Archive pour la catégorie ‘Classements oubliés’
Posté le 11 février 2024 - par dbclosc
Un sacré coup de pompe. Quand le LOSC d’Arribas craquait à l’heure de jeu (1978-1982)
Nous avons déjà parlé du LOSC de José Arribas. Récemment, ça avait été pour rappeler la parenté entre le LOSC de la saison dernière avec celui de José de la saison 1978/1979. Il y a plus longtemps, on avait évoqué que, sous la direction de l’entraîneur d’origine espagnole, les Dogues commençaient bien mieux leurs saisons qu’ils le les terminaient. On va parler aujourd’hui d’une autre réalité du club lillois à l’époque : pendant les quatre années du LOSC en D1 avec Arribas (1978-1982), le LOSC se montrait solide jusqu’à l’heure de jeu puis connaissait dix minutes difficiles où il craquait souvent.
Pour son retour en D1 en 1978, le LOSC reçoit le Nancy de Michel Platini à Grimonprez-Jooris. Si les Lillois ouvrent rapidement le score par Pleimelding, ça se gâte rapidement, Rouyer (18è, 28è) puis Rubio (34è) donnant deux buts d’avance aux Nancéens. Ce sont pourtant les Lillois qui vont l’emporter (4-3), réduisant d’abord l’écart par Simon (43è), puis égalisant et repassant devant dans le dernier quart d’heure grâce à des buts de Dos Santos (78è) puis encore de Simon (89è). Des débuts en trompe l’œil, le LOSC d’Arribas montrant dans la durée bien davantage de difficultés à finir ses matchs qu’à les commencer.
« Heeey !!! Salut !!! Ca va ??? Ca faisait longtemps !!! » Pierre Pleimelding visiblement ravi de retrouver la D1 avec le LOSC
Comme on le voit sur le graphique suivant, à l’exception des 10 premières minutes, le LOSC marque davantage qu’il n’encaisse pour chaque tranche de dix minutes jusqu’à l’heure de jeu au cours de la saison 1978/1979. Les Lillois craquent alors particulièrement souvent entre la 61è et la 70ème minute de jeu, craquant défensivement puisqu’ils encaissent 16 buts, soit autant que lors de la demi-heure précédente.
En calculant le nombre de points à partir des scores à l’heure de jeu, le LOSC aurait obtenu 44 points, soit 4 de plus que ce qu’il a en définitive obtenu. Les Lillois ont en outre perdu un point après l’heure de jeu contre Metz et Monaco, deux équipes qui ont terminé peu devant le LOSC, justement avec 44 points. Avec ce point en moins, les Messins et les Monégasques auraient terminé à 43 points : c’est dire que, au regard de ses performances sur la première heure de jeu, les Dogues étaient proches de cette 4ème place qualificative pour l’Europe. Ultime preuve, s’il en fallait encore, du Grand Complot Contre le LOSC ©, les règles font durer les matchs 90 minutes alors que l’évidence voudrait qu’ils en durent 60 (déjà parce qu’on est vachement fatigués après, moi en tout cas (1)).
José Arribas, impuissant mais pas résigné face au Grand Complot Contre le LOSC ©
La saison suivante débute différemment, Lille perdant certes un point après l’heure de jeu contre Strasbourg (6ème journée), mais en gagnant également contre Nice (7ème journée) et Bordeaux (8ème journée). Les choses semblent rentrer dans l’ordre du complot les deux journées suivantes, Lille perdant d’abord le point du match nul en fin de match à Lyon (2-2 puis 4-2), puis se contentant du nul contre Marseille, Zambelli égalisant à un quart d’heure du terme (1-1). Lille semble toutefois trouver le remède contre Paris quatre journée plus tard : menés 2-1, à l’heure de jeu, les Dogues renversent leur adversaire grâce à des buts de Delemer (65è), Henry (78è) et Cabral (88è) ! Après 20 journées, Lille a gagné un point de plus après l’heure de jeu qu’il n’en a perdu. Les Dogues auraient-ils trouvé la clé contre le complot ?
Las, la suite va toutefois montrer que les Lillois sont davantage en difficulté en fin de match, le LOSC perdant 4 nouveaux points après l’heure de jeu pour n’en gagner qu’un seul sur la même période. Comme on le voit sur le graphique suivant, le LOSC présente une différence de buts positive lors de la première heure de jeu (34 pour et 30 contre), puis nettement négative lors de la dernière demi-heure (11 pour 19 contre).
Si c’était défensivement que le LOSC avait craqué après l’heure de jeu en 1978/1979, c’est surtout offensivement qu’il se retrouve en difficulté en 1979/1980. Rapporté à temps égal, il marque ainsi 35 % de buts en moins après l’heure de jeu. Il encaisse également un peu plus, mais dans des proportions plus modestes (20 % de plus). Une statistique particulièrement remarquable tient à la différence existante entre les deux saisons dans la tranche de 10 minutes suivant immédiatement l’heure de jeu : en 1978/1979, Lille y marque 8 buts pour 16 encaissés (24 au total), la saison suivante, elle n’en encaisse que 4, mais n’en marque … qu’un seul ! Le point commun à ces deux saisons est que le passage de l’heure de jeu est concomitant d’une baisse de performance très nette des Dogues, mais elles se différencient très fortement par la forme prise par cette chute de performance.
Une hypothèse est que ce que l’on observe en 1979/1980 est le produit de l’observation de ce qui s’était passé la saison précédente. Le LOSC de l’époque était ainsi réputé pour la qualité de son jeu et sa volonté d’aller toujours de l’avant, parfois au risque de laisser des espaces derrière. Tout en voulant rester fidèle à sa vision du jeu, peut-être Arribas a-t-il voulu mettre de l’eau dans Thauvin : constatant que les Lillois subissaient une nette baisse de régime à l’heure de jeu, les membres du staff auraient conseillé aux joueurs de se montrer particulièrement prudents à ce stade de la partie (qui a lieu au stade), là où les Dogues avaient continué à jouer l’offensive malgré leurs difficultés physiques, avec le résultat que l’on sait. Sans enrayer le déclin observé à l’heure de jeu, le fait de fermer le jeu à ce moment de la partie limite certes les chances de marquer, mais permet surtout de considérablement limiter la casse derrière.
1980/1981 : un « coup de pompe » qui aurait pu coûter le maintien
Cette fâcheuse tendance des Lillois d’Arribas à galérer en fin de match aurait pu coûter bien cher au club au cours de la saison 1980/1981. Cette saison là, le LOSC termine à la 17ème place tout juste devant Tours qui est barragiste. Qu’entendons-nous par « tout juste » ? Vraiment tout juste en fait, Lille obtenant le même nombre de points que les Tourangeaux (31), encaissant exactement autant de buts (71) et marquant … 1 but de plus en tout et pour tout !
Cette tendance au « coup de pompe » à l’heure de jeu n’a en effet pas été contredite lors de la troisième saison dans l’élite du LOSC d’Arribas. Comme on le voit sur le graphique suivant, les Lillois ont très vite perdu des points après l’heure de jeu, le premier dès la troisième journée. Dès la 7ème journée, ils en étaient déjà à 3 points de perdus.
Lille a ensuite réussi à stabiliser et même légèrement réduire ces points perdus dans la dernière demi-heure, le LOSC n’ayant plus perdu « que » deux points sur cette période au soir de la 23ème journée de championnat. Lille retombe ensuite dans ses travers, finissant avec 5 points de perdus dans la dernière demi-heure, ce qui lui fait vivre une fin de saison éprouvante. C’est encore au cours de la tranche entre la 61ème et la 70ème que les Lillois se retrouvent en plus grande difficulté, encaissant durant cette période exactement deux fois plus fréquemment que lors de la première heure de jeu.
Vieux motard que j’aimais : Arribas trouve la solution en 1981/1982
A-t-on observé la même tendance au cours de la saison 1981/1982, la dernière de José Arribas sur le banc du LOSC ? Le début de saison pourrait laisser penser que oui. Dès la 3ème journée, Lille s’incline en fin de match sur un but de Rubio (85è) alors qu’il tenait le match nul. Contre Bordeaux lors de la 8ème journée, les Lillois échouent à l’emporter, René « football champagne » Girard égalisant à moins d’un quart d’heure du terme, répondant au but d’Henry. Lors de la 11me journée, c’est carrément deux points que les Dogues perdent dans la dernière demi-heure, Milla égalisant d’abord (61è) avant que Ihily ne donne l’avantage aux Bastiais (76è, 3-2).
Et pourtant, cette saison-là, le nombre de points théoriquement obtenu après 60 minutes (34) est strictement identique à celui réellement obtenu au final. Contre Metz (16ème journée), Lille l’emporte grâce à un but de Engin « Tony » Verel (65è). Rebelote deux journées plus tard contre Paris, Muslin donnant la victoire (2-1) aux siens grâce à un but inscrit à un quart d’heure du terme. Lille ne l’emporte pas contre Auxerre lors de la 20ème journée, mais récupère le match nul après l’égalisation de Péan (85è) qui répond à Szarmach (57è). Le scénario est très proche contre Nancy lors de la journée suivante, Rubio (décidément!) ouvrant le score peu avant de l’heure de jeu, Verel égalisant en fin de match (88è). Lille clôt là une période inédite sous le règne d’Arribas en D1, l’équipe prouvant qu’elle est aussi capable de très bien finir ses matchs, parvenant à gagner 4 points en fin de match en 6 rencontres seulement.
