Posté le 6 février 2021 - par dbclosc
1973/74 : l’important, c’est les 2 ou 3 points
En 1972/1973, dans un groupe A de deuxième division dominé par les Nordistes (les quatre premiers étant des clubs du Nord-Pas-de-Calais), les Lillois ont échoué à atteindre leur objectif de montée en terminant à la 3ème place, malgré un seul point de retard sur Lens (1er) et Boulogne (2ème et barragiste). Lors de la saison suivante au cours de laquelle le LOSC reste le plus souvent derrière ses principaux concurrents, notamment parce qu’il remporte moins de « points bonus », il retrouve pourtant finalement l’élite française à la faveur d’un fin de saison terminée en trombe avec 10 victoires et 1 nul sur les 11 dernières rencontres.
A l’orée de la saison 1973/1974, l’ambition du LOSC reste la montée. L’effectif est toutefois quantitativement plus maigre, puisque les départs de Mané Bajic, Patrick Chouvin, Daniel Delangre, André Loup, Philippe Levavasseur et Edmond Baraffe ne sont compensés que par l’arrivée du seul Hervé Gauthier en provenance du Stade Poitevin. Lille décide alors de faire davantage confiance à ses jeunes et notamment à Tony Gianquinto (22 ans), Patrick Deschodt (21 ans) et Gabriel Desmenez (19 ans).
Cette saison connaît par ailleurs une petite innovation règlementaire: les équipes marquant au moins trois buts au cours d’un même match engrangent un point de bonus supplémentaire, ce qui, comme nous allons le voir, constitue indéniablement une réforme du Grand Complot Ourdi par qui Vous Savez (GCOVS).
En haut de g. à d.: un demi Gianquinto, Iché, Deschodt, N’diaye, Mujica, Fouilloux, Dusé
En bas : un demi Samoy, Gauthier, Baraffe, Riefa, Desmenez, Leroux
La saison débute bien mal pour les Dogues. En effet, s’ils ambitionnent de jouer les premiers rôles, ils se doivent d’abord de tenir leur rang contre les « petits ». Le promu rochelais en fait indéniablement partie, statut que sa dernière place à l’issue de la saison viendra confirmer. En manque d’inspiration, les Lillois ne parviennent pourtant pas à faire mieux qu’un triste 0-0 qui aurait pu se transformer en douche froide sans un gros match de Charly Samoy venu suppléer Jean-Noël « Neuneu » Dusé, absent ce jour-là. Si Lille l’emporte lors de la journée suivante contre Lorient, encore à Jooris, le match confirme les difficultés offensives des Lillois qui ne l’emportent qu’à la faveur d’un but de René Riefa (56è). Le premier gros match de la saison, sur le terrain de Boulogne-sur-Mer, ne vient pas rassurer les Dogues qui s’inclinent par 3 buts à 1 lors de la troisième journée.
Peyroche revient à Lille
Suite à ce nouvel échec, René Gardien, l’entraîneur lillois (le gardien lillois ne s’appelle en revanche pas René Entraîneur (1)), est remplacé par Georges Peyroche. Sous sa direction, le LOSC se redresse, enchaînant par 4 victoires et 1 nul, lui permettant de se retrouver sur le podium, à égalité de points avec Valenciennes et à un seul petit point du leader boulonnais. Peyroche fait par ailleurs venir Christian Coste, un avant-centre qu’il a eu sous ses ordres quand il entraînait Lunel, et qui cartonne en ce début de saison en D2 avec Sète (7 buts en 10 matchs). A 24 ans, Coste est encore peu connu et joue sous statut amateur avec le club sétois, ce qui facilite sa venue à Lille qui lui propose son premier contrat professionnel.
Georges Peyroche, ancien milieu du LOSC, remplace René Gardien, ancien attaquant du LOSC
L’éclaircie semble alors arriver pour les Lillois. Alors qu’ils avaient débuté la saison en se voyant amputés de plusieurs éléments de leur secteur offensif et avec des joueurs aussi importants que Ignacio Prieto et Raoul Noguès blessés, ils sont désormais dans le peloton de tête, avec un avant-centre supplémentaire et leurs deux Sud-Américains de nouveau valides. L’ensemble est toutefois fragile et avant de recevoir Dunkerque, deuxième au classement après la 11ème journée, Lille reste sur une victoire poussive à domicile contre Le Mans (1-0) et un nul sur le terrain de Blois (0-0).
