Posté le 11 juin 2022 - par dbclosc
ESW-LOSC (3/6) Un poing puis trois points
Derby 3 : placé en tout début de saison, le derby revient enfin au LOSC ! Mais la préparation du match est perturbée par l’agression subie par Thierry Froger, qui cristallise l’hostilité d’une partie du public. À Lille, le climat est lourd, et cette victoire ne peut que très ponctuellement le masquer.
Lille a donc échoué à remonter pour son retour en D2. Dans l’absolu, il n’y a rien de dramatique, mais les circonstances de cet échec laissent pantois : à deux reprises (au soir des 29e et 36e journées), le LOSC a eu 6 points d’avance sur le quatrième ! Autant dire que le groupe a fait preuve de nombreuses faiblesses, notamment mentales. À qui la faute ? Pour l’entraîneur, Thierry Froger, le groupe n’a pas su s’adapter à ses exigences, et notamment la concurrence. Alors, au moment de reprendre ce championnat 1998/1999, il affirme : « chacun a pris conscience des problèmes de l’année dernière. Le métier de footballeur est un métier qui a des contraintes. La concurrence en fait partie : il faut l’accepter ». Lui qui n’avait plus qu’à signer un contrat proposé par Valence (dans la Drôme…) à l’intersaison a la ferme envie de parvenir à son but : faire remonter le LOSC.
Pas d’amélioration
Mais, pour une partie du public, le coupable est tout trouvé : c’est Thierry Froger lui-même. Manque d’autorité, incapacité à mettre en place un jeu cohérent, lacunes offensives et défensives, communication maladroite. La nouvelle saison ne permet pas de nouer une nouvelle relation avec le public, qui a réclamé la tête de l’entraîneur pendant des mois : pour le match de reprise contre Guingamp, la tribune des DVE est vide en première mi-temps, avec cette affiche « Phénomène D2 ». Les supporters prennent bruyamment place au repos et affichent désormais « Phénomène D1 ». Pas de doute : une partie des supporters n’a pas digéré la saison dernière et s’installe d’emblée dans un rapport de défiance avec son équipe et, particulièrement, son entraîneur. Et en plus, Lille perd : la tête de Froger est déjà demandée et, en fin de match, une partie du public pénètre sur la pelouse. Après match, le discours de Froger rappelle qu’aucun problème n’a été réglé : « nous n’avions pas de repères, pas de liens. Nos lignes n’étaient pas bonnes entre la défense et le milieu. Les uns ne revenaient pas, les autres étaient seuls ». Lille se rassure à Niort (0-0) avec, par phases, un visage séduisant et « un bel état d’esprit », d’après Jean-Pierre Mottet. Mais pour le deuxième match à domicile, Lille bute de nouveau, cette fois sur Caen (0-0). De plus en plus bruyamment, par de plus en plus de monde, Froger est invité à partir. Et le public de Grimonprez a trouvé un petit jeu : à chaque changement lillois, c’est la bronca. Bref, « le climat devient franchement malsain », au moment où il faut se déplacer au Stadium pour y affronter Wasquehal.
Froger droit dans ses bottes en caoutchouc
Deux points en trois matches, un seul but marqué, un jeu toujours aussi pauvre… La Voix des Sports a vu des Dogues « indigestes » : « ils se battent mais donnent l’impression de ne pas pouvoir faire beaucoup plus ». Le public n’apprécie pas, et cette hostilité semble crisper les joueurs. Laurent Peyrelade confie : « on savait que ce serait chaud, vu comment s’est terminée la saison passée. Mais si le public ne comprend pas que les joueurs ont donné leur maximum, c’est regrettable. Se faire siffler dès que tu manques un contrôle, ou une passe, après seulement trois journées, c’est vraiment difficile. On n’est pas Milan, ou le PSG, sinon ça se saurait et on ne serait pas là. Mais bon, il faut aussi savoir accepter les critiques, ça fait partie du boulot ».