Se termine alors une période de 5 ans du LOSC sous le règne de José Arribas. Le LOSC n’a pas passé le cap qu’on aurait pu espérer après deux premières années presque parfaites, marquées d’abord par un titre de champion de D2 puis par une sixième place inespérée pour le retour dans l’élite française. Surtout, si le LOSC a réussi ces belles performances, c’est sans jamais renoncer à développer un jeu chatoyant et particulièrement plaisant pour le public, quitte à perdre parfois en efficacité. C’est sans doute aussi cette philosophie toujours tournée vers le jeu qui a contribué à expliquer les difficultés rencontrées en fin de match, là où d’autres entraîneurs se seraient montrés plus « pragmatiques ». Se rappeler cette époque et cette philosophie n’est pas inutile tant les logiques de rationalisation de la pratique du football tournée vers une logique de maximisation des performances a pris une place croissante. Certes, tout fan de foot souhaite voire son équipe l’emporter quand débute une rencontre, mais l’essentiel n’est jamais là. On a ensuite pu aimer des LOSC perdants, on a aimé le LOSC vainqueur de Vahid, non pas tant parce qu’il gagnait que parce que ses victoires se sont construites sur des valeurs en lesquelles on se reconnaissait. On a enfin pu trouver bien fade un LOSC pourtant gagnant, faute de se retrouver dans l’état d’esprit impulsé par les dirigeants. C’est déjà cette leçon que nous enseignait José Arribas.
FC Notes :
(1) Remarquons que l’auteur de ces lignes étant déjà crevé après l’échauffement, son argument n’est peut-être pas si solide que ça.
Posté le 6 juin 2023 - par dbclosc
Lille prend des points aux riches, les rend aux pauvres, mais retrouve quand-même l’Europe
Le LOSC finit donc la saison 2022-2023 à la cinquième place (67 points) de L1 après un match nul décevant contre Troyes, se faisant alors dépasser par Rennes (68 points). Lille conserve toutefois une place qualificative en compétition européenne (en l’occurrence en Conference League) grâce à la défaite de Monaco à domicile contre Toulouse (1-2), le club de la principauté échouant à la 6ème place. Lyon s’est donné les moyens de rêver grâce à sa belle fin de saison, mais termine finalement septième. Contre quels clubs s’est joué le classement final ?
La fin est cruelle pour le LOSC qui avait les cartes en main pour conserver sa quatrième place, une victoire à Troyes pouvant lui assurer. C’était bien parti, Bafodé Diakité ayant ouvert la marque en début de seconde période (52è, 0-1). C’était sans compter sans un ex qui nous en veut, en l’occurrence Rony Lopes qui égalisait pour Troyes (72è, 1-1). Il a pu alors être souligné que le LOSC a perdu des points évitables contre les « pauvres » lors de la phase retour. Avant Troyes, Lille n’avait pas réussi à s’imposer à Auxerre (1-1) et s’était incliné à Angers (0-1), ne battant parmi les relégués qu’Ajaccio (3-0). Sur l’ensemble de la saison, le LOSC a bien pris moins de points que ses principaux concurrents contre les cinq derniers au classement. C’est bien contre eux que Lille a perdu son duel contre Rennes, ne prenant que 21 points quand les Bretons en prenaient 26.
Tout l’écart contre ces équipes s’est construit sur la phase retour, Lille et Rennes prenant 13 points sur la phase aller. Si les Rennais maintiennent le rythme sur la phase retour (14 buts marqués, 2 encaissés), les Nordistes se contentent de 8 petits points (7 buts marqués, 5 encaissés).
Les quatre concurrents connaissent des performances comparables contre les équipes du troisième quart du championnat (classées entre la 11ème et la 15ème place), Lille faisant un tout petit mieux (23 points) que les trois autres (21 points chacun). C’est en revanche contre les équipes du second quart du classement (6ème à la 10ème place) que Lyon perd la lutte pour l’Europe, ne prenant que 5 points contre ces adversaires, soit 7 à 9 points de moins que ses adversaires (Lyon et Monaco, ne pouvant jouer contre eux-mêmes, n’ont joué que 8 matchs contre ces adversaires contre 10 pour Lille et Rennes).
Lille ne se distingue pas de Rennes et Monaco sur ce point, mais fait en revanche mieux qu’eux dans les confrontations contre le top 5 : c’est lors de ces matchs que Lille bat Monaco, prenant 4 points de plus malgré 2 matchs de moins et une moyenne presque double des Monégasques (1,38 contre 0,7). Lyon est en revanche performant contre les cinq premiers, prenant deux points de plus que Lille. A la moyenne, ce sont toutefois les Dogues qui sont devant, les Gones prenant 1,3 points en moyenne.
Comme ce fût le cas lors de la saison 1988/1989, le Robin des Bois lillois a donc pris des points « aux riches », dans l’optique de les rendre aux « pauvres ». A la différence de ce qui s’était passé il y a plus de trente ans, l’issue est plus heureuse pour le LOSC qui réussit tout de même à se qualifier en Coupe d’Europe.
Source: footmercato.net
La saison de Jonathan Bamba est à l’image de celle du LOSC : il claque régulièrement contre les équipes de haut de tableau (contre Paris à l’aller et au retour, contre Monaco et Marseille), mais il ne marque qu’une fois contre celles qui terminent dans la seconde partie du classement (contre Ajaccio).
Lyon, « champion » des confrontations avec ses concurrents directs
Si Lyon échoue à se qualifier en coupe d’Europe cette saison, ça n’est pourtant pas faute de s’être montré performants contre ses concurrents directs, les Gones remportant l’officieux mini-championnat les opposant. Les Lyonnais se sont montrés particulièrement efficaces à domicile, battant Rennes (3-1), Monaco (3-1), et même sa « bête noire » lilloise (1-0).
Classement des confrontations en L1 entre Lyon, Lille, Monaco et Rennes
Pts |
J. |
V. |
N. |
D. |
Bp |
Bc |
Dif. |
|
Lyon |
10 |
6 |
3 |
1 |
2 |
13 |
10 |
+3 |
Lille |
9 |
6 |
2 |
3 |
1 |
11 |
9 |
+2 |
Rennes |
8 |
6 |
2 |
2 |
2 |
9 |
10 |
-1 |
Monaco |
5 |
6 |
1 |
2 |
3 |
7 |
11 |
-4 |
Lille s’est également montré performant, ne s’inclinant qu’une fois lors de ces six confrontations. Monaco a en revanche craqué lors de ces matchs contre ses principaux concurrents, ne récoltant que 5 points, ne remportant qu’un match et s’inclinant lors de ses trois matchs à l’extérieur. Monaco a plus généralement péché contre les équipes du haut de tableau, présentant un bilan de 4 nuls, 5 défaites pour une seule victoire contre les équipes qui ont terminé devant lui. C’était le 11 février dernier, contre le futur champion de France parisien (3-1).
Posté le 21 mai 2023 - par dbclosc
Tableau noir : l’Olympique Lillois 1932/1933
Sollicités par le site Foot Universal, Damien Boone et Maxime Pousset, auteurs du livre Lille, Capitale du football français, ont écrit pour sa rubrique « Tableau noir », qui consiste à apporter quelques éléments tactiques sur le jeu des grandes équipes de l’histoire du football.
Tâche difficile quand on ne dispose que de sources écrites, mais pas insurmontable. L’article est à retrouver en suivant ce lien :
La saison 1932/1933 de l’OL et l’histoire du grand club lillois sont à retrouver dans l’ouvrage, notamment disponible sur le site de l’éditeur, Les Lumières de Lille.
Posté le 8 mars 2019 - par dbclosc
1955, un premier barrage et une cinquième coupe
Club français au plus grand palmarès de l’après-guerre, le LOSC est en perte de vitesse en 1954/1955 : il est en effet contraint de passer par un barrage pour sauver sa place en première division, à cause notamment d’une fin de championnat bâclée. La saison est toutefois sauvée avec le gain d’une cinquième coupe de France.
Cette saison avait bien mal commencé avec le départ, dans des conditions conflictuelles, du défenseur néerlandais Corry Van Den Hart, qui réclamait une prime de 10 000 francs suite à une nouvelle réglementation sur les internationaux, et que le président Henno refusait de lui octroyer. Le LOSC lui avait pourtant trouvé un remplaçant fin juillet 1954, mais en guise d’arrière central, le club s’est offert l’histoire la plus rocambolesque de son histoire en recrutant un légionnaire déserteur se faisant passer pour le Hongrois Zacharias. Avec la blessure en début de saison du gardien César Ruminski, on se dit que cette saison peut s’annoncer difficile… mais sur le terrain, il n’en paraît rien : lors de l’ouverture du championnat, le LOSC écrase le RC Paris 6-0.
