Posté le 18 décembre 2020 - par dbclosc
Comment Gérard Houllier n’a pas signé au LOSC
Début mai 1989, Georges Heylens est gentiment prié de plier bagage car Gérard Houllier va devenir l’entraîneur du LOSC. Mais les circonstances en ont décidé autrement, et ce qui s’avérait initialement comme une bonne pioche du club se transforme en passe d’armes par presse interposée où on s’invective à coups de « raison d’Etat », de « parole donnée » et de « dégonflé ». Mi-mai, le LOSC, sérieusement ébranlé, n’a plus d’entraîneur : un coup de maître.
Cet article constitue le premier d’une série de trois consacrée au tumultueux changement d’entraîneur de l’intersaison 1989.
Le deuxième est ici : A la recherche du coach perdu
Le troisième est là : Santini ouvre l’ère des vaches maigres
Nature des faits : complot contre le LOSC
Objectif du complot : décrédibiliser le LOSC en accentuant son instabilité chronique
Principaux acteurs : Jacques Amyot (directeur général du LOSC), Bernard Gardon (directeur sportif du LOSC), Jacques Dewailly (président de la SAEM), Gérard Houllier (entraineur national adjoint), Georges Heylens (entraîneur du LOSC), Jean Fournet-Fayard (président de la FFF), Roger Bambuck (secrétaire d’Etat aux sports)
Conséquence du complot : y a plus de coach, et les dirigeants passent pour des gros nazes.
Nous sommes le 6 mai 1989. Pour la 35e journée de championnat, le LOSC s’est imposé à Nice 1-0 (but de Pelé). Septièmes à 3 journées de la fin, les Dogues sont bien partis pour réaliser leur meilleur classement de la décennie 1980. Pourtant, en coulisses, le sort de l’entraîneur, le Belge Georges Heylens, est scellé : l’élimination de la coupe de France en 1/8e par Mulhouse (0-0 ; 2-3) n’est pas passée chez les dirigeants, qui souhaitent dès lors le remplacer. Et dans la semaine, la presse régionale évoque ce qui semble quasi-acté : Georges Heylens va être remplacé par Gérard Houllier. La Voix du Nord (VDN) du 10 mai relate ainsi que Jacques Dewailly devait rencontrer son coach la veille mais, finalement, arguant d’un « agenda chargé », l’entrevue a été repoussée de 24 heures. Il a toutefois eu le temps de déclarer : « nous trouverons une solution négociée avec Georges Heylens ». Sans illusion, Georges Heylens souhaite que « les choses se passent correctement ». Si la mise à l’écart de l’entraîneur est d’ores et déjà annoncée, c’est probablement que les dirigeants du LOSC, sûrs de leur coup, ont assuré leurs arrières et lui ont déjà trouvé un successeur.
Une conférence de presse est annoncée dans l’après-midi, au cours de laquelle est attendue la confirmation de la rumeur Houllier. L’intéressé, pour le moment ne nie pas « avoir eu des contacts » avec le LOSC mais « se refuse à en dire davantage » pour le moment. À ce stade, on peut faire deux hypothèses : ou Gérard Houllier attend des garanties ; ou il s’apprête à refuser l’offre du LOSC. Quoi qu’il en soit, « un certain flou règne autour de Grimonprez-Jooris » d’après la VDN, qui fait déjà état de l’agacement de certains joueurs, pas contents d’être mis à l’écart. L’un d’eux, « indisposé par le manque d’informations officielles », confie à la VDN : « ne sommes-nous pas concernés au premier chef ? ». Seule certitude pour le moment : un nouveau préparateur physique, Georges Honoré, rejoint le LOSC.