Le problème est bien que les problèmes persistent alors que le mercato a apporté les profils que le coach souhaitait avec, notamment, un élément d’expérience en défense (Adick Koot), un buteur devant (Olivier Pickeu), un latéral explosif (Mohamed Camara) et le départ de ceux avec qui les relations étaient mauvaises (Aubry et Duncker). Qu’en dit Thierry Froger ? « Ma seule préoccupation, ce sont les résultats. Pas vingt ou trente supporters qui font de moi leur bouc-émissaire (…) Sincèrement, je suis persuadé d’avoir fait les bons choix. Le temps me donnera raison ». Face à ces propos qui apparaissent en décalage avec les faits, l’hebdo régional commence à faire dans l’ironie et prévoit un rapide naufrage pour le « marin Froger » : « Thierry Froger, s’il n’avait pas été entraîneur, aurait pu être marin. S’il n’avait pas porté le costume et la cravate, les soirs de matches, il aurait pu endosser le ciré jaune et enfiler les bottes en caoutchouc. Embarquer à bord d’une galère, affronter les vents et subir les marées sans broncher. Sans changer de trajectoire. Pour tenir le cap jusqu’au bout. Quitte à rencontrer un écueil de taille et à faire naufrage. Si Thierry Froger doit mourir au LOSC, il le fera avec ses idées ».
Le 24 août, le climat pesant autour du club devient carrément irrespirable : Thierry Froger est agressé devant le stade.
Le LOSC sur les dents
Quels sont les faits ? La Voix du Nord rapporte que Thierry Froger a été insulté après le match Lille/Caen, et a rétorqué. À cette occasion, la tension est montée et quelques crachats auraient volé. Rien de très reluisant, déjà à ce stade… Deux jours après le match, le 24 août donc, en fin de matinée, une réunion technique se déroule dans les locaux du stade. À son arrivée, Thierry Froger croit reconnaître l’un des « cracheurs » de l’avant-veille. Il gare alors son véhicule à proximité du secrétariat et interpelle le supporter : « je souhaitais avoir une explication » dit-il. Le « cracheur », David C. (Coulibaly ?), affirme alors : « il m’a insulté, en me mettant l’index sur la pomme d’Adam, j’ai des témoins. J’ai eu beau lui faire comprendre que ce n’était pas moi qui avais craché, il n’a rien voulu savoir et a continué à m’insulter ». David C. assène alors un coup de poing au visage de Thierry Froger. Bilan : une dent cassée. L’agresseur reste sur place et attend calmement les forces de l’ordre qui l’emmènent au commissariat, où il sera bon pour une amende de 4e classe (9 000 francs). Il finit par exprimer sa « honte ». L’entraîneur du LOSC l’assure : « je ne l’ai pas insulté et je suis sûr qu’il s’agissait de lui, plusieurs personnes l’ont reconnu ». Par la suite, Froger se sent d’autant plus meurtri que, même s’il reçoit le soutien de quelques supporters présents et témoins de la scène, un autre lui lance que c’est « une suite logique ». Comme si, au fond, il l’avait bien cherché.
Le lendemain, Thierry Froger assure l’entraînement « normalement », même si on le sent marqué psychologiquement. Il s’estime « victime d’une manipulation », est persuadé que David C. « passera pour un héros » et commence à tourner paranoïaque : « quand je vois des gamins de 12-14 ans me cracher dessus, je ne peux m’empêcher de penser que quelqu’un tire les ficelles derrière ». Professionnellement, il se dit désireux d’« honorer [s]on contrat (…) Quand je m’engage, c’est pour aller au bout. Je connaissais le climat malsain qui entoure ce club, mais je veux réussir. Cet événement n’altère pas mon envie d’emmener Lille en division 1. Quand je suis parmi mes joueurs, sur le terrain ou à l’entraînement, je suis toujours à 200% » ». En revanche, d’un point de vue familial, ça s’annonce plus compliqué : « c’est une catastrophe. Je ne sais pas dans quel état je vais retrouver mon épouse et mes enfants en rentrant chez moi. Comment leur expliquer les raisons de ces débordements, puisque je ne les connais pas moi-même ? Lundi, elle voulait retourner au Mans. Mais moi, j’ai besoin d’eux à mes côtés, pas à 400 kilomètres ».
