Archiver pour janvier 2022
Posté le 31 janvier 2022 - par dbclosc
9 000 spectateurs à Grimonprez… Guichets fermés !
L’événement est suffisamment rare à l’époque pour être souligné : en décembre 1994, le LOSC joue à guichets fermés à Grimonprez-Jooris. À l’origine de ce retour en force du public, une opération commerciale montée Peugeot, sponsor du club. Mais tout ne se passe pas comme prévu.
On le sait : le LOSC est pionnier. Ce 17 décembre 1994, le club franchit un nouveau palier dans l’innovation marketing, en proposant une affiche à guichets fermés, dans un stade à moitié vide. Cette démonstration de force commerciale consiste ainsi à n’établir qu’un vague lien entre l’affluence dans le stade et la décision de ne pas ouvrir ses guichets. Décryptons cette stratégie.
Nous sommes fin 1994. Lille végète entre le ventre mou et la zone de relégation depuis plusieurs saisons. Depuis des années, le public a déserté les travées de Grimonprez-Jooris hormis, de temps en temps, pour jeter un œil sur un adversaire prestigieux. Cette saison 1994/1995 ne change rien à cette triste routine : même si l’équipe tourne assez bien à la maison, l’affluence oscille officiellement entre 5 415 (Nice en octobre) et 7 642 (Nantes en août) spectateurs. Autant dire que ce n’est pas, un soir de décembre, la venue de Sochaux, dernier du classement, qui risque d’améliorer la moyenne. Lors des deux précédentes années, la venue des Doubistes a attiré 4 526 (en 1993/1994) et 3 968 (en 1992/1993) spectateurs…
Et pourtant : la veille du match, la Voix du Nord annonce que ce Lille/Sochaux se jouera « devant des tribunes copieusement garnies ». En effet, les 13 500 places du stade Grimonprez-Jooris sont prises ! En voici la raison : la semaine précédent le match, Peugeot, sponsor du club, a acheté toutes les places disponibles, une fois retirés les invitations et les abonnements (soit 9 750 places). Officiellement, il s’agit, pour la marque automobile, de « mettre en place une opération pour Noël, qui s’adresse à tout le monde, et pas seulement à des VIP. C’est un geste de convivialité, un cadeau aux Lillois en période de fêtes. Qu’on ne s’y trompe pas, ce ne sera pas la fête de Peugeot, mais bien la fête du football » d’après les responsables marketing de la direction régionale. À l’entrée du stade et dans les tribunes, les « plack-band », un groupe venu des Pays-bas, mettront de l’ambiance. De plus, Peugeot proposera après le match un « show laser ». Pour la Voix du Nord (16 décembre), c’est un « joli coup ».
Grimonprez-Jooris à guichets fermés, c’est en effet un événement. Quelques mois auparavant, le futur champion parisien était venu à Lille devant « seulement » 10 593 spectateurs ; en remontant à la saison précédente (1992/1993), c’est le derby contre Lens qui avait attiré le plus de monde : 12 589 personnes. La Voix du Nord estime que le dernier match joué à guichets fermés à Grimonprez remonte à 1986, avec la venue de Marseille (23 457 spectateurs).
Mais alors, quand on voit l’affluence de 1986 (et on se rappelle que 25 578 spectateurs sont venus voir Saint-Etienne en 1979), pourquoi le stade ne peut-il accueillir que 13 500 personnes et pourquoi n’est-il plus possible d’acheter de places ? Ce sont les nouvelles normes sécuritaires, adoptées depuis les années 1980 après diverses catastrophes, qui ont contraint le LOSC à réduire la capacité du stade, presque de moitié : ce sera donc 13 500 places. M. Hubau, le responsable de la sécurité, avance quelques explications : « la structure du stade n’est évidemment pas en cause. En revanche, les bouches d’évacuation du public n’ont pas été jugées suffisantes dans les rapports établis par les sapeurs-pompiers. Des solutions devraient être vite trouvées par le biais d’ouvertures à même la pelouse, comme on en voit sur de nombreux stades ». Ainsi, bien qu’à guichets fermés, Grimonprez-Jooris ne donnera pas l’impression d’être plein, mais l’affluence sera tout de même exceptionnelle !
Selon la Voix, un stade entier acheté par un partenaire privé, c’est une grande première. Du moins en D1 puisque récemment, Nancy a reçu Le Mans devant 23 000 personnes avec le concours de l’Est Républicain, des magasins Leclerc et de Renault. Dans le journal est relaté un extrait de l’Est Républicain à propos de ce Nancy/Le Mans : « il faisait pourtant froid et il y avait du brouillard. Mais les gens sont venus nombreux, souvent en famille. Le père qui venait habituellement seul est venu avec femme et enfants. Et il y a eu une très bonne ambiance ». On rappelle aussi que, dernièrement, il y a eu des « opérations portes ouvertes » à Paris (lors du titre en avril 1994) et à Lens (lors de barrages en 1991), mais la Ligue est intervenue, officiellement pour « préserver l’équité sportive ». Là, c’est à l’initiative d’un sponsor, donc c’est très différent !
Lorsque l’opération a été décidée, Alain Tirloit, alors responsable commercial du LOSC, a eu une petite appréhension : « nous pourrions juger de cette façon du véritable impact qu’avait encore le LOSC dans la métropole… Mais j’avais la crainte que toutes les places ne soient pas prises ! ». Mais tout va bien : toutes les places achetées par Peugeot ont été distribuées, via des concessions ou via des clubs partenaires du LOSC.
Mais Alain Tirloit et ses collègues du club ne devraient-ils pas davantage craindre un complot contre le LOSC ? En effet, personne ne semble s’inquiéter que Peugeot remplisse un stade pour voir jouer… son partenaire historique ! Rappelons en effet que le FCSM a été fondé en 1928 à l’initiative de deux ouvriers de Peugeot, avec l’aide de Jean-Pierre Peugeot en personne, parce qu’une usine est située à Sochaux depuis 1912. Les Doubistes (ce qui rime d’ailleurs avec « complotistes ») ont déjà prouvé par le passé toute leur perfidie : la première « Coupe Sochaux » a ainsi permis au FCSM d’humilier l’Olympique Lillois 6-1 lors de la finale en 1931 !
La Voix du Nord donne la parole au directeur régional de Peugeot, qui n’est autre que Jean-Claude Plessis, ancien président de l’AS brestoisoise, qui assure : « à Lille, nous nous sentons plus Lillois que Sochaliens ». On est priés de le croire. La preuve : Jean-Claude Plessis sera le président du FCSM de 1999 à 2008.
Dernière contrariété avant la fête : l’écoulement des places s’étant fait par des canaux non-traditionnels, de nombreux acheteurs potentiels n’ont pu trouver leur bonheur au secrétariat du LOSC. Une affichette les en informe.
C’est le jour J. La Voix du Nord s’amuse : « le LOSC qui refuse des spectateurs. Un 1er avril, tout le monde aurait cru à une bonne blague » (17 décembre). Ce match est l’occasion de retrouvailles : depuis une semaine, Jacques Santini a remplacé Silvester Takac sur le banc sochalien. Le nouvel entraîneur sochalien, qui « avait plutôt l’habitude de recevoir devant des banquettes vides, quand il était Lillois, manifestera sans doute un certain étonnement en entrant sur la pelouse ». Santini retrouvera cinq joueurs lillois, déjà là quand il entraînait les Dogues : Assadourian, Friis-Hansen, Leclercq, Nadon et Rollain. Tout le monde salue le football-champagne prôné par Jacquot lors de ses années lilloises, comme Fabien Leclercq : « c’est vrai que Jacques Santini était plutôt porté sur le jeu défensif mais le club n’a jamais eu d’aussi bons résultats que lorsqu’il était là ».
Mais le plus drôle est l’anecdote rapportée par la Voix du Nord : dans la semaine, Jean Fernandez inscrit sur un tableau la probable composition de l’équipe de Sochaux pour le match. Jakob Friis-Hansen le reprend alors en disant qu’il y a une petite erreur : « devant la surprise de son coach, le libéro danois expliqua avec humour que les deux attaquants doubistes joueraient juste devant Cassard [le gardien] » (17 décembre). Bel hommage !
Fernandez donne deux principales consignes à ses joueurs : marquer vite pour obliger Sochaux à se découvrir, et séduire, pour faire revenir le nombreux public. Le LOSC reste sur un match considéré comme bon à Strasbourg. Pensez donc: Lille n’a pas perdu, et a même mis un but (1-1). Pour affronter les Sochaliens, on peut compter sur les retours de Sibierski, Foulon, Garcia, Carrez, Leclercq et Pérez, absents en Alsace. Lévenard, Hitoto et Rollain sont blessés.
Jacques Santini, quant à lui, est privé de Weber, Vos, Gnako, Mendy et Cuervo, c’est-à-dire beaucoup d’éléments offensifs. Mais il n’y avait peut-être pas besoin de cela pour que la Voix du Nord mette en exergue sa « phrase du jour », signée Jean Fernandez : « ce que je sais, c’est que Jacques Santini va fermer ». Place au spectacle !
Mais en dépit de la présence très visible de Pierre Mauroy, pour la première fois de la saison, le stade donne une drôle d’impression pour un match « à guichets fermés ». Bien sûr, seules 13 500 places peuvent être pourvues, donc des sièges sont vides. Et même s’il y a manifestement plus de monde que d’habitude, il y a tout de même un paquet de sièges vides…
En fait, de nombreux titulaires de billets ne se sont pas déplacés. Ce qui fait que l’on pouvait estimer le nombre de spectateurs présents, selon la Voix du Nord, « à près de 9 000, pas davantage. Navrant ! ». Et bien dommage pour celles et ceux qui souhaitaient acheter une place !
_Deux billets pour Lille-Sochaux s’il vous plaît !
_Il n’y a plus de places !
_Mais le stade est à moitié vide… ?
_C’est guichets fermés ! Voyez avec Peugeotroisansix !
De surcroît, aux abords du stade, certains titulaires de billets gratuits ont tenté… de les vendre : « il n’y a pas de petits bénéfices. Tout aussi navrant ! ».
Et voilà comment on joue à guichets fermés avec environ 15 000 sièges vacants.
Le 11 de départ : Nadon ; Duncker, Dindeleux, Carrez, Bonalair ; Etschélé, Friis-Hansen, Sibierski, Pérez ; Assadourian, Farina.
Sur le terrain, on va vite constater que les absents n’ont pas forcément tort. En dépit d’une chandelle de Sibierski qui ne passe pas loin du but de Cassard (11e) et de quelques dribbles de Perez, on observe dans l’ensemble « trop de timidité, trop d’à-peu-près. Du déjà-vu en somme ». Sochaux se montre avec une tête de Prat dégagée par Dindeleux (20e). Peu après, sur un corner de Perez, Carrez dévie pour Sibierski : Cassard est pris à contre-pied mais Piton dégage sur sa ligne. Sur ce, s’installe le « ronron habituel », à la fois dû au manque d’imagination des Dogues, et à un adversaire qui a installé un « véritable mur » : « Santini n’a jamais été un adepte du hourra football. Mais là, l’ex patron des Dogues avait été encore plus loin. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Dans un tel contexte, la vivacité et l’inspiration sont des atouts de poids. Malheureusement, les hommes de Jean Fernandez en étaient dépourvus ».
L’arbitre siffle la pause, et le public en profite pour siffler toute la première période : les joueurs rentrent aux vestiaires sous des huées logiquement plus bruyantes que d’habitude. L’opération séduction n’est pas en marche ! La Voix du Nord a une pensée émue pour les petits ramasseurs de balle (venus de Landas) qui, en raison du nombre et de la qualité des tirs, « n’eurent guère l’occasion de se réchauffer les mains ».
Mais « une mi-temps chasse l’autre… heureusement ». Le LOSC semble être revenu avec de meilleures intentions : Assad centre vers Farina, qui reprend de peu à côté (49e) ; Carrez tire un coup-franc dans le mur, Duncker suit mais oublie de frapper (55e). Et c’est au moment où on croit les Lillois proche de marquer que Baudry, de l’autre côté, se retrouve seul face à Jean-Claude Nadon, qui repousse brillamment la plus grosse occasion du match (57e). Suite à ce sérieux avertissement, la Voix du Nord constate « un milieu de terrain engourdi, une attaque anonyme, à l’image de son avant centre Farina ». Pire, on bascule dans un « match indigeste ». Pour tenter de dynamiser son attaque, Fernandez fait entrer Garcia et Boutoille, aux places de Perez et Etschélé.
