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Posté le 30 mai 2023 - par dbclosc
Stades bruxellois
Bruxelles comporte quelques stades remarquables, empreints d’une grande nostalgie. Puisque l’un de nous y vit désormais, un pèlerinage s’imposait.
Nous autres Lillois avons connu de nombreux stades où voir évoluer nos Dogues. Et pour nous trois, l’apprentissage du football s’est fait à Grimonprez-Jooris : en effet, tout petits déjà nos pères nous emmenaaaaient à Grimonpreeeez, lalalalalalalalalalalaaaa Lille OSCCCCC. Bien, ça c’est une bonne accroche.
La grande mélancolie que le stade Grimonprez-Jooris suscite chez nous est sans doute inversement proportionnelle à l’absence de consensus qu’il a suscité « de son vivant » : trop grand, trop petit, pas assez fonctionnel, mal placé, mal desservi… D’ailleurs, te souviens-tu de Grimonprez-Jooris ? On a tout dit sur ce stade qui, au-delà de ces inconvénients, avait un avantage certain : s’y dégageait une ambiance qui, avec le recul, nous semble tout à fait typique de son temps : proximité avec des joueurs accessibles (surtout avec le terrain d’entraînement à côté), ouvert à tout le monde (combien de fois a-t-on pu se balader dans ces gradins vides, juste pour le plaisir), liberté de mouvement en son sein (pas de problème pour passer d’une tribune à l’autre « juste pour aller saluer un copain« ). Et après tout, ces tribunes à moitié vide symbolisent bien ce LOSC laborieux des années 1980 et 1990, pour qui une victoire 1-0 sur un but de raccroc à 3 minutes de la fin équivalait à une magnifique performance. Avec le temps, notre image du passé est probablement déformée, et idéalisée. Mais impossible de passer aujourd’hui sur la plaine Félix Grimonprez sans se remémorer ce qui s’y est passé, et en tentant de se rappeler le plus précisément possible où étaient situées les tribunes, le parking, le terrain d’entraînement.
Cet effort de mémoire est moins difficile à faire à Bruxelles, où subsistent quelques stades qu’on croit sortis tout droit d’un passé révolu ailleurs. Au-delà de leur intérêt architectural ou de leur curieuse apparence, ils rappellent qu’un stade, même vide, contient une atmosphère particulière et, pour peu qu’on fasse preuve d’un peu d’imagination, est peuplé de fantômes. Les stades présentés ci-après portent les traces de leur temps, du temps qui passe, et renvoient quelque chose d’une ferveur passée. En y déambulant, à côté de ces vieilles buvettes en bois et dans ces vieux gradins de béton, on se prend même à être nostalgique d’une époque qu’on n’a pas connue. Voici une petite sélection en guise de voyage, dans des endroits où les veilles photos en noir et blanc semblent prolonger leur vie en couleurs.
Toutes les photos ont été prises récemment par nos soins. N’hésitez pas à cliquer dessus pour les voir dans un plus grand format.
Vivier d’Oie (Uccle)
« Au début du siècle dernier, des messieurs en chapeau boule y prenaient place pour suivre les internationaux » lit-on dans l’ouvrage édité par l’Union Belge pour fêter ses 125 ans en 2020. Le stade du Vivier d’Oie est probablement celui qui fait se représenter le mieux les origines aristocratiques du football, tant l’endroit transpire encore une atmosphère d’entre-soi élitiste. Preuve irréfutable : la plupart des gamins qu’on y croise jouent désormais au hockey et ont des mèches qu’ils renvoient ostensiblement vers l’arrière de leur crâne, tout en exprimant un langage qui les classe socialement : tout termine par « -han ». Exemple : « ton père t’a offert quoi pour ton anniv-han ? » (authentique).
On est ici à Uccle, une des communes les plus riches de Bruxelles, dont certaines rues feraient passer les quartiers les plus huppés de Croix ou de Mouvaux pour des ZUP. L’ancienne entrée, « rue du Racing », qui donne sur un boulevard très fréquenté, n’est plus utilisée. S’y trouve encore une arche qui rappelle que, de 1902 à 1948, le Royal Racing Club de Bruxelles, 6 fois champion de Belgique entre 1897 et 1908, y a été le club résident, avant que l’équipe ne déménage au stade des Trois Tilleuls (voir plus bas).
Pour y accéder, il faut passer à l’opposé, le long du Bois de la Cambre. Là, une sorte de chalet avec une grande terrasse domine des courts de tennis, bien séparés des regards les uns des autres par de la végétation. En contrebas, se situe un terrain aujourd’hui synthétique, principalement occupé par de jeunes hockeyeurs. On ne joue plus de football ici. Mais se trouve un formidable vestige : celle qui est réputée « la plus ancienne tribune de football du pays », et probablement la plus ancienne du genre en Europe : faite de béton armé, de verre et de boiserie, elle a été construite en 1902 et a une capacité de 1 000 places.
Le 1er mai 1904, devant 1500 spectateurs, a eu lieu ici le premier match international officiel en Europe, entre la Belgique et la France (3-3). Les joueurs ont pu ainsi profiter des premières douches d’eau chaude de Belgique ! C’est surtout l’occasion pour certains dirigeants qui, jusqu’alors, n’avaient eu que des échanges épistolaires, de se rencontrer enfin physiquement. Notamment, Louis Muhlinghaus, secrétaire du Racing Club de Bruxelles, suggère au français Robert Guérin de créer une ligue de football internationale. Trois semaines plus tard, la FIFA est créée.
Le 9 mars 1919, le premier match international officiel de football d’après-guerre se joue de nouveau au Vivier d’Oie. Il s’agit une fois de plus d’un Belgique-France (2-2).
La tribune semble aujourd’hui dans un état d’humidité et de fragilité avancé. Elle est pourtant classée depuis 2010.
Stade Joseph-Marien (Forest)
Les supporters de l’Union Saint-Gilloise ont beau hurler « ici, ici, c’est Saint-Gilles ! » lorsque l’Union marque, en fait, ici, on est administrativement dans la commune bruxelloise de Forest, juste à côté de Saint-Gilles et d’Uccle. L’USG, créée en 1897, n’a joué à Saint-Gilles que jusqu’en 1898, à proximité de l’actuelle maison communale, avant de devenir un club nomade dont les stades ont régulièrement changé au sein de Uccle (1898-1919). Le club se sédentarise au sortir de la guerre, quand est inauguré le « Stade du parc Duden », du nom de l’emplacement dans lequel il se trouve, et duquel est offerte une belle vue sur l’ouest bruxellois.
Pour inaugurer le stade, un grand match de gala contre le Milan Club (l’actuel AC Milan) est organisé par la Direction unioniste. Milan s’était ensuite rendu à Lille pour y affronter l’Olympique Lillois. Si le stade est idéalement situé, avec une seule tribune couverte et trois autres adossées aux grands arbres du Parc, il est surtout connu pour sa façade Art-Déco, construite après une rénovation dans les années 1920. Sur la partie qui donne sur la chaussée de Bruxelles (c’est le nom de la chaussée), une façade d’une centaine de mètres présente sept panneaux sculptées qui représentent les deux disciplines par lesquelles l’USG a brillé : l’athlétisme et le football.
Si l’Union est redevenue à la mode depuis quelques années, son stade semble sorti tout droit d’une époque qui a échappé à une modernité footballistique qui, bien souvent, emporte avec elle les charmes d’une enceinte pas complètement saisie par des logiques mercantiles. Outre la sono, qui préfère passer des hits rigolos plutôt que des messages publicitaires, le club house du rez-de-chaussée est ouvert à tous, qu’il y ait match ou pas. La tribune couverte offre quelques vestiges qui semblent avoir figé la décoration à l’époque de l’entre-deux-guerres, quand l’Union était le centre footballistique du pays, et même au-delà.
Domine une grande bâtisse qui est aujourd’hui une résidence d’artistes et qui, autrefois, était le vestiaire du stade. Les joueurs fendaient la foule avant de rejoindre la pelouse. S’y sont déroulées de grandes rencontres, comme un Belgique/France (3-1) en 1921, devant 30 000 personnes. L’Olympique Lillois est également venu ici dans les années 1920, mais aussi le LOSC, en 1946, pour y affronter l’équipe B de Belgique, juste avant de réaliser son premier doublé coupe/championnat.
Belgique/France. Le Miroir des Sports, 10 mars 1921
Quant à l’ambiance à Joseph-Marien (nom du stade depuis 1933), elle est incomparable : le public saint-gillois est chaud et n’est pas tellement porté sur les insultes lancées aux arbitres et aux adversaires. Si on s’y risque, il est d’ailleurs plus probable d’être invité à ne plus revenir.
Depuis sa remontée en première division en 2021, l’Union n’en finit pas d’étonner. Championne de la phase régulière en 2022 avec 5 points d’avance sur le second, elle a malheureusement craqué lors des play-offs lors de la double confrontation contre Bruges. Pour info ou rappel : après 34 journées, les points obtenus durant la phase régulière sont divisés par deux et les 4 premiers s’affrontent en confrontations aller et retour. Cette réforme devait, il y a quelques années, apporter davantage de piment à un championnat las de voir Anderlecht, le Standard ou le FC Bruges truster les titres sans panache. Dommage que son application se soit faite au détriment d’un « petit » club historique comme l’Union en 2022, qui court après son premier titre depuis… 1935.
En 2023, elle est de nouveau qualifiée pour les play-offs 1 et reste bien placée pour décrocher le titre, après avoir été éliminée en demi de la coupe de Belgique, et en quarts de l’Europa League. Spécialiste des remontada et des buts tardifs, l’USG a un style très « vahidesque » : la politique du club – qui appartient à Brighton – est à l’opposé du star-system, à tel point que le président intervient régulièrement dans la presse pour rappeler que si ses joueurs réclament légitimement de meilleurs contrats, ce n’est pas à l’Union qu’ils les auront. Dès lors, l’USG va chercher des inconnus dans des divisions inférieures, et ça marche ! Sans avoir de grandes vedettes, l’équipe, depuis son retour dans l’élite, est probablement celle qui propose le jeu collectif le plus abouti.
La progression du club a ses inconvénients : le stade, d’une capacité de 9 500 places, est bien trop petit. Cette année, pour la coupe d’Europe, l’Union a été contrainte de s’exiler à Louvain, et même à Anderlecht, pour les matches à élimination directe. Le club est actuellement à la recherche d’une solution pour déménager un peu plus au Sud de Forest, où un nouveau stade, d’une capacité d’environ 15 000 places, serait construit. La façade, classée, dans un parc lui-même classé, empêche tout agrandissement de la structure actuelle.
L’Union a récemment fêté ses 125 ans avec de belles zwanzes. Un ouvrage très documenté est sorti à cette occasion. Que nos lecteurs néerlandophones se rassurent : il est bilingue.
Stade Adrien Bertelson (Forest)
Situé à quelques centaines de mètres au sud du parc Duden, où joue l’Union Saint-Gilloise, et à proximité de la salle de concert Forest national, ce stade doit son nom à un ancien élu communal, résistant, dont l’intérêt pour le sport a permis sa construction dans les années 1950.
Les tribunes du stade sont aujourd’hui entièrement recouvertes de mousse et de mauvaises herbes. Il faut dire qu’il n’y pas de club résident : même si son nom apparaît encore du côté de la buvette, la Forestoise, qui avait fusionné avec le FC Léopold, a disparu en 1996. Le stade est désormais ouvert au sportifs du dimanche.
Avec ses tribunes en béton presque entièrement debout et une seule petite tribune couverte, il est un autre exemple de ces stades qui pouvaient contenir une foule dense : sa capacité est estimée à 20 000 personnes ! Lors du mandat de Constant Vanden Stock à la tête de l’équipe nationale (1958-1968), le sélectionneur voulait faire de ce stade alors flambant neuf la résidence des Diables Rouges. Finalement, il n’en a été que le terrain d’entraînement durant des années, les Diables migrant vers le Heysel, au nord de Bruxelles.
Si ce stade a une histoire moins riche que les autres présentés ici, sa taille surprend eu égard aux usages qui en ont toujours été faits. Au pied de tours grises que masque en partie la végétation, il donne l’impression d’avoir été soudainement abandonné et oublié, et offre, comme souvent à Bruxelles, le sentiment d’une charmante anomalie dans le paysage urbain.
Jusqu’à récemment, un stade Bertelson agrandi était l’une des solutions possibles pour le « nouveau stade » de l’Union Saint-Gilloise. A priori, cette option est désormais écartée.
Stade des Trois Tilleuls (Watermael-Boitsfort)
Au sud-est de Bruxelles, à l’Est du Bois de la Cambre et au Nord de la forêt de Soignes, se trouve la très verte – et très prospère – commune de Watermael-Boisfort. S’y trouve le « parc sportif des Trois Tilleuls », un vaste complexe où se trouvent notamment une piscine, 11 courts de tennis, un terrain de padel, de nombreux locaux pour exercer divers sports, et un stade entouré d’une piste d’athlétisme.
Le stade a été construit entre 1946 et 1948 par des prisonniers de guerre allemands. Il a accueilli le Racing Club de Bruxelles (RCB), après qu’il a déménagé du Vivier d’Oie (voir plus haut). En théorie, cet ensemble constitué d’une tribune couverte et d’un espace circulaire en béton peut contenir 40 000 personnes. Bien entendu, les normes actuelles de sécurité ne le permettent pas, mais cela donne une idée de la grandeur du site, d’où on devine cette impression de compression des foules qu’on voit sur les images en noir et blanc.
Cela étant, le déficit de transports en commun, de stationnement, et les piètres prestations du RCB n’ont pas permis d’en faire une enceinte très fréquentée. Le club local l’a d’ailleurs quitté en 1954, car il n’était plus capable de payer à la commune les mensualités contractées lors de l’achat du terrain. Une convention prévoyait alors que le stade redeviendrait propriété communale. Le RCB est alors parti jouer dans un Heysel vide.
En fait, le stade n’a fait le plein qu’une fois : lors de son inauguration, le 11 novembre 1948, pour un match entre une sélection des meilleurs joueurs bruxellois et le Torino, qui restait alors sur 4 titres successifs de champion d’Italie. Ce stade porte tellement la poisse que quelques mois plus tard, l’équipe italienne disparaissait dans un accident d’avion. Le vestiaire « visiteurs » du stade rend d’ailleurs hommage aux 31 victimes du crash, dont 18 footballeurs (parmi lesquels Roger Grava, champion de France avec Roubaix-Tourcoing en 1947), toutefois sacrés champions d’Italie en 1949 à titre posthume, leur avance n’ayant pas été comblée par leurs poursuivants.
Le stade, ouvert à tout le monde, est un monument classé depuis 2011. Il accueille aujourd’hui la section football du club local du Royal Racing Club de Boisfort (hommes et femmes).
