Archive pour la catégorie ‘Elucubrations vaguement intellectualisées’
Posté le 18 février 2018 - par dbclosc
Les arbitres avantagent-ils les « grands clubs » ?
L’issue du match opposant le Real Madrid au Paris Saint-Germain a été tout à fait réjouissante pour les arbitres français. Finalement, les nombreux supporters défendant la thèse selon laquelle l’arbitrage français serait d’une nullité toute particulière – thèse toujours soutenue à travers la fameuse « preuve » selon laquelle il n’y a pas d’arbitres français à la Coupe du Monde – ont finalement changé d’avis : en fait non, les arbitres français ne sont pas plus nuls – la preuve, l’arbitre du match, M.Rocchi est italien – mais le problème se situe dans le fait que les arbitres avantagent les « grands clubs » par rapport aux petits. Le progrès est net du point de vue de la qualité de la critique puisque l’on passe d’un « les arbites sont nuls » à un « les arbites sont malhonnêtes ».
Parmi les entraîneurs, Olivier Dall’Oglio, le coach dijonnais ne manque d’ailleurs pas de rappeler qu’il est un ardent défenseur de cette thèse. En substance, il s’agit pour lui de dire que, oui, cette fois le PSG s’est bien fait avoir, mais que bon, finalement, ça leur montre un peu à ces Parisiens ce que nous, les petits, on vit au quotidien. Ce samedi 17 février, L’Equipe publie justement un article relatif à la question des avantages supposés dont bénéficieraient les cadors par rapport aux petits. Dall’Oglio y réaffirme sa thèse (qui, Dieu merci, ne lui confère pas le grade de Docteur) : « Je ne veux pas faire la pleureuse, mais c’est plus dur de siffler contre un grand club alors que, quand c’est contre nous, ça passe inaperçu ».
« Pine au bois et matez Rio ». On reconnaît bien là l’élégance proverbiale d’Olivier Dall’Oglio
Plus de pénalties en moyenne pour les « grands clubs »
Alors, qu’en est-il ? Le graphique suivant, reprenant les chiffres sur les pénalties sifflés qui ont été publiés dans l’article de L’Equipe nous donne un premier élément de réponse, bien que, en l’état, insuffisant pour trancher.
Suivant ce graphique, on pourrait être tenté de dire que les grands clubs sont favorisés puisque les clubs censés être les grands ont un nombre de pénalties obtenus en leur faveur supérieur à la moyenne. Ainsi, à eux cinq, Paris, Monaco, Nice, Marseille et Lyon ont obtenu en moyenne 6,4 pénalties par équipe, l’ensemble des autres clubs devant se satisfaire de 3,8 pénos en moyenne. Complot oblige, seul Montpellier obtient moins de pénos que nos Dogues qui n’en ont bénéficié que de deux en Ligue 1 jusqu’ici. Alors, la preuve est faite ?
Les grands clubs sont-ils favorisés au regard de leur propension à atatquer ?
En fait non. Le fait que les grands clubs bénéficient de davantage de pénalties que les autres équipes n’est non seulement pas une preuve d’un privilège qui leur serait accordé mais, au contraire, un résultat attendu. En effet, de quoi dépend qu’on obtienne un pénalty ? Déjà, facteur majeur, il faut plus ou moins nécessairement se retrouver en position d’attaque. En conséquence, on devrait logiquement attendre une relation proportionnelle entre la propension à attaquer et le fait d’obtenir des pénalties. Certes, cette chance d’obtenir des pénalties ne tient pas uniquement à la propension à se retrouver en phase offensive, certains styles de jeu – on va y revenir – se prêtant plus ou moins bien à l’obtention de pénalties. Il n’empêche, en prenant le nombre de buts inscrits par chaque équipe, on dispose a minima d’un indicateur des chances théoriques de chaque équipe de bénéficier de pénalties.
Alors, en procédant de la sorte, constate-t-on toujours un privilège accordé aux grands clubs ?
La première chose que l’on observe c’est que la majorité des clubs se situent à des niveaux très proches : douze se concentrent en effet entre 0,075 (Marseille) et 0,138 (Bordeaux).