Soutien du club, les supporters distants
Froger a bien entendu reçu immédiatement le soutien de Bernard Lecomte, mais aussi de ses joueurs, comme Patrick Collot (qui a, de son initiative, abandonné le brassard cette année) : il se demande comment un « homme droit, intègre et sérieux dans son travail, peut être une cible toute désignée. Il vit les moments les plus difficiles de sa carrière, mais peut-être aussi de sa vie. C’est incompréhensible ». Le nouveau capitaine, Adick Koot, qui pensait avoir tout vu à Cannes au cours d’une saison bien compliquée, se concentre sur le travail : « c’est en travaillant deux fois plus qu’on va aider Thierry. Mais sachez que je suis déjà impressionné par la quantité et la qualité du travail fourni. Les insultes et les crachats s’envoleront avec les résultats. Notre réponse viendra du terrain ».
En revanche, dans les jours qui suivent, la parole donnée aux supporters traduit la distance qui s’est créé entre eux et le club. La Voix du Nord parle même de « fracture ». Un reportage à l’entraînement montre que l’incident a amené du monde : ils sont… 50 à suivre les Dogues et à commenter les événements. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas tendre envers Froger, qui ne serait « pas diplomate, n’accepte pas la critique » ; « à Niort, il nous a reproché de ne pas avoir le mailllot du LOSC, alors qu’on met toute l’ambiance ». De manière générale, une lassitude semble s’être emparée de ceux qui ne voient rien venir : « ça fait 10 ans qu’on nous dit que le LOSC va faire une bonne saison. À la fin, ça devient fatigant… ». Seul Roland Clauws, ancien joueur, se montre plus modéré. Avec la configuration des terrains du Grand Carré et la proximité entre public et joueurs, « impossible que les joueurs ou l’entraîneur, principal mis en cause, n’entendent pas des bribes de phrases incendiaires. Quelques mètres séparent les deux parties en présence. Rester concentré en de pareilles circonstances relève de la gageure ».
Le derby est bien loin
Louis Deretz, président de l’association de supporters En avant le LOSC, estime que les problèmes actuels sont liés à un manque de visibilité quant aux structures actuelles du club et à son devenir. De ce point de vue, le coup de poing serait la violente manifestation d’années de frustration et de l’incapacité à se construire un avenir : « Nous condamnons évidemment le coup de poing à l’encontre de Thierry Froger. Mais cette affaire n’est que le révélateur d’un conflit latent. Il faut se mettre à la place des supporters. Ils payent leur place. Ils ont l’amour du foot, ils ont la passion du club. Ils veulent que l’équipe aille de l’avant. Nous ne mettons pas en cause le travail de l’entraîneur ou des joueurs. Ce que nous ressentons, c’est un manque de position vis-à-vis de l’avenir. Actuellement, les structures du LOSC ne sont pas celles d’un grand club. Il faut rassembler toutes les forces unies, les sponsors, les acteurs économiques, la direction, les joueurs… et bien sûr le public. On ne dit pas assez aux supporters lillois qu’il y a une volonté de monter un grand club ici, donc ils se sentent frustrés… ».
Dans ces conditions, le match contre Wasquehal paraît secondaire. Le LOSC, depuis qu’il est en D2, rêve de regarder vers l’avant ; avant cela, il est passé par des saisons médiocres qui n’ont rien bâti ni rien laissé espérer. Et désormais que, sur le plan administratif, la situation est réglée, le club semble encore payer le poids de ces années. Il n’est alors jamais possible de se projeter, mais seulement de colmater les débordements, comme si le club était enlisé. Le 25 août, Pierre Diéval signe dans la Voix du Nord un éditorial dont voici des extraits :
« À une époque où le président Lecomte, fort d’une réussite indéniable sur le plan économique, s’ingénie à recréer un climat propice à la renaissance des belles valeurs loscistes, à gommer pour de bons les erreurs du passé, l’agression dont a été victime Thierry Froger constitue un grave dérapage qui, à l’évidence, témoigne d’un lourd contentieux entre l’équipe nordiste et son public (…) Dans un contexte de reconstruction et de reconquête, le LOSC n’avait vraiment pas besoin de ça. On attendait de la sérénité, du bon sens, de la fraîcheur à Grimonprez-Jooris. Or, que trouve-t-on aujourd’hui ? De la haine, de la violence, de la bêtise. Mauvaise recette pour grandir.