Stade Edmond Machtens (Molenbeek)
Ce stade a accueilli de nombreuses équipes : Daring Club de Bruxelles, Daring Club de Molenbeek, Racing Daring Club de Bruxelles, FC Molenbeek Brussels Strombeek (dit « FC Brussels »), RWDM Brussels FC, et de nouveau Racing Daring Club de Bruxelles (avec un autre numéro de matricule que le précédent RWDM)… En réalité, Daring d’origine mis à part, ces équipes n’en forment qu’une seule : les fusions et liquidations successives masquent une certaine continuité dans l’histoire du football à Molenbeek.
De la même manière, ce stade, qui porte aujourd’hui le nom d’un ancien bourgmestre de Molenbeek, s’est appelé Charles Malis lors de son inauguration en 1920 (du nom d’un ancien président du Daring), puis Oscar Bossaert (ancien footballeur du Daring, international belge avant-guerre, puis chocolatier et bourgmestre de la commune voisine de Koekelberg) de 1939 à 1973.
A son inauguration en 1920, il était doté de toute la technologie dernier cri, avec notamment un solarium, et l’équipe nationale y a parfois joué dans l’entre-deux-guerres devant près de 30 000 personnes. Lors de l’inauguration d’une nouvelle tribune chauffée en 1973, 33 000 spectateurs accueillent le Real Madrid !
Mais il ne reste plus grand-chose de ce prestige d’antan. Situé au pied de barres d’immeubles, le stade qui a aujourd’hui 12 000 places ne comporte désormais que deux tribunes, les deux situées derrière les buts ayant été détruites pour cause de vétusté. En 2005, l’une de ces tribunes pris le nom de Raymond Goethals, qui a joué ici dans les années 1940.
A l’issue de la saison 2022/2023, Molenbeek est de retour dans l’élite du football belge. Trop heureux, son propriétaire, John Textor, entend bien rivaliser avec ses collègues bruxellois d’Anderlecht et de l’Union Saint-Gilloise, dont les stades ne sont qu’à quelques centaines de mètres : il a ainsi déclaré vouloir « botter des culs ». La direction du club s’est ensuite excusée. Beaux derbies bruxellois en perspective !
Stade Roi Baudouin et Petit Heysel (Laeken)
Le plateau du Heysel désigne à Bruxelles un quartier presque dénué d’habitations et voué au tourisme, aux expositions et aux affaires. C’est là que se sont déroulées de nombreuses festivités de l’histoire de la Belgique (fête du Centenaire en 1930, expositions universelles de 1935 et de 1958). En 1927 est décidée la construction d’un stade de 70 000 places, officieusement appelé Stade du Centenaire ou Stade du Jubilé. Ce n’est qu’après-guerre qu’il est baptisé Stade du Heysel. Résidence principale de l’équipe nationale, le stade est surtout tristement célèbre pour avoir été le théâtre d’affrontements en mai 1985 ayant conduit à la mort de 39 spectateurs. Après ce drame, et en vue d’accueillir l’Euro 2000, le stade est rénové et est rebaptisé du nom du roi décédé en 1993. Il accueille une nouvelle finale de coupe d’Europe en 1996, remportée par le PSG, et est le théâtre de la piteuse élimination des Belges au premier tour en 2000.
Le « stade du centenaire » lors de son inauguration (photo piquée sur le site de la RTBF), avec une seule zone couverte.
Entouré d’une piste d’athlétisme (le mémorial Van Damme s’y déroule annuellement), il est considéré comme froid et peu accueillant. Sa fermeture, voire sa destruction, sont régulièrement évoquées, avant que ne surgissent divers projets de rénovation.
Juste à côté se trouve le Petit Heysel. D’une capacité officielle de 8 000 places, son côté vieillot avec, là encore, ces gradins de béton envahis par les mauvaises herbes, lui donne du charme. Il a accueilli l’équipe du Racing Jet (Jette) de Bruxelles jusque dans les années 1980, club de la commune de Jette. Le club a même connu la D1 sous la direction de Goethals (et avec Böloni dans l’effectif) au milieu des années 1980.
Le Petit Heysel et, dans le fond, le stade Roi Baudouin et l’Atomium
Toujours dans l’ombre de Molenbeek et d’Anderlecht, le Racing est parti à Wavre et se nomme désormais Wavre Sports Football Club.
Jusqu’à récemment, on pouvait voir au petit Heysel l’équipe nationale de rugby à XV. Aujourd’hui, on y voit de jeunes footballeurs, notamment ceux d’Anderlecht.
Lotto Park (Anderlecht)
Résidence des Mauves d’Anderlecht (mecs et, rarement, filles), le Lotto Park est ainsi baptisé depuis une opération de naming commercial initiée par Marck Coucke, propriétaire du club. Lors de son inauguration en 1917, l’enceinte portait le nom d’Emile Versé, un des premiers mécènes du club. De 1983 à 2019, il a porté le nom de Constant Vanden Stock, ancien joueur, entraîneur, et dirigeant du club (et brasseur. Sans doute inspiré par Henri Jooris). Sous sa direction, Anderlecht a été champion d’Europe à trois reprises.
Le stade n’est pas très grand puisqu’il peut accueillir environ 22 000 personnes. Des projets d’extension sont à l’étude, avec deux contraintes principales : le stade donne pour moitié sur un parc (Astrid), et pour l’autre moitié sur des habitations.
Le LOSC y a joué en 2006 et y a ramené un point grâce à un but de Fauvergue (1-1). Par tradition, les joueurs sont accueillis à leur entrée sur la pelouse par le titre « Anderlecht champion » du Grand Jojo, à qui on doit aussi le remarquable « Allez Lille » (même air, comme la plupart de ses succès relatifs au football, hormis l’inoubliable Victor le footballiste).
Avertissement : avec, en plus, un tifo Quick et Flupke lors du derby bruxellois de janvier 2023 (« Les nouveaux exploits des gamins de Bruxelles »), la séquence ci-dessous comporte un degré très élevé sur l’échelle de la belgitude. Ne pas reproduire chez soi.
Stade communal de Jette
Au stade communal de Jette joue le Royal Scup Dieleghem Jette, produit de la fusion, en 2002, du Royal Sporting Club Union et Progrès Jette et de l’Etoile Dieleghem Jette, qui eux-mêmes ont été antérieurement connus sous les noms de Excelsior Athletic Club Football de Jette, Sporting Club Jettois, Cercle Union et Progrès Jette, Cercle Royal Union et Progrès Jette, Royale Sporting Club Union et Progrès Jette, Sporting Dieleghem Jette (qui a fusionné avec La Caravelle Bruxelles, devenue AS Etoile Caravelle Bruxelles en 1979). Ça en jette. Mais ici, en dépit d’une histoire tumultueuse, la commune soutient le foot ; comme on le dit ici : « si le club a une dette, Jette l’éponge ».
Ici aussi, on trouve un beau petit stade : le terrain est entouré d’une partie boisée et d’une partie où le public peut s’installer soit dans une vieille tribune couverte qui a l’air d’avoir été posée à la va-vite sur un talus, soit sur de vieux gradins bétonnés (avec options mousse et mauvaises herbes).
Le RSDJ joue en deuxième division amateure. Une grosse affaire a récemment occupé les esprits puisqu’un journaliste de la Dernière Heure a rapporté être tombé « nez à nez » (sic) avec un serpent au cours du match Jette/La Louvière : « cela semble assez habituel dans les environs, comme l’ont confié des membres du club jettois à notre journaliste ».
Le dessinateur Roba, résident de Jette de 1951 jusqu’à son décès en 2006, était un fervent supporter du club. Il a même dessiné un logo officieux que le club utilise de temps à autres. Quant aux footballeurs jettois, on les surnomme les Boule & Bill boys.
Epilogue : humour local, vu dans une boutique des Marolles.
Posté le 21 mai 2023 - par dbclosc
Tableau noir : l’Olympique Lillois 1932/1933
Sollicités par le site Foot Universal, Damien Boone et Maxime Pousset, auteurs du livre Lille, Capitale du football français, ont écrit pour sa rubrique « Tableau noir », qui consiste à apporter quelques éléments tactiques sur le jeu des grandes équipes de l’histoire du football.
Tâche difficile quand on ne dispose que de sources écrites, mais pas insurmontable. L’article est à retrouver en suivant ce lien :
La saison 1932/1933 de l’OL et l’histoire du grand club lillois sont à retrouver dans l’ouvrage, notamment disponible sur le site de l’éditeur, Les Lumières de Lille.
Posté le 31 mars 2023 - par dbclosc
1998 : à la poursuite de Lorient-express
Lille/Lorient, un sommet ? Oui, en janvier 1998 : le match oppose alors le troisième au leader de la D2. La victoire des Dogues laisse présager que la montée sera au rendez-vous en fin de saison. Mais les Lillois feront par la suite preuve d’une incroyable irrégularité.
Samedi 24 janvier 1998 : les caméras d’Eurosport se sont posées à Grimonprez-Jooris pour retransmettre le match au sommet de cette 28e journée de D2, Lille/Lorient. Les Lorientais, que pas grand monde n’attendait à pareille fête, se sont rapidement placés en tête du championnat au cours de l’été : c’était début septembre, lors de la 8e journée, après une victoire contre… Lille (2-0). Quatre mois après cette confrontation de l’aller, les Bretons sont de solides leaders : avec 57 points en 27 journées, ils possèdent 13 points d’avance sur le quatrième Sochaux. Et même s’il reste encore du chemin (15 journées, dans une D2 à 22 clubs), il faudrait une catastrophe pour que les Merlus n’accèdent pas à la D1 pour la première fois de leur histoire.
Des hauts et des bas pour le LOSC
En septembre, la défaite au Moustoir était alors la première pour le LOSC, fraîchement relégué après près de 20 ans en première division. Depuis, le LOSC fait un parcours correct : depuis le mois d’octobre, il oscille entre la 6e et la 3e place et, depuis décembre, il s’est stabilisé à cette troisième place, qui le ferait monter en fin de saison s’il s’y maintenait. Les Dogues ont cependant du mal à convaincre : si l’équipe est presque irrésistible à domicile (10 victoires, 2 nuls, 1 défaite), elle est très friable à l’extérieur (1 seule victoire – à Laval -, 10 nuls, 3 défaites). De plus, le jeu proposé est loin d’être emballant, son entraîneur semble hésitant, et Lille a rapidement été éliminé de la coupe de France, au 8e tour, par… Boulogne-sur-mer. Le LOSC semble tenir avant tout par la qualité de ses individualités, mais est très décevant collectivement, en plus de faire preuve d’une certaine fragilité mentale pour aborder certains matches. Ce début d’année 1998 va confirmer toute l’irrégularité de Lillois capables du meilleur comme du pire.
Le LOSC débute l’année 1998 par une nouvelle désillusion : élimination de la coupe de la Ligue au Mans (0-1). Sans son gardien Aubry, blessé, et en dépit des débuts de la présence de sa recrue hivernale, le Belge Stephan Van Der Heyden, Lille, au-delà de son élimination, a encore été décevant, incapable de créer le danger à l’extérieur et cédant rapidement dès que l’adversaire attaque. Il ne reste donc que le championnat pour le LOSC ; mais s’il remonte en D1, personne ne lui en tiendra rigueur…
Le 10 janvier, le LOSC a l’occasion de repartir de l’avant en championnat contre le Red Star, et ne se manque pas : victoire 4-1 (Collot, Lobé, Van Der Heyden, Renou). Même si le LOSC a quelques ennuis avec des blessures (Anselin, Boutoille, Landrin, et Aubry, pour qui le problème semble plus grave que prévu après un coup au genou avec Lobé à l’entraînement), il est finalement au rendez-vous pour l’essentiel : terminer à l’une des trois premières places du championnat. Thierry Froger, après cette belle victoire, est optimiste :
« À nous de savoir enchaîner les victoires, et les autres équipes vont lâcher prise une à une. Une chose est certaine, on ne nous pardonnera rien, surtout pas de perdre. On l’a bien senti avant cette rencontre. Mais quand je suis arrivé, on avait pour objectif la montée en deux ans. On a vu que c’était possible dès cette saison. Je crois que plus ça va avancer, mieux les joueurs vont s’exprimer. La pression ? Ils connaissent et, en principe, ça doit les transcender ! ».
Arrive une trêve de 10 jours que les Lillois mettent à profit en disposant de Dunkerque, en amical (2-0, Duncker et Coquelet).
Gueugnon, la déroute
Mais alors que l’on croyait le LOSC définitivement lancé vers la D1, il rechute brutalement à Gueugnon : 0-4 ! Dommage car Sochaux avait fait nul dans l’après-midi, et c’était une bonne occasion de creuser l’écart avec le quatrième. Si ce n’est que la quatrième défaite de la saison (tout comme Lorient), celle-ci est particulièrement lourde et est indiscutable, tant les Lillois ont été dominés, en plus de commettre des erreurs individuelles. « Inquiétant, vraiment, avant la venue de Lorient » constate la Voix du Nord, qui se demande : « état d’esprit, es-tu là ? ». Et même Bernard Lecomte, las, lâche un « j’en ai marre… »
« Président, quand y en a marre, y a Malabar »
Selon Carl Tourenne, « les gueugnonnais ne sont pas meilleurs que nous. Cependant, ils avaient plus envie. Nous devrons donc nous battre et avoir la haine. Non pas vis-à-vis de nos adversaires qui ont beaucoup de talents mais tout simplement la haine pour réussir, pour montrer que nous sommes forts ». C’est « une tarte » selon Froger : dans la vie, il faut savoir prendre des claques. Il faut réagir vite, voilà tout, parce que nous sommes toujours dans la course ». Pour ce qui est de prendre des claques, ce ne sera malheureusement pas la dernière fois pour l’entraîneur du LOSC, et ce n’est pas qu’une image. Les Dogues sont donc désespérément irréguliers, c’est toujours au moment où on les croit guéris qu’ils retombent dans leurs travers, et la Voix du Nord le souligne fort justement : « c’est un peu comme si les Lillois n’avaient toujours rien compris au film de la D2. Comme s’ils n’avaient pas saisi que la seule maîtrise technique ne pouvait rien devant un adversaire motivé ». Le quotidien déplore l’absence de « joueurs de devoir », capables de ne pas se faire berner comme des débutants « sur des fondamentaux comme le marquage ou le replacement défensif ». Résultat, « les joueurs lillois ont tendu les deux joues et se sont proprement fait gifler ». Mais malgré toutes ces avaries et ces signaux inquiétants, le LOSC est à la troisième place : « le plus drôle dans l’histoire, c’est que le LOSC est encore en course pour la montée ».
