Archiver pour septembre 2023
Posté le 19 septembre 2023 - par dbclosc
Acimovic, vidi, vici
Hommage à la légende Milenko « Mile » Acimovic, tandis que le LOSC affronte en Conférence League l’Olimpija Ljubljana, club de jeunesse du milieu slovène dont il fut directeur sportif à deux reprises après sa carrière de joueur. On vous donne même de ses nouvelles à la fin.
Milenko Acimovic a littéralement grandi sur un terrain de football. En effet, au tournant des années 90, son père, d’origine serbe, est gardien de stade au Bezigrad Stadium de Ljubljana. C’est donc dans la capitale slovène qu’Acimovic fait ses gammes. D’abord au Zeleznicar (club aujourd’hui disparu) puis à l’Olimpija. Après deux ans à jouer sur la pelouse de son enfance, « Mile » s’envole pour son autre club de cœur, celui de ses parents : l’Etoile Rouge de Belgrade.
Là-bas, il explose aux yeux de l’Europe du football. Et encore plus un soir de novembre 1999. De retour sur sa pelouse fétiche du Bezigrad Stadium avec l’équipe nationale slovène, il affronte l’Ukraine pour une place à l’Euro. Tandis que les deux équipes sont bloquées à un partout, le gardien ukrainien foire sa relance qui arrive sur Acimovic au milieu de terrain. Sans hésitation, tel un Beckham de l’ex-Yougoslavie, il envoie un lob direct dans le petit filet. Et qualifie son pays, huit ans après son indépendance, pour sa première compétition internationale. Un but dont tous les slovènes se souviennent encore aujourd’hui. Enfin on n’a pas de pote slovène mais on imagine.
« A l’image du Lavallois Crucet »
« Mile » signe par la suite à Tottenham à l’été 2002 après une coupe du monde réussie (1 passe décisive et un but). Désiré par Daniel Lévy, déjà en poste à l’époque, il joue pourtant très peu la première saison avant d’être carrément mis au placard la seconde. Son salut vient alors du LOSC de Claude Puel, mal en point, quatorzième à la trêve, qui le prend en prêt. Pour cette dernière saison à Grimonprez-Jooris, Acimovic aide les lillois à redresser la barre (6 buts en 16 matchs) pour finir dans le ventre mou. La fameuse zone de confort « Jocelyn Gourvennec ».
Assez pour convaincre le LOSC de le transférer définitivement. Et c’est donc à l’été 2004, qu’Acimovic démontre son talent dans la plus prestigieuse des compétitions, la Conférence League des années 2000 : la coupe Intertoto. Il offre le sacre au club d’un but au bout des prolongations face à l’UD Leira. Titre qui est encore aujourd’hui célébré chaque année par des milliers de supporters devant le Leroy Merlin de Villeneuve d’Ascq. Mais bientôt, cette réalisation est éclipsée par une autre bien plus significative dans une vraie grande compétition européenne. Et non pas une Coupe des villes de foires.
En septembre 2005, le LOSC est en Ligue des Champions après avoir terminé second la saison précédente. Les Dogues étrennent leur deuxième campagne dans cette compétition par une défaite à Lisbonne, avant de faire nul contre Villareal, puis à Manchester, sur le même score de 0-0. Pour l’anecdote, après le match à Old Trafford, Cristiano Ronaldo, impressionné par la prestation d’Acimovic viendra échanger son maillot avec lui. Mais, une fois à l’aéroport de Manchester pour prendre l’avion du retour, le Slovène est apostrophé par l’un de ses jeunes coéquipiers. En effet, le belge Kevin Mirallas part dans un long monologue pour lui expliquer que Cristiano Ronaldo est son idole et qu’il l’inspire au quotidien (sûrement pour la coiffure au gel Vivelle Dop Fixation Béton). Acimovic, le cœur sur la main, accepte alors de lui donner le maillot du futur quintuple ballon d’or. Et Mirallas de s’effondrer en larmes sous le coup de l’émotion.
Début novembre 2005, le LOSC, qui n’a donc marqué aucun but sur la phase aller, affronte de nouveau le grand Manchester United de l’époque, cette fois au Stade de France. Le LOSC est contraint à la victoire pour espérer une qualification en huitièmes de finale. En face Rooney, Van Nistelrooy, Cristiano Ronaldo et Mikael Silvestre attendent de pied ferme. Mais à la 38ème minute du match c’est Milenko Acimovic qui l’a pour catapulter la balle sous la barre de Van Der Sar. Après une folle chevauchée du capitaine Tafforeau sur le côté gauche, le Slovène se jette pour mettre un plat du pied. Rideau, chapeau l’artiste. Ça restera le seul but du LOSC dans cette phase de poules de Ligue des Champions. Mais à jamais le symbole de la victoire du jeune LOSC sur l’ogre mancunien.