Un entraîneur qui se fait agresser aux portes du stade, dans l’exercice de ses fonctions, c’est, de toute façon, une nouvelle déchirure pour un club déjà fragilisé par la descente en division 2 et confronté inévitablement aux incertitudes sportives du lendemain. Et le pire, dans cette vilaine histoire, qui ne contribuera sûrement pas à redonner une image positive à un football lillois toujours en quête d’un signal fort pour redécoller, c’est que le geste de ce supporter irascible n’a apparemment pas choqué les témoins de la scène. « Ce sont les risques du métier » offrit l’assistance à Thierry Froger en guise d’explications ».
Se remettre à l’endroit pour Lille, confirmer pour Wasquehal
Il faut malgré tout jouer. On l’aura compris, le LOSC n’est pas au mieux. Quant aux wasquehaliens, ils sont… sur le podium. Bon, après 3 journées, ce n’est significatif que de 3 bons résultats (un nul, deux victoires, dont une à Nice) mais l’équipe désormais entraînée par Dominique Carlier, avec 7 points, sera, quoi qu’il arrive, toujours devant le LOSC après le derby ! Dans ces conditions, pas de doute : cette fois l’Entente est bel et bien favorite. Cette situation inédite est toutefois perçue comme une anomalie, y compris par le président Decock, qui ne fanfaronne pas : « ça fait tout drôle de se retrouver devant les Lillois. Même s’il y a forcément une question de suprématie régionale, notre but n’est pas de creuser l’écart ! Nous tenons simplement à confirmer, devant notre public, nos bonnes dispositions actuelles ». Quel peut être l’impact des incidents de la semaine sur ce derby ? Pour Decock, « ça crée un climat malsain, mais pas du côté de Wasquehal ».
Bernard Lecomte se veut apaisant, en déclarant que « le résultat de ce derby est important et relatif à la fois. Important car il est temps pour le LOSC de montrer son vrai visage. Mais si le résultat n’est pas positif, il n’y aura pas de révolution pour autant ». Comprendre : l’entraîneur restera en place quel que soit le résultat. Il préfère évoquer la longue marche du LOSC pour se remettre en selle et condamne de nouveau les moyens utilisés pour s’en prendre à Froger : « je regrette que certains oublient tout le travail qui a été fait depuis plusieurs années pour assainir le club. Ils ne tiennent pas compte des incertitudes du sport ». Il n’empêche : ce match est une bascule. En quelques mois, les deux clubs sont passés de deux divisions d’écart à un niveau dont on peine désormais à percevoir la différence. Si l’ESW n’a encore rien à perdre, le LOSC joue sa crédibilité.
Pour ce match, l’Entente pourra de nouveau compter sur un joueur très en vue depuis le début de saison sur son côté gauche : Denis Abed, transfuge du LOSC. Arrivé à Lille en joker sauveur au cours de l’hiver 1995/1996, Abed n’a ensuite joué que 7 matches en 1996/1997 (en fin de saison, pour remonter la pente, et il avait d’ailleurs été très bon), et un seul avec Froger en 1997/1998… Il symbolise finalement une partie des errements du LOSC, pas capable de faire confiance à certains joueurs, dont le statut change au gré des considérations changeantes des entraîneurs. Pour Abed, « on sait que pour Lille, ça deviendra très difficile si on venait à marquer les premiers. Mais c’est quand même une équipe qui a d’autres ambitions et un autre potentiel que nous. Et je suis persuadé qu’ils vont relever la tête. Mais sur ce match, nous n’avons vraiment rien à perdre ».
Au Stadium, Frédéric Dindeleux fera son retour : blessé une semaine avant la reprise (tendinite au genou), il a manqué le début du championnat. Et comme Leclercq est blessé, Dindeleux devrait être titulaire aux côtés de Koot, malgré un manque d’automatismes1: « Adick2 est un excellent joueur. Il lit très bien le jeu et ne met pas beaucoup de temps à s’adapter à celui de l’adversaire. Nous devrions très vite trouver nos repères ». Afin d’évacuer la tension de la semaine, Froger révèle que « nous nous sommes relâchés sur le plan physique cette semaine, pour nous consacrer davantage à des petits jeux. Pour nous libérer ».
