Archiver pour octobre 2023
Posté le 14 octobre 2023 - par dbclosc
Bruno Metsu, de la galère lilloise au pari Dakar
Il n’est pas certain que le passage de Bruno Metsu en tant qu’entraîneur des Dogues ait constitué le meilleur souvenir de sa carrière : c’était en 1992/1993, au sein d’un LOSC claudicant, qui ne permettait à aucun coach de briller. Rapidement écarté, Metsu enchaîne avec quelques expériences mitigées en France. C’est presque par dépit qu’au tournant des années 2000, il se lance dans une carrière de sélectionneur grâce à laquelle il rebondit de façon spectaculaire et obtient une reconnaissance internationale.
« On a cassé notre travail » : amer, c’est ainsi que Bruno Metsu s’exprime dans la Voix des Sports en mars 1993, quelques semaines après son renvoi (ce qui ne signifie pas qu’il a roté).
« On », dans l’immédiat, c’est probablement Marc Devaux et Bernard Lecomte, arrivés à la tête du LOSC le samedi 20 février 1993, succédant ainsi à Paul Besson et à la tutelle de la mairie sur le club. Le soir même, le LOSC gagne, 1-0 contre Auxerre. Le lundi 22 février, le nouveau duo présidentiel limoge l’entraîneur, dont le sort était bien sûr scellé avant cette victoire.
Mais « on », c’est aussi un ensemble de paramètres qui ont parasité la saison 1992/1993 du LOSC. Le club a en effet condensé en quelques mois ce qui peut arriver de pire à un club sportif, payant ainsi à la fois une mauvaise gestion et des transformations structurelles du football. Et sur ces points, Bruno Metsu ne pouvait certainement pas grand chose.
L’histoire avait pourtant bien commencé entre le LOSC et Bruno Metsu, Dogue une première fois de 1979 à 1981.
Dogue de 1979 à 1981
À ce moment, Bruno Metsu a 25 ans est un milieu de terrain défensif reconnu, qui vient de passer quatre années à Valenciennes, au cours desquelles l’USVA joue le maintien en D1, en dépit de la présence de certaines vedettes dans l’effectif, comme Roger Milla ou Didier Six. Cette reconnaissance lui permet de recevoir quelques offres, dont une sérieuse venant de Bordeaux. Mais il choisit le LOSC, un club chez qui il estime qu’il aura davantage de possibilités de jouer. Lors de son arrivée à Lille il déclare que « le LOSC est un très bon club, un club qui monte et qui, d’après moi, n’a pas fini de monter ». En effet, avec Arribas comme entraîneur, les Dogues sont remontés en D1 en 1978, avant de terminer à une belle sixième place.
Metsu a été formé comme défenseur (le n°2 qu’il portait sur son maillot à Valenciennes, même au milieu de terrain, en est une trace), et Arribas a l’intention de le replacer à son poste d’origine : arrière droit. Mais il aura la possibilité de jouer plus haut, conformément aux intentions de jeu de l’entraîneur du LOSC : « le jeu d’arrière joué comme à Lille est complet, varié, on peut monter… On n’en est plus au défenseur qui n’a pas le droit de passer la ligne médiane » assure-t-il.
Les trois recrues de l’été 1979 : Bruno Metsu, entouré de Bernard Pardo et de Patrick Rey
Régulier durant ses deux saisons en tant que joueur au LOSC, Metsu est titularisé 27 puis 28 fois. Il marque notamment lors de son sixième match, à Strasbourg, en août 1979 (défaite 2-3). Lors de la saison 1980/1981, il ouvre la marque contre Lens (2-1), au cours d’un derby où un autre futur-entraîneur « régional » marque : Daniel Leclercq. Un an avant la fin de son contrat, il part dans le Sud, à Nice, en D2, où il retrouve un poste en milieu de terrain.
Cette dernière étape à Nice est jusqu’alors une exception dans le parcours de Metsu, du moins, d’un point de vue géographique. En effet, avant Valenciennes et Lille, il n’a que peu bougé du Nord de la France.
Nordiste pur jus
Né à Couderkerque-Branche en 1954, il joue à l’US Dunkerque des sections Pupilles à Cadets. Avec les Cadets, il fait même quelques apparitions dans le groupe professionnel. C’est à cette occasion qu’il est repéré par un recruteur d’Anderlecht. Nous sommes en 1970, et Bruno stoppe sa scolarité pour filer à Bruxelles : il ne sera pas prof de gym, comme il l’avait envisagé, sa carrière de footballeur est lancée !
Comme le statut de footballeur professionnel n’existe pas encore en Belgique, il n’y est pas « stagiaire » mais « junior ». Pendant trois années, il poursuit sa formation aux côtés, notamment, de François Van Der Elst, qui contribuera aux grandes heures d’Anderlecht dans les années 1970. Après trois ans, Metsu souhaite revenir en France. De toute façon, sa condition d’étranger aurait fini par poser problème en Belgique. Et ça tombe bien : il ignorait une clause de son contrat qui l’oblige à rentrer à Dunkerque pour la saison 1973/1974. Après cette nouvelle saison sur le littoral nordiste, il trouve le club trop peu ambitieux et se met alors en quête d’une licence amateur, condition nécessaire pour obtenir ensuite un statut professionnel.