Que des beaux noms (puisque que Giggs n’est pas là)
Il reste en mémoire quelques autres exploits d’Acimovic avec le LOSC. Dont un but magnifique face à ce bon vieux Steeve Elana ou un autre face à l’ami Wimbée.
Il part finalement en 2006, après une fin de saison tronquée. S’ensuivent l’Arabie Saoudite pré-fièvre mercantile et l’Austria Vienne. Puis « Mile », touché par une lourde blessure au genou, ne peut pas pousser plus loin et prend sa retraite à 33 ans. Il revient alors à ses premiers amours à Ljubljana. Et fait deux piges en tant que directeur sportif de l’Olimpija. Mais des différences de points de vue avec la direction le poussent à se tourner vers le rôle d’éducateur et d’entraineur. Il ouvre sa propre école de football qui accueille chaque été des jeunes footeux du monde entier. Puis en novembre 2020, quinze ans après l’épique nuit mancunienne, il prend le poste d’entraineur des espoirs de la Slovénie.
♪ Prendre un enfant par la main ♫
En novembre de cette année, pour la confrontation face à l’Olimpija, le LOSC de Paulo Fonseca ne se déplacera pas sur la pelouse du Bezigrad Stadium, détruit depuis. Mais quitte à parier que Milenko Acimovic aura tout de même ses aises en tribunes. Le cœur tiraillé entre deux clubs, le temps d’une de ces soirées européennes qu’il a si bien connu.
Posté le 8 septembre 2023 - par dbclosc
1971, le « stade Grimonprez » accueille France (B)/Australie
En 1971, l’équipe de rugby d’Australie effectue une tournée en France, ponctuée de 8 matches amicaux. Parmi ceux-là, une opposition face à l’équipe de France B au « stade Grimonprez ». Voilà une bonne occasion de se pencher sur ce qu’était ce stade avant qu’il ne soit complété du nom d’Henri Jooris.
1971 est l’année du renouveau pour le LOSC : après avoir renoncé au statut professionnel en 1969 (pour les Lensois qui nous lisent : le RCL aussi), le club a terminé premier du groupe Nord-Est, ce qui lui permet de retrouver l’élite, un an après avoir retrouvé le statut professionnel (pour les Lensois qui nous lisent : pas le RCL). On parle alors de « renaissance », non pas parce que le LOSC remet à l’honneur les arts et la philosophie gréco-romaine, mais parce qu’on croyait qu’il était bel et bien mort. Après des opérations de sauvetage mi-figue mi-raisin, cette renaissance est attribuée à Max Pommerolle, arrivé à la présidence à l’été 1970 qui, avec l’aide la mairie (l’adjoint aux sports est alors Raymond Allard), remet en place un plan ambitieux, tant sportivement que politiquement. Cela se traduit donc par ce retour au premier plan en 1971, puis par quelques travaux au stade Henri-Jooris durant l’été 1971.
Ainsi, au stade Henri-Jooris (nom du stade depuis 1943), résidence du club lillois depuis la fin des années 1900 (sous l’appellation Olympique Lillois), les « Secondes » ont été refaites ; les « Premières » ont été en partie cimentées ; dans la tribune dite « marathon », on a remodelé les places assises afin d’assurer une meilleure visibilité aux spectateurs ; des petits coussins ont été placés sur les sièges des « Présidentielles » ; les tribunes « Debout » ont été prolongées jusqu’aux angles du terrain, et, avec l’accord des anciens de l’OL, le monument aux morts de l’OL, inauguré en 1923, a été déplacé afin d’agrandir, à terme, les « Secondes ». En tribune de presse il y a désormais 6 cabines téléphoniques.
Ces travaux étonnent : si tout le monde s’accorde à dire que le stade est trop petit et trop vétuste, on sait aussi qu’il est question, depuis longtemps, de « déplacer » ce stade. Autrement dit de le détruire et d’en trouver un autre. Alors pourquoi dépenser pour un usage qui risque de n’être que très temporaire ? À vrai dire, l’échéance est encore très incertaine puisque les travaux de dérivation de la Deûle ne sont pas encore prévus. En outre, même si le stade de la ville nouvelle « Lille-Est » sera construit en 1975, la Voix du Nord considère qu’il faudra tout de même un stade aux Lillois. Il ne s’agit donc pas d’« inutiles dépenses ».