Le LOSC 1954/1955
Debout : Van Cappelen, Clauws, Van Gool, Bieganski, Lemaitre, Somerlinck
Assis : Strappe, Douis, Bourbotte, Vincent, Lefèvre
Moyen en championnat, superbe en coupe
Mais c’est un feu de paille. Alors que Lille, s’appuyant sur une défense intraitable la saison précédente, avait remporté le titre, les absences de Ruminski et Van Der Hart sont pesantes : très vite, on comprend que le LOSC ne pourra pas garder son titre. Il va même probablement connaître le plus mauvais classement de son histoire, ou plutôt le moins bon : au « pire », le LOSC s’est classé 5e lors du dernier « championnat de guerre » en 1945, puis 4e lors du championnat régulier en 1947 et 1953.
Donc pour le moment, rien de catastrophique : nous sommes fin février 1955. La fin de saison s’annonce même peinarde : même si le LOSC vit une saison en deçà des standings auxquels il nous a habitués depuis sa création, la situation sportive après 28 journées (sur 34) est assez claire : en championnat, le LOSC est 7e ! Certes, 13 équipes, de la la 5e à la 17e place se tiennent en 5 points, mais Lille regarde vers le haut. Pourquoi même ne pas tenter d’accrocher le podium, 5 points devant ? (Pour rappel, la victoire est à 2 points ; le 16e dispute un barrage contre le 3e de D2 ; les 17e et 18e sont relégués en D2)
Et surtout, le LOSC est toujours qualifié en coupe de France, dont il a déjà atteint 6 fois la finale depuis la Libération. Après avoir sorti Nantes (3-2), puis Grenoble (3-0), le LOSC a sorti le leader Reims en huitièmes fin mars (1-0), et Toulouse, le deuxième, en quarts mi-avril (1-0). C’est désormais le 3e, Strasbourg, que le LOSC va affronter en demi.
Haie d’honneur des Dogues pour leur gardien Jean Van Gool, qui se marie en avril 1955
Le sprint final
Concentré sur sa coupe, le LOSC traîne en championnat, en ne prenant qu’un point en 3 matches pendant qu’en coupe il éliminait les deux premiers du championnat. Après 31 journées – il reste donc 3 journées – la descente directe en D2 est relativement loin (Troyes, 17e, est à 4 points), mais le barrage, bien que 4 places derrière, n’est plus qu’à 1 point… Faut-il s’inquiéter ? Ou alors des joueurs de la trempe de Bieganski, Strappe, Somerlinck ou Vincent savent doser leurs efforts en priorisant la coupe tout en sachant mettre le coup de collier nécessaire pour obtenir les 2 ou 3 points qu’il manque et assurer le maintien ?
Le 24 avril, pour la 32e journée, Lille reçoit Bordeaux, un autre demi-finaliste de la coupe de France. Si la confiance est de mise côté lillois après la victoire en quart contre Toulouse, la Voix du Nord rappelle opportunément que dès lors qu’il s’agit de championnat, les Lillois perdent de leur superbe. Et c’est précisément ce qui va arriver : le LOSC, bien que devant à 2 reprises, concède le nul (2-2), la faute à un manque d’efficacité des attaquants, notamment Bourbotte et Douis qui « ratèrent des buts faciles et ne surent pas profiter des erreurs d’une défense bordelaise qui parut lourde et mal inspirée ». Ainsi, à la 17e minute, le gardien Bernard relâche une frappe de Bourbotte et « Douis, seul devant le but, reprit la balle pour l’expédier au-dessus de la transversale, alors que le point paraissait immanquable ». Ainsi donc, si Bourbotte ouvre le score (31e), Kargu égalise (41e) ; Vincent redonne l’avantage aux locaux (51e) avant que Grimonpont n’égalise (71e). On apprend après le match que si le gardien des Girondins fut si maladroit, c’est parce qu’il a été handicapé par une sortie à la 5e minute, qui lui a occasionné… une fracture du métacarpe.
Voici le classement : le LOSC prend malgré tout un point sur Metz… et la D2 se retrouve à 2 points. Somme toute, ce point n’est pas une mauvaise affaire.
Après Marseille, serrés comme des sardines au classement
33e journée, direction le Sud pour nos Lillois. Au stade Vélodrome, le LOSC va affronter un OM qui a à cœur de proposer une belle dernière devant son public. Et ça démarre mal : dès la 2e minute, Rusticelli bat Ruminski, puis Luzy fait 2-0 à la 13e. Anderson (44e) puis Marcel (55e) portent la marque à 4-0. Vincent réduit l’écart à la 59e (4-1) mais, débordés en dépit d’un « heading » de Douis sur la barre à la 65e, les Lillois encaissent un 5e but par Rusticelli (75e). 1-5, ça fait mal : « les Lillois n’ont aucune excuse à faire valoir. Ils ont été battus normalement par une équipe marseillaise beaucoup plus rapide ». Et ça fait d’autant plus mal que, pendant ce temps, Nancy a pris un point, et que Metz en a pris 2. C’est donc uniquement grâce à leur goal-average favorable par rapport à Nancy, Metz et Monaco que les Lillois ne sont pas barragistes. Et autre problème de taille : Troyes a également gagné, et revient donc à 2 points de ce groupe de 4. Autrement dit, Troyes n’est pas condamné avant la dernière journée, et va donc disputer son 34e match de la saison pour se sauver… à Lille. On reviendra plus bas sur les enjeux et les scénarios possibles de la dernière journée. En attendant, la Voix du Nord n’est pas tendre avec les Lillois : « nous n’avons jamais eu de fréquentes occasions, cette année, de nous réjouir de la tenue de l’équipe du LOSC (…) Ce que l’amateur ne peut comprendre, c’est que les joueurs du LOSC parviennent à se distinguer en coupe et soient si ternes dans le championnat, depuis la fin de janvier. La débâcle de Marseille est d’autant plus insupportable qu’un seul point aurait suffi aux Lillois pour se tirer d’affaire ».
En route pour la finale
Afin d’évacuer cette cinglante défaite, les Lillois vont pouvoir se projeter dans leur demi-finale de coupe. Pas de chance : Ruminski, gêné depuis le début de saison par un genou, a rechuté. C’est Van Gool qui gardera le but contre Strasbourg, à Colombes. En guise d’amuse-bouche, un amical contre Maubeuge est organisé : Lille gagne au petit trot, en deux périodes de 35 minutes, 3-1 « devant quelques centaines d’amateurs préférant à cette occasion le casse-croûte au plus copieux beefsteack », allez comprendre l’utilité de cette précision dans un article. Les buteurs : Douis, Bourbotte et Lefèvre. Le match s’est terminé avant le clair de lune. Poisse : Strappe s’est blessé : Lenglet devrait donc être aligné comme avant-centre.
La presse régionale s’interroge : face à un adversaire d’une telle qualité, quelle équipe du LOSC allons-nous voir ? « On ne sait plus par quel bout la prendre. Elle est fantasque au possible, instable dans ses résultats ». Même si la coupe semble sublimer les Lillois qui « grâce aux succès qu’ils ont accumulés cette saison, leur laisse un sentiment d’invulnérabilité qui les stimule », c’est surtout, paradoxalement, le beau jeu des Strasbourgeois qui serait un atout pour ce LOSC qui a du mal contre les équipes « au jeu à l’emporte-pièce, mais incisif » comme Nantes, Marseille ou Nancy. Au contraire, « la recherche du beau football, du jeu à ras de terre » de Strasbourg promet un match entre formations aux qualités égales. Bien renseignée, la Voix du Nord balance tout, et après ça se targue d’avoir été créé dans la Résistance : « les Lillois ont prévu une parade : Bieganski ne suivra pas comme l’ombre Stojaspal, avant-centre en retrait. Clauws, dans ces moments, se chargera de l’Autrichien, et Bieganski sera prêt à surveiller Carlier, inter libéré par Clauws ».
9 mai, 15h : c’est parti ! Mauvais présage ? Les Lillois perdent le toss et jouent la première période face au vent. L’avantage, c’est probablement qu’ils joueront la seconde période avec le vent dans le dos. Le LOSC démarre fort, mais ni Douis (3e), ni Bourbotte (4e), ni Vincent (6e) ne trouvent l’ouverture. Les 10 minutes suivantes sont pour Strasbourg, avec 4 corners, dont l’un est dégagé par Pazur, sur la ligne de but, qui supplée Van Gool, battu. Les débats sont équilibrés, ce que reflète le score à la pause : 0-0.
Van Gool s’empare du ballon sous les yeux de, de gauche à droite : Bourbotte, Pazur, Bieganski, Stojaspal et Somerlinck
À la reprise, Lille pousse de nouveau : Lefèvre (53e), Douis (54e), Vincent (55e), puis Lenglet (57e) manquent de peu d’ouvrir le score. Finalement, la libération arrive 5 minutes plus tard : sur un centre de Douis, Lenglet profite d’une hésitation de Borkowski pour ouvrir le score (62e) ! De la 60e à la 70e, le LOSC subit : Van Gool est sauvé par sa barre (65e) avant de réaliser deux superbes arrêts (67e). Et alors qu’on croit l’égalisation proche, Douis envoie un « bolide », un « tir fracassant » de 25 mètres qui fait 2-0 ! Dès lors, les Dogues déroulent et, à Strasbourg, « la pagaille se mit à régner » : à la 75e, Bourbotte fait 3-0 ; Clauws parachève le succès lillois à la 90e (4-0). Lille est en finale, et affrontera Bordeaux.