Cette licence amateur, il la trouve à Hazebrouck, entraîné par Jean Parisseaux, qu’on retrouvera à la tête du centre de formation du LOSC de sa création (1978) à 1986. Son passage à Hazebrouck (74/75) correspond à l’année de son service militaire. Le voilà alors sélectionné en équipe de France militaire, aux côtés, entre autres, de Daniel Zorzetto, Loïc Amisse ou Gérard Soler.
USVA 1978/1979 (debout, à droite : Nordine Kourichi ; à côté de lui, Bruno Metsu ; assis, au centre : Philippe Piette)
En 1975, il est fort sollicité : Bordeaux, Lens et Valenciennes sont sur le coup. Prudemment, il choisit Valenciennes, où il estime qu’il aura davantage sa chance, le club ayant clairement annoncé vouloir s’appuyer sur la jeunesse. Lors de sa première saison, il prend part à la moitié des matches avant de s’imposer comme titulaire, au milieu de terrain, à partir de 1976. Il restera quatre ans à Valenciennes avant donc de rejoindre le LOSC en 1979. Après Nice, Metsu trouve sur sa route Roubaix Football (83/84) puis Beauvais où il est une dernière fois joueur avant de diriger le Centre de formation du club picard, puis de prendre en charge l’équipe professionnelle à partir de septembre 1987, en remplacement du précédent entraîneur (Stefan Bialas), limogé. C’est donc presque forcé par les circonstances qu’il se retrouve à cette place : « les pros, ce n’était pas une priorité dans mon esprit. Au départ, je voulais d’ailleurs gérer un centre de formation. À Beauvais, nous avons lancé beaucoup de jeunes, dont [Etienne] Mendy. Quel plaisir ! ». Il rappelle également qu’il s’est occupé de Jean-Pierre Papin quand il était à l’école de foot de Valenciennes, et qu’il a pris en charge des équipes de jeune à Nice et à Roubaix (parmi lesquels le fils de Tony Gianquinto).
Durant ses cinq années à Beauvais, en D2, il place successivement le club picard aux 13e, 15e, 6e, 11e et 12e places, avec un quart de finale de coupe de France en 1989.
Rien de folichon, mais un entraîneur sérieux qui, au regard de ses moyens limités, convainc. D’ailleurs, avant de rejoindre le LOSC en tant qu’entraîneur, il avait été approché par Lens en 1990 mais ne se sentait « pas assez mûr » ; en 1991, c’est au tour de Valenciennes de souhaiter l’enrôler, mais seulement à la veille de la reprise de l’entraînement. Il refuse. Désormais, en 1992, alors qu’il s’estime « à un tournant de [s]a carrière », les conditions lui semblent réunies pour rejoindre Lille. Il garde son passage en tant que joueur un bon souvenir, même si « quand on quitte Lille, on se dit toujours qu’il y avait peut-être mieux à faire ». Une semaine après avoir donné son accord aux dirigeants lillois, un autre club de D1 le sollicite : « c’est la preuve qu’on reconnaît mon travail » affirme-t-il, et c’est bien à Lille qu’il signe un contrat de 3 ans.
Selon lui, « Le club a un passé et son image est bonne ». Le nouvel entraîneur estime que son prédécesseur a laissé un acquis sur lequel s’appuyer : « je n’arrive pas dans une équipe démunie et c’est un point important ». Cela étant, le LOSC commence à s’enfoncer dans une crise permanente, tant sportivement qu’administrativement. La troisième année de Jacques Santini s’est achevée sur une passable 13e place, et un match folklorique en coupe de la Ligue où les joueurs se rebellent contre leur direction et se prennent 1-9 à Sedan. A posteriori, on peut voir là les prémices d’année sans saveur mais, en attendant, Metsu est ambitieux et le fait savoir en promettant un jeu spectaculaire et offensif : « je pense que mon style et mes idées correspondent à la mentalité nordiste. J’ai mes racines dans cette région, ça compte. Le Nord aime les footballeurs qui ne calculent pas, le jeu direct, les gens qui se livrent à fond. Tout ça contribue au succès de Lens, finalement ».
Il fera équipe avec Tony Gianquinto pour directeur sportif, et Paul Besson comme président : « rien ne se fait sans mon accord. Les choses sont claires. Avec le président et Tony Gianquinto, on émet des idées, qu’on confronte ensuite. Il est toujours plus intéressant de travailler à trois que seul. Mais je suis au courant de tout. Indispensable. Mais si le président Besson m’amène Waddle sur un plateau, je ne lui ferai pas de remarques désagréables... ».