Pendant que le LOSC (la mairie) s’occupe à dépoussiérer son bâti existant, un lieu qui représente, sans qu’on ne le sache encore, l’avenir du LOSC, accueille un grand événement en novembre. De l’autre côté de la Citadelle se trouve en effet le « stade Grimonprez », qui s’apprête à accueillir un match international de rugby entre l’équipe de France (B) et l’équipe d’Australie (A). À cette époque, et depuis sa construction en 1955, ce petit stade, initialement connu comme le « stade municipal de la Citadelle », il est ouvert à quelques clubs sportifs, aux scolaires et aux sportifs du dimanche.
D’une capacité de 2 500 places, il a été construit par les architectes nordistes Auguste Corbeau et Jehan Boyer. Il est composé, sur un seul côté de terrain, de gradins séparés par une tribune centrale, sous lesquels sont aménagés des vestiaires et des douches. Autour du terrain se trouve une piste d’athlétisme.
Travaux de construction du « stade de la Citadelle » en 1955
Le « stade de la citadelle », appellation donnée durant sa construction, est rapidement baptisé « Stade Félix Grimonprez », du nom d’un champion lillois de Hockey sur gazon qui a débuté sa carrière à l’Olympique Lillois avant de briller au Lille Hockey-Club (qui semble être l’ex-branche hockey de l’OL), dont le terrain était situé à Lambersart, avenue du Bois. International français, il fut même capitaine de l’équipe de France. Il est mort en mai 1940 au cours de la défense de Calais. Dans Nord-Matin Sports (26 juin 1950), on peut lire : « la haute taille, la silhouette élégante de Félix Grimonprez continueront à planer sur la verte pelouse de l’avenue du Bois, car l’ex-capitaine du Lille-Hockey Club sera toujours pris en exemple dans un club qui entend vivre avec ses souvenirs et son passé ». C’est donc à ce petit stade entouré de verdure qu’est donné le nom de Félix Grimonprez.
Le Miroir des Sports, 21 mai 1935
Le stade Grimonprez est inauguré en juillet 1956. À cette occasion se déroule une compétition d’athlétisme mixte (hommes et femmes) entre des juniors Belges et du Nord de la France. La revue L’Athlétisme (1er août 1956) salue les installations lilloises : « le stade Grimonprez avait réellement un air de fête pour son inauguration (…) Les installations techniques se révélèrent parfaites. La piste était excellente et rapide. Les airs de concours remarquables. En un mot Lille possède un stade qui peut permettre de grandes réunions dans cette ville parfaitement outillée pour une grande propagande en faveur de l’athlétisme ».
Le stade Grimonprez accueille ainsi régulièrement des compétitions soit de jeunes sportifs, soit de sportifs internationaux d’équipe « B », comme sur la photo ci-dessous où, en 1964, la Flandres affronte la Belgique « B ».
La venue de l’équipe première d’Australie est donc une exception pour ce stade habitué à accueillir des sportifs moins prestigieux. Selon la Voix du Nord, cela tient à une « excellente initiative décentralisatrice » de la Fédération Française de Rugby. Ainsi, pour la première fois, un match international de rugby va se dérouler à Lille. Même si les Wallabies sont dans une période creuse, en témoigne le triomphe de la tournée des Sud-Africains chez eux quelques mois auparavant (outre le scandale politique que ça a suscité), ils conservent une certaine aura mais cherchent surtout à se rassurer. Face à elle, ce 3 novembre 1971, c’est donc une équipe « B » de France qui se présente. Souvent , cette équipe « B » est une sélection régionale ; seulement, dans le Nord de la France, une telle équipe est difficile à constituer (du moins, une équipe compétitive). Cette particularité étonne d’ailleurs le sélectionneur australien (qui s’appelle French), qui explique à la Voix du Nord qu’il imaginait que Biarritz et Tarbes se trouvaient quelque part entre Lille et Paris.
Voici les compositions annoncées dans la Voix du Nord :
Au coeur de l’automne, il fait frais et le brouillard entoure la ville de Lille, ce qui permet à la VDN d’écrire qu’« il faisait un temps à ne pas mettre un kangourou dehors ». C’est nul mais c’est aussi ce qu’on aurait écrit. Dans une tradition de journalisme d’investigation, le quotidien remarque que les plaques minéralogiques des voitures garées aux alentours du stade « révèlent la nature particulière de ce match » pour lequel est venu « un public composite, aux accents variés ».