La Voix salue la « puissance, l’énergie, le sang-froid » des joueurs lillois, Bieganski en tête, ainsi que Lenglet, dont on craignait qu’il ne soit trop tendre pour un match de cet enjeu : « ne crions pas miracle : Lenglet n’est pas Bihel ou Baratte, beaucoup s’en faut. Mais il apporte dans l’attaque une note agressive que l’on ne connaissait plus. Il sprinte pour toutes les balles, même si elles paraissent perdues. Et c’est pour cela qu’il plaît et que parfois, il réussit d’admirables choses. On admire en lui le goût de la lutte, de la hargne. Il donne l’apparence d’aimer son club, de se battre pour lui ». Lenglet a gagné avec cette performance un contrat pro ! Il aurait dû soit retourner dans un club amateur, en l’occurrence Hallencourt, d’où il est originaire, soit signer pro, selon une réglementation nouvelle concernant les stagiaires après une saison dans un club professionnel. Or, la tendance était jusqu’alors au retour de Lenglet à Hallencourt.
La tête à la finale
Après 15 jours d’interruption pour cause de coupe de France et de matches internationaux (au cours desquels 4 lillois ont été sélectionnés en équipe nationale : Bieganski, Louis et Vincent en A, Lefèvre en B), la Division Nationale est de retour. C’est la dernière journée. En bas de tableau, on sait déjà que le CORT est condamné. Pour la descente automatique, Troyes est le mieux placé pour l’accompagner, car il a 2 points de retard sur un groupe de 4 clubs (le LOSC, Metz, Nancy et Monaco) parmi lesquels on trouve probablement le barragiste. On a fait les calculs pour vous : pour se sauver, Troyes doit gagner à Lille. En raison d’une différence de goal-average trop importante, il est improbable que Troyes passe devant le LOSC (il faudrait une victoire de Troyes par 13 buts d’écart). En revanche, en gagnant, les Troyens passeraient à coup sûr devant les Messins, si du moins ces derniers perdent. Donc, pour la dernière journée, Lille s’en sortira quoi qu’il arrive s’il gagne ; en cas de nul, il suffit qu’une des 3 équipes (Monaco, Nancy, Metz) ne gagne pas pour se sauver ; en cas de défaite, il faut que l’une des 3 mêmes équipes perde. Tout autre scénario envoie le LOSC en barrage.
Mais la Voix du Nord le souligne bien : ce qui préoccupe les Lillois, c’est bien la préparation de la finale de la coupe de France : « bien que l’on ne dissimule pas l’intérêt et l’importance de cette rencontre, elle ne retient pas l’attention des Lillois. On considère que Lille battra Troyes. Ce qui compte, c’est la finale. Et plus encore, les billets pour la finale ». Cela fait déjà 8 jours que les supporters du LOSC cherchent à se procurer des places, et le secrétariat du club est « positivement assiégé par des gens très respectables qui sont prêts à de gros sacrifices pour obtenir une toute petite place de tribune ». Le LOSC a obtenu de la fédération 4 500 places (2 000 assises, 2 500 debout). La priorité va aux 1600 abonnés qui, parfois, réclament une place supplémentaire qu’il est difficile de refuser car, selon L. Henno, « chaque saison, ils nous font une avance de 8 millions ». Le président du LOSC s’émeut auprès du président de la fédération que chaque club finaliste ne dispose que de 4 500 places, alors que le stade de Colombes en compte 65 000, et demande une rallonge : « jovial et conciliant comme le sont toujours les présidents, M. Pochonnet a répondu : « mon gros, tu sais bien que je ne peux rien te refuser ! ». Mais Monsieur Henno attend toujours ». Et voilà que le préfet, ses chefs de cabinet, les sous-préfets et chefs de division veulent aussi assister au match, si bien que M. Henno « se fait autant d’amis que d’ennemis en pareille circonstance ». Idem pour Gaston Davidson, président de la section des supporters qui « se trouve des tas d’amis inconnus ».
Pour ce dernier match de championnat de la saison – a priori – le LOSC doit de nouveau faire sans Ruminski et Strappe. De plus, Lemaître, blessé à une cuisse, est remplacé par Van Cappelen. Confiance mais prudence : « les Bonnetiers présenteront leur équipe au grand complet et des attaquants comme Ben Tifour, Winckler, Flamion, Bessonart ne sont pas à dédaigner. Ils donneront du travail à la défense lilloise qui devra se montrer d’autant plus prudente qu’elle sera privée des services de son arrière gauche titulaire Lemaître ».
Ça démarre très bien : après 25 minutes de jeu, Vincent ouvre le score, trompant la vigilance de Flamion. Oui, Flamion, l’attaquant de Troyes, qui a échangé sa place avec Landi, l’habituel gardien, blessé d’entrée de match. À la pause, le LOSC est devant, et l’issue de la saison paraît toute tracée pour les deux adversaires du jour. Et pourtant : « les Loscistes, au lieu de demeurer calmes, d’organiser leur défense comme ils savent si bien le faire en coupe, s’affolèrent, commirent de lourdes fautes de marquage. Figés, parfois incapables de réaction rapide devant des adversaires dont la qualité essentielle était la mobilité, ils furent ballotés de toutes parts ». En début de seconde période, Delcampe égalise, mais « ce n’était pas encore tragique pour le LOSC ». Landi reprend sa place dans le but troyen. Le match se transforme en n’importe quoi, « une pagaille » : « l’enjeu de ce match se limitait à quelques combats singuliers ». Et Troyes porte le danger : « Bessonnart et Ben Tifour semaient la panique dans la défense locale, et chaque fois que Ben Tifour prenait la balle, des sueurs froides coulaient dans le dos des supporters locaux ». Inévitablement, l’international français marquait le 2e but de son équipe à la 68e. Les Dogues attaquent alors de manière désorganisée, sans se créer d’occasion : « Lille était dans un jour horrible et l’on n’arrive pas à comprendre comment en 15 jours une équipe peut se transformer de la sorte ». Le LOSC s’incline 1-2 ; Nancy ayant gagné et Metz et Monaco ayant pris un point, le LOSC est 16e, son pire classement de la saison, au plus mauvais moment : il faudra jouer un barrage pour garder sa place en D1. Ce sera contre Rennes. La coupe de France a-t-elle encore de l’importance dans ces circonstances ?
Ce diable de Ben Tifour poursuivi par Bieganski et ses grands compas
Le 24 mai, dans un éditorial, la Voix du Nord regrette que se soit trouvée réduite « la puissance acquise par la fusion des éléments de l’Olympique Lillois et du SC Fivois (…) Si la ville de Lille, après celles de Roubaix et de Tourcoing, perd tout contact avec l’élite du football français, pour une période dont il sera impossible de déterminer la durée, il faudra bien exposer au grand jour les erreurs commises dans maints domaines, depuis deux ans à peu près (…) Quelqu’un disait à la sortie du stade Henri-Jooris, dimanche, que l’équipe actuelle du LOSC serait nettement battue par les équipes de l’OL et de Fives d’avant-guerre. Elles lui étaient supérieures par la valeur technique de l’ensemble, et plus encore par l’énergie déployée en toutes circonstances. Tout cela qui doit être vrai met le niveau actuel du football lillois à un degré assez bas et explique le désintéressement des foules sportives. Comme quoi nous n’avions pas besoin d’un stade de 40 000 places… ». Oui, ça date de 1955.
Bon ben on se retrouve comme des cons là. On pensait avoir l’esprit libéré pour préparer dans les meilleurs conditions la quête d’une cinquième coupe de France, et voilà que cette finale devient presque superflue.
Les Lillois s’entraînent à Henri-Jooris en attendant leur départ le jeudi soir pour Brunoy, en Seine-et-Oise, où ils résideront à l’hôtel du Cheval blanc. Jean Chantry, de la VDN, y a vu Vincent, Strappe et Douis envoyer des « shoots terrifiants » : « vraiment, on se demande pourquoi ce qui est si bien fait à l’entraînement donne un résultat pitoyable quand il s’agit d’un match officiel ». Une fois arrivé en région parisienne, Strappe a à cœur de montrer qu’il est rétabli pour la finale : « je ne voudrais pas me présenter devant M. Coty sans être en parfaite condition. Ce serait lâche de prendre la place d’un copain et de laisser l’équipe à 10 après un quart d’heure de jeu ». Le vendredi après-midi, détente pour nos Dogues, de passage au vélodrome miniature de Brunoy, où « Lefèvre, Donis, Bieganski s’amusèrent comme des gosses sur des vélos de toutes dimensions » sous l’oeil inquiet de Cheuva, Klès et Dassonville, craignant une bête blessure. Au programme du samedi : footing le matin « cours tactique et conférence » l’après-midi, au cours de laquelle « il sera fait appel aux sentiments : le renom du club, la petite fibre locale y seront particulièrement soulignés, afin de mieux faire comprendre aux footballeurs lillois l’importance de la lutte qu’ils auront à livrer ».