Justement, qu’en sera-t-il de l’effectif actuel et du recrutement ? Bruno Metsu semble avoir des idées bien arrêtées sur ce qu’il veut faire de certains joueurs, comme il l’affirme un peu maladroitement dans la Voix des Sports (25 mai 1992) :
« On dit souvent que le LOSC n’a pas un style spectaculaire parce que les attaquants font défaut. À cela, je réponds que la réussite offensive d’une équipe dépend d’abord et surtout du collectif. Or, de ce côté-là, il y a des choses qui me chiffonnent un peu. Par exemple, je trouve que la balle ne repart pas assez vite de l’arrière. Peut être parce que le libéro ne met trop de temps pour trouver une solution idéale
Est-ce à dire que Hansen est dans le collimateur ?
Il est trop tôt pour parler ainsi. Je dirais simplement qu’à la lumière des matches auxquels j’ai assisté, il ne pèse pas assez, semble-t-il, sur le jeu ».
Promesses offensives
Pour parvenir à ce « style spectaculaire », le coach a d’abord pensé à Etienne Mendy, qu’il a connu à Beauvais et avec qui il a « un bon contact », ainsi qu’à François Calderaro, qui sort d’une saison à 19 buts avec Metz : « ces deux là auraient amené quelque chose et c’était un bon coup médiatique ». Mais les opérations ne se font pas. Gianquinto et Metsu vont alors se tourner vers l’Amérique du Sud pour trouver un joueur qui animera le jeu du LOSC, en attendant un attaquant de pointe : « j’aimerais que notre jeu d’attaque soit vif, rapide. C’est pourquoi l’Uruguayen Borgès, dont le style s’apparente à celui de Rui Barros, me plait. De Nil, le Belge, un Jesper Olsen droitier, aussi. Si on pouvait avance de ce côté et dénicher un attaquant axial, pour jouer avec Frandsen, que je vois plutôt dans une position de deuxième avant-centre, le LOSC aurait déjà de beaux arguments dans son jeu ». L’attaquant axial, ce sera Walquir Mota, que Metsu a connu à Beauvais. Lui reste sur une saison à 18 buts… mais en D2 (Tours).
Mi-juillet, le LOSC remporte son premier match de préparation, contre Beauvais, qu’on retrouve décidément beaucoup dans cette préparation. Le buteur des Dogues est Walquir Mota, et la Voix des Sports est fort séduite par le spectacle proposé : « autant le dire, le trio Borgès-Mota-Frandsen, lorsqu’il sera parvenu au maximum de ses possibilités, devrait laisser augurer de belles choses pour la suite… ». L’entraîneur est ravi : « nous nous sommes déjà rendus compte que Borgès et Frandsen s’entendaient très bien dans le jeu. Quant à Mota, c’est le troisième pion dont j’aurai besoin. Que demande-t-on à un attaquant, sinon de marquer ? Et en plus, c’est un démolisseur, qui pèse, une rencontre durant, sur les défenseurs ». Voilà qui promet. C’est alors que survient le premier caillou dans la chaussure : Per Frandsen quitte le groupe pour disputer les Jeux Olympiques en Espagne, et ne participera pas à la suite de la préparation.
Mais en attendant, les matches amicaux se poursuivent et Lille fait forte impression. L’entreprise de séduction de Bruno Metsu est réussie, comme le relate la Voix du Nord, qui indique qu’il « apporte des petites touches dans un souci permanent d’évoluer vers un football bien léché, un football privilégiant la fantaisie et le spectacle. Denrées devenues rares à Grimonprez-Jooris ces dernières saisons ». Ainsi, en dépit de quelques contraintes (outre l’absence de Frandsen, Fiard, Fichaux et Borgès rencontrent quelques pépins physiques), le LOSC tourne bien, avec ici Tihy testé comme libéro, ou là le retour de Thomas.
La préparation se passe même incroyablement bien : après 5 matches, le LOSC a tout gagné et a marqué 15 buts. Parmi ceux-là, 6 contre Lens lors du Challenge Emile-Olivier, avec entre autres un but de Borgès et un doublé de Mota ! Voilà qui donne raison à la campagne publicitaire lancée par le LOSC (à moins qu’elle n’ait été lancée après les premiers matches amicaux) : « Show devant. Du grand LOSC… C’est promis ».
La préparation se termine néanmoins avec deux défaites contre des clubs belges (Anderlecht et La Gantoise). Mais pas de quoi s’inquiéter du côté du LOSC, où on estime qu’après 5 matches en 15 jours, il est normal que les organismes aient du mal à récupérer. Quoi qu’il en soit, aucun doute pour la Voix des Sports : « Borgès s’affirme comme le futur patron du LOSC » (on en a parlé ici) ; « sérénité » est le mot qui revient dans l’hebdomadaire. Le LOSC a encore quelques pistes : on parle d’un retour de Péan et de la venue d’Amara Simba, mais « notre recrutement est plus que satisfaisant » assure Tony Gianquinto.