Et, pour revenir sur la question qui nous intéresse ici en priorité, on ne constate pas d’avantage, au contraire, des grands clubs : seul le « moins grand » (du point de vue de son histoire récente et de son classement actuel) de ceux que nous avons ici qualifiés de « grands » est ici bien classé. Nice, avec un ratio de 0,32, se situe en effet en quatrième position de ce classement. Respectivement 10èmes, 11èmes et 12èmes, Monaco, Paris et Lyon se situent tout juste dans la norme. Marseille se situe pour sa part en 19ème position. En somme, il semble qu’il y a une indépendance entre le statut du club et sa propension à obtenir des pénalties.
Un effet « style de jeu » ou le simple produit de l’aléa
Le plus étonnant dans ce classement réside finalement dans le fait qu’une poignée de clubs bénéficie d’un ratio particulièrement élevé par rapport à la tendance générale. Ainsi, quatre équipes, Nice, Saint-Etienne, Caen et Toulouse obtiennent un ratio minimal de 0,32 alors que les deux tiers de l’ensemble des clubs ont un ratio inférieur à 0,14.
Toulouse, avec un ratio de 0,563, et Caen (0,462) sont-ils alors favorisés par l’arbitrage ? Suivant notre ratio, les deux clubs ont en effet bénéficié d’un nombre de pénalties 4 à 5 fois supérieur à la norme de la plupart des clubs de L1. Difficile de ne pas de poser la question des causes d’un tel avantage. On peut ici avancer deux interprétations complémentaires.
Mika Debève, concernant le cas de son club, Toulouse, qui est le club qui a obtenu le plus de pénalties (9) cette saison, avance l’hypothèse suivante : « Ce n’est pas volontaire. Mais on a des joueurs qui vont vite et qui s’engagent dans la surface ». Puisque Debève est pour nous, supporters lillois, nécessairement un éternel lensois, nous avons forcément une envie spontanée de nous moquer. « Mais bien sûr Mika, c’est bien connu, les avants toulousains vont vachement vite. J’ai d’ailleurs été très impressionné par le 100 mètres réalisé l’autre jour par Andy Delort en 24 secondes 41 centièmes. Mais quand-même, tu avoueras que, neuf pénos, pour une équipe qui est rentrée dix fois dans la surface adverse depuis le début de saison, ça fait quand-même beaucoup ». Et puis, passé notre bien légitime envie de moquerie, il pourrait être opportun de se poser la question de savoir si cette thèse est si absurde.
En effet, si nous avons avancé que la propension d’une équipe à obtenir des pénalties était étroitement liée à sa capacité à se retrouver en phases offensives, il n’empêche que, à présence offensive égale, toutes les équipes n’ont pas les mêmes styles de jeu et, ce faisant, ne basent pas leurs réussites offensives sur les mêmes facteurs. On peut alors en déduire que certains joueurs ont pour spécificités la capacité à provoquer des pénalties. A Lille, on est bien placés pour en parler (ok : on ETAIT bien placés) : Gervinho s’était ainsi jadis révélé par un style de jeu l’inclinant à obtenir un nombre particulièrement élevé de pénalties.
La seconde hypothèse explicative du fait que certaines équipes ont obtenu un nombre de pénalties beaucoup plus élevé c’est, tout simplement, l’aléa.
En fait, en soit qu’une équipe obtienne davantage de pénalties qu’une autre à occasion égale ne suffit pas à attester d’un privilège accordé à cette équipe en raison d’une cause déterminée. On a tendance à l’oublier, mais si la logique aléatoire (en gros « le hasard ») tend à favoriser des distributions plus ou moins égales entre les différentes unités, elle a plus ou moins systématiquement tendance à favoriser certains et à défavoriser d’autres (1). Nous avons par exemple procédé à un tirage aléatoire des 89 pénalties tirés depuis le début du championnat en faisant comme si chaque équipe avait autant d’opportunités, c’est-à-dire pour voir quelle distribution on aurait dans un contexte où aucune équipe ne bénéficie du moindre avantage.
