Posté le 11 février 2024 - par dbclosc
Un sacré coup de pompe. Quand le LOSC d’Arribas craquait à l’heure de jeu (1978-1982)
Nous avons déjà parlé du LOSC de José Arribas. Récemment, ça avait été pour rappeler la parenté entre le LOSC de la saison dernière avec celui de José de la saison 1978/1979. Il y a plus longtemps, on avait évoqué que, sous la direction de l’entraîneur d’origine espagnole, les Dogues commençaient bien mieux leurs saisons qu’ils le les terminaient. On va parler aujourd’hui d’une autre réalité du club lillois à l’époque : pendant les quatre années du LOSC en D1 avec Arribas (1978-1982), le LOSC se montrait solide jusqu’à l’heure de jeu puis connaissait dix minutes difficiles où il craquait souvent.
Pour son retour en D1 en 1978, le LOSC reçoit le Nancy de Michel Platini à Grimonprez-Jooris. Si les Lillois ouvrent rapidement le score par Pleimelding, ça se gâte rapidement, Rouyer (18è, 28è) puis Rubio (34è) donnant deux buts d’avance aux Nancéens. Ce sont pourtant les Lillois qui vont l’emporter (4-3), réduisant d’abord l’écart par Simon (43è), puis égalisant et repassant devant dans le dernier quart d’heure grâce à des buts de Dos Santos (78è) puis encore de Simon (89è). Des débuts en trompe l’œil, le LOSC d’Arribas montrant dans la durée bien davantage de difficultés à finir ses matchs qu’à les commencer.
« Heeey !!! Salut !!! Ca va ??? Ca faisait longtemps !!! » Pierre Pleimelding visiblement ravi de retrouver la D1 avec le LOSC
Comme on le voit sur le graphique suivant, à l’exception des 10 premières minutes, le LOSC marque davantage qu’il n’encaisse pour chaque tranche de dix minutes jusqu’à l’heure de jeu au cours de la saison 1978/1979. Les Lillois craquent alors particulièrement souvent entre la 61è et la 70ème minute de jeu, craquant défensivement puisqu’ils encaissent 16 buts, soit autant que lors de la demi-heure précédente.
En calculant le nombre de points à partir des scores à l’heure de jeu, le LOSC aurait obtenu 44 points, soit 4 de plus que ce qu’il a en définitive obtenu. Les Lillois ont en outre perdu un point après l’heure de jeu contre Metz et Monaco, deux équipes qui ont terminé peu devant le LOSC, justement avec 44 points. Avec ce point en moins, les Messins et les Monégasques auraient terminé à 43 points : c’est dire que, au regard de ses performances sur la première heure de jeu, les Dogues étaient proches de cette 4ème place qualificative pour l’Europe. Ultime preuve, s’il en fallait encore, du Grand Complot Contre le LOSC ©, les règles font durer les matchs 90 minutes alors que l’évidence voudrait qu’ils en durent 60 (déjà parce qu’on est vachement fatigués après, moi en tout cas (1)).
José Arribas, impuissant mais pas résigné face au Grand Complot Contre le LOSC ©
La saison suivante débute différemment, Lille perdant certes un point après l’heure de jeu contre Strasbourg (6ème journée), mais en gagnant également contre Nice (7ème journée) et Bordeaux (8ème journée). Les choses semblent rentrer dans l’ordre du complot les deux journées suivantes, Lille perdant d’abord le point du match nul en fin de match à Lyon (2-2 puis 4-2), puis se contentant du nul contre Marseille, Zambelli égalisant à un quart d’heure du terme (1-1). Lille semble toutefois trouver le remède contre Paris quatre journée plus tard : menés 2-1, à l’heure de jeu, les Dogues renversent leur adversaire grâce à des buts de Delemer (65è), Henry (78è) et Cabral (88è) ! Après 20 journées, Lille a gagné un point de plus après l’heure de jeu qu’il n’en a perdu. Les Dogues auraient-ils trouvé la clé contre le complot ?
Las, la suite va toutefois montrer que les Lillois sont davantage en difficulté en fin de match, le LOSC perdant 4 nouveaux points après l’heure de jeu pour n’en gagner qu’un seul sur la même période. Comme on le voit sur le graphique suivant, le LOSC présente une différence de buts positive lors de la première heure de jeu (34 pour et 30 contre), puis nettement négative lors de la dernière demi-heure (11 pour 19 contre).
Si c’était défensivement que le LOSC avait craqué après l’heure de jeu en 1978/1979, c’est surtout offensivement qu’il se retrouve en difficulté en 1979/1980. Rapporté à temps égal, il marque ainsi 35 % de buts en moins après l’heure de jeu. Il encaisse également un peu plus, mais dans des proportions plus modestes (20 % de plus). Une statistique particulièrement remarquable tient à la différence existante entre les deux saisons dans la tranche de 10 minutes suivant immédiatement l’heure de jeu : en 1978/1979, Lille y marque 8 buts pour 16 encaissés (24 au total), la saison suivante, elle n’en encaisse que 4, mais n’en marque … qu’un seul ! Le point commun à ces deux saisons est que le passage de l’heure de jeu est concomitant d’une baisse de performance très nette des Dogues, mais elles se différencient très fortement par la forme prise par cette chute de performance.