Avec un nouveau capitaine, Thierry Oleksiak (élu par ses coéquipiers après que Fiard a renoncé au brassard), et Jean-Claude Nadon comme vice-capitaine, le LOSC peut entamer une saison pleine de promesses. Hélas, dès la première journée…
… Le LOSC est « en panne de réalisme » indique la Voix des Sports. Le résumé ci-dessus ne le montre pas, mais Mota a manqué 4 face-à-face avec Sansone, le gardien strasbourgeois ! Les premiers ont eu lieu aux 3e puis 4e minutes et, à la 7e minute, Leboeuf ouvre la marque. Et Mota a après le match une étonnante réaction, qui laisse penser qu’il est coutumier du fait, et qu’il lui faut 4 occasions nettes pour marquer un but : « il ne faut pas dramatiser, ce n’était que le premier match. Bon, c’est vrai, sur le plan de l’efficacité, je passe au travers aujourd’hui. C’est rageant parce que lorsqu’il m’est arrivé de manquer trois occasions, je mettais la quatrième au fond. Là, rien ». Par la suite, un pénalty qui a paru évident à tous, pour une faute sur Mota, n’a pas été sifflé.
Le néant offensif
Mais là où le bât blesse le plus, c’est que Lille a été complètement apathique en fin de match, comme s’il était incapable de réagir. La VDS parle de « désagrégation » : « cette dernière demi-heure me chagrine un peu », avoue Oleksiak. Et soudainement, c’est comme si on se rendait compte qu’on s’est peut-être bercé d’illusions : « il faudra se souvenir qu’il n’est pas de plus grand menteur qu’une série de matches amicaux » note encore l’hebdo régional.
Oui mais tout de même, à ce point : au cours des 15 premiers matches, Lille n’a marqué que 5 buts… Il faut attendre la 24e journée pour que Lille marque son 15e but de la saison, soit le total qu’il avait atteint lors de ses 5 premiers matches amicaux en juillet !
Notons tout de même que les 5 buts du LOSC en 15 journées sont bien rentabilisés, puisqu’on compte 3 victoires 1-0.
Dans cette vidéo, 4 buts dont 3 qui permettent de gagner 1-0. Le dernier, contre Toulon, est consécutif à une prétendue faute de Thierry Rabat (qui a le même coiffeur que Metsu), qui occasionne un pénalty. Notons, juste avant, une belle tête de Mota aux six mètres qui passe trois mètres au-dessus.
Un constat s’impose : Borgès et Mota, flamboyants durant l’été, sont loin des espérances qu’ils ont fait naître. Cela étant, Borgès est relativement épargné par la presse, qui souligne ses qualités de créateur. Mais, sur ces 15 premiers matches, il n’a inscrit qu’un but soit… un de plus que son compère d’attaque. Et un de moins que le meilleur buteur du LOSC, Hervé Rollain, qui est arrière gauche. « Show devant », effroi derrière…
Face à cette incroyable inefficacité, une solution s’impose : il faut un joker offensif. Durant une trêve internationale, un match amical est organisé contre Amiens. Chérif Oudjani, sans club depuis la fin de son contrat à Sochaux, est essayé. Et c’est lui qui inscrit le seul but du match, sur pénalty. Un attaquant qui marque ? Eh ben on ne va pas le prendre alors ! C’est finalement Pascal Nouma qui débarque. Si son arrivée apporte dans l’immédiat un léger mieux offensivement (c’était pas dur), à la trêve, le LOSC est en position de barragiste (18e sur 20, avec un match en moins, à jouer contre Marseille).
« Je me suis trompé »
Et l’année 1993 ne se présente pas sous de meilleurs auspices. Il faut jouer ce match contre Marseille, qui avait été reporté, soi-disant, pour terrain gelé. En réalité, les Marseillais avaient tout fait pour ne pas jouer ce match car ils disputaient un match de coupe d’Europe juste après. Bref, ça fera encore probablement zéro point.
Début janvier, 6 mois après sa prise de fonctions, Metsu est interrogé par la Voix des Sports. L’entretien commence de façon délicate : « Léonce Lavagne et Francis Smerecki ont disparu du paysage de la D1, votre ami Arnaud Dos Santos aussi, ça vous inspire quoi ? ». Après cette belle entrée en matière, Bruno Metsu reconnaît des erreurs :
« Nos matches amicaux donnaient beaucoup de promesses mais, en fait, l’objectif affirmé à l’époque était trop élevé par rapport à nos possibilités. Le premier fautif, dans cette histoire, c’est moi. Je me suis trompé (…) J’ai toujours essayé de faire les meilleurs choix possibles, avec les joueurs dont je disposais. Mais bon, c’était sans doute une erreur de vouloir donner un visage très offensif à l’équipe. Le choix tactique était trop ambitieux. Il nous a fallu revenir à des choses plus réalistes, plus en phase avec les capacités de l’équipe. Cela dit, malgré tout, j’ai quand même des doutes. Que l’équipe soit capable d’être à la hauteur en matches amicaux et pas en compétition, je ne me l’explique pas ».