En théorie, chaque équipe devrait obtenir 4,95 pénalties. En procédant à un tirage aléatoire, on constate que certaines équipes bénéficient de beaucoup plus de pénalties que d’autres : avec notre simulation, Troyes a « aléatoirement » bénéficié de 8 pénalties, Toulouse, Nice, Monaco et Angers 7; parallèlement, d’autres semblent pénalisées : Saint-Etienne n’obtient que 2 pénalties à ce petit jeu, Bordeaux 1 seul. Et pourtant, ici, malgré ces grandes différences individuelles, seul l’aléa est en cause.
Ah oui, on oubliait, il y a bien sûr une autre cause explicative d’éventuels déséquilibres : le complot, ourdi par qui vous savez contre notre club. Dans ce cas, il n’est point nécessaire de procéder à de grandes analyses : en moyenne, chaque club obtient près de 5 pénalties. Le LOSC en a obtenu 2. Nous en avons dit assez semble-t-il.
Complot.
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Suivant un tirage aléatoire, les éventuels déséquilibres s’estompent à mesure qu’augmentent les effectifs, c’est à dire dans le cas présent avec le nombre de pénalties. En d’autres termes, si sur 89 pénalties la distribution peut-être relativement inéquitable, les différences observées seraient certainement très ténues avec 1000 pénalties.
Posté le 10 février 2018 - par dbclosc
Comment fonctionne la contribution de solidarité ?
Le 31 janvier dernier, nous tweetions que l’officialisation du transfert d’Aubameyang à Arsenal allait ramener plus de 300 000 € au LOSC au titre de la contribution de solidarité. Le scepticisme de certains en réaction à cette information nous pousse à croire que ce dispositif est méconnu. Dans un souci d’éclaircissement, en voici donc la présentation.La libéralisation des transferts au milieu des années 90 a fait exploser le nombre de transferts et les montants de ces derniers, dont le seul bénéficiaire était le club que le joueur quittait. Pour contrer ce phénomène, la FIFA a mis en place deux mécanismes pour récompenser les clubs formateurs et freiner le déséquilibre croissant du système : les indemnités de formation et la contribution de solidarité, que nous allons ici vous présenter. Souvent confondus (et plus les gens qui pensent savoir confondent, plus ils adoptent un ton moraliste, vous avez remarqué ?), ils permettent (sans doute de manière insuffisante) de soutenir les clubs formateurs, qu’ils soient amateurs ou professionnels et de les récompenser des moyens mis à en œuvre pour assurer un développement sportif et/ou humain aux joueurs.
« Si un joueur professionnel est transféré avant l’échéance de son contrat, tout club ayant participé à la formation et à l’éducation du joueur recevra une proportion de l’indemnité versée à l’ancien club (contribution de solidarité). » (Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs, chapitre VII, article 21)
Concrètement, en cas de versement d’une indemnité de transfert, le nouveau club doit prélever 5% de ce montant et le répartir entre tous les clubs par lesquels le joueur est passé entre ses 12 et 23 ans, au prorata du temps passé dans ledit club. Toutefois, si ce mécanisme est applicable pendant toute la carrière du joueur, il ne fonctionne qu’en cas de transfert international. Un transfert entre deux clubs affiliés à la même association (ex : la FFF) n’active donc pas la contribution de solidarité.
Ces 5% sont ainsi répartis :
Le nouveau club doit verser cette contribution dans les 30 jours qui suivent l’enregistrement du joueur ou, en cas de paiement en plusieurs échéances, dans les 30 jours qui suivent chaque versement.
Et pour les joueurs prêtés ?
Le prêt d’un joueur est considéré comme un transfert à durée déterminée (Règlement du Statut et du Transfert des Joueurs, chapitre III, article 10). A ce titre, il est soumis aux mêmes règles qu’un transfert définitif. Cela signifie qu’en cas de prêt payant d’un joueur sous contrat dans un club A vers un club B étranger, ce dernier doit reverser 5% de la somme à tous les clubs connus par le joueur entre ses 12 et 23 ans. En contrepartie, si ce club B accueille un joueur âgé de moins de 23 ans, il sera considéré comme ayant pris part à la formation et à l’éducation du joueur. Il aura donc droit à la contribution de solidarité lors de chaque transfert international de ce joueur.