« On est moches sur le terrain, mais on est élégants au-dehors »
Cela étant, Lille n’est pas du tout un catastrophique troisième en termes comptables : avec 45 points en 27 journées, il est parfaitement dans les clous de ce qui s’observe lors des saisons précédentes, à rebours de l’idée selon laquelle les (futurs) promus auraient un parcours linéaire et brillant. Bien souvent, hormis pour un leader qui se détache rapidement, la D2 est très disputée entre les 2e et 8e places jusqu’à un stade tardif dans la saison. Samuel Lobé, le meilleur buteur du club, tente de replacer le LOSC à sa juste valeur : « tout est parti d’un fantasme. En début de saison, beaucoup de gens ont cru que le LOSC possédait trois wagons d’écart et allait se promener pour rejoindre la D1. Tant et si bien qu’un match nul à l’extérieur était considéré comme un mauvais résultat. C’était méconnaître notre valeur réelle. En réalité, nous allons gagner notre place difficilement mais nous allons monter ».
Se rassurer
C’est donc avec ces incertitudes que le LOSC s’apprête à accueillir le leader, meilleure attaque du championnat qui reste sur une impressionnante série de 31 points sur les 11 derniers matches, c’est-à-dire 10 victoires et un nul. Lorient n’a pas perdu depuis le 18 octobre.
Pour Bruno Clément, qui garde les cages lilloises depuis le début de l’année civile, ce choc tombe à pic « afin de remettre les pendules à l’heure. Cette situation aurait été beaucoup plus difficile à gérer s’il y avait eu 15 jours à attendre avant le match suivant »
Thierry Froger, qui commence à être franchement contesté, semble remonté : « ça chauffe de partout et certains attendent de voir si nous sommes KO ! Ce soir, ils sauront… ». Selon lui, « il sera insuffisant d’être à 100% ». Comment faire alors ? Carl Tourenne a la solution : « il nous faut 150% de détermination ».
Du côté de l’effectif, le LOSC est toujours privé d’Anselin, de Boutoille, de Landrin et d’Aubry. Ce dernier ne s’estime qu’à « 60% de [s]es possibilités. Mais comme Bruno Clément est en pleine forme, il n’y a pas de raison que je joue. Je pourrais à la rigueur le remplacer en cas de blessure ». Fidèle à son turnover, Froger retire Carrez et Garcia du groupe par rapport à Gueugnon, et intègre Banjac et Van Der Heyden.
Voici la composition lilloise :
Clément ;
Duncker, Dindeleux, Cygan ;
Collot, Tourenne, Hitoto, Senoussi, Van Der Heyden ;
Peyrelade, Lobé.
Remplaçants : Renou, Banjac, Machado.
Les Lorientais sont au complet et respectent la règle selon laquelle ils doivent aligner au moins deux joueurs dont le patronyme commence par « Le… » :
Schuth ;
Dicanot, Dugbatey, Kerhuiel, Montero ;
Ripoll, Le Bert, Le Grix, Pédron ;
Bouafia, Malm.
Remplaçants : Uncuncu, Oyawolé, Cloarec.
Le match est arbitré par M. Piccirillo, assisté à la touche par une femme, Mme Corinne Lagrange, qui est la troisième à évoluer en France au niveau professionnel, après Nelly Viennot et Chantal Labbé-Péron. Bien entendu, la Voix des Sports ne manque pas de souligner qu’elle est « charmante ».
Les joueurs lillois sont fraîchement accueillis par les DVE qui déploient une banderole sur laquelle on lit : « Boulogne, Le Mans, Gueugnon : respectez nos couleurs ». 8 825 spectateurs garnissent les travées de Grimonprez-Jooris : ça semble peu, mais c’est l’une des meilleurs affluences de la saison. Et le LOSC est en tête des affluences de D2 avec… 7 836 spectateurs en moyenne, devant Caen (7 377), Lorient (6 949) et Saint-Etienne (6 609). Dans quatre jours, le Stade de France sera inauguré à l’occasion d’un France/Espagne, annonciateur d’une coupe du monde à l’issue de laquelle les affluences du championnat français vont décoller.
Lille est mordant
Les Lillois semblent décidés à en découdre : d’entrée, ils exercent un haut pressing et jouent de manière agressive. Sur la première action à peu près construite, ils ouvrent même le score : Dindeleux trouve Lobé qui, pour une fois, est excentré, sur la gauche. Et pour une fois, il tente un dribble qui lui permet d’armer une frappe, assez moyenne, à 20 mètres, qui rebondit devant le gardien. Celui-ci ne peut que repousser légèrement sur sa gauche et Senoussi, monté aux avants-postes, conclut du plat du pied droit (1-0, 8e).
Après une vingtaine de minutes franchement dominées par un LOSC conquérant, le match s’équilibre, sans générer de situations devant l’un ou l’autre but. Au milieu de terrain, la bataille fait rage. Le match est « nerveux et très engagé » et l’arbitre sort 4 jaunes dans la première demi-heure (pour Lille : Cygan 12e, Duncker 28e). Dans son but, Bruno Clément n’est vaguement inquiété qu’à la 36e minute, après une tentative de Kerhuiel. À la pause, Lille est logiquement devant.
En début de seconde période, une belle tête de Cygan est détournée par Schuth (52e). Le match sombre ensuite « dans l’à-peu-près », Lorient ne faisant que quelques tentatives lointaines, et Lille perdant progressivement ses capacités, les joueurs « manquant cruellement de technique et de sérénité, perdant d’innombrables ballons ». Un centre de Collot fait passer des frayeurs à la défense lorientaise (66e), de même qu’une échappée de Van Der Heyden (68e). Puis Lobé, seul face au gardien adverse, manque de lucidité (73e).
Après un deuxième carton jaune, Collot est expulsé (75e). Dans « une ambiance de corrida », le LOSC défend et tente de percer en contre (Machado, 85e). En fin de match, Lorient fait le siège du but lillois. Alors que le public manifeste du mécontentement, Anne-Sophie Roquette profite d’un arrêt de jeu pour prendre la parole et annoncer que… l’horloge du stade a 5 minutes d’avance ! Un peu calmés, les supporters du LOSC assistent alors à la dernière occasion du match : sur un corner, une tête piquée de Malm est sauvée d’une manchette par Clément (87e). Lille remporte le match.
Le but de Bob Senoussi :
Froger et Mottet tombent dans les bras l’un de l’autre. Tout à sa joie, Froger adresse ensuite un doigt d’honneur au banc lorientais. Quelle mouche a donc piqué l’entraîneur du LOSC ? Selon la Voix des Sports, le geste s’adresse à Christian Gourcuff. Froger n’admet pas que son homologue ait pu chambrer Patrick Collot avant et après son expulsion. Quand Collot a reçu son premier avertissement (70e), Gourcuff aurait lancé : « vas-y Collot, continue comme ça, ça nous intéresse ! ». Puis 5 minutes plus tard, au moment de l’expulsion : « c’est bien, Collot. Je t’avais dit de jouer comme ça… ». L’hebdo commente : « attitude franchement désagréable et anti-sportive qui ternit l’image de cet entraîneur de qualité. À l’aube d’une nouvelle aventure à l’étage supérieur, Gourcuff devra apprendre la discrétion ».
En route vers la D1 ?
« Ils ont remis les pendules à l’heure » salue la Voix du Nord, qui note que le LOSC avait enfin de la « détermination » et de la « volonté ». Cette onzième victoire à la maison permet de nouveau d’effacer un mauvais résultat à l’extérieur, et laisse entrevoir des lendemains qui chantent : « Lille, tombeur de Lorient, se rapproche de la D1 » ; c’est même « la vie en rose ».
Lorient, leader incontesté, est tombé, et Gourcuff ne voit là rien d’illogique dans la défaite de son équipe : « nous avons été bousculés, au propre comme au figuré, par une équipe lilloise très agressive. Nous avons débuté le match avec 20 minutes de retard et un but de handicap ». Pour Thierry Froger, « nous avons joué une première période intéressante avec pas mal de mouvements dans le jeu. Ensuite, j’ai eu un peu peur lorsque nous avons manqué, à plusieurs reprises, le but du KO, puis quand nous nous sommes retrouvés à 10. J’avais demandé aux joueurs d’évoluer à plus de 100% de leurs possibilités. Ils m’ont écouté et on tous fini dans la zone rouge ». Bernard Lecomte, dépité en milieu de semaine, a retrouvé le sourire : « l’engagement collectif et personnel m’a fait énormément plaisir. Ce fut un bon LOSC, tel que je l’aime. Cela sentait les matches de coupe que nous n’avons pu réaliser ».
Pour Pascal Cygan, « il fallait absolument prouver d’entrée qu’on était dans le coup. On se devait de rassurer nos supporters ». Le LOSC, en jouant de la sorte, devrait pouvoir aller au bout : c’est seulement regrettable qu’il ait fallu attendre 28 journées pour prendre conscience des exigences de la D2, comme l’indique Peyrelade : « il y avait du rythme, de l’envie. C’est simplement dommage que ça n’ait pas été le cas à Gueugnon. Si chaque joueur prend conscience qu’il faut mettre la même détermination à chaque fois, alors il n’y aura pas de problème, on accompagnera Lorient en D1 ».
Tout le monde a désormais le regard tourné vers Mulhouse, où le LOSC se rend le 4 février. Comme le dit Carl Tourenne, « battre Lorient pour perdre ensuite à Mulhouse ne servirait à rien… ». Et Lille s’en va gagner à Mulhouse (3-1), pour la deuxième fois de la saison à l’extérieur !
Le LOSC semble avoir retenu les leçons et enchaîne enfin. Il a désormais 6 points d’avance sur le 4e, Sochaux. Lille est désormais l’équipe qui compte le moins de défaites (4, contre 5 pour Lorient). Il reste 13 matches. Lille en perdra… 7, et échouera au pied du podium.
Posté le 25 février 2023 - par dbclosc
Un siècle d’alcool sur le football lillois
Si Mohamed Bayo est l’objet de railleries depuis sa sortie alcoolisée en août 2022, il s’inscrit pourtant dans une tradition qui montre bien sa rapide intégration au LOSC.
« Un Ricard pour Momo Bayo, hi ha hi ha ho ! » : on ne sait pas encore jusqu’à quand cette chanson résonnera dans le grand-stade-Pierre-Mauroy-Décathlon-arena-formidable-outil à l’attention du n°27 des Dogues, mais elle constitue l’hommage d’un public ravi de voir l’un des siens s’inscrire dans une longue tradition locale. D’ailleurs, les supporters étaient eux-mêmes tellement saouls qu’ils n’étaient pas en capacité d’inventer un nouvel air, se contentant de recycler le « et un permis pour Gervinho, hi ha hi ha ho » que l’on entendait au Stadium-Nord vers 2010 quand l’attaquant ivoirien du LOSC avait eu quelques soucis de conduite. Ah, la bonne époque du Stadium où, comme le disait le proverbe, « on n’était pas beaucoup, mais on était plein ».
L’histoire entre l’alcool et le LOSC a une origine lointaine et est scandée, via ses représentants les plus éminents, par quelques coups d’éclat que nous proposons de rappeler.
La Brasserie Excelsior d’Henri Jooris
« Henri Jooris grand dirigeant, Henri Jooris personnalité respectable, Henri Jooris sans qui le football à Lille ne serait pas ce qu’il est… mais Henri Jooris brasseur ! »
Ainsi parlait à peu près Charles II Goal à la Libération pour bien mettre l’accent sur le fait que l’esprit de résistance lillois est passé par la bière.
Les affaires de Jooris étaient situées au 112/114 boulevard Montebello à Lille. Si les imposants bâtiments abritaient notamment une boulangerie (L’Indépendante) et que Jooris était surnommé le « premier boulanger de France », tout ceci n’était qu’une couverture pour développer des affaires bien plus prospères et intéressantes à travers la Grande Brasserie de Lille dite Brasserie Excelsior.
C’est probablement à partir de cette époque que le football à Lille s’est imbibé d’alcool. Les bases idéologiques du club étaient ainsi posées, via l’un de ses ancêtres, l’Olympique Lillois, auquel Henri Jooris a appartenu dès sa création.
Rappelons que c’est à l’époque d’Henri Jooris que l’Olympique Lillois a organisé de nombreuses rencontres et tournois avec l’Union Saint-Gilloise, et qu’ont été posées là les bases d’une collaboration à long terme dont il reste de sérieuses traces jusqu’en 2022 :
Avant que la publicité ne soit autorisée sur les maillots, c’est dans le stade que la bière peut s’afficher, comme lors de la saison 1954/1955 , ci-dessous.
Et, comme on l’avait évoqué dans cet article, dirigeants et publicitaires testent si bien leurs produits qu’en 1955, la Brasserie du Pélican, qui produit notamment la bière Pelforth, crée une publicité sur laquelle apparaît un personnage vêtu d’une tenue du LOSC. Et ce alors qu’elle est concurrente de la Brasserie Excelsior, sponsor du LOSC. Une « erreur de communication » qui révèle surtout le taux d’alcoolémie alarmant de nos élites.
La coupe de champagne de Jean Baratte avant la prolongation
L’un des joueurs les plus marquants de l’histoire du LOSC est bien entendu son meilleur buteur : Jean Baratte. Soucieux de préserver l’héritage alcoolisé de Jooris, Jeannot n’a eu de cesse de s’opposer à son père qui tenait la guinguette « la laiterie » : ce nom était en effet une insulte à la bonne boisson. On voit sur cette photo les rapports conflictuels précoces entre Jean « boudeur » et son père :
Fort heureusement, ses débuts en équipe première le réconcilient avec l’alcool puisqu’il admet dans But et Club en mai 1948 qu’il a marqué son premier but en « pro » de la main. C’était avec l’OICL, face à Sochaux.
Une seule raison s’impose pour expliquer la validation de ce but : l’arbitre était bourré. Jean Baratte, qui hésitait alors entre tennis et football, choisit résolument le football.
Et c’est au crépuscule de sa vie, alors qu’il a repris un bar (un beau symbole, comme l’a également fait François Bourbotte, entre autres) à Nempont-Saint-Firmin, qu’il révèle le secret de sa réussite : il buvait une petite coupe de champagne pour jouer les prolongations. Une stratégie payante : 228 buts avec Lille !
S’inventer une peur de l’avion pour boire en toute impunité : le cas Prieto
Certains considèrent Ignacio Prieto comme le joueur le plus talentueux qui ait joué sous les couleurs du LOSC. En réalité, cette admiration est surtout liée aux penchants du joueur pour le whisky. En effet, dans un article qui n’a étonné personne, en 1972 la Voix du Nord indique que le Chilien aurait une « peur panique » de l’avion, qui le conduit à en boire avant d’embarquer afin de créer un « état euphorique ». En revanche, l’article se trompe quand il précise que l’effet sur lui est immédiat car il ne boirait jamais d’alccol : c’est au contraire le manque d’alcool, à peine compensé par deux shots, qui fait trembler Prieto et lui fait poser des devinettes idiotes à ses coéquipiers, comme celle-ci : « tu sais pourquoi j’allais à la messe à 5h dans ma jeunesse ? Parce qu’Ignacio priait tôt ! »
La Voix du Nord, 18 janvier 1972
Quand Hazard jouait bourré : un triplé
Après Baratte et Prieto, manquait le troisième larron de la fierté losciste : Eden Hazard. Formé à bonne école (rappelons qu’il est Belge), il attend toutefois son dernier match pour réaliser l’une de ses plus grandes démonstations de force avec les Dogues : jouer bourré. Ce 20 mai 2012, face à Nancy, on savait qu’il partirait après avoir été étincelant sur les pelouses de Ligue 1 durant un peu plus de 4 ans. C’était donc un peu son jubilé, et la soirée a été très longue, comme l’a relaté So Foot dans cet article. Et le pire, c’est qu’il a planté un triplé en première mi-temps. Une preuve supplémentaire qu’entre boire et conduire (le jeu), il ne faut pas choisir.