Heylens/Houllier, deuxième
Ancienne gloire du football belge (67 sélections chez les Diables Rouges), et particulièrement d’Anderlecht, où il fut titulaire durant 15 saisons avant de devoir mettre un terme prématuré à sa carrière, à cause d’une blessure, à 32 ans, Georges Heylens est l’entraîneur du LOSC depuis 1984. Son arrivée dans le Nord avait déjà fait intervenir, indirectement, Gérard Houllier. En 1984, les dirigeants lillois hésitent : Roger Deschodt aimerait que Jean Parisseaux soit promu n°1 ; Patrick Doussot et Charly Samoy, de leur côté, penchent plutôt pour l’entraîneur de Lausanne, le Hongrois Peter Pazmandy. Mieux : ils ont noué contact avec celui qui a été désigné « entraîneur belge de l’année », Georges Heylens, de Seraing. Et c’est finalement cette piste qui est la plus fructueuse, le LOSC profitant des déboires financiers du club belge, qui ne peut retenir son coach. Le 24 juin 1984, Heylens, pourtant sollicité par le PSG, est lillois pour… un an. Car, en théorie, Houllier doit débarquer à Lille en 1985. C’est Georges Heylens lui-même qui revient sur cet épisode dans Sport foot en juillet 2013 : « nous nous sommes donné rendez-vous au restaurant de l’aéroport de Lille. Samoy avait apporté le contrat, il me l’a mis sous le nez et m’a dit : « si tu veux, tu peux entraîner le LOSC pendant un an. Pour la suite, nous avons un accord avec Gérard Houllier. J’ai accepté, même si je savais que ce ne serait pas facile parce que, hormis quatre joueurs, toute l’équipe était partie. Je devais me débrouiller avec des jeunes du centre de formation! J’ai sauvé les meubles et nous nous sommes sauvés à trois matches de la fin du championnat. L’équipe était beaucoup trop jeune ». Alors, fin de l’histoire entre le LOSC et Heylens ? Non. Heylens poursuit : « à la fin de la saison, Houllier, qui était à Lens, m’a téléphoné pour me dire qu’il allait au PSG et que je pouvais prendre sa place à Lille. J’en ai parlé à la direction et, cinq minutes plus tard, on me proposait un nouveau contrat d’un an. Avec quelques renforts, nous avons terminé la saison au milieu du classement et je pensais avoir rempli mon contrat. Je suis donc parti l’esprit tranquille au Mexique, pour la Coupe du Monde 1986 ». Georges Heylens est en effet consultant pour la RTBF durant la coupe du monde. Donc cette fois, fin de l’histoire entre Heylens et le LOSC ? Non. Heylens toujours : « à peine arrivé, j’ai reçu un coup de fil de Lille : je devais rentrer immédiatement parce qu’on allait me faire une nouvelle proposition. Je me suis dit qu’ils auraient pu y penser un peu plus tôt mais je suis quand même rentré. La proposition, c’était un contrat de trois ans avec l’assurance de pouvoir compter sur Erwin Vandenbergh, qui venait d’Anderlecht, et Filip Desmet, de Waregem ! ». Et Heylens de rempiler pour 3 ans à Lille.
Résumons donc : arrivé initialement en 1984 pour un an avant son remplacement prévu par Houllier en 1985, Heylens reste finalement à Lille 5 ans, Houllier ayant eu en 1985 un autre engagement (le PSG). Sous la houlette de son entraîneur belge, le LOSC a connu des fortunes diverses, alternant le médiocre (surtout la première partie de la première saison) et le correct, profitant notamment des performances des spectaculaires Mobati, Pelé, Vandenbergh, Desmet ou Périlleux, et signant un des rares moments de liesse collective dans ces années 1980, en coupe de France contre Bordeaux. Après le PSG, Gérard Houllier, de son côté, a été nommé fin 1988 adjoint du sélectionneur des Bleus, Michel Platini. Lors de l’intersaison 1989, les destins des deux hommes vont de nouveau se croiser. Ou presque.
Le LOSC vers un « nouveau cap »
Le 11 mai 1989, l’information est en Une de la VDN : Georges Heylens est officiellement écarté du club, tandis que la situation avec Houllier semble toujours en pourparlers.