Quelques exemples lillois
Mathieu DEBUCHY : arrivé au LOSC à 8 ans, parti à 27. Le LOSC n’a ainsi pas eu besoin de reverser un pourcentage du transfert vers Newcastle au précédent club de Debuchy (Fretin), puisque ce dernier était Lillois entre 12 et 23 ans. Newcastle et Arsenal appartenant à la même association, le LOSC n’a pas touché de somme au titre de la contribution de solidarité. Si le prêt d’Arsenal à Bordeaux fut payant, le LOSC a alors eu droit à 5% de ce montant. En revanche, Debuchy ayant résilié son contrat pour signer à Saint-Etienne, il n’y a pas eu d’indemnités de transfert et donc de contribution de solidarité, et ce malgré le caractère international de la mutation.
Yohan CABAYE : arrivé de Tourcoing la saison de son 13e anniversaire, parti à 25 ans. En se reportant au tableau ci-dessus, on constate donc que 0,25% de l’indemnité totale revient à Tourcoing (son club la saison de son 12e anniversaire) et que les 4,75% restants reviennent au LOSC. Ainsi, lors de son transfert à Newcastle à l’été 2011 (estimé à 5M€), 12 500 € ont été reversés à l’US Tourcoing. Puis, sur son transfert de Newcastle vers le PSG (estimé à 25M€), 62 500 € sont arrivés dans les caisses de l’UST et environ 1,2M€ dans celles du LOSC. Enfin, Cabaye est reparti en Premier League (estimation : 14M€). Son nouveau club, Crystal Palace, a donc versé 665 000 € au titre de la contribution de solidarité, dont 35 000 € à Tourcoing.
Aurélien CHEDJOU : son parcours est un peu plus chaotique. Il semble ainsi arriver dans un club camerounais (Kadji Sport) la saison de son 14ème anniversaire et y reste 4 saisons. Il rejoint ensuite Villareal (1 saison), Pau (1 saison), Auxerre (2 saisons), Rouen (1 saison) avant d’arriver à Lille en 2007, la saison de son 23ème anniversaire. Son transfert à Galatasaray (estimé à 8M€) oblige donc le club turc à reverser 5% de cette somme (400 000 €) de la manière suivante :
Eden HAZARD : quatre clubs se partageront la contribution de solidarité du Belge en cas de transfert international : Braine-le-Comte (0,25%), Tubize (0,5%), Lille (3,25%) et Chelsea (1%). Si on imagine donc un transfert à 100M€, le LOSC récupérerait donc 3,25M€, ce qui prouverait qu’Hazard a 2 Junior Tallo dans chaque jambe.
Adil RAMI : Fréjussien de 9 à 21 ans, Adil arrive au LOSC la saison de son 22e anniversaire. Fréjus a donc touché 4 % et LOSC 1 % sur chaque transfert international de son ancien joueur.
Pierre-Emerick AUBAMEYANG : si les Lillois ont plutôt souvenir de ses superbes capacités d’athlète, Aubameyang n’a pas spécialement brillé en tant que footballeur (14 matchs de Ligue 1, 2 buts). Prêté par le Milan AC la saison de son 21e anniversaire, il vient pourtant de permettre au LOSC de toucher plus de 300 000 € grâce à son transfert de Dortmund à Arsenal pour 63M€ (63 000 000*0.005 = 315 000 €). Laval (0,25%), Rouen (1,25%), Bastia (1%), Milan (0,5%), Dijon (0,5%), Monaco (0,25% puisqu’il ne reste qu’une demi-saison) et Saint-Etienne (0,75%) en ont également profité.
Posté le 3 novembre 2017 - par dbclosc
Du Bielsa sans Bielsisme ? Un retour sur les excès de la critique à l’encontre de Marcelo
S’il y a bien une chose qu’on ne pourra pas reprocher à Marcelo Bielsa, c’est de ne pas assumer la responsabilité des difficultés rencontrées par le LOSC. Il le dit et le répète, personne ne peut être satisfait des résultats de son travail. C’est limite s’il n’assume pas la responsabilité du pétage de plomb de son gardien contre Strasbourg. Peut-être même s’excusera-t-il bientôt pour sa faute dans l’effondrement de la tribune amiénoise. Sans compter celle qu’il pourrait avoir dans les nombreux conflits existants.