Les excès de dirigeants dont élocution devient hésitante
On se rappelle également que des excès ont conduit certains dirigeants à avoir une élocution hésitante, ce qui a abouti à des transferts surprenants. Ainsi, en 1995, le LOSC croit avoir fait le coup du siècle en embauchant le meilleur buteur du dernier championnat : le nantais Patrice Loko. En réalité, les dirigeants, ivres, se sont trompés et ont mené les négociations ainsi : « on veut Patrizzz Lokoo… Pastrick Coko… Patrick Collot ». C’est donc Patrick Collot qui a signé dans le Nord à l’été 1995. Après avoir désaoûlé, le directeur sportif avait reconnu « c’était quand même bizarre, il était vraiment pas cher, et comme on n’a pas d’argent… » Probablement parce que tout le budget est parti en boissons ! On évoque toutefois avec nostalgie le passage de Patrick Collot au LOSC en se rappelant : « ah, l’Collot… »
En 2002, le nouveau président Seydoux se prend une murge après l’élimination en Intertoto et décide de recruter « un joueur à 10 balles » pour sanctionner le groupe. La direction sportive, à 4 grammes, intervertit les syllabes et recrute par inadvertance « le joueur Abidal », comme quoi l’alcool a aussi du bon (et Collot, c’était très bien aussi).
En revanche, ce fut catastrophique en 2006 : le club cherchait, dixit Puel « un buteur, alléluia ». Pas de chance : ce sera « Allez Youla »…
Rappelons que l’excès de houblon a conduit à recruter par erreur Fodé Ballo-Touré : en réalité, ce recrutement visait à effacer le recrutement, quelques saisons auparavant, de « Tallo, bourré », une petite pépite d’Hervé Renard (des surfaces) qui, à ce jour, a davantage marqué contre le LOSC que pour. C’est un nouveau rappel qu’il vaut mieux que le LOSC soit à la bière, car ça va moins bien quand il est Tallo.
Et que dire de l’état d’Anne-Sophie Roquette qui, après un but de Frank Farina en 1994, annonce un but d’Eric Assadourian…?
Les années Halilhodzic : l’ivresse des sommets
N’oublions pas que la bande à Vahid n’était pas en reste. N’est-ce pas le sorcier bosniaque qui a fait de Djezon son capitaine, pensant qu’il s’appelait Bouteille ?
Grâce à une victoire à Monaco en mai 2001, le LOSC s’est qualifié pour le tour préliminaire de la Ligue des Champions. Le journal L’équipe révèle évoque alors explicitement les liens entre le LOSC et l’ivresse, comme le montre implacablement le document ci-dessous. Nous attirons particulièrement votre attention sur l’intertitre qui souligne le déni dans lequel se réfugient trop souvent les alcooliques.
Après la qualification contre Parme, les joueurs avaient brandi un maillot en pensant à leur collègue malade, Christophe Pignol. Ils en avaient alors profité pour faire un flocage grossier lui rendant hommage, mais aussi à la gnôle, qui faisait partie du traitement. Six mois plus tard, Christophe Pignol était de retour.
Avec ces performances et cette consommation, le LOSC rattrape ainsi peu à peu son voisin lensois, pionnier en matière d’alcool. Ce rapprochement Cygan/Pierre-Fanfan en décembre 2000 en est une preuve.
Seydoux, un nouveau tournant
Après les riches années Halilhodzic, l’arrivée de Michel Seydoux marque une inflexion : en effet, des résultats d’abord médiocres nous éloignent de l’ivresse du récent passé. Mais des progrès à mesure que le mandat Puel avance, puis l’arrivée de Rudi Garcia en 2008 incitent le président du LOSC à passer aux aveux en janvier 2011 :
Cette déclaration avait été à l’origine d’un courrier que nous avions envoyé au président Seydoux : nous lui demandions de participer à nos « frais de bière ». Hélas, cette demande est étonnamment restée sans réponse.
CQFD
On pourrait ajouter à ce palmarès quelques faits pas vraiment élucidés, comme l’état de Steve Elana lors de Lille/Sochaux en 2013, où les prestations d’un Thierry Rabat sans repères, mais restons-en là. La démonstration est faite : le LOSC et l’alcool, c’est une belle histoire.
Quoi de surprenant chez un club qui a souvent fait preuve d’une bonne descente (1956, 1958, 1968, 1969, 1972, 1977, 1997), très souvent suivie d’un p’tit remontant (1957, 1964, 1970, 1971, 1974, 1978, 2000) ?
Posté le 18 janvier 2023 - par dbclosc
Nantes/Anderlecht, premier match de football au Stadium Nord
En janvier 1977, les amateurs de football voient pour la première fois se jouer un match de football dans un stade tout neuf : le Stadium Nord de Villeneuve d’Ascq. Il met aux prises deux grandes équipes : Anderlecht, champion d’Europe, et Nantes, alors en tête du championnat français. Quelques à-côtés cocasses du match symbolisent déjà le rapport contrarié du Stadium avec le football.
C’est le 18 janvier 1977 que le Stadium-Nord rencontre le ballon rond pour la première fois. Inauguré après 3 ans de travaux le 27 juin 1976, le stade qu’on appelait initialement Complexe olympique Lille-Est est d’une capacité de 30 000 places. Sa construction était programmée depuis 1964 dans la ville de Lille-Est, devenue en 1970 commune de Villeneuve d’Ascq, et le schéma d’urbanisme prévoyait un stade polyvalent destiné à accueillir des compétitions d’athlétisme de haut niveau et… les matchs du LOSC. Mais le LOSC, club professionnel le plus proche, n’a pas les honneurs d’étrenner les nouvelles installations. Les Dogues ne découvriront le Stadium qu’en 1979, contre Beveren, pour la troisième édition du tournoi de la communauté urbaine de Lille (CUDL).
Il faut dire qu’en 1974, le maire de Lille, Pierre Mauroy, annonce pour sa ville un nouveau stade de 25 000 places, construit à une vitesse record et inauguré en octobre 1975. Certes, il y a urgence : le stade Henri-Jooris, en bois, est vétuste, et le canal de la Deûle doit être agrandi, comme c’est prévu depuis les années 1950. Il n’empêche que l’annonce du maire de Lille est une surprise, puisqu’un stade a priori très moderne est en passe de sortir de terre à quelques kilomètres de là.
Comment expliquer cette épidémie d’érections chez nos élus ?
Un peu d’histoire politique
La CUDL est présidée depuis 1971 par Arthur Notebart, maire de Lomme. Mais ce n’est qu’un lot de consolation, reçu des mains du président précédent, le maire de Lille Augustin Laurent, car Arthur Notebart avait l’intention de lui succéder au beffroi de Lille, avant qu’il ne lui préfère Pierre Mauroy.
Arthur Notebart et Pierre Mauroy sont les deux poids lourds de la puissante fédération socialiste du Nord, qu’il ont même codirigée de 1968 à 1971. Mais tout oppose les deux hommes à partir de 1971 : anti-communiste, Notebart a été mis en minorité après s’être opposé à Mitterrand et à sa stratégie d’« union de la gauche » lors du congrès d’Épinay. Le président de la CUDL s’emploie désormais à empêcher la montée en puissance locale de celui qui vient d’être nommé numéro 2 du PS. Il a pour cela deux leviers : son poste de président de la communauté urbaine, et la présidence du conseil d’administration de l’établissement public qui a en charge l’aménagement de Lille-Est.
Pierre Mauroy, quant à lui, s’efforce d’affirmer la place centrale de la ville de Lille dans la métropole, face à Roubaix-Tourcoing et à Villeneuve d’Ascq, où s’établissent la plupart des universités et des entreprises innovantes. L’échec de la fusion de Lille et de Villeneuve d’Ascq en 1972 est vécu comme un affront, que Pierre Mauroy impute en partie à Arthur Notebart. Cet échec conduit les socialistes lillois à vouloir maintenir sur leur territoire tous les équipements qui symbolisent la centralité de la Ville dans la métropole.
Ce n’est donc pas uniquement guidé par des considérations sportives que Pierre Mauroy s’oppose au départ du LOSC pour Villeneuve d’Ascq, mais bien pour tenter de consolider son assise municipal et tenter de conquérir le leadership métropolitain. Le LOSC, destiné à être résident du Stadium, est finalement tributaire de ces rivalités politiques, et le Stadium en est la principale victime.
Le Stadium Nord n’aura donc pas de club de football résident, du moins à ses débuts. La première compétition sportive qui s’y déroule est le tournoi européen cadet de hockey-sur-gazon le 30 avril 1976. Puis, au cours des semaines suivantes, le Stadium est l’hôte de compétitions régionales, inter-régionales et nationales d’athlétisme, qui seront la discipline-phare de l’équipement.
Quant au football, il faut attendre quelques mois. Le 4 janvier 1977, la presse régionale annonce un « match de prestige », un « match de gala » au Stadium-Nord, destiné à promouvoir le nouvel équipement métropolitain et, qui sait, montrer au yeux du public qu’il pourrait alors très bien accueillir le LOSC, si jamais les majorités politiques venaient à se modifier. Ce match opposera l’équipe française de Nantes à l’équipe belge d’Anderlecht. Dans un premier temps, les organisateurs du avaient songé à organiser un Bayern Munich/Saint-Etienne, mais cette idée leur a été déconseillée en raison des tarifs exigés par les Allemands (la Voix du Nord évoque « 30 millions de centimes »), et ensuite parce que l’équipe bavaroise « ne donne aucun spectacle… Elle se calfeutre en défense… et elle laisse venir l’adversaire. Ce n’est pas ce que l’on attend d’un match de prestige. Surtout à ce prix ! », écrit Jean Chantry. Quant aux Stéphannois, ils s’expriment par le biais de leur président, Roger Rocher : « nous refusons les matches amicaux ; nos finances n’en ont pas besoin – heureusement – et nos joueurs évitent le plus possible les déplacements ». Eh bien ce sera Nantes/Anderlecht !
Anderlecht, Anderlecht champion
La Voix du Nord présente Anderlecht comme « une des plus brillantes équipes du moment ». il faut dire que les Belges ont remporté la C2 en 1976 en battant West Ham 4-2, la supercoupe d’Europe dans la foulée, puis se sont de nouveau hissés en finale en 1977. Le quotidien régional prévoit une opposition de style entre une équipe nantaise qui symbolise jeunesse et dynamisme », et une d’Anderlecht qui représente « expérience et réalisme ».
La Voix du Nord, qui annonce le match autant qu’elle en assure la promotion, promet que le néerlandais d’Anderlecht, Robert Rensembrick est « un programme à lui tout seul », « au moins aussi fort que le Cruyff des meilleurs années ». Rien que ça ! Les Bruxellois se présentent aussi avec Van der Elst, pas encore 20 ans, meilleur buteur de l’équipe (et deux fois buteur contre West Ham en finale de coupe d’Europe, Rensenbrick marquant les deux autres). Jean Thissen, blessé depuis un mois, est annoncé de retour dans la défense des « Mauves ». L’entraîneur des Belges, Raymond Goethals, considère que son équipe doit s’imposer car « Nantes n’a pas encore fait ses preuves au niveau européen ».
Les Canaris prennent leur envol
Nantes, de son côté, est perçu comme la « meilleure équipe française, la plus riche sur le plan offensif ». Les Canaris sont entraînés depuis quelques mois par l’ancien dogue Jean Vincent, qui a pris la succssion de José Arribas, désormais à Marseille, et futur entraîneur du LOSC. Après des débuts laborieux, le travail de Jean Vincent est salué : il est « virevoltant, primesautier, insaisissable », notamment grâce à sa capacité à faire confiance, en tant que titulaires, aux jeunes joueurs qu’Arribas avait lancés : Pécout, Baronchelli et Amisse, tous trois aux Jeux Olympiques de Montréal quelques mois plus tôt. Conséquence : le polonais Robert Gadocha, blessé en début de saison, a bien du mal à retrouver sa place et, vexé, négocie un transfert aux Etats-Unis. Jean Vincent est donc parvenu à poser son empreinte sur cete équipe, et prend ce match contre Anderlecht très au sérieux : « nous jouerons à fond car, d’abord, nous devons nous forger un palmarès international. Ensuite, chaque dimanche, nous allons devoir livrer un match de coupe. C’est normal : Saint-Etienne s’en plaint, mais durant toute ma carrière à Lille, puis à Reims, chaque semaine nous étions attendus poings en avant. Tout cela, nos jeunes doivent l’apprendre. Et ils doivent jouer chaque match à fond. Imaginez la tête que ferait notre public si nous rentrions mercredi matin avec quatre ou cinq buts belges dans nos valises… »
Rendez-vous manqué
Bonne nouvelle : on annonce une « pelouse agréable et sèche », non pas que la météo soit spécialement favorable, mais la pelouse et la terre seront séchées grâce à un système de tuyaux de chauffage installés lors de la construction du stade : quelle modernité ! Aucun doute : les spectateurs vont découvrir, fascinés, ce « merveilleux stade » et, parmi eux, le kop d’Anderlecht, « si drôle » car, paraît-il, il chante « des airs français ».
8 à 10 000 spectateurs sont attendus au Stadium en ce mercredi 4 janvier.
Oui mais… Il n’y aura personne. À 17h30, les responsables de l’organisation se rendent à l’évidence : il est impossible de jouer. La cause ? Le brouillard « si dense que des tribunes on apercevait à peine la premières lignes de touche. Et les puissants projecteurs n’y pouvaient rien changer »
Les Nantais, qui étaient arrivés en début d’après-midi via Bruxelles, leur avion n’ayant pu se poser à Lesquin, en sont quittes pour un retour en Belgique et un retour à Nantes le soir même.
Quant aux Anderlechtois, ils ne sont jamais arrivés à Villeneuve d’Ascq : ils ont été prévenus du report de match alors qu’ils étaient bloqués sur l’autoroute depuis une heure à 50 kilomètres de Bruxelles.
Le match est reporté au 18 janvier et la première fois entre le football et le Stadium est un rendez-vous manqué.