3 trains et « une centaine d’autocars » font le déplacement à Colombes. Événement : la finale est télévisée. Ce n’est pas une première et le parc des téléviseurs est encore assez faible à l’époque, mais c’est notable tant les relations entre la fédération de football et la télévision sont conflictuelles. Toujours la même question : à quel visage du LOSC allons-nous avoir droit ? Celui, pataud, du championnat ou celui, virevolant, de la coupe ? La réponse arrive assez vite : dès la 6e minute, Vincent marque un premier but de la tête sur un centre de Lefèvre initialement repoussé par le gardien : « d’entrée, on eut la certitude que Lille allait gagner. Les loscistes semblaient voler sur le terrain. Ils étaient partout où la moindre once de danger pouvait se manifester. En 3 passes, la balle était devant le but bordelais et, toujours, un shoot partait dans de bonnes conditions ». « Déjà inspirée, soudée et bien en train, l’équipe devint irrésistible » : mis à part quelques minutes autour du quart d’heure où le LOSC subit, rien ne semble plus pouvoir atteindre négativement le LOSC. « Soudain, piqué par on ne sait quelle mouche, Douis se déchaîna. On le vit à droite, à gauche, toujours élégant, souverain » : il centre sur la tête de Lefèvre qui heurte la barre ; un instant après, il inscrit le 2e but lillois après s’être ouvert le but d’une feinte sur le gardien (27e). 3 minutes après, à une quinzaine de mètres du but bordelais, Douis arme à nouveau et surprend encore Astresses : 3-0 ! Face à des Bordelais « débordés, accablés », Bourbotte inscrit un 4e but, en deux temps, bien servi par Douis (34e) : « c’était la ruine totale de ce match ». À la 37e, Lefèvre ajoute même un cinquième but, refusé par l’arbitre pour des raisons que la VDN n’a pas comprises. Pour un ouvrage relatif au football au stade Henri-Jooris que nous avons consulté, si l’arbitre n’a pas accordé ce but, c’est pour « ne pas condamner trop tôt les malheureux bordelais ». Résultat, les malheureux bordelais reviennent à 1-4 juste avant la pause. À l’heure de jeu, ils reviennnent même à 2-4. Mais, à la 75e, Bourbotte conclut la fête en reprenant de volée un corner de Lefèvre. Lille remporte encore la coupe de France, et c’est probablement la plus éclatante de ses finales.
Lefèvre est ravi : « une tête sur la barre, un but refusé, deux autres ratés. Quelle poisse pour cette finale ! ». Mais le LOSC remporte donc sa cinquième coupe de France ! C’est la fête ! Non, ce n’est pas vraiment la fête. André Cheuva a interdit le champagne : « ça vous apprendra ! Vous n’aviez qu’à mieux jouer en championnat ! ». N’attendaient les Dogues qu’« une vulgaire tisane et des bouteilles d’eau minérale ». On apprend finalement qu’un dirigeant bordelais, M. Balarès, est entré dans le vestiaire lillois avec un quadruple magnum de vin blanc : « on ne saura jamais par quelle opération du Saint-Esprit il disparut. Un quart d’heure après, le divin flacon traînait dans un coin, vidé ».
Place au barrage
André Cheuva, après avoir enterré son père le 1er juin, emmène son équipe à Jonchéry-sur-Vesle, dans la Marne, le premier barrage se déroulant à Reims. Il espère bien reconduire la même équipe contre Rennes que celle qui a triomphé en coupe. Il manque Roland Clauws, qui se marie mais reviendra vite à l’essentiel et sera disponible ce week-end.
On connaissait la clause de mariage, voici le mariage de Clauws
Il paraît que les Rennais en veulent aux Lillois, qui auraient « faussé les barrages » en perdant contre Troyes : « contre le LOSC, disent les Rennais, nous n’avons aucune chance. C’est Troyes, Metz ou Monaco que nous aurions dû rencontrer. Lille n’est pas une équipe mûre pour la seconde division ». L’entraîneur, Artigas, est bien plus nuancé : « il apparaît que le LOSC n’est pas le même en championnat qu’en coupe de France. Allons ! Si nous ne devons pas être considérés comme favoris, nous ne devons pas être sacrifiés à l’avance ». L’entraîneur rennais est aussi joueur : à 38 ans, il a décidé de se titulariser en milieu de terrain. Il dit qu’il a bien préparé la confrontation contre le LOSC, notamment en regardant les actualités cinématographiques (une espèce d’ancêtre du JT, qui passait avant le film de la semaine dans les cinémas), où la finale Lille/Bordeaux était amplement développée. Espérons pour lui que les images étaient de meilleure qualité que celles du résumé posté plus haut.
Côté supporters lillois, une micheline fait le trajet jusque Reims : départ de Lille à 8h301 pour un coup d’envoi à 15h ce 5 juin.
Le match est fermé. Les Rennais sont venus pour défendre, et seulement pour défendre. La VDN évoque le « béton breton » : un marquage strict, et la quasi-impossibilité pour les Lillois de se mouvoir. « Les Rennais étaient sur notre dos avant que nous ne soyions en possession du ballon. Nous n’avions même pas le temps de faire une déviation » déplore Lefèvre. De l’autre côté du terrain, l’attaque rennaise n’en est même pas une : « il n’y avait pas d’ailier gauche, et à droite, Aubautret, bon joueur, n’avait rien d’un ailier et multipliait les rentrées vers le centre. Donc, pas d’avants de pointe ». Lille est coincé, et Rennes n’envoie que de vagues centres qu’intercepte sans problème Van Gool. À la mi-temps, c’est 0-0. à la reprise, même scénario : « les Lillois, qui avaient aussi peur que les Rennais, n’osaient pas se découvrir ». À la 54e, les Dogues trouvent enfin l’ouverture : Strappe remonte le ballon côté droit, efface 2 adversaires et centre en retrait ; Douis gêne habilement le gardien et Bourbotte, opportuniste, ouvre la marque ! « Nous vous jurons qu’à ce moment, et à ce moment seulement, les poitrines nordistes se décontractèrent. André Cheuva, sur son banc, sortit un mouchoir et s’épongea ». Le match se termine dans l’ennui. Rennes tente de sortir, mais cette fois les Lillois attendent, et le match s’achève sur une première manche gagnée 1-0.
Pour le barrage retour, les Lillois se mettent au vert à Maisons-Laffitte. Ils sont décidés à ne pas reproduire le scénario du barrage aller, en marquant d’entrée, et en obligeant ainsi Rennes à sortir. Coup d’envoi donné à 16h au Parc des Princes : Rennes, manifestement, a décidé d’attaquer. Il faut dire que les Bretons n’ont pas vraiment le choix. Ils attaquent alors de manière désordonnée : le LOSC plie, dès la 5e minute. Alors que Van Gool est à terre, Baillot frappe, mais de manière précipitée et envoie le ballon à côté. « Dieu seul sait ce qui fut advenu d’une équipe lilloise remontée au score » : Lille tient encore 10 minutes et sort à son tour. Sur sa première attaque bien construite, Vincent centre sur la tête de Bourbotte qui ouvre le score (16e). Le match était déjà plié. Rennes continuait d’attaquer de manière toujours plus inoffensive, et Lille jouait désormais rapidement en contre-attaque. Ce schéma fait alors ressortir l’écart technique entre les deux équipes : les Lillois étaient rapides et précis, les Rennais étaient lents et « monocordes », leurs attaquants se faisant surtout remarquer pour « l’indigence de leurs tirs ». Et à la 36e, logiquement, un dégagement de Van Gool, relayé par Pazur, parvient à Bourbotte qui réalise un doublé : 2-0 à la mi-temps ! Dès la reprise, Bernard Lefèvre fait 3-0 après avoir dribblé Le Boadec et Pinat (48e). Les Bretons, dans la foulée, réduisent l’écart par Artigas, reprenant un tir sur le poteau de Baillot (3-1, 50e). Puis « à chaque action éclatait la supériorité des Lillois » : Lefèvre inscrit un 4e but (63e), puis au but d’une action collective Somerlynck-Strappe-Douis, Vincent place le ballon entre les jambes de Pinat (5-1, 67e)
Bourbotte y va de son triplé à la 71e (6-1). « Le jeu du LOSC était infiniment plus riche, plus complet. Mais on ne le vit que lorsque furent disparus tous les sujets de crainte, car tant qu’il fut en danger, le LOSC joua mal ». Tout à sa joie, un groupe de supporters écrit à la Voix du Nord pour remercier ses journalistes, en particulier MM. Charlet et Chantry, de leurs judicieuses critiques sur leur club durant la saison, et notamment depuis la défaite en janvier à domicile contre Nancy (2-5). En voici un extrait :
« L’euphorie de la victoire ne doit pas faire oublier que le LOSC a une renommée nationale que ses dirigeants n’ont pas le droit de diminuer (…) La saison est finie, oublions les regrets, les déceptions, mais dès maintenant, préparons la saison prochaine. Nous faisons appel à votre sens judicieux, votre connaissance des joueurs, pour que ne se renouvellent pas les erreurs, les situations comiques et cruelles pour nous. L’étonnante renommée du LOSC et de Lille impose, à notre avis, la création d’un comité de gestion qui comprendrait quelques personnalités qualifiées, des représentants des supporters, et surtout des critiques sportifs de la presse de Lille ; ce comité veillerait à émettre des suggestions, des critiques, dont les dirigeants devraient tenir compte pour un rendement maximum.