C’est d’ailleurs un fameux point d’accord entre lui-même et ses aujourd’hui très nombreux détracteurs : c’est lui, et presque lui seul, qui est responsable des actuelles difficultés lilloises. L’objet de cet article n’est pas de contester l’existence d’une responsabilité, qui nous semble nécessairement bien réelle, dans l’échec du début de saison lillois. En revanche, on s’étonne aujourd’hui de l’ampleur que les critiques prennent à son encontre. Ceci étant, c’était plus ou moins attendu : là où il y a Bielsa, on dirait qu’il fait tout absolument tout seul. Si son équipe gagne, c’est tout juste si l’on ne le félicite pas pour son incroyable but décisif inscrit depuis son banc de touche. S’il perd, les réactions sont, suivant la même logique, tournées vers sa responsabilité : là encore, on pestera sur sa responsabilité sur cette incroyable passe ratée entraînant le but adverse.
Alors, bien sûr, Bielsa est le type d’entraîneurs qui marquent d’une empreinte toute particulière le jeu de son équipe. Pour autant, même lui est soumis à tout un tas de contraintes qui lui sont extérieures. En premier lieu, les actes de ses collaborateurs.
Un effectif quantitativement réduit
Lorsque l’on étudie les spécificités de Marcelo Bielsa, on constate d’abord qu’il avait décidé de s’appuyer sur un effectif réduit. Alors qu’on avait l’habitude que les postes soient doublés partout, et ce à peu près depuis l’ère Vahid Halilhodzic (1), le technicien argentin a lui décidé de s’appuyer sur un groupe restreint, s’appuyant sur un joueur et demi par poste (en moyenne, hein, il ne les découpe pas). Ainsi, après les départs de Xeka et de De Préville, l’effectif ne compte, en dehors des jeunes formés au club, que quinze joueurs (2).
Dans ce schéma, classique jusque dans les années 1980-1990, la polyvalence des joueurs est une valeur reconnue. Cela explique qui sont les rares joueurs conservés cette saison : Ibrahim Amadou, pouvant jouer en défense comme au milieu de terrain, présente le profil idoine ; Yassine Benzia, attaquant de formation mais à l’aise plus bas et d’ailleurs reconverti au milieu par Antonetti ; Yves Bissouma, qui a montré une polyvalence aux différents postes de milieux de terrain ; Mendyl n’est « que » arrière-gauche, mais il présente un profil qui en fait un joueur adapté que Bielsa évolue en 3-3-3-1 ou en 4-2-3-1. Seul Soumaoro, défenseur central, semble faire exception à la règle, encore qu’il ait débuté sa carrière pro comme arrière latéral. Même Maignan, pourtant gardien de but, présente un profil atypique de par sa propension à jouer au pied.
La première remarque tient au fait qu’une telle philosophie présente un risque certain en cas d’absences conjuguées de plusieurs joueurs. Nous avons souligné que l’effectif lillois ne comptait que quinze joueurs de champ à la fin du mercato, mais nous n’avons pas encore précisé que, parmi eux, deux étaient blessés de longue date : Mendyl et Soumaoro. En d’autres termes, là où le risque était élevé pour Bielsa est qu’il débutait la saison en sachant qu’il s’appuyait sur un groupe de seulement treize joueurs de champ opérationnels.
Cette première remarque en appelle une seconde : en constituant un groupe réduit, la question de la répartition des joueurs par poste est cruciale. En effet, puisque seuls la moitié des postes sont doublés, cela signifie qu’il faut aussi que ceux qui ne le sont pas puissent potentiellement être occupés par des joueurs non habitués à y jouer. Or, là où le choix pouvait apparaître risqué, c’est que l’équilibre entre les différents postes apparaît déjà discutable en début de saison : alors que Bielsa s’appuie souvent sur une défense à cinq (en comptant les latéraux), son effectif ne dispose que de quatre joueurs opérationnels : Malcuit, Ié, Alonso et Ballo-Touré, même si Amadou peut très bien faire le compte dans l’axe. Dans un tel cas de figure, il suffit qu’un joueur se montre insuffisamment performant (comme ce fût le cas avec Ballo-Touré), soit blessé (comme Malcuit) ou suspendu (comme Amadou) pour qu’un important problème apparaisse.