Le LOSC répond présent dans les grands rendez-vous
Face aux Maritimes, les Dogues réussissent ce qui sera l’une de leur marque de fabrique cette saison-là : être présents dans les grands rendez-vous. Christian Coste qui fait ses grands débuts ce jour-là ne tarde pas à rassurer ses dirigeants sur leur choix de lui faire confiance : dès la 10ème minute, il ouvre le score pour Lille à Jooris. Moins d’un quart d’heure plus tard, c’est Noguès qui double la mise (2-0, 23è). Le score ne changera plus.
Le deuxième gros test aura lieu un mois plus tard, sur le terrain de Valenciennes, leader malgré un match en retard. Verhoeve réalise un gros match dans l’entre-jeu lillois et Coste et De Martigny assurent le succès lillois sur le terrain de son concurrent (1-2). Le LOSC prend alors la tête de son groupe et entrevoit un peu plus clairement la montée en Division 1.
Mais ce LOSC-là n’est toutefois pas flamboyant. S’il reste solide, il n’écrase jamais la concurrence : sur les 7 matchs qui suivent, Lille n’en emporte aucun par plus d’un but d’écart, gagnant parfois au forceps, comme à Chaumont qui mène longtemps avant de craquer en fin de match (Coste pour le 1-1, 60è, puis Prieto pour le 1-2, 80è), et lâche quelques points en route (à Lorient et contre Boulogne et Cambrai).
Le roseau lillois plie face au complot mais ne rompt pas
Quand Lille reçoit Rouen pour le choc de la 25ème journée (Lille est deuxième à 1 point du leader rouennais), on est partagés entre la certitude de la solidité de l’équipe la plus difficile à battre de la division (et qui reste sur 15 matchs sans défaite) et les doutes sur son potentiel offensif réel, elle qui n’a inscrit 4 buts en un match qu’à deux reprises. Le cas de Christian Coste, seulement 5 buts en 13 apparitions, illustre ces doutes. De surcroît, la blessure de Mamadou Ndiaye, incontestable leader de la défense lilloise cette saison, vient même mettre le doute sur ce qui constitue les principales certitudes. Le LOSC donne à la fois l’impression de se distinguer par ses individualités (Prieto, Fouilloux, De Martigny, Noguès) et d’être pourtant en permanence sur un fil.
En outre, Lille semble le grand perdant de la réforme accordant un point de bonus aux équipes marquant 3 buts dans un même match ‘voir plus bas) : les Lillois n’ont ainsi encore obtenu que 5 points de cette manière, contre 10 pour Rouen et 9 pour Valenciennes. Sans cette réforme, Lille serait en tête avec 4 points d’avance sur les Normands et 5 sur les Hennuyers.
En coupe de France, Lille a été éliminé en 16ème par Sochaux (0-0, 2-0) : mais il y avait Battmann dans les buts doubistes
À Henri-Jooris, devant 8451 spectateurs, Lille s’impose finalement grâce à un but de Prieto (62è), mais reste tout de même deuxième, Valenciennes étant passé devant grâce à sa victoire (5-0) contre Hazebrouck qui lui donne un point de bonus offensif en plus des deux de la victoire. Illustration d’un championnat dans lequel le LOSC peine à se défaire de la concurrence, même une victoire contre le leader ne l’empêche pas de se faire dépasser simultanément par un autre concurrent !
Valenciennes résiste mais finit par craquer
A partir de là, Lille réussit presque le sans-faute : Lille cartonne au Mans (0-4), contre Blois (4-0), à Dunkerque (5-2), puis contre Besançon (4-1). En parallèle, les Valenciennois suivent ce rythme d’enfer : malgré cette belle série, les Dogues restent derrière Valenciennes à la différence de buts ! C’est bizarrement quand il ne gagne pas que le LOSC repasse devant ses voisins. Ainsi, Lille se contente du match nul à Brest (0-0) quand Valenciennes s’incline à Besançon (2-1). A quatre journée de la fin, il n’a pourtant qu’un point d’avance sur son dauphin et deux sur Rouen.
Le LOSC s’impose alors largement contre Poitiers (4-0), mais Valenciennes suit le rythme contre Montluçon (4-1). Les Montluçonnais reçoivent justement les Lillois pour la 32ème journée, les visiteurs maintenant leur rythme d’enfer (1-2) comme les Hennuyers vainqueurs à la Rochelle (0-1). Sur ces deux journées, les Rouennais lâchent en revanche l’affaire, explosant à Chaumont (5-1) puis s’inclinant encore à Poitiers (2-0).