De fait, l’entraîneur belge, en fin de contrat, a accepté de se retirer sur la pointe des pieds à l’issue de la saison, dans 3 semaines. Sans provoquer de vagues, sans cracher dans la soupe non plus. L’annonce est officialisée dans un communiqué hautement diplomatique qui évoque que l’avenir du club « passe par un nouveau cap nécessitant un changement profond des structures techniques ». La VDN (via Eric Leduc) propose une interview que nous reproduisons in extenso :
Au nom de quoi êtes-vous sacrifié ?
Je ne sais pas si c’est le mot juste. Il s’agit plutôt d’un contrat qui n’est pas reconduit après une longue vie commune. Disons que les dirigeants voulaient un changement. Ils craignaient que je fasse l’année de trop. Peut-être aussi que mes idées ne concordaient plus avec les leurs.
Votre discours était usé alors ?
Non, franchement, je ne le crois pas. On a certes évoqué des problèmes relationnels avec certains joueurs, mais cela fait partie du quotidien. Un entraîneur ne peut pas être en parfaite harmonie avec 20 joueurs. Il y a ceux qui sont en ballottage, ceux qui restent sur la touche. Les relations s’en ressentent, mais c’est le cas chaque année. Surtout lorsqu’on approche de la période de nettoyage !
À quel moment avez-vous ressenti qu’il y avait déchirure ?
Le lundi qui a suivi l’élimination en coupe de France contre Mulhouse. J’ai compris que la rupture était proche, mais je savais bien avant que ma proposition pour trois nouvelles années n’aboutirait pas.
Croyez-vous que votre engagement avec le Standard de Liège, l’an passé, a pesé dans la balance ?
Absolument pas. À l’époque, nous avions complètement vidé l’abcès et cet épisode n’est plus jamais entré en ligne de compte.
Que pensez-vous de la méthode qui a conduit à la séparation ?
J’aurais préféré que les choses se fassent plus vite. Je regrette que ce qui s’est passé aujourd’hui n’ait pas eu lieu il y a une quinzaine de jours. Mais les employeurs ne sont pas tenus d’agir selon les souhaits d’un employé. Dans toute entreprise, c’est comme ça.
Avez-vous l’impression de servir de bouc-émissaire ?
Je ne veux pas voir les choses de cette façon. Le LOSC a l’ambition de franchir un palier et je ne veux pas être un frein à son évolution. Il faut savoir se retirer.
Ressentez-vous beaucoup d’amertume ?
Bien sûr, je ne suis pas heureux de partir. Je laisse des amis, des joueurs, une entité et une tâche qui me plaisaient. Le plus difficile est, sans doute, de se retirer sans avoir pu aller au bout de ce qui a été entrepris, mais c’est la règle et je l’accepte. Il faut savoir avaler des choses qu’on a envie de dire. Sinon, on se tue soi-même.
Avez-vous une impression de gâchis ?
Sur un plan personnel, je dirai oui en pensant non. Mais, une fois de plus, mes patrons n’ont pas à tenir compte de ce que je ressens.
Vous considérez vous comme trahi, berné ?
Ni l’un, ni l’autre. Je suis conscient de ce qui s’est réellement passé à tous les niveaux. Non, je ne suis pas dupe.
Quel sentiment général vous laissent ces 5 années loscistes ?
Je ne regrette rien. Je crois avoir accompli ce pour quoi on était venu me chercher. Dans un endroit qui me plaisait et avec des conditions de travail plutôt favorables. Mon bagage s’est enrichi.
Comment envisagez-vous votre avenir ?
Je vais planter ma tente ailleurs et voilà tout. Je ne pense pas que j’aurai à en passer par une année sabbatique. Je vais étudier certaines propositions que j’avais écartées en attendant d’être fixé sur mon sort. Et puis le téléphone sonnera, soyez-en sûr…
Fataliste, Heylens s’en remet donc aux choix de ses « employeurs », en se gardant bien de mettre en cause telle ou telle personne, mais on comprend bien qu’il y a manifestement de l’eau dans le gaz avec au moins un membre de l’équipe dirigeante.
Le LOSC peut donc désormais officialiser ce qui est un secret de Polichinelle : Gérard Houllier va débarquer.