Le fait que le milieu (quatre joueurs) soit en revanche très fourni par rapport aux besoins des systèmes de Bielsa (un ou deux sur le terrain) semble indiquer que Bielsa comptait en particulier sur ces joueurs pour jouer à d’autres postes que celui auquel ils sont habitués. En revanche, il n’est pas certain que cette prédilection pour la polyvalence des milieux signifie que Marcelo ait anticipé que ce besoin de polyvalence se fasse sentir d’abord sur les postes défensifs : si Amadou était un substitut évident dans l’axe central de la défense, il n’est pas certain que Bielsa considérait au départ Bissouma comme le remplaçant au poste de latéral droit plutôt que sur l’aile droite. De même, Thiago Maia était peut-être pressenti comme un substitut potentiel sur l’aile gauche. Difficile, bien sûr, de déterminer ce qu’avait en tête « El Loco » en déterminant un tel équilibre de l’effectif, mais puisque l’on sait qu’il ne pouvait pas anticiper à quels postes il aurait des blessés et qu’il savait que deux défenseurs reviendraient dans les semaines suivantes, il est probable qu’il ait fait le pari que sa défense tienne jusqu’au retour des blessés et que la polyvalence des milieux doive d’abord s’exercer devant.
« Quand le sage montre la Lune, l’imbécile regarde le doigt ». Ça ne nous explique toujours pas pourquoi le sage montre la Lune.
En effet, une fois Mendyl et Soumaoro revenus, la défense n’apparaît pas un secteur particulièrement décharné : sept joueurs pour quatre ou cinq places (en comptant Amadou), c’est en effet cohérent par rapport aux six joueurs pour quatre places dans le secteur offensif.
Sauf que, pas de bol, tous les besoins constatés l’ont été en défense : Malcuit se blesse sur le côté droit, justement pourvu du seul Kévin, même si Ié est une potentielle alternative ; Ballo-Touré ne se montre pas aussi performant que ça sur son côté gauche ; enfin, Amadou a été pour sa part suspendu suite au match de Troyes. Devant, Bielsa a toujours disposé d’au moins un joueur pouvant jouer sur chacun des quatre postes offensifs (3).
Des choix pas si incohérents au regard d’un effectif mal ficelé
On peut penser que cette stratégie de s’appuyer sur un groupe restreint est critiquable. Ceci étant, à partir du moment où l’on en accepte le principe, force est de constater que les difficultés rencontrées par Bielsa dans la composition de ses équipes tient à beaucoup de facteurs sur lesquels il n’avait largement pas prise. Évidemment, quand on voit ce qui s’est passé, on pourrait avoir tendance à dire que Bielsa a fait de mauvais choix. Ce qui est vrai, à cette réserve près que, par définition, Bielsa ne pouvait pas anticiper les imprévus. Et s’il avait anticipé ces problèmes en défense, recrutant davantage dans ce secteur, on se serait retrouvés avec un secteur surchargé une fois les blessés revenus et ce au détriment d’autres secteurs de jeu. Bref, vu comme ça, ce que l’on pourrait reprocher à Bielsa, c’est d’avoir voulu construire un groupe trop restreint, prenant un risque trop élevé que l’on paie aujourd’hui.
Effectivement, là où l’on aurait du mal à défendre qu’il n’y a pas eu d’erreur, c’est sur le fait de composer un groupe si réduit numériquement alors même que deux des joueurs de ce groupe déjà réduit étaient blessés en début de saison. Le pari n’était pas absurde, mais il était extrêmement risqué. Pour qu’il tienne, il aurait fallu qu’il n’y ait aucun pépin, notamment en défense, ce qui est justement arrivé. En revanche, ce que l’on ne sait pas, c’est dans quelle mesure cette stratégie est le seul produit de décisions de Bielsa ou si elle n’est pas aussi largement dépendante d’autres décideurs. Le cas du transfert de Nicolas De Préville (voir plus loin) nous semble un exemple éloquent d’une décision que Bielsa a vraisemblablement accepté plutôt qu’il ne l’a demandé.
L’un des principaux reproches faits à Marcelo Bielsa réside dans le fait qu’il utilise massivement des joueurs à des postes qui ne sont pas leurs postes de prédilection. Le reproche nous paraît en partie infondé dans la mesure où cette situation a largement été subie par Bielsa.