Puis, miracle : enfin « un mouvement collectif cohérent » : Carrez sert Duncker, qui trouve Assadourian à l’entrée de la surface. Il sert parfaitement Sibierski, lancé au point de pénalty, qui conclut (1-0, 66e). Ouf !
Extrait Les plus beaux buts du championnat de France 94/95, TF1 Vidéos
Le match devient alors un peu plus ouvert. Garcia, qui a remplacé Estchélé, bute sur Cassard (75e). En toute fin de match, Farina (87e, 90e) et Bonalair (89e) auraient pu alourdir le score, mais cela aurait mis en péril le record de victoires 1-0 à domicile que le LOSC vise cette saison-là.
« Programme minimum », « match sans grand relief », « joueurs le plus souvent aux abonnés absents », mais cela fait 3 points et, en 1994, on s’en contente bien ! À défaut d’être franchement méritée, la victoire n’est pas imméritée. Pendant que le show laser bat son plein, Jean Fernandez, lucide, déclare : « on n’a pas fait un bon match (…) ça a été tout de même assez laborieux. Sochaux était venu pour prendre un point et tenter d’obtenir le 0-0 ». Jacques Santini se rend compte de la tâche qu’il a à accomplir : « il n’y a que 8 jours que je suis là et c’est la première fois que je vois mon équipe à l’oeuvre. Il y a eu trop de ballons perdus, trop d’approximations dans son jeu ? C’est la raison pour laquelle je pense que le LOSC mérite sa victoire ». On n’oublie pas de saluer Jean-Claude Nadon, notamment pour son arrêt vers l’heure de jeu, comme Antoine Sibierski (« ce n’est pas moi qu’il faut féliciter en premier, mais bien Jean-Claude, qui fut l’auteur de deux arrêts spectaculaires » et Jean Fernandez « le tournant du match, ne l’oublions pas, c’est l’arrêt de Jean-Claude Nadon en début de deuxième mi-temps ».
Dans la Voix des Sports datée du lundi 19 décembre, on met en avant, à défaut d’un jeu léché et spectaculaire, les « valeurs morales » de cette équipe lilloise, finalement assez attachante, et qui a tout de même un meilleur visage que celui affiché lors des deux dernières saisons : « privé de force de pénétration, le LOSC se raccroche donc à ses qualités morales, et elles sont grandes cette saison, pour noyer le poisson et mener à bien ses missions ». Avec 24 points à la trêve, Lille est dans le bon tempo. L’hebdomadaire souligne qu’indépendamment du jeu, encore laborieux, on sent une meilleure ambiance dans le groupe lillois, qui évoque volontiers le travail effectué, ainsi que des objectifs qui paraissent clairs et auxquels il adhère. Jean Fernandez et Bernard Lecomte sont à ce titre salués pour avoir installé « une ambiance, un environnement propice à une remise à flots bénéfique sur le plan moral ».
Et il est vrai que même si le LOSC connaîtra encore quelques frayeurs sportives durant la saison, il fera preuve aussi de belles performances à domicile tandis que, sur le plan financier, Bernard Lecomte dévoile progressivement une vision stratégique qui faisait cruellement défaut au club. Et même si elle ne s’annonce pas réjouissante, la transparence est appréciée.
Quant à l’opération de drague envers le public, si on a perfidement souligné ses quelques ratés, il n’est pas dit que, même à 9 000, elle n’ait pas été un succès, ne serait-ce que parce qu’il a permis un à public jeune d’assister à un match de football dans de bonnes conditions, et sans considération pour la qualité du jeu, pourtant sévèrement jugée dans la presse. L’auteur de cet article a d’ailleurs fait partie, via son club de foot, des bénéficiaires de l’opération. Dans l’immédiat, les affluences n’ont pas explosé, oscillant entre 5 415 (Metz en février) et 12 000 (PSG en mars) jusqu’à la fin de la saison. Mais officiellement, ce Lille/Sochaux est la meilleure affluence de la saison, puisque 13 500 billets ont effectivement été vendus, et c’est ce qu’indiquent aujourd’hui les sites spécialisés.
Si cette action est ici l’oeuvre d’un sponsor privé, on peut aussi toutefois y voir les prémices d’une plus grande considération accordée au public, qui sera un des marqueurs de la présidence Lecomte – même si, bien sûr, tout n’a pas été rose – avec des tarifs attractifs et des formules d’abonnement originales, qui permettront au LOSC, pourtant en D2, de battre ensuite chaque année son record du nombre d’abonnés, à partir de la saison 1997/98.
Par la suite, les résultats du club faciliteront le retour du public, au point de faire passer 13 500 spectateurs pour une affluence ridicule.
Partenariat LOSC/Peugeot lors de la saison 1995/1996
Posté le 24 janvier 2022 - par dbclosc
Faux pas dans le derby
Après le match rejoué en coupe contre Beauvais (7-0. Pour rappel, lors du premier match, le score avait été de 7-0), suivi immédiatement d’une nouvelle qualification, cette fois contre un club de D1, Issy (mais là-bas, 5-1), le LOSC a retrouvé le championnat au Havre la semaine dernière. Et Lille y a obtenu un nul probant (2-2) : après les deux défaites chez les autres membres du quatuor de tête (0-1 à Nantes, 1-2 à Metz), il était important de tenir tête aux principales rivales du championnat. D’autant que, rappelons-le, ce sont les confrontations directes qui priment en cas d’égalité au classement. Le nul est donc intéressant dans l’absolu mais, devant, ça galope toujours : avant ce match Lille/Lens, Metz est en tête (25 points) suivi de Nantes (24 points), Lille (23 points), puis Le Havre (22 points). Et ça se joue souvent à pas grand chose, Metz ayant par exemple gagné sur un pénalty à la 85e la semaine dernière contre Orléans, pendant que Nantes ne gagnait que par un but d’écart à Saint-Maur. Bref, on le répète semaine après semaine : ce sera serré jusqu’au bout ! Et comme l’a souligné Rachel Saïdi dans la presse régionale cette semaine, « tout le monde a perdu des points contre des équipes hors du top 4 ».
En l’occurrence, ce serait bien de ne pas perdre de points comme l’adversaire du jour, Lens, qui n’est pas le Top 4 (5e). Comme dit le proverbe : « Contre Lens, il ne s’agit pas de caler ». Mais les Lensoises ont connu un début poussif au niveau comptable (une défaite suivie de quatre nuls, dont ceux contre Lille et Metz), avant d’adopter un rythme de croisière précisément assez proche de celui du top 4, en signant notamment une performance notable contre une des équipes de tête (victoire contre Le Havre 3-1). Autant dire qu’on est aussi sur un sommet de la saison, renforcé par la dimension « derby », dont on sera privé de l’éventuelle ferveur populaire, puisque des restrictions liées au contexte sanitaire ont limité la capacité d’accueil de Luchin à 250 personnes. Ne sont donc présents que les officiels, médias, partenaires et proches des joueuses.
C’est le premier Lille/Lens, version féminine, d’équipes « Seniors ». En effet, en 2019/2020, seul le match aller avait pu être joué, à Bollaert (d’ailleurs, c’était encore officiellement Arras) et, la saison dernière, aucun derby n’a été joué, l’interruption du championnat survenant juste avant le match aller à Lens.
À l’aller, les deux équipes se sont séparées sur un nul (0-0). Si les Lilloises ont été bousculées en première mi-temps, leur outrageuse domination en seconde période aurait dû être récompensée par un but, qui n’est malheureusement pas arrivé. Et les joueuses le gardent forcément en travers : « on aborde ce match avec une certaine envie de revanche après le nul de l’aller » indique Rachel Saïdi dans la Voix du Nord ; « on veut remporter ce match essentiellement pour la suite du championnat mais aussi pour prouver que la section féminine du LOSC est en avance sur celle de Lens ».
En même temps se joue Metz/Le Havre, où au moins une des deux équipes perdra des points, et Nantes joue à Strasbourg.
Equipe classique du côté du LOSC. Naomie Bamenga est préférée à Salomé Elisor. Et la compo des Lensoises, qui ont sorti une tenue d’un bleu fluo immonde qui leur va à ravir :
14h30 C’est parti Paprzycki !
6e Les Lilloises se posent d’emblée dans le camp lensois, avec une succession de corners en ce début de match.
10e Corner de Silke Demeyere, qui rebondit au premier poteau, passe devant tout le monde, et atterrit finalement sur Polito, seule au deuxième poteau, qui reprend du droit à ras de terre, 1-0 !
12e Fremaux profite d’une glissade dans la défense lensoise pour gagner du terrain, elle trouve un relais avec Bamenga et se présente aux abord de la surface. Elle cherche Azzaro dans la surface de réparation, mais c’est contré par une arrière, qui ne passe pas loin du csc. Corner.
14e Première frapounette lensoise avec Diop depuis l’angle droit de la surface de réparation. Elisa Launay capte.
18e Bamenga, à 40 mètres du but lensois, réussit un très beau contrôle orienté qui lui permet d’éliminer une adversaire. Elle voit Azarro, lancée dans l’axe, mais la passe est contrée d’un rien par une jambe tendue.
20e Sur la gauche, encore un beau mouvement lillois avec Boucly, Bamenga puis Mouchon. Celle-ci centre et Demeyere est à deux doigts de pouvoir reprendre.
22e Carton jaune pour la lensoise Pauline Cousin, qui avait dangereusement taclé 30 secondes auparavant. L’avantage avait été laissé aux Lilloises.
24e Lens attaque côté droit. Diop centre vers les 6 mètres, Fremaux repousse du talon et, au point de pénalty, Cousin égalise d’une volée du gauche (1-1)
Alors que les Lilloises dominent largement leur adversaire depuis le début du match, la première occasion lensoise fait mouche.
25e Demeyere élimine trois adversaires et se présente dans la surface de réparation. Sa frappe est contrée, mais revient sur Mouchon. Du droit, Noémie croise, c’est légèrement dévié et ça passe à un cheveu du poteau opposé. Corner.
Le corner est repoussé, et revient sur Demeyere qui frappe sans trop de danger pour Mancion.
27e Faute de Ollivier dans l’arc-de-cercle, plein axe. Smaali enroule du gauche, en plein sur l’équerre, puis ça tape la ligne. Gavory reprend du droit, Launay touche la balle du bout des gants, ça termine sur le poteau, puis ça longe la ligne et Elisa s’en empare finalement. Les Lensoises se montrent peu, mais c’est drôlement dangereux à chaque fois !
29e Bamanga vers Boucly, qui centre vers Mouchon, dont la frappe termine à côté.
30e Au tour d’Agathe Ollivier d’essayer, de loin, et du droit ! À côté.
31e Dans le camp lillois, Polito sert Fremaux à droite, qui joue avec Bamenga. Le ballon parvient jusqu’à Azzaro au milieu, qui joue en retrait sur Paprzycki, qui lance en une touche Mouchon dans le couloir droit. Le centre au point de pénalty est joliment repris par Boucly, qui conclut du gauche : quel but bien construit, 2-1 !
37e Faute sur Bamenga à une trentaine des buts lensois, sur la droite. Boucly envoie une balle dégagée du poing par la gardienne, corner. Celui-ci est frappé directement par Paprzycki, sur l’extérieur du poteau.
Les lensoises partent vite sur la remise en jeu. À notre avis, Traoré est hors-jeu côté droit mais l’arbitre ne l’a pas vu. Ça se termine par une frappe manquée, qui termine en touche, alors qu’il y avait mieux à faire (tirer vers le but par exemple).
Rachel Saïdi est rappelée à l’ordre par l’arbitre. On a dû voir la même chose.
41e On tente de percer côté gauche à Lille, avec Azarro, puis Boucly. Et finalement, Agathe Ollivier s’enfonce et frappe à 15 mètres : sur la gardienne.
43e Coup-franc pour les Lensoises sur la gauche, frappé par Gavory : Launay attrape sans problème. Le LOSC joue vite le contre, avec Azarro qui sert Boucly : la frappe de Maïté est repoussée des pieds par la gardienne.