Gérard où y est ?
Mais le débarquement et son lieu tardent à se dessiner. Il paraît que Houllier aurait souhaité une rencontre « en terrain neutre ». Mais où ? En tout cas, pas à Saint-André, chez le président Dewailly. Les journalistes de la VDN ne sont pas avares d’efforts pour arracher le scoop : Pierre Diéval relate ainsi dans le journal du 11 mai sa quête d’information. Il circule dans la métropole lilloise à la recherche de la R21 de Bernard Gardon et de la « R25 V6 Turbo » de Jacques Amyot. Et voici venir la R25 : « R25 contre R5 de presse… Le match qui s’engage bientôt sur l’autoroute A1, direction Lille, via l’échangeur de Lesquin, est déséquilibré. De fait, en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, la piste Amyot-Houiller s’évapore dans le flux de la circulation. Plus de poisson-pilote. Plus de scoop. Aïe ! Commence la galère. Pas spécialement réjouissante. Un impératif. Trouver le fameux terrain neutre réclamé par l’entraîneur de l’équipe de France ». Qui a dit que le journalisme d’investigation avait disparu ?
Tintin chez les Ch’tis : Objectif nul
Trouvaille aux alentours de 20h dans le Vieux-Lille : la fameuse R25 ! Ses occupants se sont probablement réfugiés dans un restaurant, mais l’article s’arrête sans que nous n’ayons eu le fin mot de l’histoire. Passionnant.
La grand’roue tourne
En fait, on commence à sentir le vent tourner, et il apporte une très mauvaise odeur. Alors que, le mercredi 10 mai, un dirigeant du LOSC confiait encore à la VDN « le dossier est ficelé », et que le jeudi 11, Amyot prétendait que les discussions avaient franchi « un pas important », la situation paraît bien moins claire en cette fin de semaine. Le journal du vendredi 12 mai nous apprend que « la fédération renâcle », et elle « regimbe » même, l’occasion de découvrir un joli verbe. Son président, Jean Fournet-Fayard, est surpris et mécontent de découvrir dans la presse que l’entraîneur adjoint des Bleus, nommé il y a 8 mois, semble négocier son arrivée dans un club : « Gérard Houllier, en plus d’un contrat à durée indéterminée, a un engagement moral. Il a une mission à accomplir. Je ne vois aucune raison pour qu’il ne la mène pas à son terme. Je m’étonne, de surcroît, d’être sans nouvelles des Lillois. J’attends qu’ils me donnent des éclaircissements ». Voilà bien une partie du problème : le LOSC tente d’attirer un entraîneur qui est par ailleurs engagé, et pas n’importe où, sans avoir contacté au préalable son employeur. Sûr de leur fait, s’appuyant sur, a priori, la volonté de Houllier de rejoindre le LOSC, les dirigeants nordistes ont viré dare-dare leur coach… « Est-ce donc un crime d’avoir contacté Gérard Houllier ? » demande naïvement Amyot ; « c’est un homme du Nord qui n’a jamais caché son désir d’y revenir. Il fallait en parler avec lui avant de se tourner vers les autorités fédérales, ce à quoi nous allons nous attacher prochainement. Mon but est de sortir notre région de l’anonymat footballistique, pas de me faire plaisir». Jouer sur la fibre régionaliste risque de ne pas peser pas grand chose face à la fédération et aux contrats en cours.
De son côté, Gérard Houllier ne dit pas grand chose : « Donnez moi 2-3 jours. Je ne peux rien dire pour le moment. J’ai des vues convergentes avec le LOSC, mais je ne suis pas complètement libre ». Mises bout à bout, les déclarations des uns et des autres semblent conduire à une évidence : le cœur de Gérard Houllier penche pour Lille où on est prêt à l’accueillir à bras ouverts, mais Jean Fournet-Fayard ne veut pas le laisser partir : « il craint, sans doute, un nouvel ébranlement de la maison tricolore, même si l’arrageois n’y vit que dans l’ombre de Michel Platini » ajoute la VDN, dont on sent bien qu’elle souhaite la venue de l’ex-entraîneur de Lens, quitte à minimiser son rôle et son influence au sein de la fédé. Le président de la FFF a-t-il les moyens de retenir Houllier ? Houllier a-t-il intérêt à quitter la fédé pour le LOSC ? 5 ans après avoir été contacté pour la première fois par le club lillois, Gégé viendra-t-il pour de bon ? Si non, il faudra changer son fusil d’épaule, mais on suppose que le LOSC a des idées : circulent les noms de Kasperczak, Santini, Suaudeau et Husson.