Humour à gogo
Entre le 4 et le 18 janvier, les deux équipes ont gagné en championnat : pour la reprise après la trêve, Nantes a battu Bastia 3-1 (Bargas, Michel, Sahnoun) alors que le score était de 0-1 à la… 84e. Si bien que les Nantais sont désormais leaders de D1, ce qui fait dire à la Voix que les organisateurs « ont eu du nez », et que le temps de domination de Saint-Etienne est bel et bien passé.
Et il y a apparemment une bonne ambiance chez les Nantais : descendus à l’hôtel Novotel, les joueurs font un canular à leur entraîneur, en le faisant appeler à la réception. Bien évidemment, quand Jean Vincent s’y pointe, il n’y a personne. Or, cette bonne blague survient à peu près au moment où a lieu le tirage au sort de la coupe de France. Et puisqu’il a été trompé, Jean Vincent réunit ses joueurs et leur annonce qu’ils devront affronter Fontainebleau, alors qu’il vient d’être informé que ce sera Nantes/Toulouse. Un quart d’heure plus tard, une radio évoque Nantes/Toulouse… Eclat de rire général.
Du côté d’Anderlecht, les « banlieusards bruxellois » (sic) ont battu le Beveren de Jean-Marie Pfaff 2-0, grâce à un doublé de Rensenbrinck, ce qui autorise la Voix du Nord à écrire : « il laissa le gardien Pfaff… tout paf ! ».
Des Sang & Or sur le terrain
Dans les buts, Munaro a remplacé Ruiter depuis la trêve car ce dernier a fait des déclarations « désobligeantes » à l’endroit de son entraîneur, Raymond Goethals ; « mais les spectateurs ne perdront pas au change : Munaron est un jeune géant très athlétique. Les assidus des tournois de Croix et Roubaix se souviennent d’ailleurs de lui ».
Voici les compositions annoncées :
Finalement, Ruiter est titulaire. Le Nord lui réussit puisque c’est à Henri-Jooris qu’il avait été testé par Anderlecht quelques années avant, ce qui lui avait permis de décrocher un contrat au RSCA.
Après la victoire, en lever de rideau, de la communauté urbaine contre la police (2-1), le public est estimé à 12 000 spectateurs, soit bien plus que ce qui avait été prévu, ce qui permettra de compenser partiellement la perte de « 3 millions de centimes » liée au report du match. Mais quelques sifflets descendent des tribunes car les joueurs de Nantes et d’Anderlecht tardent à entrer sur le terrain alors que la température est de 0° : « par ce froid, un quart d’heure d’attente, c’est long… ». La raison de ce retard est très surprenante : en arrivant au stade, l’intendance nantaise se rend compte qu’elle s’est trompée de maillots… Les maillots sont ceux d’il y a 3 ans. Ce ne serait pas forcément un problème si le sponsor n’avait pas changé entretemps : les Nantais sont désormais soutenus par Europe 1.
Que faire alors ? Trouver des maillots sur lesquels figure le logo de la station. Et qui a ça ? Le Racing Club de Lens ! L’affaire est vite arrangée, le Racing prête un jeu de maillots, et voilà comment le stade métropolitain de Lille accueille pour sa première footballistique des Nantais habillés en Sang & Or !
Les deux équipes se séparent sur un nul, 1-1. Selon la presse, Nantes a largement dominé, et a réussi son match « au-delà de ses espérances ». Sahnoun s’est particulièrement distingué : il est le « pourvoyeur de l’équipe et eut des actions techniques remarquables ». Vincent considère que « nous méritions de gagner et nous aurions très pu le faire si Tintin avait marqué le second qu’il avait au bout du pied ». Tintin contre Bruxelles, voilà qui est très étonnant. Même Goethals salue la qualité des Nantais : « quelle vivacité, quelle jeunesse dans cette équipe. Défensivement, elle est moins forte que Saint-Etienne mais, offensivement, Nantes m’a paru nettement supérieur à l’équipe championne de France. Voilà Jean Vincent paré pour quelques années avec une équipe de cette qualité »
Anderlecht s’est montré plutôt décevant et n’a jamais cherché à emballer le match. Quant au petit génie Rensembrick, « il se contenta de jouer son petit Hitchcock, se gardant le plaisir d’apparaître quelques instants dans un coin du match. Du talent ? Bien sûr, mais au compte-gouttes ! »
Du côté de l’organisation, on montre sa satisfaction et son envie d’organiser d’autres matches de football. La possibilité de la venue d’une autre grosse équipe européenne contre une sélection nordiste est envisagée.
Mais plutôt en été puisque « les spectateurs ne manquaient pas de courage car, par un froid de canard aussi intense qu’hier, il fallait vraiment aimer le football pour se déplacer en plein vent, à cette heure-là ».
Dans un monde qui change, voilà une belle constante depuis 1977.
Les extraits de presse sont tirés de La Voix du Nord et de La Voix des Sports, janvier 1977.
Posté le 21 décembre 2022 - par dbclosc
Lille/Bastia 2000 : contexte chaud, Valois fait le show, Noël au chaud
Le 21 décembre 2000, le LOSC bat Bastia 1-0, grâce à un but d’un revenant : Jean-Louis Valois. Ainsi s’achève une formidable année civile pour le club, qui se place deuxième à la trêve. Pourtant, le match a failli ne pas avoir lieu : peu avant le match, le président du club corse a été pris dans une échauffourée dans les couloirs de Grimonprez-Jooris.
Après trois ans en D2, on ne donnait pas forcément très cher de la peau du LOSC lorsqu’il retrouve l’élite à l’été 2000. Même si le club a survolé le championnat en 1999/2000, les souvenirs des décennies sans saveur persistent, et le recrutement de l’été n’a pas soulevé d’enthousiasme délirant. Les ambitions sont donc modestes, et on se satisfera largement d’un maintien sur le fil, pour reprendre des habitudes bien ancrées. Pourtant, le LOSC se place rapidement dans le haut du classement, surtout après deux matches en septembre, à Saint-Etienne puis contre Lens. Dans un championnat certes serré, les Dogues se placent régulièrement parmi les 6 premiers, et se permettent même d’être deuxièmes au soir de la 13e journée, après une victoire sur Toulouse (1-0).
Début décembre, à cinq jours d’intervalle, Lille bat le leader Sedan (2-0), puis le PSG (2-0), un match qui a été rejoué après avoir été interrompu à 1-1. Suit un nul à Metz (1-1) qui place le LOSC au pied du podium alors que se profile le dernier match de l’année civile, contre Bastia. Surprenant promu, Lille profite et se dit que les points pris ne sont plus à prendre : à coup sûr, des temps plus difficiles arriveront, les « gros » reprendront progressivement les premières places, et le LOSC rentrera dans le rang : pourquoi pas 15e ? C’est sur cette base plus réaliste que Luc Dayan, le président du club depuis mars, a budgetisé l’exercice 2000/2001.
Dayan, l’univers parallèle
Les bons résultats de l’équipe permettent de s’enlever un fardeau et de structurer le club, en voyant grand à moyen voire court terme. La privatisation est présentée comme un processus d’autonomisation vis-à-vis de la mairie, marquée par différentes étapes qui symboliseraient la « modernité ». Début décembre, Luc Dayan, annonce ainsi dans la Voix du Nord qu’il espère prochainement « signer l’acte de vente d’un immeuble dans le centre-ville qui aura pour objectif d’être un centre de vie du club avec une partie commerces, une brasserie, une salle de fitness. Si tout va bien, nous ouvrirons en fin de saison ». Il parle de « l’entreprise LOSC », de la cession de 25% du capital du club à des entreprises régionales, et de la possibilité d’attribuer des stock-options aux joueurs, indépendamment d’une éventuelle entrée en bourse : « notre principe serait de fidéliser les joueurs avec des actions donnant droit à une plus-value en fonction des résultats financiers du club, au cas où ils effectueraient l’intégralité de leur contrat. Les 10% d’actions seraient ponctionnées sur les 72% que possédera bientôt notre société, Socle ». Bien parlé président, voilà le football qu’on aime ! Il est aussi question d’un nouveau stade (ou d’un aménagement de Grimonprez-Jooris) « à l’horizon 2003 », une tâche que Dayan cède volontiers aux acteurs publics, probablement parce qu’il n’est pas certain de faire de la thune avec ça. Privatisons les profits, socialisons les pertes, le LOSC est un club moderne !
La Voix du Nord, 8 décembre 2000
Le « contexte corse » s’exporte à Lille
En attendant, Luc Dayan va devoir revenir à des réalités bien plus terre-à-terre et montrer autre chose pour rivaliser avec Bernard Lecomte, qui vient d’être désigné « dirigeant de l’année » par France Football : ce jeudi 21 décembre, Lille/Bastia doit commencer à 20h30. Mais le président lillois arrive un peu plus tôt que prévu, en catastrophe, dès 19h45 : il se retrouve face au président du Sporting Club de Bastia, François Nicolaï, griffé sur une joue, les chaussures et le pantalon couverts de terre. Une demie heure auparavant, il aurait été pris à partie par des stadiers du LOSC, qui l’auraient envoyé par terre, et l’un d’eux lui aurait même asséné un coup de tête, occasionnant un beau roulé-boulé sur la pelouse boueuse. En riposte, quatre dirigeants corses « faisant valoir la loi du Talion » auraient roué de coups un stadier. La Voix du Nord, présente juste après les échauffourées, interroge les deux parties, qui n’ont pas l’air d’accord : selon un agent de sécurité, « ils n’avaient pas les cartes valables pour entrer sur le terrain on a voulu les empêcher ». François Nicolaï, lui, attend Luc Dayan de pied ferme : « si le président Dayan ne m’explique pas pourquoi la sécurité s’est conduite ainsi, on ne jouera pas. Si ces messieurs souhaitent régler le problème corse, ils doivent voir avec Matignon », référence au Premier Ministre, Lionel Jospin qui, depuis quelques mois, a fort à faire avec la Corse, quelques mois après l’assassinat du Préfet Eyrignac suivi de la toute belle aventure des paillotes brûlées, qui a conduit au renvoi du préfet suivant, Bernard Bonnet, dont les fans de foot connaissent davantage la fille, Anne-Laure (authentique)
Selon la Voix, « le visage marqué du président bastiais met mal à l’aise les dirigeants lillois ». Très énervé, Nicolaï tente de joindre le président de la Ligue, Gérard Bourgoin, et dépose une réclamation auprès de M. Glochon, l’arbitre du match. Enfin, il assure vouloir porter plainte pour « coups et blessures volontaires ».
Arrive alors Luc Dayan qui, après un moment d’échange avec son homologue, se présente devant la presse : « c’est désastreux. Je suis extrêmement triste. Je présente mes excuses au président Nicolaï ».
Apparemment, personne ne comprend réellement ce qu’il s’est passé : « il y a des mécanismes qui m’échappent, je veux savoir » affirme Dayan. Pendant ce temps, les joueurs sortent pour s’échauffer et sont mis au courant. Vahid Halilhodzic, informé de l’incident, prend à part Frédéric Antonetti, l’entraîneur du SCB, puis déclare seulement : « ce qui s’est passé est anormal. Il n’y a aucun problème entre les deux clubs. Là-bas, nous avons été reçus superbement bien ». Apparemment, la diplomatie de Dayan et d’Halilhodzic a permis de faire retomber la tension : le match aura lieu.
Jean-Louis Valois, de Calais à Bastia
Du côté du LOSC, Cygan, blessé à un mollet, est absent depuis quelques semaines. Manquent aussi Laurent Peyrelade, Bruno Cheyrou et Edvin Murati. Devant, la nouvelle vedette, Sterjovski, est titularisée aux côtés de Beck et de Boutoille. Au milieu, Vahid surprend son monde en ne titularisant pas Sylvain N’Diaye : Landrin prend sa place à la récupération avec D’Amico. Sur l’aile gauche, un revenant : Jean-Louis Valois qui, jusqu’alors, n’avait fait que 6 entrées en jeu, pour 74 minutes jouées. Joueur essentiel en 98/99 (29 matches dont 27 titularisations, 5 buts), Jean-Louis Valois reste un élément important de l’année du titre de D2 (25 matches dont 12 titularisations) au cours de laquelle il inscrit deux buts particulièrement marquants : d’abord, contre Guingamp, de la tête, pour une victoire dans un match au sommet (2-0), puis contre Valence, dans le match de l’officialisation de la montée, où il envoie une frappe en lucarne qui provoque un envahissement de terrain et une brève interruption du match.
Si son pied gauche a beaucoup apporté en D2, Jean-Louis Valois semble faire partie ce ces rares joueurs du LOSC qui ne parviennent pas à performer au niveau supérieur. D’ailleurs, lorsqu’il jouait à Auxerre, il n’a fait que 2 petites apparitions en D1, pour seulement 23 minutes jouées (en 96/97). Il faut dire aussi que, cette année, il ne semble pas avoir la confiance d’Halilhodzic qui, à son poste, a recruté durant l’été Murati, qui lui-même sera progressivement barré par l’éclosion de Bruno Cheyrou. Si l’on ajoute à cela la belle surprise Sterjovski, la satisfaction Beck dans son jeu si spécifique, l’explosion de Bakari en 2001, et le fait que le statut de Collot fait de lui le favori pour entrer en fin de match, il reste peu de place devant pour Valois.
Mais alors, pourquoi se retrouve-t-il titulaire ce soir là ? Pour répondre à cette question, il faut remonter à janvier 2000, presque un an auparavant.
Buteur contre Guingamp, novembre 1999
Le 22 janvier 2000, sans Vahid Halilhodzic, malade, le LOSC s’incline en 32e de finale de coupe de France, à Calais, pensionnaire de quatrième division (1-1 ; 6-7 aux tirs aux buts). Même si le parcours ultérieurs des Calaisiens peut relativiser la portée de cette défaite, c’est un affront pour Halilhodzic. 11 mois après, il n’a pas oublié ; le 17 décembre 2000, la réserve du LOSC reçoit Calais, qui est alors largement en tête (44 points en 14 journées, 0 défaite1), alors que les Lillois sont 16es, n’ont gagné que deux fois, et auraient bien besoin de points. L’occasion est trop belle : Halilhodzic envoie en réserve tous ses pros qui n’ont pas joué la veille à Metz ! Dès lors, l’équipe d’Eric Guérit est renforcée par 9 professionnels : Allibert, Hammadou, Delpierre, Santini, les frères Cheyrou, Valois, Dernis et Beck. Ils sont tous titulaires pour ce match au Stadium Nord, et seuls Dumont et Michalowski complètent le 11 de départ, sous les yeux d’Halilhodzic, qui n’a manifestement pas digéré l’élimination. Sont également présents en tribunes : Mottet, Lambert, Cygan, Sterjovski, Pichot, N’Diaye et Bakari.
