l’évocation du passé et du retour à Grimonprez-Jooris. « En 4 ans, on a fait ce que d’autres réalisent parfois en 10 ans ! Cette époque fut tout simplement grandiose, d’autant qu’aux résultats s’ajouta une aventure humaine peu banale (…) Je vais être ému, peut-être même nostalgique. En suivant le match Manchester/Real devant mon téléviseur, je n’ai pu m’empêcher de regarder le passé. Il y a un an ou presque, on était là-bas. Ce sont de beaux souvenirs. Le simple fait d’en parler me donne des frissons ».
18 septembre 2001, à Manchester
« J’ai toujours des amis dans ce club. Des supporters m’envoient aussi régulièrement des messages d’amitié. Je serai forcément embarrassé vis-à-vis de tous ces gens car, aujourd’hui, je suis entraîneur de Rennes. Et Rennes a besoin de points. Une victoire à Lille me ferait donc plaisir ». En effet, une défaite mettrait Rennes dans de sales draps : on imagine que Vahid aurait aimé des retrouvailles moins chargées d’enjeux sportifs, aussi bien pour son équipe que pour le LOSC. Alors qu’il bénéficiait à l’aller de son aura acquise à Lille et d’une étiquette de « sauveur » pour un groupe à la dérive, il semble cette fois bien moins serein, après quelques mois laborieux. Comme à son habitude, et probablement à raison, il place la pression du côté de l’adversaire : « le LOSC aura vraisemblablement plus de pression que nous, car à domicile, on a l’obligation de gagner ». Vu la position de Lille et son incapacité à briller à l’extérieur (une seule victoire : à Sedan), les Dogues seraient en effet bien inspirés de prendre les 3 points. La Voix du Nord, confiante, rappelle un épisode de 1955, où Lille avait sauvé sa place en D1 à la faveur d’un barrage remporté contre Rennes : « Rennes, symbole du déclin, il y a presque un demi-siècle ». Mieux : en 1951, le LOSC a battu les Bretons 9-1.
Seydoux et Puel au front
« Si on est encore hors de danger pour l’instant, c’est parce que derrière, il y a également eu des manques » : Claude Puel ne veut pas se contenter de la faiblesse des oppositions. Les améliorations dans le jeu évoquées plus haut semblent lui donner confiance : « nous devons tout mettre en œuvre pour ne pas casser ce que nous avons fait à Lyon. Car ce match est LA référence de la saison. L’équipe se doit d’être animée de la même rigueur, du même plaisir de jouer qu’à Gerland ». Surtout, concernant l’émotion extra-sportive, la stratégie a changé par rapport au match de novembre, où l’encadrement du LOSC avait semblé complètement écrasé par l’ombre d’Halilhodzic. Michel Seydoux sent le danger et appelle le public à soutenir son équipe : « Vahid est toujours apprécié à Lille, par rapport à ce qu’il a fait. C’est normal. Mais maintenant, si les Lillois aiment leur club, c’est derrière lui qu’ils doivent être ». Sur l’aller, « il est évident que sur cet épisode, il y a une partie qui a été gagnée par le psychologique ». Pas question de se laisser avoir cette fois. Puel : « on me parle souvent de revanche par rapport à l’épisode aller. Or, je n’ai pas l’habitude de raisonner ainsi. Tomber dans ce piège, ça peut être la preuve d’un manque de discernement et de lucidité. À mes yeux, il est plus important de gommer tout ce qui a pu être négatif à l’époque – nous nous sommes notamment trop dispersés – que de songer à régler nos comptes ». Il n’empêche : il attaque à son tour et envoie un message aux arbitres, en rappelant que Piquionne a plongé à l’aller pour obtenir un pénalty, et qu’il a récemment remis ça à Strasbourg : « se faire respecter, c’est tout ce qui m’intéresse »
Place au match. 17 177 personnes sont venues. Le temps est clément, la pelouse est belle, et Grimonprez-Jooris offre une grosse ambiance. Du côté de Lille, Fahmi, Tapia, et Boutoille sont blessés, tandis que D’Amico, en froid avec son entraîneur, est écarté et voit son aventure à Lille s’achever discrètement. À Rennes, Maoulida est suspendu. Durant l’échauffement des joueurs, ni Halilhodzic, dont le nom a été scandé, ni Puel ne sont apparus sur la pelouse. En tribunes, Grimonprez réserve un accueil chaleureux à Vahid avec de nombreuses affiches : « bienvenue chez toi, Vahid », « Vahid, on ne t’oubliera jamais », « Vahid, reviens », et « Vahide ostraces zauwiteg unasiu scrima » en Honneurs, qui doit signifier quelque chose du même genre. À 19h57, Vahid monte les quelques marches qui séparent les vestiaires de la pelouse. On sent une certaine retenue dans le public, qu’on sent prêt à bondir, mais qui souhaite ne pas donner le sentiment de prendre fait et cause pour l’entraîneur adverse alors que le LOSC joue sa peau. Tel un empereur romain, Vahid salue le stade, une main en l’air, l’autre sur la poitrine. Des « Vahid !Vahid ! » descendent des tribunes.
