Posté le 18 décembre 2022 - par dbclosc
Georges Heylens : « Lille, c’était pas mal, hein ? »
Georges Heylens, ce sont cinq années de la vie du LOSC dans les années 1980. Pas forcément les plus glorieuses, mais de celles qui ont laissé des souvenirs marquants chez les supporters qui les ont vécues. Rencontre avec un morceau d’histoire.
« C’était notre quartier ici, notre rue » : depuis une table de La Tribune, une brasserie populaire du cœur d’Anderlecht, où nous avions rendez-vous, Georges Heylens semble regarder au-dehors avec nostalgie. Juste à côté se trouve la rue de Formanoir, où il avait une boutique d’articles de sports, de 1961 à 2014, qu’a dirigée son fils Stéphane : « on était livreurs de l’équipe d’Anderlecht, et de l’équipe nationale. À l’époque, à Bruxelles, il n’y avait pas de boutique de sports. On a été pionniers là-dessus ».
Les Heylens vivent toujours à Anderlecht, « leur » commune. À quelques dizaines de mètres se trouve le Lotto Park – anciennement stade Constant Van Den Stock – l’antre des « Mauves », où Georges Heylens a réalisé l’entièreté de sa carrière de joueur professionnel, de 1960 à 1973, avec 7 titres de champions de Belgique et trois coupes, glanant au passage 67 sélections avec les Diables Rouges. Les Diables, justement, ont été éliminés la veille de la coupe du monde : « pas de chance » juge-t-il laconiquement. Une élimination au premier tour, comme en 1970 au Mexique, où Georges Heylens était arrière droit de l’équipe nationale : « c’était autre chose, ça n’avait rien à voir avec aujourd’hui… ».
On sent que les souvenirs s’effacent peu à peu, mais Stéphane, « [son] patron, [son] secrétaire » se charge de stimuler la mémoire de son père, désormais 81 ans : « je crois que j’ai eu une belle carrière ». Une carrière notamment passé par le LOSC, de 1984 à 1989.
L’arrivée à Lille
Après avoir été contraint de stopper prématurément sa carrière de footballeur à l’âge de 31 ans en raison d’une blessure à la jambe, Georges Heylens a entraîné l’Union Saint-Gilloise (73-75), Courtrai (75-77), Alost (78-83), puis le petit club de Seraing, qu’il a mené jusqu’à la 5e place du championnat belge en 1984. A cette occasion, il est élu « entraîneur de l’année » en Belgique.
Pendant ce temps, les dirigeants loscistes cherchent un nouvel entraîneur après le départ d’Arnaud Dos Santos. Jean Parisseaux ne souhaite pas quitter la formation des Dogues et, alors que l’on s’attend à la signature du Hongrois Pazmandy, on apprend le 22 juin que le FC Seraing est placé en liquidation judiciaire, et son entraîneur, licencié. Le LOSC saute sur l’occasion et fait signer un contrat d’un an à celui qui a mené si haut ce petit club de la banlieue liégeoise : « on a eu beaucoup d’ennuis financiers à Seraing. J’avais rencontré les dirigeants du LOSC à plusieurs reprises, et la mise en liquidation a tout changé ».
Direction le Nord de la France pour Heylens, alors qu’on le disait sollicité par Lausanne, Benfica et le PSG. Le précède une réputation qui colle bien à la région : travail et rigueur.
Le LOSC des années 1980
« Mes trois premières années à Lille ont été super. Par la suite, on s’est essoufflés. Le LOSC était un club familial. Je n’en garde que des bons souvenirs : Dewailly, Samoy, Parisseaux, Amyot, Robert… Des gens très biens. Sur le plan personnel, j’ai habité La Madeleine la première année, puis le quartier Vauban, et Lambersart. Lille, c’était pas mal, hein ? ».
« Avec moi, ça s’est moins bien passé avec Bernard Gardon. Mais c’est du passé ». On se rappelle en effet les circonstances rocambolesques du départ de Georges Heylens en 1989, dont on peut supposer qu’il avait été fortement « encouragé » par le directeur sportif de l’époque, Bernard Gardon, qui tenait à faire signer Gérard Houiller… qui n’était pas libre.
Sur le terrain, les années 1980 ne sont certainement pas les plus glorieuses du club ; elles oscillent entre le moyen et quelques éclaircies, le temps d’un bon parcours en coupe, ou pour admirer la technique de quelques vedettes « on a tout de même eu de très bons joueurs : Périlleux, Angloma, Lama, Mobati, Pelé, les frères Plancque… Avec ces joueurs-là, je pense qu’on aurait dû mieux faire, au moins atteindre une fois une coupe d’Europe ».
Grimonprez-Jooris n’a en effet que trop rarement vibré durant cette période, hormis, par exemple, lors du retournement de situation contre Bordeaux en coupe en 1985 (1-3 ; 5-1) : « oui mais on se fait éliminer derrière. J’ai davantage de regrets sur notre parcours en coupe en 1987 [Lille est éliminé en quarts par Bordeaux 1-3 ; 2-1]. On n’est pas passés loin de la demi, et le tableau me semblait plus abordable » ; ou lors d’une victoire contre le PSG en janvier 1986 : « le match avait été joué une première fois, et interrompu à 5 minutes de la fin à cause d’un problème d’éclairage. Il y avait 1-1, et on était très contents. Il a fallu tout rejouer ! Luis Fernandez était en colère de rejouer… Et on a gagné 2-0 ! »
« Je me rappelle aussi qu’on avait la possibilité de partir loin, assez longtemps, car il y avait une vraie trêve de quelques semaines en hiver. On est allés au Niger, au Cameroun. On est aussi allés en Guyane, chez Bernard Lama ».