La Voix des Sports, 18 décembre 2000
Et ce qui devait arriver arrive : même si Calais se montre dangereux en premier avec un sauvetage d’Hammadou sur la ligne devant Lefebvre (2e), Beck ouvre le score (38e), Valois double la mise (59e). Le capitaine calaisien, sans réussite, envoie ensuite un pénalty dans les nuages (75e), avant que Jean-Louis Valois ne marque encore (83e, 92e). 4-0, avec un triplé de Valois : l’affront n’est sans doute pas lavé, mais probablement que « Vahid content ».
La Voix des Sports, 18 décembre 2000
Valois buteur, le LOSC dauphin
Triplé contre Calais : voilà comment Jean-Louis Valois a gagné sa place pour ce match contre Bastia. Voilà la composition du LOSC : Wimbée ; Pichot, Fahmi, Ecker, Pignol ; D’Amico, Landrin, Valois ; Boutoille, Sterjovski, Beck.
Dans un match sans grand attrait, Lille domine globalement et se crée des occasions par Beck (tête repoussée par Durand) ou Boutoille (frappe au-dessus). En seconde période, l’éclair vient de Djezon Boutoille qui, servi par Pichot, crochète un défenseur et centre au second poteau ; le ballon surmonte le gardien de Bastia et, au second poteau… Jean-Louis Valois reprend du plat du pied gauche et conclut (1-0, 70e). Luc, voilà une action qui amène une belle plus-value !
Le but sur Fréquence Nord :
Pour la 10e fois en 22 journées, Lille gagne et compte 37 points à la trêve. Et comme Sedan et Bordeaux ont perdu, le LOSC se place deuxième : les Dogues se muent en dauphins (de Nantes, 2 points devant).
S’il est encore un peu tôt pour s’emballer, les fantômes du passé semblent envolés. L’équipe est sur sa lancée des deux dernières années et paraît solide, au moins pour assurer un maintien tranquille. Elle a déjà marqué 2 points de plus que sur l’entièreté de sa dernière saison en D1, en 96/97 (qui, en outre, comptait 4 journées supplémentaires) ! Le LOSC peut passer Noël au chaud. Et on est loin de s’imaginer que le meilleur reste à venir. En revanche, du côté de Bastia, on s’inquiète pour François Nicolaï qui, le lendemain du match, est hospitalisé après avoir été pris d’un malaise lors d’une réunion pour évoquer les événements de Grimonprez-Jooris.
Épilogue
Jean-Louis Valois ne sera qu’un acteur très intermittent de la formidable fin de saison du LOSC. Il ne jouera plus qu’en janvier, pour deux entrées en jeu, et 14 minutes jouées. Il part ensuite du côté de l’Angleterre et de l’Ecosse.
Le lendemain de Lille/Bastia, le LOSC porte plainte contre X, ce qui permet l’ouverture d’une enquête judiciaire. Selon Luc Dayan, « nous sommes responsables de ce qui se passe chez nous, et donc de la sécurité des visiteurs. François Nicolaï, que je connais bien, est très affecté, de même que les stadiers. Je souhaite montrer à tous que personne à Lille n’est de mauvaise foi et permettre ainsi que ce genre de problème ne se reproduise plus ». En janvier 2001, le club est sanctionné par la commission de discipline de la LNF à 500.000 francs d’amende et à un match de suspension de terrain avec sursis. Élégamment, le club fait appel. La sanction est confirmée en février. On s’en fout, on est en tête du championnat.
Un résumé du match (France 3 Nord-Pas-de-Calais) :
1 La victoire est à 4 points, le nul à 2, et la défaite (hors forfait) à 1.
Posté le 18 décembre 2022 - par dbclosc
Georges Heylens : « Lille, c’était pas mal, hein ? »
Georges Heylens, ce sont cinq années de la vie du LOSC dans les années 1980. Pas forcément les plus glorieuses, mais de celles qui ont laissé des souvenirs marquants chez les supporters qui les ont vécues. Rencontre avec un morceau d’histoire.
« C’était notre quartier ici, notre rue » : depuis une table de La Tribune, une brasserie populaire du cœur d’Anderlecht, où nous avions rendez-vous, Georges Heylens semble regarder au-dehors avec nostalgie. Juste à côté se trouve la rue de Formanoir, où il avait une boutique d’articles de sports, de 1961 à 2014, qu’a dirigée son fils Stéphane : « on était livreurs de l’équipe d’Anderlecht, et de l’équipe nationale. À l’époque, à Bruxelles, il n’y avait pas de boutique de sports. On a été pionniers là-dessus ».
Les Heylens vivent toujours à Anderlecht, « leur » commune. À quelques dizaines de mètres se trouve le Lotto Park – anciennement stade Constant Van Den Stock – l’antre des « Mauves », où Georges Heylens a réalisé l’entièreté de sa carrière de joueur professionnel, de 1960 à 1973, avec 7 titres de champions de Belgique et trois coupes, glanant au passage 67 sélections avec les Diables Rouges. Les Diables, justement, ont été éliminés la veille de la coupe du monde : « pas de chance » juge-t-il laconiquement. Une élimination au premier tour, comme en 1970 au Mexique, où Georges Heylens était arrière droit de l’équipe nationale : « c’était autre chose, ça n’avait rien à voir avec aujourd’hui… ».
On sent que les souvenirs s’effacent peu à peu, mais Stéphane, « [son] patron, [son] secrétaire » se charge de stimuler la mémoire de son père, désormais 81 ans : « je crois que j’ai eu une belle carrière ». Une carrière notamment passé par le LOSC, de 1984 à 1989.
L’arrivée à Lille
Après avoir été contraint de stopper prématurément sa carrière de footballeur à l’âge de 31 ans en raison d’une blessure à la jambe, Georges Heylens a entraîné l’Union Saint-Gilloise (73-75), Courtrai (75-77), Alost (78-83), puis le petit club de Seraing, qu’il a mené jusqu’à la 5e place du championnat belge en 1984. A cette occasion, il est élu « entraîneur de l’année » en Belgique.
Pendant ce temps, les dirigeants loscistes cherchent un nouvel entraîneur après le départ d’Arnaud Dos Santos. Jean Parisseaux ne souhaite pas quitter la formation des Dogues et, alors que l’on s’attend à la signature du Hongrois Pazmandy, on apprend le 22 juin que le FC Seraing est placé en liquidation judiciaire, et son entraîneur, licencié. Le LOSC saute sur l’occasion et fait signer un contrat d’un an à celui qui a mené si haut ce petit club de la banlieue liégeoise : « on a eu beaucoup d’ennuis financiers à Seraing. J’avais rencontré les dirigeants du LOSC à plusieurs reprises, et la mise en liquidation a tout changé ».
Direction le Nord de la France pour Heylens, alors qu’on le disait sollicité par Lausanne, Benfica et le PSG. Le précède une réputation qui colle bien à la région : travail et rigueur.
Le LOSC des années 1980
« Mes trois premières années à Lille ont été super. Par la suite, on s’est essoufflés. Le LOSC était un club familial. Je n’en garde que des bons souvenirs : Dewailly, Samoy, Parisseaux, Amyot, Robert… Des gens très biens. Sur le plan personnel, j’ai habité La Madeleine la première année, puis le quartier Vauban, et Lambersart. Lille, c’était pas mal, hein ? ».
« Avec moi, ça s’est moins bien passé avec Bernard Gardon. Mais c’est du passé ». On se rappelle en effet les circonstances rocambolesques du départ de Georges Heylens en 1989, dont on peut supposer qu’il avait été fortement « encouragé » par le directeur sportif de l’époque, Bernard Gardon, qui tenait à faire signer Gérard Houiller… qui n’était pas libre.
Sur le terrain, les années 1980 ne sont certainement pas les plus glorieuses du club ; elles oscillent entre le moyen et quelques éclaircies, le temps d’un bon parcours en coupe, ou pour admirer la technique de quelques vedettes « on a tout de même eu de très bons joueurs : Périlleux, Angloma, Lama, Mobati, Pelé, les frères Plancque… Avec ces joueurs-là, je pense qu’on aurait dû mieux faire, au moins atteindre une fois une coupe d’Europe ».
Grimonprez-Jooris n’a en effet que trop rarement vibré durant cette période, hormis, par exemple, lors du retournement de situation contre Bordeaux en coupe en 1985 (1-3 ; 5-1) : « oui mais on se fait éliminer derrière. J’ai davantage de regrets sur notre parcours en coupe en 1987 [Lille est éliminé en quarts par Bordeaux 1-3 ; 2-1]. On n’est pas passés loin de la demi, et le tableau me semblait plus abordable » ; ou lors d’une victoire contre le PSG en janvier 1986 : « le match avait été joué une première fois, et interrompu à 5 minutes de la fin à cause d’un problème d’éclairage. Il y avait 1-1, et on était très contents. Il a fallu tout rejouer ! Luis Fernandez était en colère de rejouer… Et on a gagné 2-0 ! »
« Je me rappelle aussi qu’on avait la possibilité de partir loin, assez longtemps, car il y avait une vraie trêve de quelques semaines en hiver. On est allés au Niger, au Cameroun. On est aussi allés en Guyane, chez Bernard Lama ».
« Il y avait une grande rivalité avec Lens. D’ailleurs, peu après mon arrivée, le quarantième anniversaire du club coïncidait avec la réception des Lensois. On a gagné 2-0 ! Et on a gagné aussi une ou deux fois à Bollaert… Dont une fois 4 à 1. On m’avait dit que Lille n’avait pas gagné là-bas depuis 20 ans »
Les deux entraîneurs nordistes sur RVN, avant le derby de septembre 1984
« J’ai été le premier à ouvrir la filière scandinave au LOSC, avec la venue de Kim Vilfort. Malheureusement, il n’a pas trop réussi à Lille ».
Le duo Desmet/Vandenbergh
« J’ai eu du plaisir à les avoir ces deux-là ! » S’il est bien un duo qui a marqué les années Heylens, c’est celui formé par ses deux compatriotes. Au cours de l’été 1986, les dirigeants du LOSC sont orientés vers la Belgique par leur entraîneur. Signe, dans un premier temps, Filip Desmet, révélation de la saison à Waregem, qui a joué une demi-finale de C2. Puis Heylens s’envole pour le Mexique, cette fois en tant que consultant pour Sports 80 (devenu Sports Magazine). La Belgique se classe quatrième, avec le même Desmet, et Erwin Vandenbergh, meilleur buteur du championnat belge en 1980, 1981 et 1982, et Soulier d’Or 1981.
Peu après la coupe du monde, Vandenbergh signe au LOSC (et Heylens rempile cette fois pour 3 ans) : « Vandenbergh avait été mis sur la liste des transferts par Anderlecht. Je l’ai su… ». La promesse d’une attaque de feu qui, là aussi, n’a finalement brillé que de façon intermittente, comme on l’a évoqué ici ou ici.
« La venue de Desmet et de Vandenbergh a fait venir pas mal de Belges à Grimonprez-Jooris : beaucoup venaient de Moucron, de Courtrai, de Menin, ou de Waregem. Le LOSC a toujours eu des liens privilégiés avec la Belgique ».
Après le LOSC, Georges Heylens a vite rebondi, d’abord au Berschoot puis, entre autres, à Charleroi (où il a retrouvé Desmet, et a participé au Tournoi de Liévin 1992), Malines ou Seraing, avec qui il a participé au fameux « tournoi de Liévin » en 1994. à l’issue de la saison 1993/1994, le petit club liégeois découvre la coupe d’Europe : « on a joué un tour d’UEFA contre le Dynamo Moscou. On a été battus 3-4 à la maison, et on rate un pénalty pour égaliser. Au retour, on gagne 1-0 là-bas. Insuffisant, malheureusement… Roger Lukaku, le père de Romelu, a tiré sur la latte à la dernière minute ! »
Après bien d’autres expériences, en Belgique et ailleurs, Georges Heylens a tiré sa révérence après une dernière pige chez les filles du White Star Fémina (club de Woluwé-Saint-Lambert), en 2015 : « au cours d’une rencontre d’anciens, j’ai rencontré le président du club, qui m’a proposé de m’occuper des féminines deux fois par semaine, de 20h à 22h. Ce sont souvent des étudiantes, donc il faut leur aménager des horaires. J’ai accepté avec plaisir ».
Georges Heylens suit toujours attentivement les performances du LOSC et d’Anderlecht, même s’il se rend de moins en moins au stade « quand les deux clubs se sont affrontés en Ligue des Champions en 2006, on a été invités à Anderlecht par les dirigeants d’Anderlecht, et à Lille par les dirigeants du LOSC. En 2014, Patrick Robert nous a invités pour les 70 ans du LOSC. J’espère qu’on a laissé de bons souvenirs. Saluez bien tout le monde à Lille... »
Merci à Stéphane et Georges Heylens pour leur disponibilité
Une sélection d’articles sur les années Heylens :
1984-1986 : quand le David lillois tyrannisait le Goliath Lensois
Erwin Vandenbergh, la classe belge
Quand Soler et Bureau semaient la terreur. Retour sur 40 jours de feu (1986)
Les succulents Lille-Lens de l’été 1986
La coupe de la Ligue 1986 des Loscistes
1986-1987 : quand le LOSC retrouve l’ambifion
Eté 1987, les premiers pas de Christophe Galtier au LOSC
Le tournoi CIFOOT de l’hiver 1987 : l’histoire d’un quadruple complot contre le LOSC
Le LOSC 1988/1989 : le Robin des Bois de la D1
Comment Gérard Houllier n’a pas signé au LOSC
Santini ouvre l’ère des vaches maigres
Posté le 2 décembre 2022 - par dbclosc
Jean Baratte, sportif « touche-à-tout » de l’OICL
Si l’on connaît bien les exploits footballistiques de Jean Baratte, c’est principalement pour les nombreux buts qu’il a marqués dès ses débuts au haut niveau, à l’OICL. Mais Jean Baratte a également gardé les buts de l’OICL lors d’un derby contre Fives en mai 1943. Alors qu’il n’a pas encore 20 ans, ce fils de sportif est également champion de tennis avec l’OICL ! Il a de qui tenir : son père est un personnage reconnu de la vie sportive lambersartoise.
La première mention de Jean Baratte dans la presse écrite remonte au 19 août 1928. Ce jour-là, on apprend dans Le Grand Echo que les fêtes du 15 août à Lambersart ont rassemblé un grand nombre de familles et d’enfants dans les avenues Soubise et de l’Hippodrome, où étaient organisés des activités telles que des lancers de ballons, un « jeu de ciseaux », un concours de cerceaux et un concours de trottinette, remporté par le petit Jean Baratte, 5 ans.