Nous vous faisons confiance car nous savons votre dévouement au LOSC et à tous les sports où le renom de la ville de Lille est en jeu.
Merci. Vive le LOSC, vive Lille, vive La Voix du Nord »
À l’issue de performances décevantes en championnat, le LOSC se maintient donc en première division. La saison a été marquée par une part de malchance (les blessures de Ruminski et de Strappe), mais aussi par des tâtonnements qui ont lourdement pesé (le remplacement de Van Der Hart, l’incapacité à percevoir le danger de la relégation à partir de janvier). Pour Louis Henno, « ces émotions vont rendre à chacun le goût de la lutte, de l’entreprise. Nous allons nous remuer davantage. Ceci a été une bonne leçon pour nous tous » : ces intentions ne seront malheureusement pas suivies d’effets, puisque dès la saison suivante, de nouvelles erreurs conduisent encore à la 16e place et, cette fois, les barrages ne souriront pas aux Dogues. Finalement, cette saison 1954-1955 marque la fin d’une époque. L’équipe a affiché deux visages : l’un, excellent, en coupe, comme les derniers soubresauts d’une glorieuse décennie, l’autre, inquiétant, en championnat, comme les prémisses d’années bien plus difficiles.
La saison s’achève sur un transfert-surprise
FC Notes
1 Cet horaire est déterminé pour permettre aux supporters qui le souhaitent « d’accomplir leurs devoirs électoraux », indique la Voix du Nord. Mais il n’y a pas d’élection le 5 juin 1955. Mystère.
Posté le 31 octobre 2018 - par dbclosc
Le Lannéedernièromètre
Vous le savez, l’équipe de DBC n’est pas en manque d’idées innovantes. Nous lançons donc le « lannédernièromètre », instrument de mesure des résultats du LOSC en comparaison des résultats de la saison dernière contre les mêmes adversaires ou contre leurs « équivalents » (1).
Comparons d’abord, le « lannéedernièromètre » au niveau des points obtenus :
Comme on le voit, la courbe de la saison actuelle (en bleu) indique un léger avantage par rapport à la saison précédente : 25 points après 11 journées pour 7 points obtenus contre les mêmes adversaires la saison dernière, soit 18 points d’avance.
Voici maintenant le « lannéedernièromètre » des buts marqués puis celui des buts encaissés.
Au niveau des buts marqués, le lannéedernièromètre indique une avance de 8 buts par rapport à l’année dernière. Au niveau des buts encaissés, notre indicateur donne des résultats encore plus encourageants avec 11 buts d’avance.
Enfin, on vous présente le « lannéedernièromètre » des buts marqués par Nico Pépé.
Déjà 5 buts d’avance pour Nico par rapport à sa saison précédente. A ce rythme, il finira la saison à 30 buts.
On mettra régulièrement à jour le « lannéedernièromètre » (peut-être pas chaque semaine, hein) et il est bien possible qu’on le complète par d’autres indicateurs.
- Par exemple, les relégués de la saison précédente sont comparés aux promus de cette année.
Posté le 3 septembre 2017 - par dbclosc
Pour le rétablissement des poules « régionales » Nord et Sud dans le championnat de France
La saison 1944/1945 constitue la première de l’histoire du LOSC (1). C’est aussi le dernier « championnat de guerre » et le dernier à avoir fonctionné sous la forme d’une élite nationale à deux poules « régionales », Nord et Sud. En 1945, on justifie de ne faire qu’un seul groupe au motif que les problèmes ferroviaires de la guerre, qui justifiaient la division du championnat en deux poules, sont désormais terminés. La vérité est en réalité toute autre et, il faut le dire, inavouable : les élites à la solde du complot contre le LOSC ont bien compris que cette formule de championnat à poule unique désavantage nos Dogues.
A DBC, on voudrait donc proposer de rétablir ce système qui n’a manifestement été créé que dans l’intention de nous faire du mal. Certes, ça veut dire qu’on doit se coltiner le PSG, mais ça veut aussi dire qu’on évite Marseille, Bordeaux, Lyon, Saint-Étienne, Nice et Monaco. On a voulu voir ce qui se serait passé si, depuis la remontée de 2000, le championnat était divisé en deux groupes « régionaux » Nord et Sud de 10 équipes chacun (2). Ci-dessous, nous résumons les classements qu’aurait eus le LOSC, dans son groupe Nord et au niveau national (3), comparés aux classements réels du club au niveau national.
On constate que, jusqu’en 2005, le classement national virtuel avec formule de « poules régionales » est généralement assez proche du classement réel. En revanche, à partir de 2006, le classement national du LOSC serait assez nettement meilleur avec le système de « poules régionales » que dans le réel classement national. Avec ce système, les Dogues se seraient virtuellement qualifiés en coupe d’Europe en 2013 et 2015 et auraient joué la finale pour la troisième place, qualificative pour le tour préliminaire de la C1, chaque année de 2010 à 2016, sauf en 2011 quand ils auraient joué la finale pour le titre, ce qui leur aurait offert une qualification directe, d’ailleurs comme dans la vraie vie.
« Mais pourquoi tant de complots ?! » semble interroger Michel Bastos
On observe également que le LOSC s’est stabilisé dans les deux meilleurs clubs de la partie Nord du pays depuis 2009 malgré une 4ème place dans la hiérarchie en 2016/2017.
Par ailleurs, en revenant plus loin en arrière, on constate que la formule à un seul groupe nous a porté préjudice à d’autres moments. On n’aurait par exemple pas attendu 2001 pour obtenir notre première qualification européenne. Lille aurait terminé deuxième de son groupe régional en 1991 et aurait accroché une qualification en coupe de l’UEFA. En 1984, Lille aurait fini à la troisième place de son groupe Nord, à la lutte avec les Strasbourgeois, deuxièmes.
Encore, une fois, les forces du complot s’acharnent sur le LOSC. Malgré les doutes légitimes que l’on peut nourrir au regard des dernières prestations des Dogues, gageons que l’équipe actuelle saura encore une fois déjouer les plans odieux des conspirateurs.
1. Notons que les matches amicaux d’avant saison ainsi que les deux premières journées de championnat se sont joués sous l’appellation Stade Lillois, jusu’à l’officialisation du nom LOSC le 23 septembre 1944.
2. et 9 par groupe entre 2000 et 2002 puisque la L1 comptait alors 18 clubs.
3. Déterminé suite à une confrontation avec l’équipe ayant terminé à la même place dans le groupe Sud.
Posté le 6 juin 2017 - par dbclosc
La victoire à trois points, un outil du complot contre le LOSC ?
En 1990/1991, le LOSC termine 6ème du championnat et est à deux doigts de réussir la première qualification européenne de son histoire, tout en n’ayant remporté que 11 rencontres. Certes, les Dogues gagnent peu, mais ils perdent alors encore moins.
Selon nos sources, c’est à cette époque que naît une idée machiavélique dans les têtes des élites complotistes contre notre très cher club de cœur : il faudrait mettre la victoire à trois points, ce qui, dans ce championnat 1990/1991, aurait fait perdre trois places au LOSC. Mais avant de mettre en place cette réforme, il faut lui trouver une justification éthiquement entendable. En 1994, c’est chose faite. Au principe que la victoire à trois points inciterait à pousser pour marquer en fin de match, une telle réforme encouragerait les buts et donc le spectacle. Cette explication, au demeurant douteuse, justifiera alors une infâme réforme contre nos ouailles.
Est-ce que ça change tant de choses que ça ?
Alors, est-ce que la victoire à trois points change beaucoup de choses dans la hiérarchie entre le clubs, et surtout, pour nous ? Pas tant que ça serait-on tentés de répondre si l’on regarde l’écart moyen de classement depuis la remontée du LOSC entre ce qu’est le classement avec la victoire à trois points et ce qu’il serait avec la victoire à deux points. En effet, en dix-sept saisons, cela n’aurait modifié le classement final du LOSC que de 0,35 place en moyenne.
Lille 90/91, champion de France des matches nuls
En plus, ces variations n’auraient pas tant pénalisé le LOSC : avec la victoire à deux points, le LOSC aurait en effet gagné trois places au total (une en 2012/2013 et deux en 2007/2008) et aurait perdu autant de places (une pour chacune des saisons 2003/2004, 2006/2007 et 2016/2017).
Alors, en fait cette réforme ne nous pénaliserait pas ? En fait, c’est beaucoup plus vicieux que cela.