« Il y avait une grande rivalité avec Lens. D’ailleurs, peu après mon arrivée, le quarantième anniversaire du club coïncidait avec la réception des Lensois. On a gagné 2-0 ! Et on a gagné aussi une ou deux fois à Bollaert… Dont une fois 4 à 1. On m’avait dit que Lille n’avait pas gagné là-bas depuis 20 ans »
Les deux entraîneurs nordistes sur RVN, avant le derby de septembre 1984
« J’ai été le premier à ouvrir la filière scandinave au LOSC, avec la venue de Kim Vilfort. Malheureusement, il n’a pas trop réussi à Lille ».
Le duo Desmet/Vandenbergh
« J’ai eu du plaisir à les avoir ces deux-là ! » S’il est bien un duo qui a marqué les années Heylens, c’est celui formé par ses deux compatriotes. Au cours de l’été 1986, les dirigeants du LOSC sont orientés vers la Belgique par leur entraîneur. Signe, dans un premier temps, Filip Desmet, révélation de la saison à Waregem, qui a joué une demi-finale de C2. Puis Heylens s’envole pour le Mexique, cette fois en tant que consultant pour Sports 80 (devenu Sports Magazine). La Belgique se classe quatrième, avec le même Desmet, et Erwin Vandenbergh, meilleur buteur du championnat belge en 1980, 1981 et 1982, et Soulier d’Or 1981.
Peu après la coupe du monde, Vandenbergh signe au LOSC (et Heylens rempile cette fois pour 3 ans) : « Vandenbergh avait été mis sur la liste des transferts par Anderlecht. Je l’ai su… ». La promesse d’une attaque de feu qui, là aussi, n’a finalement brillé que de façon intermittente, comme on l’a évoqué ici ou ici.
« La venue de Desmet et de Vandenbergh a fait venir pas mal de Belges à Grimonprez-Jooris : beaucoup venaient de Moucron, de Courtrai, de Menin, ou de Waregem. Le LOSC a toujours eu des liens privilégiés avec la Belgique ».
Après le LOSC, Georges Heylens a vite rebondi, d’abord au Berschoot puis, entre autres, à Charleroi (où il a retrouvé Desmet, et a participé au Tournoi de Liévin 1992), Malines ou Seraing, avec qui il a participé au fameux « tournoi de Liévin » en 1994. à l’issue de la saison 1993/1994, le petit club liégeois découvre la coupe d’Europe : « on a joué un tour d’UEFA contre le Dynamo Moscou. On a été battus 3-4 à la maison, et on rate un pénalty pour égaliser. Au retour, on gagne 1-0 là-bas. Insuffisant, malheureusement… Roger Lukaku, le père de Romelu, a tiré sur la latte à la dernière minute ! »
Après bien d’autres expériences, en Belgique et ailleurs, Georges Heylens a tiré sa révérence après une dernière pige chez les filles du White Star Fémina (club de Woluwé-Saint-Lambert), en 2015 : « au cours d’une rencontre d’anciens, j’ai rencontré le président du club, qui m’a proposé de m’occuper des féminines deux fois par semaine, de 20h à 22h. Ce sont souvent des étudiantes, donc il faut leur aménager des horaires. J’ai accepté avec plaisir ».
Georges Heylens suit toujours attentivement les performances du LOSC et d’Anderlecht, même s’il se rend de moins en moins au stade « quand les deux clubs se sont affrontés en Ligue des Champions en 2006, on a été invités à Anderlecht par les dirigeants d’Anderlecht, et à Lille par les dirigeants du LOSC. En 2014, Patrick Robert nous a invités pour les 70 ans du LOSC. J’espère qu’on a laissé de bons souvenirs. Saluez bien tout le monde à Lille... »
Merci à Stéphane et Georges Heylens pour leur disponibilité
Une sélection d’articles sur les années Heylens :
1984-1986 : quand le David lillois tyrannisait le Goliath Lensois
Erwin Vandenbergh, la classe belge
Quand Soler et Bureau semaient la terreur. Retour sur 40 jours de feu (1986)
Les succulents Lille-Lens de l’été 1986
La coupe de la Ligue 1986 des Loscistes
1986-1987 : quand le LOSC retrouve l’ambifion
Eté 1987, les premiers pas de Christophe Galtier au LOSC
Le tournoi CIFOOT de l’hiver 1987 : l’histoire d’un quadruple complot contre le LOSC
Le LOSC 1988/1989 : le Robin des Bois de la D1
Comment Gérard Houllier n’a pas signé au LOSC
Santini ouvre l’ère des vaches maigres
Laisser un commentaire
Vous pouvez vous exprimer.
0 commentaire
Nous aimerions connaître la vôtre!