45e Gavory reprend de volée un centre venu de la droite de Traoré, c’est largement au-dessus.
45 + 1 Carton jaune pour Smaali, après une faute sur Bamenga.
C’est la mi-temps, Lille mène 2-1. Avantage logique au vu des occasions, et on peut même regretter que l’écart ne soit pas plus grand, tant le LOSC a paru supérieur, notamment dans les 20 premières minutes, puis dans les 10 dernières. Comme les Lilloises nous y ont habitués, on voit de belles combinaisons, et le danger vient surtout des côtés.
Les Lensoises sont cependant restées dans le coup en marquant sur leur première opportunité, et n’ont pas été loin de prendre l’avantage dans la foulée. Même si elle n’a pas eu l’occasion de se montrer, on sent que l’avant-centre Sang & Or, Diop, comme à l’aller, est aussi provocatricre que dangereuse, jouant de son physique avantageux.
15h30 C’est reparti Paprzycki !
48e On prend des risques à 30 mètres de nos buts : perte de balle de Paprzycki, et bonne grosse faute de Bamenga : carton jaune. Le coup-franc, tiré par Smaali, est capté par Elisa Launay.
50e Agathe Ollivier est sur son côté gauche. Azarro est seule dans la surface, mais le centre est contré, merde !
52e Carton jaune pour Silke Demeyere, après une faute qu’on peut qualifier de pas évidente. C’est le moment choisi par un spectateur pour demander à l’arbitre si elle est « payée par les Houillères du Nord et du Pas-de-Calais ». À peine le temps de rigoler que les lensoises attaquent par la droite avec Coquet, le ballon est cafouillé dans la surface, puis remisé vers Cousin, qui égalise de près (2-2).
55e C’est curieux, mais on est en train de se dire que nos Lilloises n’y sont plus du tout. Les Lensoises sont certes montées d’un cran, mais impossible de se trouver ou même de profiter de quelques contres.
57e Coup-franc pour Lens, sur la droite de la surface. C’est dégagé de la tête par Paprzycki, sur Cousin, qui reprend de volée à l’entrée de la surface et marque encore, en pleine lucarne ! 2-3.
60e Frappe lointaine de Paprzycki, à côté.
Chloé Marty replace Lorena Azzaro. Noémie Mouchon passe dans l’axe de l’attaque.
61e Carton jaune pour Eva Fremaux, qui a été dribblée sur son côté. Le coup-franc lensois est dégagé par la défense lilloise. Fremaux tente de repartir mais est victime d’une obstruction, que l’arbitre met un temps fou à siffler, ce qui irrite beaucoup les Lilloises, d’autant que l’obstrueuse semble s’être assoupie sur la pelouse et ne veut pas se relever.
66e Double changement au LOSC : Olliver et Bamenga sortent, Pierel et Elisor entrent.
Alors que les changements lillois ont été faits depuis 20 secondes, Lens procède au sien : Thivillon remplace Traoré. Après l’arrêt de jeu de 3 minutes à la 61e, ces remplacements ont duré deux minutes.
On ne joue pas beaucoup dans cette seconde période.
74e Pendant que les lilloises ne se trouvent pas et que Lens est bien en place, changement à Lens : Coquet est remplacée par la 28.
79e Le peu de récit que l’on fait sur la seconde période est l’illustration d’un jeu devenu hâché, qui se passe souvent en milieu de terrain et dans lequel il n’y a pas d’occasion. Les lilloises ne parviennent plus à s’approcher du but adverse, tandis que les Lensoises semblent mieux organisées derrière et cherchent même des brèches devant.
Après avoir perdu le ballon, Pierel tente de le reprendre mais semble attraper la cheville d’une Lensoise : elle est directement expulsée. De là où on est, difficile de se faire un avis, mais Chloé Pierel est très en colère, de même que bon nombre de Lilloises qui entourent l’arbitre, et on n’a pas l’habitude de les voir réagir de la sorte. Eva Fremaux, notamment, est très agacée, et on a comme l’impression qu’il se passe quelque chose qu’on ne peut pas percevoir de la tribune.
Bien entendu, après avoir frôlé la mort pendant 2 minutes 30, la lensoise se relève.
84e Grosse faute sur Demeyere qui n’est sanctionnée que d’un coup-franc. Ça commence se pousser et à se filer des claques.
La gardienne de Lens, qui est venue grogner, prend un carton jaune. De l’autre côté du terrain, une lensoise est à terre après avoir fait passer une poussette de Fremaux pour un uppercut.
Les deux capitaines sont appelées par l’arbitre, puis Eva Fremaux en particulier.
Après ces 3 nouvelles minutes sans jouer, le coup-franc de Paprzycki, dévié par Devlech’, est repris par Fremaux en extension, mais ça passe à côté.
88e Marty s’enfonce dans la surface lensoise, dribble, et tombe. A-t-elle été accrochée ? Voilà qui en tout cas n’améliore pas la relation entre les lilloises et l’arbitre.
Sur le contre, les lensoises profitent des espaces, et Elisa Launay sort loin de son but prour écarter le danger.
Lens effectue un dernier changement.
90e + 2 Corner de Paprzycki, qui atterrit sur la main d’une Lensoise. Donc on joue.
En contre, Diop part au but. Au duel avec Marty, les deux joueuses s’accrochent. Finalement, c’est Marty qui attrape en dernier le col de Diop à 40 mètres du but lillois. Marty est expulsée. On peut considérer qu’il y a annihilation d’occasion de but, mais on aurait aussi pu siffler, plus tôt, dans l’autre sens… Là encore, il faut du temps pour reprendre le jeu, tant les Lilloises contestent. Salomé Elisor prend un carton jaune.
90e + 6 Lille obtient un bon coup-franc à 22 mètres. Elisor enroule, mais cela passe à côté.
90e + 7 Launay doit sortir loin de son but, Lens récupère à 40 mètres et ça frappe de loin : juste à côté.
90e + 9 (on sent qu’avec autant de temps additionnel, l’arbitre a bien tenu son match et a la conscience tranquille) Diop attaque Paprzycki au duel aérien a place un violent coup d’épaule dans le visage d’Aurore. Carton… jaune ! Aurore est KO. Et on s’arrête encore pour deux minutes.. Le soigneur, faisant manifestement constater les dégâts à l’arbitre, est sanctionné d’un carton jaune !
90e + 12 Dernier ballon envoyé dans la surface lensoise, c’est dégagé. On termine avec une bagarre générale, et les insultes de Diop envers le public. Saluons-la pour sa volonté d’uniformiser les pratiques entre foots masculin et féminin !
Défaite du LOSC 2-3. Deuxième mi-temps fort différente de la première, au cours de laquelle les Lilloises, sans être franchement dominées, ont perdu le fil, se retrouvant prises en défaut au milieu et sans solution offensive. De l’autre côté, les Lensoises, en jouant un cran plus haut, ont su profiter des moindres espaces et ont été très réalistes. La première période, très aboutie, a-t-elle pu endormir les Lilloises, ou les rendre trop sûres de leur force ? Toujours est-il qu’elles ont montré un manque d’imagination qu’on ne leur connaissait pas, qui rappelle à certains égards une défaite face au Havre, il y a deux ans : là aussi, on attendait beaucoup de nos favorites dans un match au sommet, et elles étaient passées au travers (durant les deux mi-temps), avant de rebondir et d’enchaîner avec une belle série de victoires.
Il y a donc d’abord eu une défaillance collective à l’origine de ce résultat. Mais il est impossible d’évoquer ce match sans faire référence à la façon dont le match a été dirigé. Il nous semble qu’on est suffisamment bienveillants sur ce blog envers les arbitres (on nous indique même parfois qu’on est excessifs sur ce registre) pour nous permettre d’émettre de sérieux doutes quand quelque chose semble clocher.
En l’occurrence, on a un peu de mal à croire que l’inhabituelle nervosité de nos joueuses ne soit due qu’à la frustration du résultat et du scénario du match. On ne contestera pas outre mesure les deux expulsions (quoique la première semble constituer une erreur d’appréciation de l’arbitre), mais davantage l’ambiance ressentie autour de ce match : si l’arbitre a considéré que Pierel avait mis une semelle mal placée, on peut lui mettre le rouge. Si l’arbitre considère que Marty empêche Lens de marquer, on peut lui mettre le rouge. Mais la réaction des deux expulsées et de leurs coéquipières est suffisamment véhémente pour qu’on ait envie d’accorder de l’intérêt à leur défense. Les Lilloises ont semblé tellement exaspérées qu’on a vite compris que la relation entre elles et l’arbitre était cassée. Pour quelle raison ? Sagement, les Lilloises ne nous en ont pas dit davantage.
On a ainsi le sentiment que les expulsions sont la conséquence d’un match mal géré par l’arbitre, qui a ajouté de l’énervement à la frustration, en ne faisant rien pour contrer la stratégie des Lensoises (que l’on comprend bien) de casser le jeu. Ou quand, par exemple, elle a averti Demeyere pour une faute peu évidente qui a conduit à un but ; quand elle a laissé à trois reprises les Lensoises gémir à terre sans exiger qu’elles ne sortent pour être soignées ; ou quand elle a mal géré les remplacements de la 66e, donnant l’impression d’accompagner les visiteuses dans leur gain de temps.
En toute fin de match, deux actions litigieuses auraient pu donner un pénalty à Lille, et Diop aurait bien mérité un rouge, elle aussi (avant puis après le coup de sifflet final).
Lorsqu’on en arrive à mettre 12 minutes de temps additionnel après un match où il n’y a pas eu tant de fautes, on peut y voir le symptôme d’un match non maîtrisé.
Les réactions ci-dessous de Rachel Saïdi et de la capitaine Gwen Devlech’ confirment qu’il y a eu des problèmes sur le terrain. Quand on annonçait que Lens jouerait les arbitres, on n’imaginait pas que ce soit à ce point ! Au Nord, c’étaient les corrom-pus !
Comptablement, et symboliquement, cette défaite est bien sûr une mauvaise affaire. 1 point en deux matches contre cette équipe… Cependant, les résultats de l’après-midi (nul de Nantes à Strasbourg, victoire du Havre à Metz) maintiennent la première place à 2 points des Lilloises. Ce qui signifie aussi qu’en gagnant, le LOSC aurait pris la tête mais, décidément, ce championnat est indécis. Puisse-t-il l’être uniquement sur la valeur des équipes… !
Les prochains matches nous permettront de répondre à la question : cette défaite contre Lens est-elle un accident mineur, de fond…?
Coupe de France le week-end prochain, déplacement à Strasbourg le 6, et réception de Brest le 13.
Tout reste à faire !
Un résumé du match via Vrouwenteam TV :
La réaction de Rachel Saïdi :
Aujourd’hui, je ne suis pas déçue, je suis en colère. C’est la première fois de la saison que ça m’arrive, car on s’est arrêtées de jouer en seconde mi-temps. En seconde mi-temps, on a levé le pied, on a pris des risques bêtement, et on n’a pas été capables de peser offensivement comme on l’a fait en première.
À ce niveau là, dans un tel contexte, avec beaucoup de monde, avec une certaine pression par rapport au classement, on ne peut pas se permettre de passer à côté, y compris quand on est arbitre. En deuxième division nationale féminine, on doit être en capacité d’avoir du vécu, de l’expérience, pour mieux appréhender les situations, mieux maitriser le contexte et son environnement. Les derbies ont la particularité d’être assez chauds. Alors si on n’est pas ouverte au dialogue et à la communication, il ne faut pas faire ce métier là. Le match a mal tourné en deuxième mi-temps car les choix de l’arbitre n’ont pas été bons.
Mais nous sommes les premières responsables car on s’est laissés déborder par nos émotions de frustration et de colère. On a perdu de l’énergie, on a perdu du temps. Si on comptabilise le temps de jeu effectif de la deuxième, on doit être à 25 minutes… On doit se remettre en question et se remettre au travail dès demain, corriger ce qui n’a pas été en deuxième, notamment notre concentration sur les coups de pied arrêtés et notre présence sur les seconds ballons.