Consciente du danger que représenterait un plébiscite, la direction avait prévu le coup et avorte la standing ovation qui allait sans nul doute arriver en appelant à applaudir Jules Bigot, qui donne le coup d’envoi ! Licencié à l’Olympique Lillois dès 1931, l’ancien avant-centre a remporté trois coupes de France et un titre de champion avec le LOSC. Un opportun contre-feu, et l’hommage à Vahid s’évapore aussi vite qu’il était venu. Les souvenirs restent, et Grimonprez-Jooris a choisi son camp
Un maintien quasi-assuré
Devant les sapeurs-pompiers et gendarmes intervenus lors de l’incendie de la « ferme Luchin » quelques jours avant, invités par le club, Rennes ne semble pas déterminé à mettre le feu à la défense lilloise et est venu pour défendre. Exceptée une percée de Piquionne (10e), les Bretons attendent et le LOSC, après un premier quart d’heure d’hésitation, se montre plus consistant. Sur un corner de Sterjovski, la tête de Manchev trouve le poteau (15e). Au bout d’une demi-heure de jeu, au moment d’une nette montée en puissance des Dogues, une ouverture d’Abidal dans l’axe est mal repoussée par Escudé. À 18 mètres, Sterjovsi reprend de volée. Le ballon rebondit plusieurs fois et va dans le petit filet droit du but de Cech (1-0) ! Les Lillois multiplient alors les occasions jusqu’à la pause, et c’est un miracle si la tête de Brunel est repoussé par Cech (42e). Le LOSC mène à la pause.
Le même scénario se dessine en seconde période : sans être brillants, les Lillois dominent et ne pêchent que par maladresse (Manchev, 49e, 51e). La Voix du Nord déplore des « duels à la limite de l’acceptable », notamment entre Jeunechamp et Pichot. L’expulsion de Jeunechamp facilite la fin de match (70e), marquée par la sortie de Grégory Wimbée, touché à la pommette (74e). Vahid s’agite sur son banc. À défaut de maîtrise complète, les joueurs du LOSC font preuve d’une volonté de s’en sortir, mais tremblent tout de même sur un dernier centre de Jay (92e). Finalement, « un LOSC parfaitement équilibré, froid et conquérant » prend les 3 points et s’assure désormais une avance de 3 points sur le premier relégable : ça devrait passer. « La bonne affaire » ; « Les Lillois ont lavé l’affront breton » titre la presse, qui salue la « copie parfaite » rendue par le défenseur roumain Marius Baciu. « Tout le monde avait bien travaillé cette semaine, on est récompensés, se félicite Claude Puel. On a fait un très gros match, on a été solidaires, appliqués, c’est dans la lignée de ce qu’on avait fait à Lyon il y a 15 jours ». Michel Seydoux tient de son côté un langage auquel on va devoir s’habituer : « vous ne pouvez pas savoir comme je suis soulagé ! Si vous n’avez pas de projet dans une entreprise, vous n’avancez pas. Or, le match de ce soir a démontré que tous les joueurs adhéraient aux idées et aux plans visant à préserver notre place parmi l’élite (…) Notre crédibilité d’investisseurs passe nécessairement par notre crédibilité sportive ».
Vahid s’est effacé
Dans les tribunes, se trouvait également Bernard Lecomte, ancien président du LOSC : « revoir Vahid sur un banc de touche, à Lille, fut d’abord très fort car on a vécu une grande époque ensemble et on s’est battus pour trouver des relais. Voir ensuite le LOSC se battre pour sauver l’essentiel me réconforta pleinement. Malgré toute l’affection que je porte à notre ancien entraîneur, je suis content d’avoir assisté à cette victoire lilloise. Je l’avais eu au téléphone ces derniers jours. On devait se retrouver après le match. Mais il est parti… Il ne faut pas se faire trop de soucis pour lui. Son avenir est tracé ». En effet, Halilhodzic a esquivé l’après-match médiatique : était-il en colère, ému, inquiet pour son équipe, déçu de n’avoir pu profiter de Grimonprez ? Sans doute un peu de tout ça. Contrairement à l’aller où son fantôme semblait avoir hanté les joueurs lillois, c’est cette fois lui qui a défailli dans le stade qui l’a fait roi. La Voix du Nord l’a décrit « ulcéré par l’arbitrage » en précisant « que l’arbitre aurait en effet dû expulser Jeunechamp plus tôt ». « Gêné par la piètre prestation de son équipe, tactiquement faible et inutilement agressive », il a évité de discuter du match, de son avenir, et de commenter ses retrouvailles avec Grimonprez-Jooris. Dès lors, c’est Pierre Dréossi, manager du Stade Rennais, qui s’est présenté à la presse et a assuré la corvée, évoquant les difficultés sportives de son club, et les incertitudes sur son avenir, elles-mêmes liées aux décisions que l’entraîneur doit prendre. Pendant ce temps, Vahid était aperçu du côté du parking, discutant avec les supporters du LOSC, signant des autographes, posant de bonne grâce pour des photos. D’un côté un Vahid râleur, renfrogné, indigné ; de l’autre un Vahid chaleureux, convivial, émotif. Une façon de souffler sans cesse le chaud et le froid qu’il s’agira désormais d’éprouver à Paris, nouvelle destination qu’il officialise trois jours après.
Note :
1 À noter l’apparition de Stéphane Dumont dans le dernier tiers-temps, alors qu’il n’a pas encore joué en D1.