Le 19 mai 1974, Lille a les cartes en main pour potentiellement assurer définitivement sa première place. Les Dogues reçoivent en effet leur dauphin à Henri-Jooris et, en cas de victoire en marquant au moins trois buts (et si VA ne marque pas également trois buts), ils compteraient alors 4 points d’avance. Le stade est plein (20 500 spectateurs officiellement pour une coquette recette de 381 231 francs) malgré la concurrence de l’autre « finale » du jour, celle opposant Valéry Giscard D’Estaing à François Mitterrand lors des élections présidentielles. A lui tout seul, le derby attire deux fois plus de public que dans tous les autres matchs réunis du groupe A de D2.
Le match est fermé, les deux équipes ne prenant aucun risque. Le match se débride lors du deuxième acte et c’est finalement le LOSC qui fait la différence à un quart d’heure de la fin du match arbitré par Robert Wurtz. Pour une fois, la décision ne revient pas à Christian Coste qui marche sur l’eau depuis quelques semaines (10 buts sur les 7 dernières rencontres) mais à Hervé Gauthier qui claque un doublé en une minute (75è et 76è). Le public exulte, en tout cas du côté lillois. 2-0, le score ne bougera plus.
Moins d’une semaine plus tard, Lille valide définitivement son ticket pour la D1 en l’emportant (0-3) sur le terrain de la lanterne rouge rochelaise. Un point suffisait, mais il était nécessaire, Valenciennes s’imposant pour sa part contre Boulogne (3-1).
La finale du championnat de D2, opposant les Dogues au Red Star sera à l’image de la saison. Restant sur 25 matchs sans défaite en championnat, les Lillois s’inclinent au match aller (2-0) sur le terrain des Audoniens. Au retour, et devant seulement 7600 spectateurs, les Lillois font d’abord leur retard grâce à Gaby Desmenez (7è) puis Hervé Gauthier (35è). Le Red Star reprend la main quand Marey réduit la marque (2-1, 38è). C’est finalement Desmenez qui remet les deux équipes à égalité à un quart d’heure de la fin (3-1, 75è). En prolongation, Christian Coste donne pour la première fois l’avantage aux siens (4-1, 108è) avant qu’Alain Verhoeve ne parachève leur succès (5-1, 115è). Toujours sur un fil, le LOSC est finalement un flamboyant champion de Division 2.
Christian Coste et Gaby Desmenez, décisifs en finale du championnat
Lille déjoue (encore) le complot
Les forces de l’odieux complot ourdi contre le LOSC depuis la nuit des temps n’avaient pourtant pas lésiné sur les moyens cette saison-là. La réforme des « points bonus » avait en effet d’autant plus de chances de passer comme une lettre à la poste qu’elle ne visait apparemment par le LOSC plutôt qu’une autre équipe. « Apparemment » car, comme les faits allaient le montrer ensuite, ce changement réglementaire avait de toute évidence été pensé pour mettre des bâtons dans les roues de notre équipe favorite.
Si nous avons des preuves ? Bien sûr. Nous avons des chiffres qui, comme vous le savez, sont les meilleurs amis de qui veut prouver des choses.
Pour démontrer cette ignoble manœuvre nous ciblant pour notre pureté de coeur, voici un graphique qui retrace le nombre de points de retard du LOSC sur le premier selon la journée avec les « points bonus » et le retard qu’il aurait eu sans. Quand le nombre de points indiqué est négatif, c’est qu’il s’agit du nombre de points d’avance du LOSC sur son dauphin.
Comme on le voit sur ce graphique, avec le comptage habituel, les Lillois auraient pris la tête du classement dès la 16ème journée pour ne plus la lâcher ensuite. Dès la 20ème journée, Lille aurait eu au minimum 3 points d’avance sur son premier poursuivant, pour en compter 5 deux journées avant la fin ce qui lui aurait permis d’assurer dès lors cette première place.
Avec la réforme, il en a été tout autrement. Si Lille prend parfois la tête du championnat (aux 17ème, 20ème et 21 journées), il reste le plus souvent en position d’outsider, jamais très loin (après la 16ème journée, le retard des Lillois ne dépasse jamais les 2 points), mais peinant à combler ce retard, ne reprenant la tête qu’à l’issue de la 30ème journée.
Encore une fois, le LOSC déjoua le complot.
(1) Ce qui nous permet de souligner que quand Liberopoulos était l’avant-centre de l’AEK d’Athènes puis du Panathinaikos, ces clubs n’avaient pas de libéro nommé Avancentropoulos.
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