Quand on voit les résultats de Nantes, Metz et Le Havre, on voit que ce championnat est redoutable. Nous, on perd des points contre Lens : en début de saison, on avait déjà perdu des points contre cette équipe. Ça ne nous a pas empêchées d’être co-leader à la trêve. On aura encore l’opportunité de passer devant. Avec le scénario qu’on a vécu, je pense que les filles auront encore plus envie de se remettre au boulot, de tourner la page et de se remettre en selle, en coupe et en championnat.
La réaction de Gwenaëlle Devleesschauwer :
C’est frustrant, car au vu des autres résultats, on aurait pu repasser devant aujourd’hui. Mais on a fait des erreurs, et on peut s’en vouloir. On prend des buts qu’on n’aurait pas dû encaisser, et on ne s’est pas mises à l’abri de suite, ce qu’on aurait dû faire dès la première mi-temps. Nous sommes déçues mais il faut se servir de ce match pour rebondir. Rien n’est encore défini pour la montée.
Nous, footballeuses, on nous demande d’être correctes et de jouer au foot. Quand on est arbitre, on est censé être neutre et ne pas se disperser sur autre chose, comme se foutre ouvertement de la gueule des gens. Certains commentaires n’ont pas lieu d’être.
Apprenons de tout cela. On doit se canaliser sur les prochains matchs et se focaliser sur le jeu.
Les résumés des précédents matches auxquels on a assisté :
LOSC/Orléans : Lille recolle
LOSC/La Roche : Des Lilloises renversantes
LOSC/Saint-Malo : Lille s’empare des Malouines
LOSC/Strasbourg : Au bout du suspense
Lens/LOSC : le LOSC freiné
LOSC/Saint-Maur : Le LOSC réussit sa rentrée
Présentation de la saison
Posté le 22 janvier 2022 - par dbclosc
Complot hivernal (2/2) : le LOSC cueilli à froid
Le LOSC aura tout fait pour reporter le derby prévu à Grimonprez-Jooris en janvier 2002, mais rien n’y aura fait : comme on pouvait s’y attendre, Lille s’incline… sur un but imputable aux conditions météorologiques.
La première partie du complot hivernal est ici.
La neige et le froid causent bien des soucis aux Lillois au cours de cet hiver 2001/2002. Après la défaite contre Sochaux sur un terrain gelé en décembre, après l’accident de ski de Vahid Halilhodzic, après la défaite à Montpellier pour entamer 2002, le LOSC, qui s’entraîne dans des conditions difficiles en raison du froid persistant, s’apprête désormais à recevoir son voisin lensois, le vendredi 11 janvier. Mais, durant la semaine précédant le match, il existe une grande incertitude sur le tenue du match, précisément en raison de la rigueur hivernale.
Seule certitude : Vahid Halilhodzic, qui a fait une apparition mardi 8 à l’entraînement, sera de retour au stade, et probablement sur le banc, même s’il l’on se demande encore si le confort d’un siège en tribune officielle ne siérait pas davantage au convalescent. La Ligue Nationale de Football (LNF) a en tout cas fait savoir qu’elle considérait que Vahid avait purgé sa suspension (consécutive à l’après-match de Sochaux) à Montpellier : ben évidemment !
Le mardi 8 janvier, la Voix du Nord nous apprend que la pelouse de Grimonprez-Jooris est gelée à 5 -6 centimètres de profondeur. Il gèle en effet sur Lille tous le matins depuis le 28 décembre (de -7° à 0° le matin), avec une tendance à l’accentuation du froid depuis le 1er janvier. Et les rares fois où le thermomètre passe en positif durant la journée ne suffisent pas à écarter les doutes sur la possibilité du match. Bruno Baronchelli, évoquant la séance d’entraînement de la veille où un peu de soleil a permis de dégeler les zones dégagées, explique : « tout le monde s’est attaché à jouer. Il y a tellement longtemps que nous n’avions pas eu l’occasion de le faire. Pourtant, ce fut délicat sur une véritable patinoire. Si le ballon roulait effectivement bien, le terrain n’était dégelé qu’en surface et ce n’était vraiment pas l’idéal sur une pelouse souple au dessus et très dures en dessous ». Ce 8 janvier, le groupe part s’entraîner sur un terrain synthétique à Villeneuve d’Ascq. En l’état, le derby est considéré par le journal comme « compromis », « hypothétique ». La tendance passe ensuite à « improbable » dans l’édition du lendemain.
Il est en effet prévu, pour les trois prochaines nuits, des températures entre -7° et -9°, et pas de température positive en journée. Une décision est censée être prise jeudi 10 en cours de journée, lors de la visite d’un délégué de la Ligue Nationale : « il prendra une décision qui devrait être celle du report » (La Voix du Nord, 9 janvier). Selon Jean-Claude Grandclaude, un des responsables de la société Torève à Templemars chargée de l’entretien du terrain, « actuellement, la pelouse est dégelée sur 7 à 8 centimètres. Jouer serait donc possible même si ce serait embêtant pour le gazon. En revanche, si le froid revient en force, ce ne sera pas jouable ». Le 10, un intrigant spectacle a lieu à Grimonprez-Jooris.
Le délégué envoyé par la LNF s’appelle Louis Ortega. En début d’après-midi, il arpente la pelouse du stade en compagnie de Vahid Halilhodzic et de Pierre Dréossi, ce qui semble curieux. N’est-il pas censé faire cela seul ? Que cherchent à faire Dréossi et halilhodzic en l’accompagnant ?
Au bout de 30 minutes d’inspection, il est surpris de trouver une dizaine de journalistes à proximité des bancs : quelques jours avant, après le même travail à Sedan, personne ne s’était intéressé à son expertise. Il déclare : « la pelouse est gelée sur 15 à 20 centimètres, à l’exception d’une bande le long de la tribune présidentielle [note DBC : la plus exposée au soleil], mais elle est verte, bien plate et ne présente pas de bosses. Je conseille donc de maintenir le match. On peut prendre le risque ». À la question d’éventuelles pressions qu’il aurait reçues, il répond qu’il a agi en toute indépendance, « sinon je ne serais pas crédible ». La décision de M. Ortega étonne : si une telle question est posée, c’est bien parce qu’il apparaît aux yeux des journalistes que la pelouse n’est visiblement pas praticable.
Coup de théâtre deux heures plus tard : Francis Graille, prenant à témoin Pierre Dréossi, affirme qu’avant de faire son rapport, M. Ortega pensait, comme eux, que le terrain était impraticable. Pierre Dréossi confirme : « il a dit : « le terrain est complètement gelé, ce n’est pas jouable. Et quand il a téléphoné à la Ligue, on lui a demandé : « c’est gelé mais est-ce vert ? Est-ce plat ? ». Selon le directeur général du LOSC, le délégué de la Ligue aurait alors changé d’avis. Ou plutôt, il applique les critères d’évaluation de la Ligue, qui auraient changé. Très concrètement, cette décision, qualifiée plutôt de « non-décision » par Francis Graille, fait désormais reposer la décision sur les épaules de l’arbitre du match, M. Garibian.
Mais alors, si le récit des dirigeants lillois est vrai, comment expliquer cette volte-face ? Pierre Dréossi évoque des « pressions » : « après maintes pressions, la Ligue a laissé la possibilité à l’arbitre de décider de jouer ou non. Ils ont mis beaucoup de temps à se décider, alors que le terrain, gelé à 90%, est dangereux. La Ligue a un problème de calendrier ; le nôtre, c’est la sécurité des joueurs, mais on n’a ni plus ni moins d’intérêt que Lens à jouer ».
En attendant, les seules pressions visibles sont plutôt celles des Lillois : la présence du trio dirigeant (Graille/Dréossi/Halilhodzic) et son discours laisse planer l’idée que Lille n’a pas trop envie de jouer… Conscients que l’équipe a un coup de mois bien depuis un mois et avec l’absence de nombreux joueurs, blessés ou sélectionnés, on verrait sans doute d’un bon œil un report de quelques semaines !
Selon la Voix du Nord (11 janvier), « à Paris », tout est fait pour que le match ait lieu. Comprendre : le match étant diffusé sur Canal +, la LNF ne souhaite pas que son partenaire soit de nouveau privé d’une retransmission télévisée, les reports de matches s’étant accumulés depuis mi-décembre. Et du côté du LOSC, on est apparemment convaincu par cette version : « on est dans un monde d’argent auquel on participe » affirme Francis Graille. Il avance clairement que la pression vient de la Ligue, pas de Canal.
Prenant de nouveau les journalistes à témoin, en espérant que tout cela soit relayé dans les journaux du lendemain, a priori jour de match, Francis Graille les invite en soirée à Grimonprez, qu’il fait éclairer partiellement, afin que chacun puisse littéralement tâter le terrain. Commentaire de la Voix du Nord : « curieuse impression : l’herbe n’est pas gelée mais, en-dessous, c’est du béton ! ». On demande au président s’il n’y avait pas moyen de protéger la pelouse en amont. Justement, Francis Graille revient de Lyon, où une bâche a été posée sur la pelouse de Gerland ; il explique que la bâche est restée collée au terrain à cause du gel, et Lyon/Troyes est reporté. Autant dire qu’il n’y a pas grand chose à faire hormis, selon Gervais Martel, équiper les stades de pelouses chauffantes, comme c’est le cas à Sochaux, où ça a coûté 910 000€ : « mais on ne peut décemment pas en demander plus aux collectivités locales » souligne ce grand gestionnaire. Gervais « euh » Martel suit par ailleurs cette histoire avec beaucoup de recul et de sagesse : « je suis mal placé pour parler puisque le match n’a pas lieu dans nos installations mais à Lille. Par conséquent, je ne peux pas porter de jugement en la matière (…) Les lillois et le délégué de la Ligue nationale sont les seuls juges de cette affaire. Nous leur faisons confiance ». Sur le fond, Gervais Martel « préférerai[t] jouer. Mais je n’aimerais pas qu’il y ait des blessures ». Bruno Baronchelli tient à peu près le même discours : « s’il faut jouer, on jouera. Et si l’on a de la chance, on n’aura pas de blessés ! ».
Avant de partir, Francis Graille dit ne pas vouloir recourir à la mairie pour obtenir un arrêt municipal d’interdiction du terrain ; dire cela publiquement, c’est probablement un gros appel de phares pour solliciter un arrêt municipal d’interdiction du terrain. Ainsi s’achève une journée au cours de laquelle un mauvais feuilleton a tenu tout le monde en haleine, pour finalement aboutir à une décision reportée.
Vendredi 11 janvier : il n’a pas gelé pendant la nuit. En journée, la température atteint 7°, et il devrait geler de nouveau à partir de la fin d’après-midi. Suffisant pour jouer ?
Aux alentours de midi, Pascal Garibian inspecte la pelouse et, dès cet instant, il apparaît qu’elle est considérée comme praticable. On devrait donc jouer, sauf cataclysme météorologique.
Après un dernier repérage à 20h, la décision de jouer est prise : « la pelouse est inégale en certains endroits, mais c’est un terrain d’hiver tout à fait jouable ».
Après le brillant épisode des atermoiements du délégué la veille, la LNF publie immédiatement un communiqué qui ressemble à une justification que personne n’avait demandée, comme s’il fallait se rattraper de quelque chose : « Pascal Garibian a décidé, souverainement, que la rencontre Lille/Lens pouvait avoir lieu ». Commentaire de la Voix du Nord (12 janvier) : « souverain, l’arbitre a en effet certainement pris la bonne décision. Mais tout cela n’effacera pas l’éventail de questions soulevées, ces derniers jours, notamment au sujet de certaines pressions émanant de la télévision, ou d’ailleurs ».
Reste, pour les joueurs, à choisir les chaussures adéquates : certains endroits du terrain sont entièrement gelés (le long des Honneurs notamment), d’autres laissent entrevoir un brin de souplesse. Le toss est est effectué juste après l’échauffement, avant que les joueurs ne rentrent au vestiaire, pour ne pas à avoir à changer d’équipement en dernière minute en cas d’inversion des camps.