En 1928, le nom de Jean Baratte n’est pourtant pas inconnu pour les sportifs du Nord, et plus particulièrement pour celles et ceux de Lambersart. En effet, le père de l’enfant est une figure locale, non seulement parce qu’il est le propriétaire de la guinguette « La Laiterie de l’Hippodrome », situé au 128 avenue de l’Hippodrome, lieu réputé pour recevoir des événements tantôt mondains, tantôt populaires ; mais aussi parce que dès qu’un événement sportif est organisé à Lambersart, il n’est pas loin : et cet homme s’appelle aussi Jean Baratte. Dans la presse des années 1920 et 1930, on trouve ainsi régulièrement son dans les pages sportives de la presse régionale. Sa passion première est le rugby : il est d’ailleurs un des meilleurs éléments du « quinze » de l’Iris-Club de Lambersart. Cela lui vaut une sympathique réputation, d’autant que son commerce, situé entre l’hippodrome de Lambersart, le terrain de l’avenue de Dunkerque, et le terrain de l’Iris, est au cœur d’un espace sportif d’où démarrent de nombreuses épreuves. Ainsi, en janvier 1927, le Grand Echo indique que le coup d’envoi championnat du Nord de cross cyclo-pédestre est donné le 27 à 9 heures, « avenue de l’hippodrome, à hauteur de « la laiterie », tenue par le sportif si connu M. Jean Baratte » (31 janvier).
Mais on le sait également président actif du Vélo-Club Lillois à partir de l’année 1926 (Le Grand Echo du Nord, 16 décembre 1925). Jean Baratte père est ainsi impliqué dans l’organisation d’épreuves cyclistes, comme en 1927, où il organise la course de vitesse de l’« omnium interclubs », qui consiste en un « match de vitesse » sur l’avenue Pasteur à Lambersart (entre la Laiterie et l’Hippodrome). À cette occasion, on peut encore lire dans le Grand Echo la sympathie que suscite Jean Baratte, qualifié de « sympathique rugbyman de l’Iris Club » (23 juillet). L’année suivante, il profite du passage du tour de France cycliste à Lambersart pour faire partie de l’organisation de la sécurité qui permet de « transformer le carrefour de l’avenue de l’hippodrome en une cité en réduction pimpante et ordonnée » (Le Grand Echo, 14 juillet 1929).
On lui connaît une troisième passion : la moto. Jean Baratte est en effet membre du « Moto Sporting Club ». À ce tire, il est aussi l’organisateur d’événements, comme le cross moto pédestre du 10 mars 1929, pour lequel le Grand Echo souligne que tout renseignement est à prendre auprès de lui (22 févier 1929). En tant que membre de ce club, il fait aussi partie de la délégation qui remet à une association de « gueules cassées » un chèque pris sur les bénéfices d’une compétition sportive qu’il a contribué à mettre en place (12 juillet 1928). Le 2 août 1931, il est président du comité d’organisation de courses motocyclistes sur prairie, sur le terrain de l’Iris Club Lillois, avenue de l’hippodrome.
Le Grand Echo, 30 juillet 1931
En 1933, il est l’« âme et cheville ouvrière » (3 juillet 1933) d’une journée de « dirt track » (course de motos sur piste en terre), sur le terrain du Colysée.
Mais Jean Baratte n’est pas qu’organisateur : en tant que motard, il remporte en avril 1929, le même jour qu’un nouveau titre de champion du Nord pour l’OL, le « rallye-ballon du printemps ».
Sur sa moto de marque Terrot, il remporte une course entre Lille et le bassin minier lensois dans laquelle concourraient « vingt autos de toutes marques et une demi-douzaine de motos » (22 avril 1929).
Jean Baratte est donc aussi évoqué comme « champion motocycliste bien connu » (18 juillet 1930), cette fois à l’occasion d’un fait divers : sa tante de 60 ans, qui vit aussi à La Laiterie, est renversée par une voiture, devant la guinguette.
Sur sa moto, Jean Baratte est régulièrement chargé de s’occuper des « pédards1 » qui pourraient gêner les courses cyclistes. Ainsi, dans le Grand Echo du 28 juillet 1929, on peut lire que « notre ami Jean Baratte sera le seul motocycliste officiel du 16e circuit minier. Nous savons comment M. Baratte accomplit la tâche délicate qui consiste à avertir les usagers de la route du passage de la course, et à assurer les dégagements de la route. Quant à convaincre les pédards du dangers qu’il font courir à eux-mêmes et aux coureurs. Jean baratte a le doigté voulu pour parvenir à ses fins en ne recourant aux moyens extrêmes que lorsqu’il y est absolument obligé » : il fait de même lors du 8e Paris/Lille cycliste en mai 1930 avec sa « fidèle Terrot » (12 mai)
Enfin, Jean Baratte est parfois arbitre de football (comme lors de Ronchin-Thumesnil/Ennevelin en mars 1932) et s’implique dans les épreuves d’athlétisme : le 4 mai 1935, le Grand Echo fournit les indications d’itinéraire du « critérium des Italiens » entre Lille et Cassel, sur les conseils de Jean Baratte, parti en repérage sur sa moto. La Croix du Nord signale dès juillet 1934 qu’il est président du jury des annuels championnats d’athlétisme de l’Union de Flandre, qui se déroulent à Lambersart.
Voilà donc pourquoi, avant même les exploits footballistiques du fils, le nom de Jean Baratte est familier aux sportifs nordistes. Les multiples engagements sportifs du père ont même conduit à la création de la « coupe Jean Baratte » à partir de 1931 : à l’occasion de l’annuelle « coupe Bélière », une épreuve d’athlétisme, elle récompense certaines catégories « Junior ». Et à partir de 1934, le « challenge Jean Baratte », en football, met aux prises des équipes de jeunes de la région.
Au niveau de la diversité des activités, Jean Baratte fils a donc de qui tenir ! C’est en 1935 qu’on retrouve sa trace dans la presse : en effet, dans l’édition du 25 juin, le Grand Echo nous informe de l’obtention de son Certificat d’Études Primaires. Qu’en est-il côté sportif ? Dans un portrait que lui consacre la France Socialiste le 3 novembre 1943, on comprend que Jeannot est voué à faire du sport : « le fait de naître aux portes d’un stade ne peut que vous prédisposer à le fréquenter un jour. Et ce fut vers celui de l’Iris Club Lambersart que Jean Baratte, dès qu’il put déjouer la surveillance de sa mère, fit sa première escapade ». « Il ferait un excellent demi de mêlée » disait de lui son père. Et en effet, le journal souligne malicieusement que « le petit Jean passait son temps à se faufiler au travers des palissades mal ajustées du stade, ou au travers des jambes des clients dans la salle bruyante de l’estaminet paternel ». Mais l’enfant, dès qu’il put se servir habilement de ses mains, ne manifeste aucun intérêt pour le ballon ovale : il opte pour le football.
« C’est un manchot ton fils, peuchère ! Ironisa un coéquipier de Baratte père, un méridional qui ne comprenait pas qu’on puisse jouer autrement qu’avec les mains, voire avec les poings », rapporte le journal. Mais l’enfant montre aussi un intérêt pour le tennis et « fait des balles » contre un mur, avec une raquette bien trop lourde pour lui : « et un jour, sur l’unique court de l’ICL, les modestes tennismen du club s’aperçurent avec stupeur que le « manchot » possédait un redoutable coup droit et un honnête revers. Admis sur le cours, Jean Baratte ne tarda pas à y mystifier tout le monde, jeunes et moins jeunes, et s’achemina de victoires en victoires vers le titre de champion du Nord junior ».Avec l’équipe des « Jeunes du Nord » (Football) pour un match contre les « Jeunes du Sud » Le Miroir des Sports, 22 février 1942
Parallèlement, Jean signe ses premiers succès footballistiques : avec l’Iris, il enlève le championnat du Nord des Minimes, puis des Juniors. Si bien que lorsque les Dogues de l’OL se rattachent au petit Iris, ils trouvent en ce jeune homme une graine de champion. Dès la saison 1941/1942, il s’impose comme avant-centre de l’OICL, et arrive avec les « dogues irisés » jusqu’en finale de la zone interdite, où les Lillois s’inclinent contre Lens.
Les Sports du Nord, 21 mars 1942, à la veille de la finale Lille/Lens
Durant l’été 1942, tout en préparant sa saison de footballeur à l’OICL, Jean Baratte devient champion des Flandres de tennis ! Présenté par M. Brun directeur sportif de l’OICL, comme « le plus talentueux [des amateurs de l'OICL] » (La France Socialiste, 15 août 1942), la diversité de ses activités lui vaut le surnom de « touche-à-tout » : « ils se distingue aussi bien sur les terrains de football que sur les courts de tennis souligne M. Brun. Ne vient-il pas d’enlever la finale du championnat des Flandres Juniors, en battant Lecomte par 6-2, 6-4 ? »
La France Socialiste, 15 août 1942
Les Sports du Nord, 15 août 1942
Si bien qu’à l’automne 1942, dans la presse nationale, Jean baratte est plutôt présenté comme un tennisman qui, en plus, joue au football.
Le Miroir des Sports, 26 octobre 1942
Au cours de la saison 1942-1943, Jean Baratte fait de nouveau la preuve de sa polyvalence, mais au sein du même sport. En effet, en mai 1943, l’absence du titulaire habituel dans les buts, Julien Da Rui, l’amène à occuper la cage de l’OICL lors du derby OICL/SCF en mai 1943 (on en a parlé ici) ! L’épisode de la coupe de France 1952 est plus connu : en demi-finale, en raison de la blessure de Val, l’habituel titulaire, et du manque de confiance placé en D’Archangelo, le remplaçant, Jean Baratte avait été titularisé dans les buts du LOSC. Cette configuration s’est présentée une dernière fois en mars 1956, alors que Jean Baratte est désormais joueur du CO Roubaix-Tourcoing en D2 : on le retrouve dans le but lors d’un déplacement au Havre.
À l’aube de la saison 1943-1944, celle des équipes fédérales, la France Socialiste nous apprend que l’entraîneur de l’équipe de Lille-Flandres, Demeillez, a placé Baratte sur l’aile : « là aussi, en quelques matches, le jeune prodige de Lambersart s’est hissé sans peine à la hauteur des meilleurs « intérieurs » du moment » (3 novembre 1943). La même édition du journal relate que Jean fréquente toujours le petit stade de ses premiers pas, et qu’il participe régulièrement aux entraînements des hockeyeurs… et des rugbymen de l’OICL ! « Cette préparation physique fait de Baratte un véritable marathonien (…) M. Baratte peut se consoler d’avoir perdu un demi de mêlée en découvrant un grand inter ».
Ses performances lors de la saison 1942/1943 avec l’OICL, confirmées en 1943/1944 avec l’équipe fédérale Lille-Flandres, ancrent Jean Baratte dans une discipline principale : le football. Pour le plus grand bonheur de Lille.
Note :
1 « En 1898, le mot chauffard entrait dans notre langue. Composé à l’aide de chauffeur et du suffixe péjoratif -ard, il est, hélas, toujours en usage, l’espèce des conducteurs imprudents et dangereux ne semblant pas en voie de disparition. Quelques années plus tard, sur ce modèle, on créait à partir de pédaler le nom pédard qui désignait, comme l’indique fort bien le dictionnaire Larousse de 1923, à la page 818, un « cycliste grossier, maladroit, dangereux pour les autres » (https://www.academie-francaise.fr/va-donc-eh-pedard)
Posté le 22 novembre 2022 - par dbclosc
Quand Daniel Leclercq envisageait de rejoindre le LOSC
Peu après son éviction du RCL à l’automne 1999, Daniel Leclercq a fait de l’oeil au LOSC, qui caracolait alors en tête de la D2. Une offre de services restée sans suite, mais qui illustrait le renouveau du club.
30 septembre 1999 : grâce à Nouma et Delporte, Lens bat Tel-Aviv 2-1 au stade Bollaert. Après le nul de l’aller (2-2), le Racing se qualifie pour le prochain tour de la coupe UEFA. Mais ce sera sans son entraîneur qui, à l’issue du match, est évincé, à moins qu’il n’ait donné sa démission – ce point n’ayant jamais été très clair. Quoi qu’il en soit, il est toujours surprenant de partir après une victoire (mais le LOSC n’est pas en reste car c’est également arrivé à Bruno Metsu en 1993) et, surtout, après avoir donné à Lens durant son mandat deux titres – les mauvaises langues aiment rappeler que ce sont les seuls, oubliant que le Racing a remporté trois magnifiques coupes Drago (1959, 1960, 1965), une prestigieuse coupe de l’Amitié (1962), et a vu son piston droit sélectionné en équipe de France (2022).
L’annonce du décès de Daniel Leclercq, en novembre 2019, a légitimement suscité une grande émotion à Lens, mais aussi dans toute la région, car Leclercq est également passé avec réussite par Valenciennes en tant que joueur (1961-1970 ; 1983-1984) et entraîneur (2003-2005). Mais à Lille aussi, les hommages ont été nombreux : le club s’était même fendu d’un tweet, largement relayé et commenté positivement par des supporters du LOSC.
Capture d’écran Twitter
Cela étant, Leclercq n’a pas attendu de mourir pour susciter une quasi-unanimité autour de lui, à Lille, alors même que son statut de faiseur de titres à Lens pourrait susciter de la défiance : certes, quand Lens a été champion (1998), le LOSC n’évoluait pas en D1, et peut-être peut-on considérer que ce titre a été vécu de loin par les Lillois. Mais plus probablement, sa carrière fait de lui un homme respecté, tant il a marqué le football par ses qualités de joueur, en inventant une sorte de poste mixant libéro et meneur de jeu où sa qualité de passe a fait merveille, et en prônant durant sa vie professionnelle des valeurs telles que le travail et l’humilité, ce qui semble coïncider avec l’individu qu’il était, et qui colle aussi aux fameuses « valeurs de la région » que Lillois et Lensois partagent largement.
La meilleure patte gauche du Pas-de-Calais. Extrait d’un derby en février 1981
Daniel Leclercq aurait pu marquer davantage les Lillois s’il avait rejoint le LOSC ; précisément, il en a été question au cours de cette saison 1999/2000. Désormais libre, il profite de ce moment de calme, tout en exposant ses projets dans une interview donnée à la Voix du Nord (VDN) en janvier 2000. Il rappelle les principes auxquels il est attaché (« famille », « amis », « professionnalisme », « passion », « maillot », « région », « public »). Et il n’hésite pas à montrer son intérêt pour les Dogues, en particulier pour leur entraîneur, Vahid Halilhodzic.
La Voix du Nord, 14 janvier 2000
Pour le moment, Daniel Leclercq a retrouvé une activité de consultant, pour TPS puis pour Canal +. Et il affirme que si son premier match dans cette nouvelle activité était Lille/Sochaux, ce n’est sûrement pas par hasard : c’est par « fibre régionale » soutient la VDN. Il est vrai que Daniel Leclercq, quel que soit le club dans lequel il était, a toujours manifesté de l’intérêt pour les clubs régionaux. À Lille, on se rappelle qu’il était souvent présent à Grimonprez-Jooris. Et on se rappelle aussi qu’il était présent lors d’un match amical d’avant-saison à Tourcoing entre le LOSC et Anderlecht (2-3), à l’issue duquel il avait affirmé toute sa sympathie pour les Dogues, espérant qu’ils rejoignent la D1 au plus vite. Leclercq affirme qu’après Lille/Sochaux, « tous les joueurs lillois étaient venus me remercier pour le mot d’encouragement que je leur avais envoyé en début de saison ».