Lille se donne de l’air
En tribunes, l’ambiance est toujours bonne : une banderole de bienvenue accueille les supporters du LOSC, dont la réaction après une semaine riche en émotions est scrutée avec attention. Seule couac de l’avant-match : du monde s’est pointé sans acheter de billet en amont, si bien qu’il y avait encore des centaines de personnes aux guichets quand le coup d’envoi a été donné.
Voici les deux compositions d’équipe et leur évolution, devant 9 681 spectateurs payants :
Wasquehal :
Sibille, Bizasène, Scrimenti (cap), Benon, Keller ; Antunès (Debaets, 79e), Dailly, Bonadeï (T. Cygan, 60e) ; Allais (Dablemont, 60e), Cadiou, Abed.
Lille :
Wimbée ; Sanz, Dindeleux, Koot (cap.), Camara ; Hitoto, Collot, Valois (Coulibaly, 70e), Renou ; Pickeu, Boutoille (Peyrelade, 81e). Non entré en jeu : P. Cygan.
L’entame est wasquehalienne : Dindeleux sauve en catastrophe un centre d’Allais vers Cadiou (10e), puis un centre d’Abed passe dangereusement devant le but de Wimbée (13e). Lille réagit avec un une-deux entre Renou et Collot qui conduit à une frappe de Pat’, contrée.
21e minute : corner de Valois, et tête piquée de Koot au second poteau, qui ouvre la marque (0-1). événement : c’est le premier but encaissé par l’Entente cette saison, et c’est aussi la première fois que le LOSC mène dans un derby face à Wasquehal !
Les Lillois multiplient alors les occasions dangereuses : une frappe tendue de Collot est repoussée par Sibille (24e) ; après un mouvement Camara-Collot, Momo fait sa spéciale « centre raté qui se transforme en tir vicieux » que Sibille claque en corner (30e) ; sur un corner, Sibille se troue et la frappe de Boutoille est renvoyée sur la ligne par Keller (35e). Lille a manifestement retrouvé du mordant et la pause est sifflée sur cet avantage pour les Dogues.
En seconde période, Lille lève le pied et Wasquehal tente quelques percées, avec Abed-Dailly-Allais (49e), puis un tir croisé de Bonadéï, à côté (50e). Le plus dangereux est Denis Abed, qui dribble Sanz et Hitoto avant d’envoyer un centre non exploité (60e). Le LOSC, cette fois, est sur le reculoir, mais on ne sent pas pour autant l’Entente avoir la capacité de revenir. Dindeleux note : « on était entre deux eaux. D’un côté, on souhaitait continuer à attaquer mais, de l’autre il fallait aussi préserver le résultat ». Les vagues wasquehaliennes se calment et, à la 70e minute, coup de théâtre :
« un événement se produisit alors : Thierry Froger effectua un changement (Valois pour Coulibaly) sans provoquer le moindre sifflet ! ». La fin de match est assez tranquille pour Lille, qui gère son avance et remporte son premier derby contre Wasquehal.
Tout le monde est content
Enfin, des sourires dans le vestiaire lillois ! Même si Olivier Pickeu n’a toujours pas marqué, l’avant-centre lillois souligne que « ça fait vraiment plaisir. Nous étions tous navrés des incidents qui, à travers le coach, visaient tout le groupe. La seule solution pour ramener le calme, c’était de gagner. On a vraiment fait une bonne première mi-temps. Il faut s’appuyer là-dessus et poursuivre pour atteindre nos objectifs ». Les joueurs de l’ESW reconnaissent la supériorité lilloise, comme Bonadéi : « on est tombés sur une bonne équipe de Lille, qui était agressive, qui faisait bien tourner le ballon. Il y a un peu de déception car on prend un but sur coup de pied arrêté » ou Sibille : « le fait de marquer en premier les a galvanisés ».