Le match peut donc commencer, mais la plupart des spectateurs et spectatrices ignorent qu’un autre complot contre le LOSC est en cours. Si un millier de lensois arrive « régulièrement » avec 18 cars, une centaine d’autres arrivent à Lille sans billet. Ils sont repoussés par la police aux alentours du stade après quelques bagarres. Puis la boutique du LOSC devient un théâtre d’affrontements, dans lequel on compte un blessé. Le groupe lensois est repoussé dans le Vieux-Lille. Bonne idée : « le groupe des « sans billets » s’est alors déchaîné sur un établissement fréquenté par des supporteurs lillois » : des véhicules sont dégradés et deux vitrines du bar-brasserie « À Faidherbe » volent en éclats. Bilan : un blessé léger, soigné sur place, qui a finalement pu assister au match. 80 personnes, toutes supportrices de Lens et membres des « Red Tigers », sont arrêtées.
Vahid Halilhodzic, assez peu mobile et tirant une tronche pas possible, est de retour. La saison précédente, Lille était allé à Lens pour confirmer sa première place. Un an après, Lens vient pour consolider sa place de leader, devant 20 191 spectateurs.
« Rendez-nous encore plus fiers de vous » lit-on en Secondes Basse, preuve que les quelques accrocs de ces dernières semaines n’ont pas entamé la relation entre le LOSC et ses supporters. Depuis la remontée, le LOSC n’a pas perdu un derby : deux victoires en 2000/2001 et un nul à l’aller.
Le match est pauvre en occasions. Sur un tel terrain, pas de miracle : les joueurs font ce qu’ils peuvent. Le match est équilibré, et le LOSC, qui peut compter sur le retour de D’Amico, fait bonne figure. Quelques escarmouches de part et d’autres ne permettent pas encore de débloquer le tableau d’affichage. Signalons que Johnny Ecker sort à la pause, mal remis d’un choc avec Sikora. Verdict : quatre côtes cassées. Décidément…
Dans ce genre de configuration, l’équipe la plus en réussite confirme que tout lui sourit : peu avant l’heure de jeu, Cygan, trompé par le terrain bosselé, manque sa passe en retrait à Grégory Wimbée et lance Moreira qui n’a plus qu’à transmettre à Diouf, qui conclut (0-1). Merci le terrain, merci le gel, merci la Ligue, merci Garibian, merci le complot !
En dépit de deux occasions pour Bakari (68e) et Sterjovski (71e), le LOSC s’incline et confirme sa perte de vitesse : inefficacité offensive, cadeaux derrière, fatigue, blessures, absences… Le LOSC traverse des doutes comme il n’en avait pas connus depuis un long moment.
Un résumé du match (Téléfoot) :
Le lundi suivant, Vahid Halilhodzic est de retour à l’entraînement. Il s’agit de préparer le match contre Bordeaux, à rejouer. Si Lille est encore laborieux, il égalise… à la 89e (2-2). Les habitudes reviennent progressivement. Et Djezon Boutoille, auteur de la première égalisation, déclare : « vous ne le saviez pas… je suis un homme du froid ! ». Ouf, on aperçoit la fin du complot hivernal.
Posté le 21 janvier 2022 - par dbclosc
Complot hivernal (1/2) : Le « planté de bâton » version Vahid Halilhodzic
Le 28 décembre 2001, en vacances en famille à Val d’Isère, Vahid Halilhodzic, le coach du LOSC, subit une lourde chute à ski. L’un de ses bâtons se plante parfaitement, mais pas où il faut. Bilan : quatre côtes cassées et un poumon perforé.
22 décembre 2001, 19h15 : en ce deuxième jour d’hiver, la neige se met à tomber subitement et abondamment sur Lille. Le match Lille/Bordeaux, qui devait clore l’année 2001 de football, est reporté à l’année prochaine. Voilà ainsi les Dogues en vacances anticipées de deux heures et, surtout, en vacances bien méritées.
Même si le mois de décembre a vu arriver la première défaite du LOSC à domicile cette saison, sur un terrain déjà gelé qui a surtout refroidi la clairvoyance de l’arbitre ce soir-là, et même si Lille y a été éliminé des deux coupes, les supporters des Dogues ont de quoi être comblés. Pour son retour en D1, Lille a en effet terminé 3e du championnat après avoir lutté pour le titre (presque) jusqu’au bout, s’est qualifié pour la Ligue des Champions, y a fait un parcours très honorable, et a déjà éliminé la Fiorentina de la coupe UEFA où il a été reversé. En championnat, les Dogues on été en tête jusque début novembre, et pointent à la 4e place, à égalité de points avec le 2e, au moment de cette trêve (avec, donc, un match en moins).
Cette exceptionnelle année 2001 vient d’ailleurs d’être récompensée par France Football : Lille y est désigné « club de l’année », Vahid Halihodzic « entraîneur de l’année » et Francis Graille « dirigeant de l’année » ! Alors ce ne sont pas quelques flocons et un match précédemment perdu sur terrain gelé qui vont jeter un froid sur l’euphorie ambiante.
Et pourtant : l’hiver, voilà l’ennemi ! La réussite du LOSC étant trop insupportable aux yeux de certains, les complotistes s’attaquent à la première cause de ladite réussite : l’entraîneur, Vahid Halilhodzic.
Le 23 décembre, accompagné de son épouse et ses deux enfants, Vahid Halilhodzic débarque à Val d’Isère. Les festivités de Noël se passent au mieux jusqu’au vendredi 28, jour où Vahid, se retrouve tout schuss (au fait : tout schuss du combien ?) sur la piste noire Oreiller-Kill.
Et ski devait arriver arriva : Vahid se casse violemment la figure.
Que s’est-il passé ? Selon la Voix du Nord (30 et 31 décembre), « une épaisse couche brumeuse enveloppait les pistes. Dans ces conditions difficiles, il a vu trop tard un obstacle, l’a heurté et est tombé lourdement. Il s’est retrouvé à terre avec le poids du corps sur le coude et le bâton. C’est ce dernier qui a causé les blessures dont il souffre ». L’enquête se précise dans l’édition du 2 janvier 2002 qui évoque une « bosse traitresse », mais Libération (31 décembre) parle d’ « un trou ».
Sans avoir perdu connaissance en dépit d’une « vive douleur », Vahid est secouru par un pisteur qui l’enveloppe dans une coquille : il est emmené en hélicoptère vers l’hôpital de Bourg-Saint-Maurice où on lui diagnostique quatre côtes fracturées, l’une d’elles ayant perforé un poumon. Le personnel médical s’inquiète un temps de la possibilité d’une hémorragie interne, qui est finalement écartée. Le soir-même, Vahid est opéré d’un pneumothorax, puis on lui pose un drain.
Déjà victime d’un accident de voiture peu avant le match à Lyon en novembre, ce qui l’avait obligé à porter une minerve durant plusieurs jours, Vahid vit décidément dangereusement. Et, cette fois, il sera difficile de rester à proximité du terrain. On l’annonce immobilisé pour plusieurs semaines, et probablement absent du banc du LOSC pour au moins un mois. Bonne nouvelle : sauf complications, il ne gardera pas de séquelles de cet accident : « si, dans un premier temps, il a accusé le coup, dépité de s’être ainsi mis hors d’état de travailler, il a vite repris le dessus moralement » note la Voix du Nord.
Le président du club, Francis Graille, court immédiatement à son chevet et se montre rassurant : c’est moins grave que ce que nous avons craint. Nous avons eu très peur mais, pour l’avoir vu, je sais qu’il va déjà beaucoup mieux. Le plus dur sera de l’obliger à penser d’abord à lui et à sa santé. À se soigner. Car son esprit est déjà au club. D’ailleurs, pendant les deux heures que j’ai passées avec lui, nous avons travaillé… ». Vahid devrait rester deux jours à Bourg-Saint-Maurice, avant d’être rapatrié en ambulance vers le CHR de Lille. Dimanche 30, Vahid reçoit la visite de Marcel Campagnac (chargé du recrutement et de la supervision des adversaires), de Pierre Dréossi (directeur général du club) et de Patrick Collot qui, parti en vacances comme milieu de terrain, revient en 2002 dans l’encadrement aux côtés de Marcel Campagnac.
La Voix du Nord, 31 décembre 2001. Sympa l’illustration !
À Grimonprez-Jooris, la reprise de l’entraînement reste fixée au lundi 1er janvier, jour où Vahid voyage en ambulance. Les deux séances du jour sont dirigées par les adjoints d’Halilhodzic : Bruno Baronchelli, Marcel Campagnac, Philippe Lambert et Jean-Noël Dusé. Selon la Voix du Nord, ils font face à des joueurs interrogatifs, qui leur posent une question insidieuse : « leur entraîneur avait-il le droit de pratiquer le ski, un sport qui leur est interdit ? ». Nous n’avons pas la réponse mais, même en ambulance, Vahid est très présent puisque le quotidien indique que Baronchelli a « plusieurs conversations avec lui alors que l’ambulance roulait sur l’autoroute aux alentours de Reims ». Si Bruno Baronchelli sera en première ligne sur le banc pour le prochain match à Montpellier (et, de toute façon, Vahid aurait été suspendu suite à sa colère après le match contre Sochaux), Vahid continuera à composer l’équipe : « nous avons préparé ces entraînements tous les quatre et nous avons été en contact avec Vahid comme nous en avions l’habitude » souligne initials BB ; « nous n’avons pas encore discuté de ce qui sera mis en place pour le match de Montpellier. Au lieu de se trouver dans les tribunes, puisqu’il était suspendu, il sera juste un petit peu plus loin ! Pour moi, cette situation n’a rien de frustrant. Chacun tient son rôle et l’entraîneur, c’est Vahid ! ».
Sur un terrain gelé et enneigé, les séances sont qualifiées de « toniques », avec « footing puis fractionnés ».
Du côté des joueurs, on ne semble pas perturbé outre mesure. La seule menace qui pointe est l’éventualité d’un démobilisation du groupe. Les joueurs savent aussi que leurs résultats vont être scrutés et, inévitablement, une défaite sera imputée à l’absence du chef. Comme le dit Bruno Cheyrou, « certains seront tentés de trouver une faille dans notre solidarité si les victoires ne suivent pas. C’est la première chose que Bruno Baronchelli nous a dite ce matin (…) Nous n’avons pas besoin de prétextes pour rester unis. Je sais que le téléphone va chauffer entre lui et le reste du staff technique. Le club est prêt à palier ce genre de mésaventure et nous assumerons parfaitement cette situation, tout en espérant un retour rapide de notre entraîneur ». Grégory Wimbée abonde : « si on lâchait quoi que ce soit à l’entraînement, nous ne serions pas crédibles. Une telle attitude aurait signifié en outre que tout ce qui a pu être dit et écrit concernant la force morale de notre groupe n’était qu’un gros mensonge ! ». Et l’aîné des frangins essaie de trouver un petit avantage à la situation : « disons que les excès de nervosité du coach seront moins sensibles quand ses ordres nous seront communiqués par ses adjoints ».
On rappelle aussi que ce n’est pas la première fois qu’Halilhodzic est absent : il avait déjà été hospitalisé en novembre 1998 pour des problèmes d’oreille interne, et le LOSC s’était imposé sans lui, à Caen (1-0).
Et l’entraîneur, grippé, avait également manqué le déplacement à Calais en coupe de France, en janvier 2000. Cette fois, le LOSC avait été éliminé.
Si l’absence momentanée de son entraîneur, à qui le drain est enlevé le 2 janvier, ne semble donc pas constituer un souci majeur au LOSC, l’hiver apporte tout de même son lot de préoccupations.
Premièrement, l’effectif compte quelques blessés : D’Amico est absent depuis fin novembre en raison de douleurs aux adducteurs et, durant cette semaine de reprise, Boutoille, Fahmi, Landrin, Beck et Cygan connaissent quelques alertes diverses. L’année 2001, et notamment les mois d’octobre et novembre, durant lesquels Lille a beaucoup joué, ont laissé des traces. Comme le résume Fernando : « c’est la première fois que je suis contraint à un arrêt aussi long. Jamais, jusque là, je n’avais été indisponible plus d’une semaine. Mais c’est une évidence, j’étais un peu fatigué. Nous avons beaucoup joué et j’ai fini par en payer le prix ».
Ensuite, en ce début d’année, Lille est privé de Murati, qui a joué en sélection nationale, et d’Olufadé, déjà en sélection pour la CAN. Après le match de Montpellier, Fahmi, Bassir et N’Diaye rejoindront aussi la compétition.