Le LOSC va pourtant se réveiller au moment où on s’y attend le moins. En dépit d’un « vous ne pensez tout de même pas que vous allez nous battre avec votre équipe ? » lancé par Bernard Tapie (rapporté par la Voix des Sports), le LOSC s’impose 2-0 contre Marseille, sur un terrain sans doute plus gelé que le jour du report, et avec la manière. Alors, cette fois, le LOSC est lancé ? Bien sûr que non. Une défaite à Caen (3-4), un nul contre Montpellier (0-0) puis une défaite contre Valenciennes (1-2) plus tard, le président Besson s’en prend à Jean-Claude Nadon, qui a succédé à Oleksiak comme capitaine. Résultat, Jean-Claude Nadon pique une colère et rend son brassard. Si on ajoute à cela un Pascal Nouma qui fait davantage parler de lui pour l’extra-sportif et qui s’amuse à tirer un pénalty à côté, pas grand chose ne va.
Heureusement, le maillot rose d’Auxerre permet d’égayer la saison
Tuiles sur tuiles
Cette bonne ambiance tourne à la farce lorsque le président Besson affiche désormais clairement ses intentions : la mairie ne doit plus subventionner le LOSC. Ses propos, dont on ne sait pas trop s’ils relèvent de la sincérité ou de la stratégie électorale (Besson est candidat aux législatives de mars), sont abrupts :
« Le temps est venu de réfléchir à la politique sportive de la ville, et notamment de penser à aider certaines disciplines, jusqu’ici plus ou moins délaissées. Et cela passe par une autre répartition des subventions (…) Quand on pense que la France est le seul pays européen où les clubs de foot professionnels sont subventionnés par des collectivités locales, il y a de quoi se poser des questions. Les clubs pros doivent et peuvent vivre sans cela (…) Lille a coûté beaucoup d’argent – 250 francs par habitant, la saison dernière – pour des retombées qui n’ont jamais été à la hauteur de ce qu’on est en droit d’attendre. Je constate, d’ailleurs, que l’affluence à Grimonprez-Jooris n’a pas évolué depuis 1981. De toute façon, les footballeurs sont des mercenaires de passage dans une ville, qui ne sont là que pour l’argent et qui se moquent du reste. Il est révoltant de voir que des footballeurs gagnent 100 000 ou 150 000 francs par mois, alors que des tas de gens n’ont que 5 000 francs pour vivre, voire moins ».
Que l’on soit d’accord ou non avec ces propos, qui semblent sortis d’un autre âge – celui du clivage entre partisans de l’amateurisme et ceux du professionnalisme – le message est clair : il ne faut plus compter sur le pouvoir municipal.
Cerise sur l’Hitoto, le club présente une dette abyssale qui, probablement, le mènera très rapidement au dépôt de bilan.
Et, comme le disait un grand penseur : « la merde, ça vole toujours en escadrille » : les joueurs apprennent par la presse qu’il est sérieusement question d’une fusion avec Lens, ou avec Valenciennes. Et puis, tant qu’on y est, la Voix des Sports rapporte « deux échauffourées qui ont mis aux prises quatre joueurs » lors d’un entraînement. Alors que l’hebdo croule sous un courrier de lecteurs indignés (tant du côté de Lens que de Lille) par la tournure des choses, sur le terrain, Lille perd 0-3 à Paris, mais peut compter sur la confiance et l’optimisme de son nouveau capitaine, Jean-Luc Buisine : « on se demande si on va y arriver, en tout cas nous ne sommes pas sur la bonne voie. On a l’impression qu’il n’y a plus grand choses dans cette équipe. On sent des individualités mais pas d’âme, pas la solidarité de groupe ».
Ensuite, les Dogues obtiennent un nul à la maison contre Toulouse (2-2), pour le retour de Borgès, « grande satisfaction du match », après 3 mois d’absence. À Grimonprez-Jooris, il y avait 4 500 spectateurs, dans une « ambiance feutrée, voire de recueillement, avec un dernier carré de fidèles. La fin de la rencontre est sifflée dans l’indifférence ». Dans son éditorial, la Voix des Sports semble préparer la nécrologie du club : « en quelques mois, par la faute de résultats décevants, le LOSC a perdu le peu de crédit qu’il lui restait. Aujourd’hui, il faut bien le dire, le LOSC fait peine à voir. Il existe bien une équipe et un encadrement, des structures, un centre de formation et des salariés qui font consciencieusement leur travail, mais le cœur, lui, bat au ralenti ».
Dans cette ambiance, Metsu est las : « sur le plan psychologique, ce n’est pas très facile. Le sujet [le dépôt de bilan] revient sans cesse dans les conversations… Si notre départ peut être salutaire, pourquoi pas. On s’exécutera, voilà tout. Comme d’autres avant nous ».
Après la mairie, c’est la région qui se retire. En coulisses, Devaux et Lecomte arrivent à la tête du club. Quelques heures après, grâce à une belle reprise de N’Diaye sur un centre de Borgès, le LOSC bat Auxerre. Loin du jeu « spectaculaire » souhaité par Metsu en début de saison, Guy Roux évoque le « hourrah football de style britannique » du LOSC, et souligne qu’« il y avait un joueur de classe dans ce match ». Il parle de Borgès.