C’est non
Comme on le sentait venir, la journée du vendredi 12 a pris un virage décisif. La FFF s’oppose officiellement à la venue de Gérard Houllier au LOSC.
Et il semblerait que la décision vienne d’encore plus haut que la position de Fournet-Fayard : le secrétaire d’Etat aux sports, Roger Bambuck, serait intervenu personnellement pour s’opposer fermement au départ d’Houllier. Il faut dire qu’il vient de lancer un plan visant à lutter « contre le laxisme des autorités du football » ; or, selon la VDN, « le plan du secrétaire d’Etat ne pouvait être battu en brèche dès le lendemain de sa divulgation par le retrait de l’adjoint de Michel Platini ». Si l’on ajoute à cela le fait que, depuis la coupe du monde 1986, l’équipe nationale est dans un trou d’air, l’instabilité au niveau des Bleus ferait très mauvais genre. La tête de Fournet-Fayard est déjà mise à prix : pas la peine d’ajouter une nouvelle casserole. Pas du tout pour dramatiser la situation, la VDN évoque la « raison d’Etat » et représente un Houiller pris dans les filets, si ce n’est prisonnier, de la fédération !
Houllier a alors deux solutions: soit il se soumet à la volonté de la fédération, soit il opte pour l’épreuve de force en démissionnant. Mais selon la VDN, cette dernière option aboutirait à un procès où le LOSC risquerait d’être concerné pour « débauchage abusif » : « on voit mal comment Gérard Houllier prendrait le risque d’un tel conflit qui l’amènerait à commencer sa carrière lilloise en traînant le boulet d’un désavoeu fédéral. Il hypothèquerait son plan de carrière en coupant brutalement les ponts avec la rue d’Iéna, un an seulement après y être entré ».
« Gros-Jean comme devant »
Bref, ça sent le pâté pour les Lillois, où on pensait que Gérard Houllier n’aurait pas de difficultés majeures à recouvrer sa liberté, comme d’autres avant lui : « mais il faut croire que l’époque n’est plus aux arrangements, la fédération souhaitant réaffirmer une autorité tellement bafouée ces derniers temps ». Du coup, du côté du LOSC, on est dans une « position ennuyeuse, c’est le moins que l’on puisse dire », car même si des contacts sont noués avec d’autres, on misait sur la venue certaine de Houllier : « la séparation d’avec Georges Heylens n’avait-elle pas été liée à l’arrivée quasi certaine de l’ancien entraîneur du RC Lens ? ». L’impossible venue de Houllier ne peut dès lors faire passer le prochain entraîneur du LOSC que comme un choix par défaut. La VDN insiste sur la « légèreté » des dirigeants du LOSC, « un club se retrouvant Gros-Jean comme devant » : « on est, dès lors, obligé de s’interroger sur le rôle exact des uns et des autres dans cette affaire qui va entamer la crédibilité du comité directeur lillois ».
« Dégonflé ! »
Samedi 12 mai, par le biais d’un communiqué, Gérard Houllier annonce qu’il renonce à venir au LOSC.