Également, Vahid aimerait des renforts. Et Lille ne trouve pas. Divers noms sont avancés mais ils sont trop coûteux pour le club.
Enfin, la neige et le gel ne quittent pas Lille. Le LOSC s’entraîne sur des terrains de très mauvaise qualité. Bruno Baronchelli explique : « notre seul vrai souci est l’état du terrain. Nos conditions d’entraînement sont éprouvantes ». Le groupe est contraint de jouer… sans ballon « et ce n’est vraiment pas la meilleure façon de préparer un match » note très justement l’adjoint n°1, dont on perçoit ici toutes les qualités de technicien ; « Mais pour le reste, nous n’improvisons rien. Les séances correspondent à ses souhaits, à sa méthode, à la manière dont il veut nous voir fonctionner. Je ne sens aucune pression supplémentaire parce qu’il n’est pas là. C’est simplement une situation à gérer. Les joueurs nous aident beaucoup en se montrant très coopératifs, très solidaires. Ils réagissent très bien, sont très corrects dans leur attitude ».
Pendant ce temps, Vahid, au CHR de Lille depuis le 1er, a demandé une télévision et un magnétoscope dans sa chambre. On suppose qu’il a aussi demandé des cassettes, du coup. Djezon Boutoille lui a rendu visite et apporte quelques nouvelles : « il souffrait, mais j’ai quand même trouvé devant moi un homme avec une forte envie de revenir. Pour lui changer les idées, je l’ai taquiné un peu avec son histoire de chute de ski. « Dites-moi, coach, c’est une faute professionnelle ? ». Il a rigolé.. ». Quel énergumène ce Djezon !
La sortie est prévu le 4, et Vahid envisage déjà de retourner au stade le 11 c’est-à-dire… le jour du derby.
Le groupe effectue une dernière séance d’entraînement le 5 au matin. Vahid téléphone après l’entraînement : via le haut parleur, le groupe lillois a reçoit des encouragements et des consignes. L’après-midi, l’effectif s’envole pour Montpellier, sans avoir très bien préparé le match ; non pas en raison de l’absence du coach, mais parce que les conditions climatiques ont empêché de travailler tactiquement. Bruno Baronchelli précise : « je regrette simplement que nous n’ayons pu insister sur l’approche tactique du match en raison du gel. Mais les joueurs connaissent assez leur sujet pour être en mesure de répondre à toutes les sollicitations ». Sur place, BB admet que l’absence de Vahid sur le banc n’est certainement pas un atout pour le LOSC, tant il représente un poids important dans la gestion des événements. Concrètement, « Vahid va suivre le match à la télévision. Et s’il a des remarques à formuler, il nous téléphonera ; ce qui est normal, car je n’ai pas le pouvoir de décision. Le décideur, c’est toujours lui. Je me considère surtout comme un messager de Vahid. Son discours, je le transmettrai avec mes mots, mais c’est lui qui l’aura bâti ; le but final étant que les garçons ne soient pas perturbés par son absence ».
Voilà la composition de départ :
Wimbée ; Pichot, Delpierre, Cygan, Ecker, Tafforeau ; Michalowski, N’Diaye, Br. Cheyrou ; Sterjovski, Bakari.
La dernière fois que Lille s’est déplacé à Montpellier, ça s’est bien passé : le 19 octobre 1996, le LOSC s’impose 1-0 grâce à un but de David Garcion. Depuis lors, Lille a passé 3 ans en D2, puis Montpellier est descendu quand Lille est monté. Les retrouvailles entre les deux clubs, au match aller, ont été animées : à 10, le LOSC a marqué grâce à deux buts inscrits dans le temps additionnel. Manifestement, ce scénario est resté en travers de la gorge des Montpelliérains. La Voix du Nord (6 et 7 janvier 2002) rapporte qu’« aux quelques frictions qui ont émaillé la rencontre de Grimonprez-Jooris vinrent s’ajouter hier soir de véritables agressions. Le montpelliérain a le sang chaud : le lillois l’a appris à ses dépens : la semelle traîne dangereusement, les duels sont âpres.. Dommage que de telles scènes aient encore la vedette sur des terains de football ».
Au niveau du jeu, Wimbée intervient d’entrée devant Silvestre (1e) puis Maoulida (17e). Lille réplique timidement par Sterjovski (9e) puis Bakari, prolongeant un coup-franc de Cheyrou (15e). Sur le banc, Lambert et Baronchelli donnent de la voix : « les deux techniciens lillois ne se dérobèrent pas ».
21e minute : Bruno Cheyrou lance Sterjovski qui emmène son ballon de la poitrine, et se retrouve seul face à Riou. L’Australien parvient à faire passer le ballon sous le gardion adverse, mais Silvestre revient et écarte le ballon… de la main. Mais l’arbitre ne le voit pas et ne donne qu’un corner pour les Lillois, dont la chance est passée. Quelques minutes après, Carooti récupère un ballon à 25 mètres : sa frappe, manquée, surprend Wimbée, qui est en outre trompé par un rebond devant lui (1-0, 26e).
En seconde période, le LOSC, « assez éloigné de ses standards habituels », ne semble pas en mesure de revenir. Et encaisse même un nouveau but-gag à la 62e : après un corner, Johnny Ecker tente de dégager de l’extérieur du pied gauche, mais le ballon file dans la direction opposée, directement dans les filets de Wimbée (2-0). En dépit de quelques offensives apportées par Bassir en fin de match, le LOSC s’incline 0-2.
Un résumé du match (Téléfoot) :
Certes, Lille a pris deux buts, « pas ordinaires » selon Francis Graille. Et certes, Lille aurait dû obtenir un pénalty à 0-0, et Vahid le pointe : « ce que je regrette, c’est que Silvestre a commis un pénalty qui n’a pas été reconnu par l’arbitre. Même si nous n’avons pas fait un gros match offensivement, il y avait de quoi faire un résultat… ».
Mais au-delà, la Voix des Sports (7 janvier) a trouvé un LOSC qui n’a « pas affiché la même maîtrise que d’habitude : duels perdus, occasions ratées, idées moins claires… », « légère, très légère érosion dans le domaine crucial des duels et des attaques de balle ». On croirait presque revivre le début d’année 2001, au cours duquel le LOSC avait perdu trois fois consécutivement (coupe de la Ligue, coupe de France et championnat), en montrant d’inquiétant signes de fébrilité, avant de se ressaisir. On croirait là que le LOSC a perdu la réussite qui l’accompagne depuis des mois. Les deux buts encaissés semblent montrer que quelque chose a tourné. Sur le premier but, Gregory Wimbée explique : « Carotti frappe dans la terre avant de tirer et la trajectoire de la balle est déviée une première fois. Quand le ballon touche le sol devant moi, sa trajectoire change à nouveau. Après, c’est très difficile de réagir ». « S’il fallait inventer un contraire à la baraka, Wimbée pourrait être celui-là, tant le gardien du LOSC a joué de malchance » commente la Voix des Sports.
Alors, faut-il conclure qu’en l’absence de Vahid, le LOSC a perdu son porte-bonheur ? À vrai dire, le LOSC est plutôt dans la continuité d’un mois de décembre où les premiers signes de fatigue se sont manifestés, comme on l’a rappelé en début d’article. À cet égard, faire de l’absence de Vahid la cause principale de la défaite à Montpellier est abusif. Le groupe a beaucoup donné sur l’année 2001 (et on peut remonter encore plus tôt) et connaît un bon coup de mou, comme s’il devait digérer sa soudaine réussite et son exposition nouvelle, ce que confirmera d’ailleurs tout ce mois de janvier : la première victoire du LOSC en 2002 ne surviendra que le 16 février, à Nantes.
Et surtout, l’hiver n’en finit pas de causer des torts au club, torts qui ont un effet boule de neige : les conditions d’entraînement à Lille ne permettent pas de travailler la tactique, et fragilisent le physique des joueurs. Après ce match contre Montpellier, Baronchelli répète que « le fait que nous n’ayons pas pu travailler tactiquement durant la semaine à cause du gel a pesé très lourd. L’absence de Vahid n’a pas eu d’influence. Elle n’a rien changé à notre façon d’aborder les matches. Ce qui nous a manqué, c’est la possibilité de travailler les duels à l’entraînement ! ».
Mardi 8, la direction du LOSC annonce un entraînement à huis-clos. Le derby se profile (si la météo le permet), mais on devine facilement ce que ce huis-clos signifie : voilà le retour de Vahid ! Il se rend tout d’abord dans les vestiaires pour discuter avec les joueurs, mais ne dirige pas la séance qui suit. Il l’observe au bord du terrain… bien au chaud dans la voiture de son épouse ! Encore très diminué, il se prête ensuite de bonne grâce à quelques échanges avec les supporters, ravis de le retrouver.
Bruno Cheyrou commente le retour de Vahid : « vous le connaissez aussi bien que moi ! Il est très professionnel et travailleur. Aussi ne pouvait-il pas résister plus longtemps à l’envie de venir nous voir et nous parler. Il nous a simplement demandés de rester mobilisés et d’effacer notre défaite à Montpellier par un résultat positif dans le derby »
Vahid Halilhodzic n’est pas encore en état de diriger les entraînements. Mais, vendredi 11, il retrouve sa place sur le banc pour le match contre Lens. Un match au cours duquel l’hiver n’en finit pas de comploter contre le LOSC.
Posté le 6 janvier 2022 - par dbclosc
1971 : L’hydre complotiste perd une tête
En novembre 1971, une étape importante dans l’enquête relative au complot contre le LOSC est franchie, avec l’arrestation d’un malfaiteur qui en voulait au club. Une action bienvenue mais malheureusement insuffisante pour éradiquer toutes les ramifications du complot.
Quelle malédiction frappe donc le LOSC ? Depuis sa création en 1944, le club ne cesse de cumuler des déboires et des déconvenues qui créent un faisceau d’indices, comme on dit dans les milieux policiers et judiciaires, très mobilisés sur la question.
Que l’on en juge par ces quelques éléments, tous traités sur notre blog, probablement motivés par la jalousie créée par la réussite du club après-guerre :
_depuis 1945, on considère que les championnats dits « de guerre » ne comptent pas vraiment, et donc on se permet de sous-évaluer les buts lillois marqués par Jean Baratte en mettant de côté ses performances avec l’OICL, l’équipe fédérale de Lille-Flandres et le LOSC 1944/1945 ;
_en février 1946, face à un LOSC bien parti pour gagner le titre, on fait s’écrouler le toit du stade Henri-Jooris en plein derby en espérant un retrait de points (qui n’arrivera pas) ;
_en septembre 1946, le LOSC, champion en titre, encaisse mystérieusement 3 buts dans les 10 dernières minutes du derby et concède le nul ;
_en novembre 1946, le capitaine François Bourbotte est licencié dans d’étranges conditions ;
_en 1947, le LOSC, régulièrement classé 3e du championnat, est relégué à la 4e place pour un prétexte fallacieux ;
_en mai 1948, Le LOSC se prend 3-8 à Saint-Etienne : étrange…
_en 1949, le LOSC, bien parti pour enlever son deuxième titre de champion, en est privé car on fait rejouer le match que Reims, concurrent du LOSC, était en train de perdre ;
_en 1951, les Lillois parviennent en finale de coupe latine avec 250 minutes de jeu dans les jambes et doivent affronter un adversaire qui a joué 90 minutes avec un jour de repos supplémentaire ; et, de plus, l’UEFA décide que cette coupe d’Europe « ne compte pas pour de vrai ».
_en 1954, le président Henno se fait berner par un légionnaire tchécoslovaque qui prétend être le Hongrois Zacharias, le recrute et ne remplace finalement pas Van Der Hart, et le LOSC chute ;
_au printemps 1955, des comploteurs informent l’ASSE qu’il faut piquer le jeune Jean Oleksiak au LOSC car il n’y a pas de contrat de non-sollicitation, et Lille perd un grand espoir ;
_en août 1955, des forces anti-LOSC infiltrent le club et convainquent Douis, Lefèvre et Vincent de faire grève et contribuent à faire exploser le groupe cette saison-là ;
_en septembre 1955, le LOSC perd deux fois 1-7 à quatre jours d’intervalle : bizarre !