Lille n’est plus barragiste grâce à la cinquième victoire de Bruno Metsu en tant qu’entraîneur. Sa dernière. Le 22 février, il est limogé. Pas à une originalité près, le LOSC vire donc son entraîneur après une victoire. Dans la semaine, un accord avait déjà été trouvé avec Henryk Kasperczak. Un poste dans le club a été proposé à Metsu, mais il préfère partir. Quant à Tony Gianquinto, on lui demande gentiment de se recentrer sur ses fonctions initiales : la coordination générale des activités du club.
L’instabilité se stabilise au LOSC
En réalité, pas grand chose n’est réglé. L’arrivée de Devaux suscite les mêmes questions que celles qui s’étaient posées pour Claude Guedj quelques années auparavant : « pour avoir fréquenté le monde de la compétition, Marc Devaux connait les exigences du sport de haut niveau. Mais que sait-il du football professionnel, univers clos avec ses rites, ses lois, ses petitesses ? ». Sur le terrain, le LOSC fait à peine mieux (nul à Lens, avec un pénalty arrêté par Nadon). Il se fait piteusement éliminer de la coupe de France à Rouen, chez Roger Hitoto et Michel Titeca. Perd à Toulon chez « un adversaire très faible dans tous les secteurs du jeu ». Et Marc Devaux déclare à la presse que les joueurs n’ont pas été surpris par le départ de Metsu, et qu’il aurait voulu que le LOSC joue toujours comme il l’a fait contre Marseille et Auxerre… Metsu prend alors la parole (on en revient à l’interview au début de l’article).
Il met d’abord en cause les propos de Marc Devaux, qui sous-entendent que les joueurs avaient lâché leur entraîneur : « Cinq d’entre eux n’étaient pas favorables à mon maintien. Une minorité, par conséquent. Les autres ne sont pas contre moi. D’ailleurs, après le match de Nantes, certains m’ont invité à partager leur table. C’est la preuve qu’il n’y avait pas d’opposition franche. Un entraîneur fait chaque semaine des choix qui, forcément, suscitent des grincements de dents ».
Ensuite, il s’interroge sur les exemples choisis par le nouveau président pour justifier son renvoi : « je ne comprends qu’on puisse présenter de telle références ; c’est oublier un peu vite que ces victoires furent obtenus avec Bruno Metsu ! ».
Puis il met en avant les progrès réalisés par l’équipe, ayant selon lui enclenché une dynamique que l’on enraye : « aujourd’hui, je ressens une profonde frustration, une grande injustice car on a cassé notre travail. Nous étions en train de trouver une assise. Les bons matches de Metz et contre Auxerre le prouvent. La question est de savoir, à présent, si le LOSC peut se permettre, à neuf journées de la fin, de tâtonner à nouveau. En arrivant à Lille, je savais que ma mission ne serait pas simple. Le club dispose de 21 professionnels d’égale valeur. C’est une situation difficile à gérer. Il m’avait fallu, certes, 6 mois pour dégager une équipe. Mais nous étions dans la bonne direction. Je revendique bien les progrès réalisés par le LOSC jusqu’au match d’Auxerre. Je revendique aussi la sélection d’Hansen en équipe du Danemark car c’est moi qui, le premier, l’a placé au milieu, dans une position axiale ».
Il rappelle enfin ses références professionnelles : « je trempe dans le milieu depuis 18 ans et j’ai guidé Beauvais en D2, pendant six saisons pleines. Avec des résultats en prime !Le nouveau président recherchait, parait-il, un entraîneur-manager. Mais tous les entraîneurs bossent comme des managers ! Je tiens en outre à préciser que j’ai toujours travaillé les mains libres à Lille. Ce qui ne semble pas être le cas de mon successeurs, puisqu’on lui a demandé d’écarter Oleksiak. Si le LOSC descend en D2, ça lui coûtera sûrement plus cher qu’un renouvellement de contrat ! ». Sur ce dernier point, Bruno Metsu fait référence à la situation particulière dont Oleksiak est victime : quand il est arrivé à Lille en 1991, il sortait d’une opération des ligaments croisés. Lui souhaitait un contrat de trois ans, mais les dirigeants étaient réticents. Les deux parties ont alors trouvé un compromis : ce sera deux ans, mais si Oleksiak atteint les 54 matches, il aura automatiquement une troisième année.
Or, il en est à 53 (sur 56 possibles) et, apparemment, le nouveau duo présidentiel ne souhaite pas prolonger le contrat du joueur. Même l’UNFP s’en est mêlé mais rien à faire : Kasperczak obéit à la présidence et on ne verra plus Oleksiak sous le maillot lillois.
« Lille » et « football » entretiennent dès lors des rapports compliqués, si ce n’est presque d’extériorité. Les saisons suivantes, plombées par le fantôme du dépôt de bilan à chaque saison (on peut estimer qu’une descente jusqu’à 1996 inclus, aurait grandement hypothéqué l’avenir du LOSC), montreront qu’il sera difficile pour tout entraîneur d’avoir de l’ambition dans ce club.