Une réforme aux conséquences en réalité dramatique
Poussons plus loin l’analyse. Les trois saisons où le LOSC a bénéficié du système de la victoire à trois points, cela n’a en réalité rien changé : cette saison, il aurait fini 12ème, ce qui n’aurait pas changé grand chose. En 2003/2004 et 2006/2007, il aurait fini 11ème et non 10ème. Là encore, cela n’aurait rien changé ou presque. En effet, la seule différence est que, en 2004, le LOSC aurait dû disputer un tour de coupe intertoto de plus pour gagner le prestigieux trophée. Et tout le monde sait pertinemment que l’on aurait passé ce tour (probablement joué contre le 5è du championnat syldave), donc ça ne change rien.
En revanche, cela aurait changé beaucoup de choses en 2007/2008. terminant alors 7èmes, les Dogues échouent alors à toute qualification européenne. Avec la victoire à deux points, les Lillois auraient alors terminé à une 5ème place qui aurait apporté une nouvelle qualification européenne aux Lillois, en coupe de l’UEFA.
En 2012/2013, rebelote. Les Lillois finissent juste derrière le dernier qualifié en Europa League. Avec la victoire à deux points, le LOSC aurait gagné une place et, en même temps, sa qualification européenne.
Mais cela ne fût-il pas en définitive un mal pour un bien. On se le rappelle, c’est en partie parce que le LOSC échoue à la qualification européenne que Florian Thauvin nous fait son sketch pour partir rejoindre le grand Tohème. Si Lille avait réussi dans cette entreprise, Thauvin serait peut-être resté. Facétieuse ironie de l’histoire, en nous mettant des bâtons dans les roues, les complotistes nous ont alors sans doute évité le pire. Sans cela, peut-être serait-on encore en train de nous morfondre en voyant Thauthauvin sous nos couleurs. Et ça, nul n’ose y penser.
Posté le 4 mai 2017 - par dbclosc
Les meilleurs buteurs du LOSC (1978-2001) en perspective
On entend souvent parler de ces buteurs « qui marquent 15 buts par saison ». Comme s’ils étaient si différents de beaucoup de buteurs « qui ne marquent pas 15 buts par saison ». Il y a pourtant quelque chose d’un peu injuste là-dedans, parce qu’on tend à juger un « score », le nombre de buts marqués, comme ayant une valeur en eux-mêmes, là où ce total dépend en réalité de beaucoup de choses sur lesquels les buteurs en question n’ont pas prise.
Par exemple, t’as beau être le buteur de l’année, si les joueurs censés d’offrir de bons ballons sont des buses, ton total en souffrira forcément. Mais bon, le « facteur coéquipiers buses », je ne t’en parlerai pas aujourd’hui même s’il faudrait nécessairement le faire pour épuiser la question. A défaut de l’épuiser, cette question, nous nous contenterons de la fatiguer un ch’ti peu en mettant les performances des meilleurs buteurs du LOSC chaque saison en perspective, et, plus concrètement, en proposant une évaluation des performances de ces joueurs en tenant compte, d’une part, du degré de jeu défensif de D1 pour chaque saison et, d’autre part, du temps de jeu. Ben oui, en gros, ce qu’on veut montrer par là c’est qu’un buteur va forcément plus galérer à marquer dans un championnat hyper défensif et s’il joue peu, deux facteurs sur lesquels il n’a jamais de prise directe.
Pour ce faire, on a calculé le nombre de buts marqués par chaque joueur d’abord en le rapportant au prorata de son temps de jeu sur une base de 3000 minutes par saison (soit 33,3 matches entiers). Concrètement, si un joueur marque 12 buts en 2400 minutes sur une saison, je multiplie son score par 3000, le divise par 2400 et j’obtiens son total (15 en l’occurrence). Pour ce qui est de la prise en compte du niveau défensif du championnat, je procède de la même manière en prenant comme indicateur la moyenne de buts du championnat (ce qui est à mon sens un excellent indicateur) en prenant comme base 2,5 buts par match. Par exemple, si un joueur marque 10 buts sur une saison, je multiplie son total par 2,5 puis je divise par la moyenne de buts en D1 cette saison-là : si, comme en 1986/1987, la moyenne de buts par match est de 2,09, c’est que les systèmes de jeu sont faits pour empêcher les buts, et non pas parce que les buteurs sont mauvais (sinon, la 2ème division district aurait les meilleurs buteurs de France).
Bref, quand on fait ça, qu’est-ce que cela nous dit ?
Pierre Pleimelding était moins extraordinaire que ce qu’on pensait
Sur la période étudiée, c’est Pierre Pleimelding qui occupe les deux premières places du classement « brut » des super buteurs des Dogues. Il marque en effet 21 buts en 1978/1979 puis 18 la saison suivante. Il faut cependant replacer ces performances dans un championnat très offensif et dans lequel il joue énormément : en deux saisons, il ne rate que 47 minutes ! Rapportées aux normes que nous avons définies, les perfs de Ploum sont nettement moins impressionnantes : 15 buts en 1978/1979 puis 14 la saison suivante.
Ce qu’on appelle aujourd’hui une « moustache à la Pedro » s’appelait alors une « moustache à la Pierrot »
Les totaux pleimeldingiens demeurent cependant très solides ces deux saisons-là. Vues comme ça, elles sont pour autant seulement dans une bonne moyenne. Pis, suivant les mêmes critères, il ne marquerait que 12 fois la saison 1980/1981, soit un total en-dessous de la moyenne des meilleurs buteurs du LOSC.
Lolo Peyrelade, LE buteur
Suivant les mêmes critères, Lolo Peyrelade est en revanche LE buteur de la période. Pourtant, en 2000/2001, il ne marque que 7 fois. Ajoutons qu’en scores bruts (et non en scorbut), seul Assadourian en 1992/1993 est un meilleur buteur qui marque moins (6 fois) sur les 21 saisons étudiées. Comment diable se peut-il qu’il passe alors de la toute fin du classement à ses cimes ?
D’abord, il réalise cette performance à une époque particulièrement peu offensive. Ensuite, il joue essentiellement comme super-sub et, enfin, sur une saison à 18 clubs, deux facteurs expliquant qu’il ne joue cette saison que 1107 minutes en L1.
Selon la légende, Lolo Peyrelade marquait un but toutes les 17 secondes. Mais c’est une légende : en vrai c’était plutôt toutes les 22 secondes.
Bref, quel total aurait atteint Lolo selon nos critères ? 19 buts ! Hé oui. Certes, parmi les explications, on pourra avancer le fait qu’il entre souvent en cours de jeu, sa fraîcheur constituant sans doute un avantage face à des défenses fatiguées par la tactique de Vahid. Pour autant, s’il suffisait de faire entrer un attaquant pour qu’il marque deux fois plus, le foot serait facile. Non, si on parvient à ce total, c’est aussi parce que Lolo a été un excellent scoreur. Tout simplement.
Desmet et Becanovic, les scoreurs tireurs de pénos
Suivant cette logique, Becanovic (en 1996/1997) et Desmet (en 1986/1987) arrivent respectivement deuxième et quatrième du classement. En effet, ils auraient alors marqué 18 et 16 buts sans les blessures en restant au même rythme dans un championnat un peu plus offensif. En réalité, Desmet est même troisième ex-æquo avec Vandenbergh au total arrondi, mais il est un peu derrière (15,76 VS 16,42) en prenant en compte les chiffres après la virgule.
En brut, l’un et l’autre marquent en fait 13 buts dont 5 pénos, soit une belle proportion. Ils auraient alors été de bons scoreurs, mais il ne faut pas omettre de souligner, toujours suivant les mêmes critères, qu’ils devraient respectivement 7 et 6 buts aux pénos dans leur total.
Frandsen, le buteur pas avant-centre
En 1991/1992, Per Frandsen marque 8 buts. Pas mal pour un milieu de terrain. Encore mieux quand on sait qu’il réalise ce score dans une équipe qui marque peu (31 buts sur la saison) dans un championnat très défensif. Encore plus impressionnant quand on sait qu’il a loupé une bonne partie de la saison à cause du jambe brisée par Antoine Kombouaré, qui n’est pas que footballeur et entraîneur, mais également boucher.
Peu le savent, mais Frandsen est dans le Guinness book comme « l’homme le plus blond du monde »
Rapportée à nos critères, sa performance lui vaudrait 14 buts, énorme pour un milieu. D’ailleurs, son absence fût très préjudiciable et coïncida avec une période de disette offensive et de contre-performances : de la 13ème journée à la 21ème, les Lillois ne marquent que 4 fois. Titulaire à Nancy pour la première fois depuis sa blessure, fin décembre, il offre la victoire aux Dogues grâce à un doublé.
Des saisons sans buteur
Dans la grande majorité des cas, les totaux corrigés selon nos critères des meilleurs buteurs des dogues atteignent ou dépassent les 12 buts (cela arrive 16 fois sur 21) avec une forte concentration aux alentours des 14-15 buts. En somme, cela atteste que certaines saisons sans buteur atteignant un niveau élevé de buts marqués s’expliquent en partie par des blessures de l’avant-centre ou par un niveau particulièrement défensif du championnat. François Brisson, en 1990/1991 en est la plus parfaite illustration : blessé une dizaine de matches au cours d’une saison extrêmement défensive (voyant par exemple Cannes finir 4ème avec 32 buts inscrits), il marque 10 fois, mais rapporté à un temps de jeu de 3000 minutes dans un championnat à 2,5 buts /match, il « aurait » scoré à 15 reprises.