Les deux présidents ont le sourire à l’issue du match. Lecomte est ravi de constater que « dans ce climat pourtant hostile, l’équipe a gardé toute sa solidarité et son moral. J’ai connu d’autres groupes qui, en pareil cas, se seraient effondrés. Franchement, cette équipe a du potentiel, des qualités individuelles et collectives. Ce soir, j’espère, en fait, que le LOSC a véritablement démarré son championnat. Et puis, Thierry Froger a bien réagi aussi après ce qui lui est arrivé ». Le président lillois semble aussi rassuré que les supporters lillois n’aient pas manifesté d’hostilité envers leur équipe ou l’entraîneur : pas de « démission », certainement parce que l’incident de la semaine a choque la grande majorité d’entre eux, et aussi parce que le LOSC a su marquer rapidement, a fait une belle première période, et a ainsi tué dans l’oeuf toute velléité contestataire.
Guy Decock, malgré la défaite, est lui aussi satisfait. L’Entente est en avance sur son tableau de marche et ne rêve que d’un maintien tranquille : « notre objectif, c’était de prendre 6 points lors de nos 6 premiers matches. Nous ne sommes donc pas en retard. Cette défaite, rassurez-vous, n’aura pas de conséquences. Ce match n’était certainement pas un tournant dans notre saison. Je constate que Wasquehal a progressé. Ce match, nous l’aurions perdu 3 ou 4-0 l’an dernier. Nous avons toutes les raisons d’être optimistes ». Sympa, il ajoute : « et puis franchement, ce soir, il valait mieux que ce soit nous qui perdions… ». La voix du Nord salue les attitudes : « nous avons aimé la réaction de Dominique Carlier, de Guy Decock, de Thierry Froger et de Bernard Lecomte. Tous très dignes dans la défaite comme dans la victoire ».
Le bout du tunnel ?
Cette première victoire de la saison apporte une accalmie au LOSC. De même que le fait que le buteur soit Koot… Car le recrutement du néerlandais, qui était entraîneur-joueur à Cannes la saison précédente, a suscité bien des questionnements qui ont aussi fragilisé la position de Froger à l’égard des supporters. En effet, la rumeur d’un complot orchestré par Dréossi (qui a bien connu Koot à Cannes) et Lecomte a surgi dès juillet : et si la direction avait déjà recruté le successeur de Froger au premier coup dur ? Froger avait alors répondu par l’humour (« s’il redevient entraîneur, eh bien, je redeviendrai joueur ! »), mais le doute était instillé. Alors, si Koot marque le but qui lance la saison du LOSC, c’est donc que la version officielle était la bonne : Froger recherchait bien « un relais expérimenté, un meneur d’hommes ». Au-delà de Koot, Froger se satisfait de sa défense, lui qui a souvent dit qu’avoir la meilleure défense était une garantie pour remonter : « trois matches consécutifs sans encaisser de but, cela ne nous était jamais arrivé la saison dernière ».
Alors, c’est parti ? La Voix du Nord l’espère : « ce derby, s’il doit rester dans les mémoires, le sera comme ayant été peut-être (on le saura dans les prochaines semaines) la fin des ennuis lillois en général. Et de Thierry Froger en particulier ». Deux semaines plus tard, après une nouvelle partie indigente à la maison marquée par de nombreux incidents en tribunes, puis une défaite à Beauvais, Thierry Froger est remercié. En 6 matches cette saison, il n’aura donc signé qu’une victoire : contre Wasquehal.
Les citations et illustrations sont tirées de La Voix du Nord et La Voix des Sports.
La série complète :
Lille/Wasquehal, nouveau derby professionnel
1/6 ESW-LOSC (1-1, 8 octobre 1997) : Le LOSC gâche déjà
2/6 LOSC-ESW (1-1, 14 mars 1998) : L’impuissance lilloise
3/6 ESW-LOSC (0-1, 29 août 1998) Un poing puis trois points
4/6 LOSC-ESW (1-1, 12 décembre 1998) : Toujours les mêmes travers
5/6 LOSC-ESW (1-0, 7 septembre 1999) : Le LOSC inarrêtable
6/6 ESW-LOSC (2-1, 5 février 2000) : Wasquehal inscrit son nom au palmarès
Bilan : LOSC/Wasquehal, le derby oublié de l’histoire ?
Notes :
1 La piste Jean-Marc Devaux a été abandonné par le LOSC : dommage, l’association Koot-Devaux aurait pu faire des étincelles.
2 Notons qu’avec Abed et Adick, ce derby est une belle occasion de réviser son anglais. « A Bed », par exemple, signifie « un lit ».
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