Le LOSC 1979/1980
Par la suite, Bruno Metsu part entraîner Valenciennes. Juste après l’affaire VA/OM, on ne peut pas dire que ça ait été là aussi le moment idéal de reprendre ce club. La saison est moyenne, et l’USVA reçoit de nombreuses marques d’hostilité à l’extérieur (Arnaud Duncker nous en a parlé). Là encore, Metsu est viré à la fin de l’hiver et, derrière, le club s’effondre et est relégué en troisième division.
Après quelques mois au chômage, il atterrit à Sedan au cours de la saison 1995/1996. Les Ardennais sont alors en troisième division. Le club se classe 6e, mais perd son statut professionnel. En 1996/1997, Sedan se classe 6e : heureusement car, en raison d’une refonte des championnats, seuls les 8 premiers se maintenaient. C’est alors que Sedan chamboule son effectif : à l’été 1997, débarquent des joueurs mis sur le carreau dans leur club : N’Diefi, Quint, Sachy, Elzéard, (Aliou) Cissé, Mionnet… Mais le club n’est autorisé à démarrer le championnat qu’à la dernière minute, la DNCG ayant de sérieux doutes sur les finances de ce club aux installations tellement vétustes… Mais Sedan réalise une superbe saison et accède à la D2. Du moins, en théorie. L’intersaison 1998 est marqué par le refus de la DNCG de faire jouer Sedan en D2. Le club n’y parvient que grâce à une souscription lancée auprès des supporters… Peut-être las de cette situation, Metsu s’en va : il a été sollicité par un club ambitieux, Valence, qui a terminé 7e de D2 en 1998 (Valence avait d’ailleurs tenté de débaucher Thierry Froger).
Malheureusement, en dépit de la présence de Frédéric Machado, prêté par le LOSC, la saison est catastrophique : 18e, Valence ne reste en D2 que suite à un repêchage administratif, le troisième de National n’ayant pas pu monter pour raisons financières. La saison suivante part sur les mêmes bases et Metsu démissionne en novembre 1999. Et Valence est même reléguée à l’issue de la saison.
Terrible méprise sur Valence : croyant filer au Mestalla en Espagne, Bruno Metsu atterrit au stade Georges-Pompidou dans la Drôme
À ce moment là, en regardant sa carrière d’entraîneur, on peut se poser plusieurs questions à propos de Bruno Metsu : a-t-il une incroyable scoumoune qui l’envoie dans des clubs en déshérence ? Quelle est sa contribution à la déshérence de ces clubs (autrement dit, est-il compétent?) ? Sa côte est-elle trop basse au point de n’avoir que des propositions de clubs en galère ? A-t-il le nez si peu creux qu’il fait des choix de carrière désastreux ? Quand on voit la trajectoire de Sedan après son départ, c’est à se demander s’il n’a aucune intuition… Mais, à l’inverse, on peut aussi le voir comme le précurseur du renouveau spectaculaire du club. En tout état de cause, il semble désormais difficile à Metsu de rebondir en France.
Il prend alors en charge, pour la première fois, une sélection nationale : la Guinée. Mais la poisse semble le poursuivre. Engagé pour qualifier le pays à la CAN puis à la coupe du monde 2002, il n’a que le temps, sur l’année 2000, de diriger quelques matches amicaux avant de démissionner, las des interférences politiques sur la fédération guinéenne et sur son propre travail. On craint alors de voir son nom s’allonger à la liste de ceux qui, étant tricards en France, partent en Afrique pour ne pas prouver beaucoup plus.
Via Pape Diouf, il rebondit fin 2000 à la tête de l’équipe nationale du Sénégal. Sur place, on est circonspect face à cette nomination. Mais ce qui lui est initialement reproché finit par tourner à son avantage : alors que son style décontracté et son apparence (cheveux longs, sourire permanent) le faisaient passer pour un rigolo, le personnage suscite finalement la sympathie. Cela est, bien entendu, aidé par de rapides résultats convaincants, qui sont attribués, outre son travail, à un management original, loin du style rigide de son prédécesseur, l’Allemand Peter Schnittger. Metsu déclarait ainsi à Libération en 2002 : « dans le foot, on néglige le côté humain. Maintenant, les joueurs arrivent comme des gens qui font un boulot. Mais le foot, c’est un jeu, avec un climat amical important. A part ça, en dehors du terrain, chacun fait ce qu’il veut. Les joueurs se prennent en charge eux-mêmes (…) Moi, je ne suis pas un flic, je suis un entraîneur. D’ailleurs, quand je suis avec eux, je ne me considère pas comme un entraîneur mais comme un copain. C’est pas parce qu’on gueule qu’on est respecté. Il y a une liberté totale ».