_en 1956, la guerre d’Algérie mobilise des joueurs qui ne peuvent participer à la lutte pour le maintien, et le barrage aller contre Valenciennes est fixé par le Groupement sur terrain « neutre »… au stade Bollaert. Le LOSC est relégué ;
_en 1958, le LOSC se prend 1-6 à la maison contre le RC Paris : suspect !
_en 1959, quand le LOSC doit sauver sa peau, une barre transversale cède, déconcentre tout le monde et le score de 0-0 condamne le club à la D2 ;
_en 1960, le LOSC, en D2, obtient un héroïque nul à Lens après prolongation l’année où le règlement de la coupe Drago prévoit qu’on départage les équipes au nombre de corners ;
_en 1970, Lille se prend 0-7 dans le derby à Lens :
Et la liste n’est pas exhaustive… ! Les premiers actes malveillants n’ont pas fait réagir : « pas de chance ! », « coïncidences ! » disait-on alors, avec une insouciance qui se démarque peu de l’inconscience. Mais leur récurrence a finalement mis la puce à l’orteil des enquêteurs de la très réputée police lilloise, sollicitée par des lanceurs d’alertes. En effet, le caractère systémique des attaques portées contre le club ne pouvait qu’aboutir à ce constat : il y a bel et bien un complot contre le LOSC. D’où vient-il ? Qui tire les ficelles ? Pour quelles motivations ?
Dès la fin des années 1940, de nombreux suspects ont été pris observés et espionnés. Ne dit-on d’ailleurs pas que l’expression « prendre en filature » provient de la volonté de la police lilloise d’appréhender les comploteurs anti-LOSC au sein des usines textiles de la ville ? Mais cela n’a rien donné. Les autorités se sont alors tournées vers une autre région que nous ne nommerons pas des raisons évidentes de confidentialité, mais dans laquelle on soupçonnait que les potentiels complotistes avaient « mauvaise mine ».
Et puis, comme cela arrive souvent avec les bandits et criminels de grande envergure, ils tombent après une bête affaire…
Samedi 30 octobre 1971 : le club organise « le bal du LOSC » dans la ville. Officiellement, l’événement n’a pas été organisé pour attirer les complotistes, mais on peut le révéler aujourd’hui : c’était un piège. Un piège dans lequel est tombé Gérard Viart, 29 ans. N’écoutant que ses plus bas instincts, il attend patiemment la fin de la soirée pour s’attaquer à Jean Houte, qui repartait tranquillement avec la recette de la soirée. L’individu est appréhendé quelques jours plus tard, comme le rapporte la Voix du Nord datée des 7 et 8 novembre 1971 :
Cette arrestation suscite un immense élan d’espoir parmi la population lilloise, éprise de justice : enfin, ce qui semblait inexplicable depuis 27 ans – le complot contre le LOSC – était en passe d’être résolu, et on devait ces odieuses manigances à une famille bien sous tous rapports et au-dessus de tout soupçon : la famille Viart, autant dire nos voisins, nos frères, nos soeurs !
Dans les locaux de la police lilloise, M. Viart a été confronté, comme le permettaient les lois de l’époque, à la procédure dite d’« amende honorable », qui consiste à répéter 59 fois « Le LOSC est beau, le LOSC est grand, tu portes nos couleurs comme on porte un enfant ».
Le refus manifeste de l’individu a été interprété comme un aveu de culpabilité. Désespérément muet, M. Wiart n’a pas fourni davantage d’éléments sur le complot contre le LOSC et ses réseaux.
Car il est vite apparu que M. Wiart n’a pas agi seul. Si cette prise a pu laisser entrevoir la fin du complot, sa persistance a ramené tout le monde à l’évidence : les forces du complot sont nombreuses, bien organisées et, pour ainsi dire, insaisissables. Ainsi, seulement 6 mois après l’arrestation de M. Wiart, le LOSC retournait en D2. Finalement, cette arrestation, d’abord salvatrice, a montré l’ampleur et la capacité de nuisance d’une hydre aux capacités régénératrices. Faut-il se résigner… ?
Les merveilleuses possibilités de l’Internet nous ont permis de découvrir que M. Gérard Viart est décédé le 15 mars 2006 à Frelinghien.
En guise d’ultime hommage, les puissances du complot organisent à la va-vite, le soir-même, un plan diabolique pour saboter les chances du LOSC qui se déplace à Séville, en 8e de finale de retour d’UEFA. Vainqueurs 1-0 à l’aller, les Dogues sont réduits à 10 dès la 26e minute avec l’expulsion de Mathieu Bodmer, encaissent un but trois minutes après puis un deuxième à la 45e.
Lille est éliminé : une ultime vengeance, près de 35 ans après, d’une arrestation jamais digérée par les forces du complot, et qui sonne comme un avertissement pour les générations futures.
Posté le 4 janvier 2022 - par dbclosc
Lille s’agrippe à la coupe
Après s’être affrontés lors de la finale 1948, Lens et Lille se retrouvent en janvier 1949 en 32e de finale de l’édition 1949. Mais l’affiche a du mal à passionner les foules : d’abord parce qu’elle arrive sans doute trop précocement dans la compétition, et ensuite parce qu’une épidémie de grippe se propage à une vitesse inquiétante dans le pays.
« Les amateurs d’émotions fortes et de matches sensationnels – prématurés au goût de certains – n’envisageaient pas de se voir offrir aussi tôt la réédition de la dernière finale » lit-on dans Nord-matin Sports le 8 janvier 1949 : en effet, en ce jour, Lillois et Lensois se retrouvent, 8 mois après la victoire des premiers sur les seconds, en finale.
La finale de 1948 (But, 10 mai 1948)
Cette confrontation, à ce stade de la compétition, n’aurait pas été possible quelques années en arrière : d’abord parce que le LOSC n’existait pas en tant que tel ; et ensuite parce que le principe du tirage au sort intégral dès les 32e de finale de la coupe de France n’a été adopté qu’en avril 1947 par le conseil national de la FFF. Auparavant, la fédé déterminait elle-même les affiches : officiellement pour proposer des matches favorisant la proximité géographique et donc la réduction des coûts de transports ; officieusement pour protéger les « gros » et maximiser les chances d’avoir de belles affiches pour la fin de la compétition. Voilà comment comprendre le propos lu dans Nord-Matin Hebdo, et « voilà ce qu’il est bien permis d’appeler un tirage au sort malin » ajoute l’hebdo. Pour la Croix du Nord, ce match est un choc « atomique » (8 janvier 1949). Le match se jouera sur terrain « neutre », au stade Amédée-Prouvost de Wattrelos, là où a joué l’Excelsior de Roubaix de 1928 à 1945, et où joue le Club Olympique Roubaix-Tourcoing, champion de France 1947, depuis 1945.
Nord-Matin Sports, 8 janvier 1949
Où en sont les deux équipes, quelques mois après cette finale « nordiste » (la deuxième, après le Roubaix/Roubaix de 1933) ?
Le LOSC va bien : quelques jours auparavant, il a repris la tête de la « division nationale » après une écrasante victoire contre Colmar : 8-0, avec un triplé de Jean Baratte ! Les Dogues sont désormais invaincus depuis 2 mois, jouent un football offensif et rapide, et le titre semble devoir désormais se disputer entre Lille, Reims et Marseille. Admirative, la Voix du Nord note : « on cherche en vain quelles sont les failles de la formation nordiste », même si l’adversité a été « d’une insigne faiblesse constructive » (4 janvier). Durant la semaine qui précède le match contre Lens, le journal L’Équipe tresse des lauriers à l’attaque lilloise (4 janvier) puis à sa défense (5 janvier), et clame tout le bien qu’il pense de la formation lilloise : « heureuses gens qui, à mi-parcours d’un âpre championnat, disposent d’hommes en aussi belle forme que Baratte, Tempowski, Vandooren, Dubreucq, Sommerlynck et Nuevo ; qui voient des jeunes tels que Strappe et Walter éclater dès les premières passes d’armes ; qui ont un ancien tel que Jadrejak capable de remonter irrésistiblement le rapide Lechantre (un remplaçant dont se régaleraient tous les autres clubs de France) ; qui peuvent enfin se permettre de désigner leur goal à la courte paille, la longue étant pour Witkowski ». Au final, « il ne semble pas possible que la synthèse lilloise puisse rétrocéder, dimanche, ses droits de propriété sur l’objet d’art qu’elle détient depuis 3 ans ».
Le classement de D1 après 21 journées (La Voix du Nord, 4 janvier 1949)
La référence au gardien de but tiré « à la courte paille » semble à peine caricaturale : le 8 janvier, le quotidien sportif place en Une un exercice de l’entraînement du LOSC à l’issue duquel est désigné le prochain titulaire. Félix Witkowski ayant « mieux plongé » que Robert Germain, c’est Witkowski qui gardera la cage lilloise.
Seule inquiétude du côté Lillois : le LOSC est favori, et se retrouve en outre dans la position de celui qui a un trophée à défendre. Comme le résume le président Louis Henno, « Lens n’aura rien à perdre dans l’affaire. Tandis que nous... ».
Lille est d’autant plus favori que Lens est en D2, après sa descente en 1947. Avant ce match contre le LOSC, les Sang & Or sont deuxièmes de leur championnat, avec un atout considérable : sa défense, qui n’a encaissé que 10 buts. Une défense qui est d’ailleurs composée d’anciens attaquants, puisqu’en 1939, Lens jouait avec Ourdouillié, Spechtl, Stanis, Siklo et Melul devant ; en 1949, Ourdouillié, Siklo et Melul jouent derrière, et seul Stanis a gardé son poste d’attaquant (Spetchl a terminé sa carrière). C’est « le plus ancien carré du football professionnel » selon L’Équipe.
Mais Lens fait de la montée sa priorité. Dès lors, ce 32e contre ce qui ressemble à la meilleure équipe française du moment n’a pas l’air de mobiliser outre mesure les Lensois. Comme l’affirme leur président, Louis Brossart : « nous irons à Roubaix le cœur léger. Si nous sommes battus, nous le serons par la meilleure équipe du moment. L’essentiel pour nous est de garder intact l’atout que nous avons en championnat » (L’Équipe, 6 janvier). Le quotidien est même allé chercher des informations du côté du masseur de l’équipe lensoise, qui tient un discours assez prudent quant à la forme des « mineurs » : selon lui, Dehon, Gouillard, Gailis, Pachurka et Melul sont « à la limite du claquage. Ils ont fourni beaucoup d’efforts jusqu’à maintenant et le match qu’ils ont joué dimanche contre Amiens n’a pas arrangé les choses ». à la très délicate question du journaliste de L’Équipe (« alors, on perd dimanche ? »), Elias Melul répond toutefois : « qui vous a dit ça ? Il ne faut pas que les Lillois se figurent tout de même que nous allons jouer aux Colmariens ».
Le classement de D2 après 19 journées (La Voix du Nord, 4 janvier 1949)
Alors, la température monte dans le Nord ? Oui, mais pas que pour ce match. Le RCL a encore des doutes sur le fait que Ourdouillié et Nemeur puissent tenir leur place. En effet, ils ne se sont pas entraînés de la semaine car ils sont grippés et placés à l’isolement. Comme quoi on peut avoir une bonne défense, et peu de défenses immunitaires.
Les deux joueurs lensois ne sont pas les seuls touchés par la maladie : depuis plusieurs jours, la Voix du Nord fait état d’une épidémie de grippe venue d’Italie qui, jusqu’à tout début janvier, n’alarme pas les professionnels de santé. Seulement, la contagion est favorisée en raison par « le temps doux et humide que nous subissons depuis quelques jours » (6 janvier). Si, pour le moment, ce sont surtout Paris et l’Est du pays qui sont touchés, la région n’est pas encore l’objet d’inquiétude particulière : « à moins de complications toujours à craindre, le repos à la chambre, accompagné d’une médication appropriée, suffit à faire tomber la fièvre et à vaincre définitivement l’affection ».