Une hypothèse est que ce que l’on observe en 1979/1980 est le produit de l’observation de ce qui s’était passé la saison précédente. Le LOSC de l’époque était ainsi réputé pour la qualité de son jeu et sa volonté d’aller toujours de l’avant, parfois au risque de laisser des espaces derrière. Tout en voulant rester fidèle à sa vision du jeu, peut-être Arribas a-t-il voulu mettre de l’eau dans Thauvin : constatant que les Lillois subissaient une nette baisse de régime à l’heure de jeu, les membres du staff auraient conseillé aux joueurs de se montrer particulièrement prudents à ce stade de la partie (qui a lieu au stade), là où les Dogues avaient continué à jouer l’offensive malgré leurs difficultés physiques, avec le résultat que l’on sait. Sans enrayer le déclin observé à l’heure de jeu, le fait de fermer le jeu à ce moment de la partie limite certes les chances de marquer, mais permet surtout de considérablement limiter la casse derrière.
1980/1981 : un « coup de pompe » qui aurait pu coûter le maintien
Cette fâcheuse tendance des Lillois d’Arribas à galérer en fin de match aurait pu coûter bien cher au club au cours de la saison 1980/1981. Cette saison là, le LOSC termine à la 17ème place tout juste devant Tours qui est barragiste. Qu’entendons-nous par « tout juste » ? Vraiment tout juste en fait, Lille obtenant le même nombre de points que les Tourangeaux (31), encaissant exactement autant de buts (71) et marquant … 1 but de plus en tout et pour tout !
Cette tendance au « coup de pompe » à l’heure de jeu n’a en effet pas été contredite lors de la troisième saison dans l’élite du LOSC d’Arribas. Comme on le voit sur le graphique suivant, les Lillois ont très vite perdu des points après l’heure de jeu, le premier dès la troisième journée. Dès la 7ème journée, ils en étaient déjà à 3 points de perdus.
Lille a ensuite réussi à stabiliser et même légèrement réduire ces points perdus dans la dernière demi-heure, le LOSC n’ayant plus perdu « que » deux points sur cette période au soir de la 23ème journée de championnat. Lille retombe ensuite dans ses travers, finissant avec 5 points de perdus dans la dernière demi-heure, ce qui lui fait vivre une fin de saison éprouvante. C’est encore au cours de la tranche entre la 61ème et la 70ème que les Lillois se retrouvent en plus grande difficulté, encaissant durant cette période exactement deux fois plus fréquemment que lors de la première heure de jeu.
Vieux motard que j’aimais : Arribas trouve la solution en 1981/1982
A-t-on observé la même tendance au cours de la saison 1981/1982, la dernière de José Arribas sur le banc du LOSC ? Le début de saison pourrait laisser penser que oui. Dès la 3ème journée, Lille s’incline en fin de match sur un but de Rubio (85è) alors qu’il tenait le match nul. Contre Bordeaux lors de la 8ème journée, les Lillois échouent à l’emporter, René « football champagne » Girard égalisant à moins d’un quart d’heure du terme, répondant au but d’Henry. Lors de la 11me journée, c’est carrément deux points que les Dogues perdent dans la dernière demi-heure, Milla égalisant d’abord (61è) avant que Ihily ne donne l’avantage aux Bastiais (76è, 3-2).
Et pourtant, cette saison-là, le nombre de points théoriquement obtenu après 60 minutes (34) est strictement identique à celui réellement obtenu au final. Contre Metz (16ème journée), Lille l’emporte grâce à un but de Engin « Tony » Verel (65è). Rebelote deux journées plus tard contre Paris, Muslin donnant la victoire (2-1) aux siens grâce à un but inscrit à un quart d’heure du terme. Lille ne l’emporte pas contre Auxerre lors de la 20ème journée, mais récupère le match nul après l’égalisation de Péan (85è) qui répond à Szarmach (57è). Le scénario est très proche contre Nancy lors de la journée suivante, Rubio (décidément!) ouvrant le score peu avant de l’heure de jeu, Verel égalisant en fin de match (88è). Lille clôt là une période inédite sous le règne d’Arribas en D1, l’équipe prouvant qu’elle est aussi capable de très bien finir ses matchs, parvenant à gagner 4 points en fin de match en 6 rencontres seulement.
Se termine alors une période de 5 ans du LOSC sous le règne de José Arribas. Le LOSC n’a pas passé le cap qu’on aurait pu espérer après deux premières années presque parfaites, marquées d’abord par un titre de champion de D2 puis par une sixième place inespérée pour le retour dans l’élite française. Surtout, si le LOSC a réussi ces belles performances, c’est sans jamais renoncer à développer un jeu chatoyant et particulièrement plaisant pour le public, quitte à perdre parfois en efficacité. C’est sans doute aussi cette philosophie toujours tournée vers le jeu qui a contribué à expliquer les difficultés rencontrées en fin de match, là où d’autres entraîneurs se seraient montrés plus « pragmatiques ». Se rappeler cette époque et cette philosophie n’est pas inutile tant les logiques de rationalisation de la pratique du football tournée vers une logique de maximisation des performances a pris une place croissante. Certes, tout fan de foot souhaite voire son équipe l’emporter quand débute une rencontre, mais l’essentiel n’est jamais là. On a ensuite pu aimer des LOSC perdants, on a aimé le LOSC vainqueur de Vahid, non pas tant parce qu’il gagnait que parce que ses victoires se sont construites sur des valeurs en lesquelles on se reconnaissait. On a enfin pu trouver bien fade un LOSC pourtant gagnant, faute de se retrouver dans l’état d’esprit impulsé par les dirigeants. C’est déjà cette leçon que nous enseignait José Arribas.
FC Notes :
(1) Remarquons que l’auteur de ces lignes étant déjà crevé après l’échauffement, son argument n’est peut-être pas si solide que ça.
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