Par exemple, contre Nantes comme à Strasbourg, tous les joueurs qui ont débuté la rencontre ont joué à leur poste de prédilection, à l’exception d’Amadou : d’ailleurs, dans son cas, on peut se demander s’il est exact de dire qu’il ne jouait pas à son poste de prédilection dans la mesure où Ibrahim s’est depuis longtemps montré solide au milieu de terrain comme en défense centrale.
Ensuite, quand Bielsa ne titularise pas un joueur à son poste de prédilection, c’est presque toujours parce qu’il ne dispose pas de choix en la matière. En l’absence de Malcuit, qui voulez-vous mettre à droite ? On pourrait penser à Edgar Ié, puisque celui-ci a été recruté pour sa polyvalence arrière central-droit. Sauf que si Bielsa avait mis Ié à droite plutôt que Bissouma, qui aurait-il mis dans l’axe à la place de Ié ? De même, il est a posteriori aisé de critiquer le choix d’avoir aligné Maia latéral gauche à Angers et contre Bordeaux. Pour autant, a priori il n’est pas sûr que ce choix était absurde : Ballo-Touré étant loin d’être convaincant, Mendyl étant blessé, on pourrait plutôt juger que le fait d’essayer à ce poste un autre joueur n’a rien d’absurde. Après le match, certains ont jugé bon de critiquer Bielsa sur ce choix, considérant que Kouamé aurait été de manière évidente un meilleur choix. Mais sur quoi se basait cette évidence ? A peu près sur rien d’autre que la bonne deuxième mi-temps contre Nantes, c’est-à-dire sur pas grand chose en comparaison de ce que Marcelo a l’occasion de voir au quotidien des entraînements. D’ailleurs, la critique du choix de Maia semble encore aujourd’hui d’autant plus facile que contre Monaco le choix de Kouamé n’a pas semblé constituer une bien meilleure garantie. On se demande qui aurait dû occuper le poste de latéral gauche pour chacun de ces matches puisque, visiblement, à chaque fois les choix ne furent pas les bons ? Mendyl en béquille ? Ou, mieux, jouer sans latéral gauche ? Que peut faire Bielsa lors du choix de son latéral gauche s’il n’a à sa disposition que des choix qui vont insatisfaire ?
Un bouquet-mystère nommé Marcelo
Mais, bref, ce sur quoi on veut insister par là, c’est qu’il nous paraît faire un mauvais procès à Bielsa que de considérer comme un choix philosophique de sa part de faire jouer chacun à des postes qui ne sont pas les leurs. On n’est pas là en train de contester que cette attente de polyvalence n’est pas un trait caractéristique de sa réflexion. De manière plus nuancée, on voudrait mettre l’accent sur le fait que Bielsa n’a sans doute jamais eu l’intention de favoriser cette polyvalence de manière aussi brutale. D’ailleurs, il suffit de voir quels sont les joueurs présents sur le banc lillois pour constater que Bielsa n’a pas tant de choix que ça, en particulier sur les postes sur lesquels ses choix sont contestés (4).
Certains rétorqueront que la critique faite à l’encontre de Bielsa ne porte pas uniquement sur le choix des joueurs mais sur la tactique mise en place. Mais, précisément, nous mettons au défi quiconque de définir, à partir des joueurs dont Bielsa disposait au cours des dernières semaines, un système de jeu dont la cohérence et l’efficacité apparaîtrait de manière évidente comme supérieure à celui que développe Bielsa. Si l’on ne peut contester que les mauvaises performances actuelles doivent beaucoup à de mauvaises décisions, l’évaluation de la responsabilité en elle-même du technicien argentin est en revanche beaucoup plus sujette à discussions.