La Voix du Nord, 6 janvier 1949
Interrogé par le quotidien régional, le docteur Costemend, sorti d’on ne sait où, rejette l’idée d’un vaccin, qui serait de toute façon inutile : « il existe bien un vaccin utilisé couramment aux Etats-Unis. Malheureusement, son application sur une grande échelle est actuellement impossible et ne confère une immunité ne dépassant guère plusieurs mois (…) Le meilleur moyen d’éviter la grippe, voyez-vous, est encore de se prémunir contre les refroidissements, de coucher dans une chambre saine, bien éclairée, modérément chauffée et exempte de ces vapeurs de cuisine qui, dans tant de taudis, humidifient l’atmosphère et le rendent propice à la multiplication des microbes et en particulier au virus grippal.
Un conseil encore : on a remarqué que la grippe s’attaquait de préférence aux individus atteint d’avitaminose ou, pour parler plus simplement, de personnes dont l’organisme était pauvre en vitamines. Absorbez donc le plus de vitamines possibles. Mangez des carottes crues râpées. C’est le légume qui en contient le plus. Et exposez-vous le plus possible à la lumière – au soleil quand il daigne briller – parce qu’en définitive ce sont les rayons solaires qui permettent la transformation du carotène en ces vitamines précieuses qui, mieux qu’un vaccin, éloigneront de vous la grippe et ses complications ».
Les conseils du docteur Costemend ressemblent fort à ceux du « Professeur Pierre Dac » qui, en 1949, réagissait ainsi à l’épidémie de grippe
© Les actualités françaises/INA
La semaine passe, et la contagion s’étend. Le 7, la Voix s’inquiète désormais de ce qui se passe dans le Sud du département, par où la grippe semble devoir investir le Nord : « l’épidémie de grippe qui règne actuellement dans le valenciennois atteint plus particulièrement les sujets âgés, sans toutefois épargner la jeunesse. Selon les docteurs de la région qui se trouvent débordés de travail, une telle épidémie ne se serait pas rencontrée depuis une dizaine d’années. Elle entraîne dans la plupart des cas des complications graves telles que broncho-pneumonie, congestion, prurit, etc. Les hôpitaux de la région regorgent de malades et, pour faire face à la situation, les directeurs de ces établissements ont dû transformer certaines salles, voire même des corridors, en chambres pouvant accueillir ces malades »
Nord-matin Sports, 8 janvier 1949
Le forfait d’Ourdouillié, malade, est confirmé. Le jour du match, la place réservée au match et à la grippe est sensiblement la même en Une de la Voix du Nord.
Mais les nouvelles concernant la grippe commencent à être inquiétantes au niveau national : sur décision du préfet de l’Orne, les écoles d’Alençon ferment du 7 au 17 janvier. Le Ministère de la santé publique et de la population recommande d’« appliquer de façon très stricte les mesures habituelles d’hygiène corporelle. Les lavages des mains, en particulier, doivent être fréquents ; de désinfecter les voies respiratoires. De plus, il convient autant que possible d’éviter des sorties inutiles et la fréquentation des lieux publics (…) En cas de fièvre, l’enfant doit être immédiatement isolé (…) Il est également recommandé à toute personne approchant un grippé ou un autre suspect de grippe de porter un masque (simple compresse rectangulaire de gaze recouvrant le nez et la bouche ».
Le match Lille/Lens est-il visé par les « sorties inutiles » ? À ce stade (Amédée-Prouvost), il n’existe pas de consigne spécifique par secteur d’activité, mais seulement le communiqué reproduit partiellement ci-dessous. Il n’empêche que la panique est proche : « voilà que la grippe a pénétré dans nos départements. De là à penser qu’elle va déferler sur nos populations, à établir un pourcentage de victimes, à la comparer à un redoutable fléau, il n’y avait qu’un pas à franchir ».
15 169 spectateurs, parmi lesquels « des milliers de supporters bruyants des deux camps » (L’Équipe), ont pris place dans un stade « archi-comble » selon la Voix des Sports. Mauvais présage, le temps est nuageux. En somme, le ciel est comme l’épidémie : gris pâle. Mais la température est largement inférieure à 38°.
Voici les équipes alignées :
Lille :
Witkowski ; Jadrejak, Sommerlynck, Nuévo ; Dubreucq, Carré ; Vandooren, Tempowski ; Strappe, Baratte, Walter.
Lens :
Duffuler ; Gouillard, Dehon, Melul ; Siklo, Maresh ; Nemeur, Gailis ; Stanis, Danko, Cryspin.
Logiquement, les Lillois sont les premiers à l’attaque avec Strappe, mais les Lensois ne sont pas en reste et répliquent par Melul ; « à de nombreuses reprises, Duffuler doit faire preuve d’une maestria sans pareille » note la Voix des Sports. Ainsi, les premières minutes du match semblent confirmer le rapport de forces annoncé. Cependant, le match est marqué par « une intensité de jeu, une ambiance vraiment peu communes » : les deux équipes jouent à la limite de la brutalité, surtout les Lillois, « qui ne dédaignent pas l’obstruction irrégulière » ; « nous avons déjà vu le Lille OSC jouer plus élégamment, nous ne l’avons jamais connu aussi dynamique, aussi ardent ». En face, il apparaît très vite que les Lensois ne sont pas venus pour faire de la figuration. Ils rendent coup pour coup : « il eut fallu voir quelle énergie, quelle vitalité les « Sang et Or » apportèrent à la bataille pour être persuadé de leur entier désir de victoire » (La Voix des Sports) ; « c’était bien une galéjade de prétendre que les Lensois s’intéressaient peu à la coupe. Lors qu’ils furent pris par l’ambiance, portés par leur innombrables supporters, les Sang & or n’eurent plus qu’un objectif : prendre leur revanche » (La Voix du Nord). L’Équipe, qui a relayé dans la semaine la prétendue prudence des Lensois semble surprise : « lorsqu’on nous affirmait cette semaine que les Lensois ne tenaient pas vraiment à la revanche de Colombes, on peut se demander ce qu’il en eût été s’ils y avaient vraiment tenu ».
Nord-Matin Sports, 15 janvier 1949
Au quart d’heure de jeu, les Artésiens sont proches de marquer : les passes « judicieuses » de Nemeur « donnent le frisson aux supporters lillois. Sur l’une d’elles, Danko a le but au bout du pied, mais le goal lillois lui subtilise la balle dans les jambes »
Peu après, le LOSC attaque : Baratte lance Walter. Duffuler, sorti de ses buts, parvient à détourner le ballon sur sa gauche, d’où Baratte surgit et place une frappe à mi-hauteur qui fait mouche, en dépit d’un retour désespéré de Melul (1-0, 18e).
La Voix du Nord, 11 janvier 1949
Dans la foulée, Walter manque le 2-0 en tergiversant face au but adverse. Lens, toujours aussi étonnamment affûté, réplique encore : Siklo traverse le terrain en largeur vers la gauche « ce qui oblige Dubreucq à surveiller l’avant-centre et Nuévo l’inter » (La Voix des Sports). Gailis se porte alors à l’aile droite, reçoit la balle de Siklo et bat Witkowski (1-1, 24e).
Nord-Matin Sports, 15 janvier 1949
La suite de la première période est une succession d’incorrections : « ce match dépassa les limites, et les coups de pieds, de poing furent innombrables. Toutes les ficelles du métier furent mises en pratique, et cela n’assura pas un niveau technique de première classe. En revanche, l’intérêt de la rencontre fut constant » (La Voix du Nord). L’arbitre, M. Delesalle, a fort à faire, et tant la presse régionale que la presse nationale saluent sa prestation. Le LOSC domine mais Baratte, identifié comme le danger n°1, est systématiquement pris par deux arrières. Signe de la domination lilloise : à la pause, les Dogues mènent par 7 corners à 0. La Voix des Sports considère que les attaquants lensois sont lents, tandis que les attaquants lillois « pressent les défenseurs lensois qui trouvent, grâce au corner, le moyen d’écarter un danger pressant ». En attendant, ils se cassent les dents : « le Lille OSC s’évertue à créer une brèche dans cette rangée de poids lourds que forment les trois arrières lensois » et qui constituent une bonne couverture, très utile en période de grippe. Les équipes sont à égalité à la mi-temps.
Nord-Matin Sports, 15 janvier 1949
Changement de physionomie en seconde période : cette fois, Lille domine outrageusement et ne laisse plus de possibilités de contre-attaques aux lensois. Le danger est de plus en plus fréquent sur le but lensois, et les attaques loscistes sont plus ordonnées : « toute la défense lensoise, ainsi que les demi-ailes, sont sur les boulets ». Vandooren croit libérer son équipe à la 65e, mais son but est refusé pour hors-jeu. Acculés en défense, multipliant les fautes, les lensois semblent proches de céder ; les Dogues poussent et tentent de créer des brèches pour le porteur de balle en crochetant les adversaires qui pourraient se trouver sur son chemin : « la valeur athlétique l’emporte alors sur la valeur technique ».
Tout ceci est bien entendu parfaitement régulier
Nord-Matin Sports, 15 janvier 1949
Lille poursuit sa domination et, sur un 12e corner (contre 2), « Tempowski, pris en sandwich par les arrières adverses, parvient à glisser la balle à Strappe, dont le tir est impardonnable pour Duffuler. Dès lors, c’en est fini des espoirs lensois » (2-1, 73e).
Lens semble dès lors incapable de rivaliser. À quelques minutes du terme, Siklo et Tempowski, « gagnés par l’énervement, se livrèrent à un combat singulier ». L’arbitre considère que la première faute est lensoise, ce qui donne un coup-franc bien placé que frappe Carré. Duffuler, masqué, repousse, mais Vandooren suit et conclut de la tête (3-1, 88e). Le LOSC se qualifie pour les 16e de finale.
La Voix des Sports, 10 janvier 1949
Dans la presse, on souligne une partie « rapide, animée, crispante même par instants, elle fut empreinte d’un maximum d’ardeur » (L’Équipe) ; le « caractère passionné de la rencontre », un match « joué dans une ambiance « derby du Nord » vraiment prenante » (La Voix du Nord). 35 fautes ont été commises, ce qui est perçu comme un chiffre considérable reflétant la brutalité du jeu. Et en effet, en lisant la description de certaines actions, on croit comprendre que l’arbitre ne siffle qu’en dernier recours, et que les règlements de compte individuels sont tolérés, ou seulement sanctionnés par une réprimande verbale. D’ailleurs, les Lensois « ne contestèrent pas cette victoire, mais ils s’insurgèrent contre la manière forte employée par les Lillois ».
La prestation des deux équipes est saluée : Lens a proposé un beau visage en première période, avant de résister jusqu’au dernier quart d’heure. Les Sang & Or semblent avoir pêché à cause de mouvements offensifs trop lents et « imparfaits » : « les bons joueurs ne manquent cependant pas, mais l’habileté technique des Danko, Nemeur et Siklo est trop spasmodiquement démontrée pour trouver un rendement efficace et profitable pour l’ensemble de l’équipe. Maintes fois, les attaquants lensois se trouvèrent en excellente position, soit pour tirer au but, soit pour effectuer une passe précieuse à un partenaire. Mais le dixième de seconde de réflexion qu’ils laissèrent à l’adversaire annihila tous leurs efforts précédents » (La Voix des Sports). Les dirigeants lensois en sont persuadés : il ne leur manque qu’un grand attaquant pour rivaliser avec le LOSC. Ils donnent rendez-vous dans quelques mois… en première division.
Le LOSC a eu moins de facilité que lors de ses dernières sorties, mais il a su être patient : « le grand mérite de Lille fut d’avoir surmonté ses hantises de première mi-temps pour mener ensuite sa barque » (L’Équipe). Après le repos, les Dogues « parvinrent à imposer leur jeu clair et précis » (la Voix des Sports). Dans l’ensemble, le LOSC a fourni un jeu fait de « permutations et passes dont l’automatisme relève d’un entraînement étudié jusque dans les moindres détails ». Lille passe logiquement « et nous en sommes très heureux car il est mieux armé que Lens pour défendre le prestige de notre région dans la coupe » écrit la Voix du Nord.
Quelques jours plus tard, le 17 janvier, le docteur Lépine de l’Institut Pasteur de Paris, et le docteur Muller, aux Pays-Bas, parviennent à identifier les virus responsables de l’épidémie, qui décline progressivement. Le LOSC reste quant à lui immunisé contre la défaite en coupe, s’y agrippe, et s’affirme de plus en plus dans cette compétition comme une équipe aguerrie (ce qui n’a rien à voir avec une équipe anciennement malade).