« Je ne manque pas de propositions, les plus sérieuses, actuellement, venant de Dubaï, de Fenerbahçe, ou de l’équipe nationale d’Algérie. Cependant, je ne suis pas pressé ». Surtout, Leclercq est plutôt attiré par le LOSC qui, depuis l’arrivée de Vahid Halilhodzic en septembre 1998, a retrouvé beaucoup de crédibilité : sur leur lancée d’une saison 98/99 terminée en trombe où la montée s’est dérobée à la différence de buts, les Dogues cartonnent et devraient cette fois retrouver l’élite. Au moment de l’interview (23 journées jouées en D2), le LOSC a 16 points d’avance sur le 4e. De quoi avoir envie de découvrir un nouveau club du Nord ? « Lille, c’est le seul club nordiste que je n’ai pas encore fait (…) J’ai noué des contacts sérieux avec Vahid, qui est très sensible et attaché à des valeurs. C’est tout simplement un homme du Nord ! Sachant tout ce qui l’attend en D1, je me verrai bien lui donner un petit coup de main ».
Document rarissime : Daniel Leclercq 1) dans les couloirs de Grimonprez-Jooris 2) qui sourit
L’offre de services peut sembler étonnante : d’abord parce qu’elle ne semble manifestement pas motivée par des questions financières, ce qui est original dans le milieu ; ensuite parce que Leclercq reste malgré tout étiqueté « lensois » et, même s’il a la côte, c’est une autre chose de le voir intégrer le LOSC (aussi bien pour les supporters des LOSC que des Sang & Or). Comme on a dû le dire à l’époque au « Druide » : « rejoindre le LOSC, c’est Astérix et périls » ; et enfin parce qu’a priori, le LOSC n’est pas demandeur et a trouvé une formule qui, sportivement, fonctionne enfin. Certes, le processus de privatisation est lancé depuis quelques semaines, et il amènera probablement son lot de changements. Mais quand bien même Daniel Leclercq devrait intégrer le club, son palmarès et son aura peuvent-ils l’amener ailleurs qu’à une place de n°1 ? Peut-il cohabiter avec Halilhodzic ? Halilhodzic peut-il cohabiter avec qui que ce soit ?
Photo Jean Chaumont/Voix du Nord
Daniel Leclercq ne rejoindra jamais le LOSC, et n’y exercera aucune fonction, officielle en tout cas. On peut toutefois penser que l’amitié nouée avec Halilhodzic a pu servir de conseil officieux pour Vahid.
À cette époque, l’important pour le LOSC est bien de constater qu’il est de nouveau attractif, et si des hommes de valeur semblent prêts à lui prêter main-forte, c’est probablement qu’il est sur la bonne voie.
Posté le 16 novembre 2022 - par dbclosc
Mersey beaucoup Divock ! Origi, l’improbable idole d’Anfield Road
Huit ans après sa signature et sept ans après son arrivée de retour de prêt à Liverpool, Divock Origi a quitté les bords de la Mersey pour rejoindre le Milan AC. Bien qu’il n’ait jamais été un titulaire indiscutable chez les Reds, que son temps de jeu était même famélique depuis 2018, il les quitte en laissant aux supporters un souvenir impérissable. En cause, sa capacité, déjà montrée à Lille et en sélection nationale, à réaliser des coups d’éclat au moment où il le fallait.
Le 2 février 2013, Roooonny Roodelin cède sa place à un jeune joueur de 17 ans sobrement intitulé Divock Origi, lequel fait là ses débuts avec l’équipe première du LOSC. A vingt minutes de la fin, les Lillois sont en fâcheuse posture, puisqu’ils sont menés à domicile par 1 à 0 contre Troyes, 18ème avant la rencontre. Cinq minutes plus tard, Origi reprend de la tête un centre de Dimitri Payet et permet aux Lillois d’égaliser. Des débuts en fanfare pour le jeune Belge. Le score ne bougera plus. Il aura en tout cas fallu très peu de temps à Divock pour se faire remarquer.
Le nom d’Origi n’est alors pas tout à fait inconnu du monde du football. Son père Mike (Origi donc) est ainsi un ancien international ayant compilé pas moins de 120 sélections avec l’équipe du Kenya. Il a par ailleurs passé 14 saisons en professionnel en Belgique, y disputant 434 rencontres pour 105 buts marqués. Son prénom, ne nous en cachons pas, nous paraît en revanche alors peu familier. Et pour cause : il a été inventé par ses parents (1). Toujours est-il que le fils de Mike commence à se faire un prénom et qu’il prend une importance croissante dans le 8-1-1 de René Girard, disputant 35 matches toutes compétitions confondues en 2013/2014 (15 comme titulaire) pour 6 buts inscrits, dont 5 après la trêve hivernale.
Ces performances suffisent à faire de lui l’invité surprise de la sélection belge à la Coupe du Monde 2014 au Brésil. A tout juste 19 ans et 7 buts inscrits en pro, Origi bénéficie du forfait de Christian Benteke, le sélectionneur Marc Wilmots considérant que les deux joueurs présentent un profil comparable. Ses performances dépassent les espérances, Divock marquant notamment le but de la victoire contre la Russie qualifiant les Diables rouges pour les huitièmes de finale. Origi apparaît comme une valeur montante du football et Liverpool, qui observait déjà le Lillois depuis quelques mois, le fait signer en juillet contre un montant de 12,6 millions d’euros. Il est immédiatement prêté à Lille.
Après un début de carrière presque idéal, Divock Origi montre les premiers signes de son irrégularité. S’il marque son 4ème but de la saison contre Wolfsbourg le 2 octobre 2014, il reste ensuite muet 23 matches de suite toutes compétitions confondues, et ce jusqu’au 15 mars 2015. Ce jour-là, Divock ne se contente pas de débloquer son compteur mais inscrit carrément un hat-trick (38è, 63è, 72è), doublant son total de buts inscrits en championnat en 34 minutes. Le match est assez symbolique de la carrière de Divock, marquée par des coups d’éclat comme celui-ci et une relative monotonie le plus souvent.
Toujours présents dans les grands rendez-vous des Reds
Origi rejoint alors Liverpool à l’été 2015, découvrant le troisième maillot rouge de sa carrière après ceux du LOSC et des Diables. Il rejoint les Reds en même temps que Christian Benteke qu’il avait suppléé en sélection un an plus tôt et qui est son principal concurrent à la pointe de l’attaque. Il n’y est pas titulaire pour sa première saison et y est même quasiment ignoré par Brendan Rodgers, Origi se contentant d’une seule entrée en jeu en Premier League jusqu’au licenciement du technicien anglais le 4 octobre. Les cartes sont rebattues avec l’arrivée de Jurgen Klopp et Divock brille à l’occasion, claquant un triplé en quart de finale de League Cup sur le terrain de Southampton (1-6) ou sonnant la révolte lors d’un quart de finale d’Europa League contre Dortmund très mal embarqué (0-2 après 10 minutes, 1-1 à l’aller) mais finalement remporté (4-3). Les circonstances du derby remporté (4-0) contre Everton en avril contribuent également à alimenter son aura naissante auprès des supporters : il ouvre d’abord le score peu avant la mi-temps, puis sort blessé en début de seconde période suite à un tacle assassin de Ramiro Funes Mori, ce sacrifice involontaire entraînant l’expulsion de l’Argentin. Origi termine la saison avec 10 buts.
En 2016/2017, Origi débute encore comme remplaçant avant de devenir brièvement titulaire à la faveur de ses belles performances. Entre le 26 novembre et le 28 janvier, Origi marque ainsi 6 fois en 16 rencontres, dont 10 comme titulaire. Il reprendra pourtant bien vite sa place sur le banc des remplaçants mais trouvera toujours le moyen de se rappeler aux bons souvenirs des supporters. Ainsi, alors qu’il reste sur deux mois sans avoir marqué, Divock choisit le match du derby contre Everton pour retrouver le chemin des filets. Le 1er avril, il ne lui faut que 3 minutes après son entrée en jeu pour marquer le but du break en faveur des Reds (3-1). Cette performance lui vaudra de terminer les deux derniers mois de la saison comme titulaire. Ce seront les derniers sous ce statut.
Depuis cette saison 2016/2017, le temps de jeu de Divock Origi n’a cessé de décroître. Prêté à Wolfsburg la saison suivante, il passe ensuite 4 saisons à jouer les deuxièmes ou troisièmes choix. Origi dispute ainsi 49 % du temps de jeu toutes compétitions confondues de Liverpool en 2016/2017, puis 14 %, 32 %, 11 % et 11 % entre 2018 et 2022. Son temps de jeu en Premier League est particulièrement faible : il n’est ainsi présent que 11 %, 21 %, 5 % et 3 % du temps de jeu de cette compétition sur les quatre dernières saisons, pour une moyenne de 9,9 %.
Et pourtant, si Origi connaît un temps de jeu particulièrement faible à partir de 2018, c’est sur cette période qu’il acquière définitivement son statut de chouchou d’Anfield Road. En décembre 2018, il confirme d’abord que le derby lui convient particulièrement bien. Avant ce match, l’international belge avait dû se contenter de 11 minutes de jeu contre l’Etoile Rouge de Belgrade en tout et pour tout. un supporter annonce même qu’il se fera tatouer « Divock » si celui-ci marque contre Everton (2). Klopp le fait entrer à la place de Firmino à la 84è (Origi, pas le supporter) contre Everton alors que le score et nul et vierge. Au bout du temps additionnel (90è+6), Divock est à l’affût sur un ballon mal maîtrisé par Pickford, marquant dans le but vide et faisant chavirer de bonheur Anfield. Le supporter respectera son engagement.
- Il est tatoué ce supporter ?
- Bé ouais qu’il est à moué !
De joueur populaire, Origi devient carrément un héros en fin de saison, d’abord lors de la remontada du 7 mai 2019 contre le Barça en demi-finale de Ligue des champions. Battus 3-0 au Camp Nou, les Liverpuldiens se remettent dans le bon sens dès la 7ème minute grâce à l’ouverture du score. Revenant à la hauteur de leur adversaire à la faveur d’un doublé de Wijnaldum, les Reds se qualifient finalement grâce à leur avant-centre du jour qui inscrit également son doublé (79è). Trois semaines plus tard en finale, Origi marque le but du break en fin de match (2-0, 87è) assurant le titre européen aux siens ! Avec 7 buts en 693 minutes, il finit la saison avec un ratio d’un buts toutes les 96 minutes bien meilleur que ceux de Salah (1/161 minutes), Mané (1/165) et Firmino (1/213), et, comme on l’a vu, pas contre des équipes en bois.
Les supporters de Liverpool après le but d’Origi en finale de LDC
Bien qu’il joue très peu, Origi continuera à faire ce qu’il faut pour entretenir son statut d’improbable idole d’Anfield Road. Le 4 décembre 2018, un an et 2 jours après son but décisif contre Everton, Origi récidive, inscrivant même un doublé (5-2). Fin 2021, Origi montre encore qu’il est un vrai supersub : entré à 20 minutes du terme d’un déplacement sur le terrain de Wolverhampton, il donne la victoire aux siens au bout du suspense (0-1, 90è+4). A l’issue du match, Klopp déclare qu’ « Origi, la légende […] est un joueur de football incroyable […]. C’est un but que nous avons souvent vu à l’entraînement. J’espère qu’il trouvera un manager qui le fera plus jouer que moi » (3). Après le derby contre Everton an avril, Klopp est encore dithyrambique avec son avant-centre. «Il a été impliqué sur les deux buts. Tout ce qu’on a fait en deuxième mi-temps n’aurait pas eu lieu sans Divock. Le groupe vit grâce aux garçons qui ne jouent pas toujours, ce sont les joueurs les plus forts. C’est une légende sur et en dehors du terrain. C’est un footballeur fantastique pour moi, c’est un attaquant de classe mondiale, notre meilleur finisseur. Il l’a toujours été et tout le monde vous dira la même chose. » (4) L’hommage de l’entraîneur allemand contraste ainsi avec le peu de temps qu’il lui accorde : pour sa dernière saison à Liverpool joue en effet en tout et pour tout … 126 minutes en Premier League, pour 3 buts inscrits !
Origi à Milan, j’aurais dit moins
Cet été Divock Origi a enfin quitté Liverpool où il aura marqué 41 buts, soit un total relativement modeste sur 6 saisons. Bien entendu, il ne pouvait que rejoindre un club dont le maillot comporte du rouge. Ce sera finalement le maillot rossonero de l’ambitieux Milan AC, vainqueur du dernier scudetto. Il vient ainsi compléter une attaque composée des « vieux » Olivier Giroud (35 ans) et Zlatan Ibrahimovic (40 ans), de l’ancien dogue Rafael Leao et d’Ante Rebic.
C’est d’abord avec Giroud et Ibrahimovic que Divock est en concurrence (5). Sur le papier, deux concurrents de ce calibre pour un seul poste d’avant-centre lui fait risquer de prolonger ses habitudes à tâter du banc. Concrètement, Ibrahimovic est blessé jusqu’au début de l’année prochaine et il n’est de surcroît pas éternel. En outre, le Milan à AC doit disputer pas moins de 21 rencontres en 13 semaines jusqu’au 13 novembre, dernière date du calendrier de Serie A jusqu’à la trêve qui précède la Coupe du Monde. Dans cette configuration, Origi n’est pas de trop et aura vraisemblablement un temps de jeu conséquent.
A 27 ans, l’avant-centre belge a peut-être enfin l’occasion de quitter son statut d’éternel remplaçant et de s’imposer dans une équipe qui a vocation à disputer la Ligue des Champions avec régularité.C’est en parallèle peut-être également une opportunité pour relancer une carrière en sélection qui semble au point mort et qu’on ne pouvait qu’imaginer plus belle au regard de la précocité de ses débuts et de ses performances d’alors : le 12 novembre, cela fera 8 ans qu’il a inscrit son dernier but avec les Diables Rouges. Sauf, bien sûr, s’il faisait partie des sélectionnés surprise du rassemblement de septembre et qu’il lui prenait d’en mettre un aux Gallois ou aux Néerlandais.
FC Notes :
(1) https://www.dhnet.be/sports/football/diablesrouges/2014/06/23/mike-origi-il-a-ete-le-premier-divock-au-monde-NKOCTQ4PEFA35CMHVXXLN62PNM/ Notons que le site namekun.com nous en dit un peu plus sur la personnalité des Divock. On n’a pas tout compris, peut-être que vous pourrez nous éclairer : « Profondément indépendante, vive, rapide et entreprenant la nature. Frank et diriger vous ne voulez pas prendrez des détours et ne supporte pas l’hypocrisie »
(5) Rebic joue également avant-centre, mais il joue très souvent ailier gauche.