On y lit : « j’étais d’accord sur tout ! La politique du club, le visage de l’équipe à venir. J’avais envie de faire passer certaines idées au cœur d’une région qui m’est chère ». Mais comme la VDN l’avait envisagé, venir à Lille hypothèquerait sa carrière : « j’avais envie de venir au LOSC. J’étais vraiment content. Mais je ne peux pas torpiller mon avenir. D’un côté, il y a une aspiration régionaliste avec tout cela comporte de liens affectifs. De l’autre, une action nationale qui s’inscrit dans un vaste programme de renouveau du football français. Un véritable dilemme. Je comprends la déception et la tristesse des dirigeants nordistes. Mais je ne perds pas espoir de prendre les choses en main, un jour ou l’autre ». Au sein de la fédération, ses responsabilités devraient être étendues : il va passer DTN.
La VDN résume bien la recette du sentiment général : « une cuillerée de précipitation, une pincée de naïveté, un zeste d’ignorance, un nuage de susceptibilité et la pâte vous reste sur l’estomac. Pour longtemps (…) Aujourd’hui, le LOSC n’a plus d’entraîneur et doit se rabattre sur l’ANPE (…) On a fait tomber une tête. Peut-être n’était-ce pas la bonne ? ». Voilà qu’on réclame des têtes !Premiers visés : Jacques Amyot et Bernard Gardon. Ils contre-attaquent : « vous m’accusez de légèreté, déclare Amyot, mais comment peut-on qualifier l’attitude d’un homme qui est d’accord sur tout, puis qui fait machine arrière sans crier gare ? Il y a des années que Gérard Houllier exprime son désir de venir travailler à Lille. J’irais à genoux, m’a t-il confié. Nous avions trouvé un terrain d’entente tant sportif que financier. Mercredi soir, nous sabrions le champagne pour fêter le mariage… ». Sentant le vent tourner, Amyot s’était même rendu au Parc des Princes vendredi soir, quitte à se taper PSG/Laval : « je lui ai fixé rendez-vous pour une explication les yeux dans les yeux. Mais je le cherche encore. C’est un dégonflé ». Gardon ajoute une couche : « des pratiques comme celles-là, je n’en avais jamais vues. Des gens comme lui déshonorent la profession. Après une telle conduite, on ne peut qu’être soulagé. Nous avons réalisé l’affaire du siècle en perdant Houllier ». Le lundi 15 mai, dans la Voix des Sports (VDS), Amyot poursuit : « Gérard Houllier a préféré la sécurité de l’emploi. À la fédération, la paie tombe jusqu’à 65 ans. Moi, j’ai commencé comme manœuvre. Je dispose, aujourd’hui, de 1 000 employés. Je sais ce que représente la gestion des hommes mais aussi ce que vaut la parole donnée. J’ai simplement eu la faiblesse d’y croire ». « Emouvant » commente ironiquement l’hebdomadaire sportif.
On trouve également dans la VDS la réponse de Houllier aux propos des Lillois la veille dans la VDN. A priori, toute collaboration dans un futur proche entre tous ces hommes est compromise :
« J’imaginais que la réaction des responsables du club lillois serait celle de la déception, voire du dépit. Je ne m’attendais pas à de la bassesse, à des attaques qui n’honorent pas leurs auteurs.
J’ai de l’estime pour Jacques Amyot. J’en ai un peu moins pour Bernard Gardon. Mon choix a été dicté par les circonstances. À défaut de le comprendre, ils auraient pu le respecter.
Cela dit, j’ajouterai deux choses :
Primo, je n’ai pas de leçon à recevoir de Bernard Gardon. Moi-même, je me garde bien de le juger au travers de ses expériences antécédentes, malheureuses.
Secundo, je n’ai pas attendu d’être confronté à un choix devenu impossible pour faire preuve de courage. Ceux qui m’ont suivi à Noeux, à Lens puis au PSG, que j’ai repris en zone rouge, peuvent en témoigner.
En conclusion, j’ajouterai qu’un jeune homme ou une jeune fille éconduit pense toujours que, finalement, le parti n’en valait pas la peine »
Le LOSC n’a plus d’entraîneur. Amyot va désormais revoir la liste des successeurs possibles à Georges Heylens. Mardi 16, une première audition a lieu : celle de… Georges Heylens.
Laisser un commentaire
Vous pouvez vous exprimer.
0 commentaire
Nous aimerions connaître la vôtre!