Franfois Briffon
Parallèlement, on observe que les saisons avec peu de buts inscrits par le meilleur buteur ont lieu des saisons où le LOSC n’a pas d’avant-centre stabilisé. En 1982/1983, Verel et Françoise se succèdent en pointe, sans grand succès, et c’est Henry qui finit meilleur buteur (8 buts, 9 en corrigé) ; en 1989/1990, c’est Pelé qui finit meilleur buteur (9 buts réels comme suivant l’indicateur) ; Assadourian est dans ce cas en 1992/1993 (6 buts, 7 corrigé) quand Mota, Nouma et N’Diaye se succèdent en pointe ; Sibierski ne score que 7 fois en 1994/1995 (en réel comme en corrigé), le « buteur » annoncé, Franck Farina loupant une grande partie des matches (6 buts en tout, 10 en corrigé).
Voilà, voilà. Tout ça pour dire que, en gros, nos buteurs réalisent souvent des performances voisines d’une saison à l’autre une fois mis de côté les facteurs sur lesquels eux-mêmes n’ont aucune prise.
Posté le 22 avril 2017 - par dbclosc
Le LOSC, champion de Bretagne 2016 !
Ce week-end a lieu un événement d’importance majeure pour l’histoire et l’avenir de la France. Vous l’aurez bien compris, je parle bien évidemment de ce match qui va opposer Lille à Guingamp. Comme ça arrive régulièrement, Lille est donc opposé à des Bretons, les seuls dans l’imaginaire collectif à concurrencer les Nordistes dans la compétition éthylique.
Nolan Roux, symbole étincelant de la relation filiale entre Bretagne et Nord
Bref, on est un peu bretons sur les bords. Cela justifie à bien des égards de considérer le LOSC comme étant légitimes à concourir pour le titre plus ou moins officieux de champion de Bretagne. On a donc fort logiquement calculé le parcours du LOSC dans un championnat 2015/2016 qui n’aurait opposé que les clubs bretons, à savoir Rennes, Guingamp, Lorient, Nantes (même si tout le monde n’est pas d’accord pour dire qu’ils sont bretons) et donc Lille (là, au moins, tout le monde est à peu près d’accord).
Voilà ce que donne ce classement pour la saison 2015/2016 :
Pts |
J |
v |
n |
d |
bp |
bc |
GA |
|
Lille |
13 |
8 |
3 |
4 |
1 |
10 |
4 |
6 |
Nantes |
11 |
8 |
3 |
2 |
3 |
7 |
12 |
-5 |
Guingamp |
10 |
8 |
2 |
4 |
2 |
15 |
10 |
5 |
Rennes |
10 |
8 |
2 |
4 |
2 |
11 |
13 |
-2 |
Lorient |
7 |
8 |
1 |
4 |
3 |
10 |
14 |
-4 |
Lille est donc champion de Bretagne 2015/2016. Nantes est le dauphin des dogues, et Guingamp, notre adversaire du jour finit troisième. Le champion contre une équipe de milieu de tableau, le LOSC est donc large favori. Attention quand-même, les Guingampais ont quand-même terminé avec la meilleure attaque du championnat.
Une autre manière de voir les choses, à notre avis bien moins pertinente parce qu’elle ne nous arrange pas, c’est aussi de regarder ce même championnat breton cette année. A priori, ça risque d’être chaud pour Lille de conserver son titre. En effet, sauf révélation de scandales improbables, Lille ne rattrapera pas en deux matches les 13 points de retard qu’il a sur Rennes, ni les 10 sur Lorient (tu as bien lu « sur Lorient ») et ses 8 sur Guingamp. Avec 2 points en 6 rencontres, Lille peut encore espérer dépasser Nantes (5 points en 6 rencontres). Un championnat breton 2016/2017 bien scandaleux en somme (enfin en Bretagne).
Posté le 4 mars 2017 - par dbclosc
Ces LOSC à la lutte pour le maintien après 27 journées depuis 1982
A l’issue de la 27ème journée, le LOSC se retrouve quatorzième. Et encore, Caen et Metz, un point derrière nos Dogues, ont respectivement un et deux matchs en retard : autant dire que la place « réelle » du LOSC se situe plutôt vers la 16ème place avec un point de marge sur Nancy et deux sur Dijon, ce dernier ayant un goal-average meilleur que celui des Lillois. On avait perdu l’habitude de lutter pour le maintien, mais c’est cette fois une réalité. Même très mal embarqué la saison dernière, le LOSC comptait pourtant cinq points de plus au même stade du championnat.
Ceci étant, ne dramatisons pas. Si on redécouvre ce désagréable sentiment de devoir « lutter jusqu’au bout » pour le maintien, on l’a pourtant souvent connu depuis la fin de saison 1976/1977. Et, depuis cette date, nous ne sommes descendus qu’ à une seule reprise, en 1997. On te propose un petit retour sur les dix dernières fois où le LOSC s’est retrouvé dans une position similaire après la 27ème journée pour te rendre compte de ce que cela implique.
En situation difficile mais pas encore relégable : normal ça nous arrive jamais aussi tôt
Depuis 1982/1983, le LOSC a été en position de lutter pour le maintien après 27 journées à dix reprises. Autant dire qu’on a (eu) l’habitude. Ceci étant, jamais depuis cette date le LOSC ne s’est trouvé en position de relégable (ou de barragiste) à ce stade du championnat (1). Autant dire qu’être dans cette position au classement ne nous dit rien de ce qui adviendra ensuite.
Relégables quelques temps, les Dogues redressaient la barre, étaient déjà hors zone rouge après 27 journées et allaient terminer 10èmes
On n’a pas beaucoup de marge sur le 18ème : c’est bon signe
Sur les dix dernières fois où le LOSC était à la lutte pour le maintien après 27 journées, il lui est arrivé à quatre reprises de n’avoir qu’un ou deux points de marge sur le premier relégable : en 1983, 1985, 1993 et 1994. A chaque fois, ça s’est bien passé ensuite puisque le LOSC s’est maintenu Mieux, il termine systématiquement au moins aussi haut au classement qu’il ne l’est après 27 journées.
A l’inverse, avoir de la marge n’est pas nécessairement bon signe. En 1996/1997, le LOSC est 16ème au classement après 27 journées, mais dispose d’une marge de 7 points sur Caen, 18ème. Lille finira la saison catastrophiquement et connaît alors sa seule relégation de la période. Alors, du point de vue de la lutte pour le maintien, cette faible avance de la saison 2016/2017, c’est plutôt bon signe.
Ça ne se voit pas très bien sur la photo, mais Bojan Banjac et Miladin Becanovic sont en train de lutter pour le maintien
Admettons quand même qu’on fait là une présentation avantageuse pour cette thèse. En effet, si le LOSC a alors 7 points d’avance sur le 18ème (qui constitue presque toujours la première place de relégable ou de barragiste), il y a avait cette saison-là quatre relégables : Lille n’avait alors « de la marge » que sur le 18ème, habituel premier relégable, mais seulement deux sur Le Havre, 17ème et réel premier relégable.
Mais bon, presque toujours on s’en sort. Mieux, en général on progresse au classement
Sur ses dernières luttes pour le maintien, le LOSC s’en est donc sorti presque à chaque fois. D’ailleurs, comme on te l’a déjà expliqué, le LOSC s’est fait le spécialiste des fins de saison en boulet de canon. Ceci est également vrai quand il lutte pour le maintien. Sur les dix dernières fois où le LOSC était en position délicate à l’issue de la 27ème journée, le LOSC n’a régressé qu’à deux reprises, a terminé à la même place deux fois également, mais a progressé à six reprises.
Rio a l’habitude de survoler les fins de championnat
Comme quoi, si ça tombe, à la fin de saison on sera qualifiés en Ligue des Champions (Mais avouons que sauf stratégie de corruption habile de la part de Gégé Lopez, ça risque d’être chaud).
Et puis, à Lille, quand on descend, on fait les choses bien : on prévient avant
Et puis, globalement, en allant plus loin en arrière, on se rend compte que quand le LOSC descend, il fait les choses bien, il prévient, les choses sont claires très vite. En 1955/1956, pour sa première relégation, Lille se trouve rapidement en position de relégable ou au moins de barragiste. A trois journées de la fin, avec 6 points de retard sur le premier non relégable dans un championnat où la victoire valait deux points, le LOSC était déjà presque assuré de jouer au mieux les barrages.
En 1967/1968, les Dogues assurent la relégation à deux journées de la fin et étaient en position de relégable depuis bien longtemps. En 1976/1977, c’était carrément royal : après la 27ème journée, le LOSC était déjà largué, à dix points du premier non relégable.
Il n’y a qu’en 1958/1959 que les Lillois n’avaient pas complètement prévenu. Enfin, ça n’a pas été non plus une énorme surprise, le LOSC se retrouvant très vite en difficulté.
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Quand on dit « à ce stade », on veut dire « à ce moment » et on ne fait référence à aucun stade. C’est vrai, c’est un peu ambigu dans un article de foot.