Sur le terrain, le match n’est pas très équilibrée entre Australiens et une équipe de France qualifiée de « gentillette ».
Sous les yeux de 4 000 spectateurs, parmi lesquels plusieurs joueurs du LOSC, dont le capitaine Jean Laffont, fils de rugbyman, les Australiens s’imposent 28 à 12. Curieusement, ce sont les Français qui sont satisfaits, estimant avoir bien résisté en dépit d’un manque d’automatismes ; et les Australiens sont déçus, comme l’indique French : « il est heureux pour nous que l’opposition ait été assez faible, car nous avons présenté de sérieuses lacunes au niveau du pack par exemple. Il nous faudra beaucoup travailler avant les test-matches, car les Français vont nous dévorer ».
On conçoit ici très bien l’avantage qu’auraient eu les Français en alignant une équipe régionale : pas de lacune au niveau du pack (de bières).
Pour la suite de sa tournée française, l’Australie remporte 3 matches contre d’autres sélections françaises, en perd deux ; puis affronte l’équipe de France A pour deux matches, officiels ceux-là : une victoire, une défaite.
Pour la Voix du Nord, « l’essai est transformé » (il reste la blague des cheveux emmêlés et on aura tout fait) : malgré le froid, à la suite de trois jours fériés, et « en plein fief du ballon rond » (!), la Ligue des Flandres a réussi son pari : « Grimonprez avait rarement été à pareille fête (…) Quatre mille personnes… Qui l’eût cru ! (…) Pour le sport en général, pour le rugby en particulier, inutile de dire que nous sommes heureux ! (…) Une belle, très belle journée de plus à mettre à l’actif du sport et des sportifs d’une région qui, quoi qu’en pensent certains, est ouverte à toutes les initiatives, à tous les genres de spectacles, à condition, bien sûr, qu’ils soient de qualité. Et celui là l’était ! ».
En 1974, les travaux pour faire le nouveau lit de la Deûle sont entamés. Les jours du stade Henri-Jooris sont désormais comptés. Du côté du LOSC, on semble acter que l’avenir se fera dans le nouveau stade de Lille-Est construit sous l’égide de la Communauté urbaine. Cependant, les rivalités politiques entre Arthur Nottebart (président de la Communauté Urbaine) et Pierre Mauroy (maire de Lille) aboutiront au maintien du stade de Lille-Est, mais sans le LOSC, qui gardera un stade dans sa ville car, selon Mauroy, « il faut un stade lillois pour le football lillois ».
Dès lors, le lieu est tout trouvé : ce sera Grimonprez. L’emplacement est idéal, de dépaysera pas les supporters, et il « suffit » d’agrandir l’existant (et comme il y a urgence, on ne s’embarrassera pas d’un permis de construire). Et peut-être peut-on imaginer que ce match de rugby a donné corps à la possibilité d’y jouer des grands matches. Ainsi s’exprimait Gros Quinquin :
« Oui, nous voulons faire un stade pour le football à Lille. Il ne faut pas oublier que le stade métropolitain est omnisports, qu’il accueillera donc toutes sortes de disciplines et pas seulement le football. C’est une nécessité pour la Communauté. Mais il aurait été anormal qu’un club lillois, le LOSC, occupe de façon permanente un stade fait pour toute la métropole. Il n’y a pas opposition entre les deux équipements mais complémentarité. Nous ne voulons pas faire un stade métropolitain à Lille, nous voulons faire le stade du football lillois. À Grimonprez, nous nous contenterons donc d’aménager pour une somme limitée et selon un programme qui s’étalera sur plusieurs années, des tribunes couvertes. Le LOSC y jouera ses matches, sauf cas exceptionnel où il jouera au stade métropolitain » (La Voix du Nord, 6 juillet 1974)…
Dès juillet 1974, les travaux au stade Grimonprez sont engagés.
Un peu plus d’un an plus tard, le LOSC inaugure contre Feyenoord son « nouveau » stade, gardant le « Grimonprez » de 1956 auquel tenait la mairie, en y accolant le « Jooris » de 1943, auquel tenait le club. Et à Grimonpez-Jooris, désormais, on ne jouera qu’au football.
Un petit morceau pour conclure :