Metsu semble avoir trouvé au Sénégal un équilibre personnel et professionnel. La suite, on la connaît : Bruno Metsu qualifie le Sénégal pour la coupe du monde 2002. Lors du match d’ouverture du tournoi, alors qu’on imagine les champions du monde en titre ne faire qu’une bouchée des Sénégalais, les Lions battent les Bleus. C’est une surprise monumentale, un séisme en France, une immense fierté au Sénégal. Tous attribuent cette réussite à Bruno Metsu, comme le défenseur Ferdinand Coly, qui confiait à So Foot : « Son discours d’avant-match avait été très, très fort. Avec ces longs cheveux et ses yeux bleus, il réussissait à galvaniser n’importe quel joueur ». Et pourtant, Metsu ne fanfaronne pas. Peu en réussite en France, il aurait pu trouver là une forme de revanche, mais cette réaction ne semble pas faire partie de son caractère. Omar Daf se souvient : « J’étais assis avec Souleymane Camara, on profitait. Et là, on l’a vu arriver avec ses grands yeux bleus. Il était heureux et fier de nous. Mais il n’a rien dit. Pas que je me souvienne. Avec lui, c’était de la gratitude au quotidien. Tout se voyait dans son regard. Il nous disait merci ».
L’aventure des Sénégalais s’achève en quarts de finale : jamais une équipe africaine n’était allée si loin en coupe du monde.
Par la suite, il enchaîne diverses expériences, en Arabie Saoudite, au Qatar (il y remplace Maradona comme sélectionneur), aux Emirats, pas toujours avec une grande réussite d’ailleurs. Mais le bien est fait : il jouit d’une aura extraordinaire en Afrique. Lui n’aura pourtant pas le surnom de « sorcier blanc », qu’il voyait comme un cliché paternaliste : « c’est des conneries. Mais il y a des gens qui aiment bien le mythe… » ; alors on le surnomme Jésus-Christ au Sénégal, surnom sur lequel il ne trouve rien à redire. Très attaché au Sénégal, où il a trouvé son épouse, il se convertit à l’islam et a désormais pour nom Bruno Abdoul Karim Metsu.
Fin 2012, se sentant fatigué, il apprend brutalement qu’il souffre de trois cancers. On lui donne 3 mois à vivre. Dans un premier temps, avec les premiers traitements, la maladie se stabilise, et Metsu profite de quelques accalmies pour revenir dans le Nord.
En août 2013, il est invité par les dirigeants du VAFC à assister au match Valenciennes/Marseille. Devant les médias régionaux, se présente un homme souriant, toujours affublé de sa longue crinière, mais aussi affaibli et transformé physiquement. C’est sa dernière apparition publique.
Bruno Metsu perd le « match de sa vie », comme il avait nommé cette épreuve. Il meurt dans sa ville natale le 15 octobre 2013, à l’âge de 59 ans. Ses obsèques se déroulent à Dunkerque ; il est ensuite inhumé au Sénégal. Sa réputation est telle au Sénégal que le président de la République Macky Sall a salué un « Sénégalais de coeur », « héros parmi les héros Sénégalais », « un exemple d’humanité ». Il était même présent aux cérémonies funèbres au Sénégal.
Du côté de Beauvais, quelques jours après son décès, à l’initiative de la maire Caroline Cayeux, une minute de silence est respectée sur tous les terrains de la ville. En 2017, un « centre sportif Bruno Metsu » y est inauguré. Dans sa ville natale, un terrain synthétique à son nom a été inauguré en 2015.
Inauguration du centre sportif en 2017. Madame et les trois enfants sont facilement repérables.
En 2018, le Sénégal est de retour en coupe du monde pour la première fois depuis 2002. Son sélectionneur est l’ancien joueur du LOSC Aliou Cissé, présent en tant que joueur en 2002. Lors de sa première conférence de presse du tournoi, il se présente face aux journalistes et, avant toute question, déclare : « seize ans avant, j’étais face à vous avec Bruno Metsu, en tant que capitaine. J’ai une pensée pour lui. Seize ans après, me retrouver ici, c’est un honneur pour moi, et un plaisir. Je profite de ces moments, car j’ai conscience que c’est très rare. Je sais que là où il est, il nous regarde, et que son énergie nous portera. »
Du côté de Lille, les hommages ont été bien plus feutrées. Si, au moment de son décès, le LOSC a salué sa mémoire par deux articles sur son site web (l’un très factuel, évoquant qu’il « parvient à maintenir le club lillois dans l’élite en 1993 » – certes, mais ce maintien (sans lui…) sans faveur est apparu comme une déception – l’autre faisant appel aux souvenirs de ses anciens collègues du LOSC), il n’y a pas eu d’hommage au stade.
Il faut dire que, si l’homme a indéniablement séduit, Bruno Metsu n’a pas laissé un souvenir extraordinaire pour ses résultats sportifs. Mais qu’y pouvait-il ? S’il a probablement sa part de responsabilité, notamment sur le recrutement, difficile de lui attribuer les nombreuses secousses que traverse le club à ce moment-là. Embarqué dans un club en errance sportive, à la gouvernance chaotique, confronté au retrait des collectivités locales, aux déclarations peu amènes de Besson, aux évocations de fusion, devant composer avec des recrues en deçà des attentes, les résultats ont été médiocres. Pour le moins, il n’a pas été servi.
10 ans après, pour Lille/Brest, il ne sera pas trop tard pour se rattraper, et pour se rappeler qu’il fut de ceux qui ont contribué à maintenir à flots le navire lillois, en suivant la devise de l’USLD : contre vents et marées.