Le cas De Préville
Dans la multitude des critiques portées à l’égard de Marcelo Bielsa, on relève la décision d’avoir transféré Nicolas De Préville, lequel demeurait pourtant une valeur sûre du club, et dont l’absence s’avère aujourd’hui d’autant plus visible que son successeur à la pointe de l’attaque n’a encore marqué aucun but. Par exemple, la lecture faite le 18 septembre par Olivier Fosseux de La Voix du Nord de ce transfert pointe directement la responsabilité de l’Argentin : « Comment les dirigeants lillois ont-ils pu laisser filer leur attaquant de pointe […] sans avoir déniché son successeur ? Parce que Marcelo Bielsa leur a notamment défendu la thèse qu’il disposait de son remplaçant avec Pépé et Ponce. » Là où l’interprétation du journaliste nous semble discutable, c’est qu’elle semble présenter comme une évidence que Bielsa avait alors affirmé qu’il n’avait pas besoin de De Préville. Or, ce qui nous semble beaucoup plus plausible, c’est que l’équipe dirigeante a alors demandé à Bielsa qui, dans son effectif, pourrait être transféré, ce qui n’est pas du tout la même chose.
Comment en arrivons-nous à cette hypothèse ? D’abord parce qu’il nous semble que si Bielsa tenait NDP pour un joueur n’ayant pas sa place dans son effectif, il ne l’aurait pas titularisé à l’occasion de trois des quatre premiers matches en championnat. Ensuite, parce que NDP affirme lui-même que « le club » lui a fait savoir qu’ « il avait besoin d’argent » étayant largement qu’il s’agit d’une décision de l’équipe dirigeante, décision elle-même contrainte par les exigences de la DNCG. Vraisemblablement, c’est donc Gégé Lopez et son équipe qui ont alors demandé à son coach quel joueur bankable il accepterait de vendre. De fait, sachant que 1) cela ne pouvait être un défenseur vu les problèmes d’effectifs à ce poste ; 2) cela ne pouvait être une recrue puisque personne n’aurait compris que l’on revende aussitôt un joueur à peine arrivé, alors, quelles possibilités étaient offertes à Bielsa : Nicolas De Préville, Yves Bissouma et Yassine Benzia. A ceci, il faut ajouter que 40 % d’un éventuel transfert de Benzia doivent être reversés à l’Olympique lyonnais, ce qui implique qu’il aurait fallu qu’il soit revendu environ 15 à 18 millions d’euros pour rapporter autant que NDP, ce qui semble une somme nettement supérieure à son actuelle valeur marchande. Vu ce choix étriqué, on comprend que Bielsa ait choisi de privilégier le départ de NDP, dont on peut estimer raisonnablement qu’il est au faîte de sa carrière.
Dans le florilège des critiques faciles à l’égard de Bielsa, on sait que beaucoup ont affirmé que Bony lui avait été proposé en remplacement de NDP et qu’il l’aurait refusé. En creusant un peu la question, on sait que si Bielsa n’a pas marqué un enthousiasme délirant pour la venue du joueur, il y était tout de même favorable mais Bony n’avait en définitive pas accepté la proposition. On a certes eu cette représentation selon laquelle « ce que Bielsa veut, Bielsa a », mais la réalité est plus complexe : l’accord du joueur est encore une condition nécessaire à son recrutement.
Latéral gauche, droit, arrière central, Frankie avait a priori le profil pour plaire à Bielsa s’il n’avait pas 62 ans (Franck, même s’il est vrai que Marcelo aussi a 62 ans)
Soit dit en passant, cette observation met l’accent sur le fait que, si l’on veut trouver des responsables, on pourrait se questionner la stratégie Lopez, lequel est bizarrement presque totalement exempté de toute critique. S’il est en effet avéré que Bielsa a validé la stratégie du chef de tout changer dans l’effectif du club, il n’empêche qu’on ne peut pas en faire le seul produit de la décision du seul technicien argentin. La vente de De Préville met l’accent sur le fait que le bizzness plan de Lopez n’est pas aussi unlimited qu’il aime le laisser entendre même s’il faut aussi entendre que le nouveau patron du LOSC a été contraint par les règles (légitimement) imposées par la DNCG. Cela montre que Bielsa est loin d’être le seul décideur dans la construction de son équipe, contrairement à ce qui est fréquemment avancé pour justifier les critiques à son encontre.
Un ensemble de faits subis par Bielsa
Si l’on observe en détail l’ensemble des causes pouvant être raisonnablement avancées pour expliquer l’échec lillois depuis que le championnat a débuté, on constate que de nombreuses tuiles, indépendantes des décisions de l’Argentin, lui sont tombées sur le coin de la gueule.
Contre Strasbourg tout d’abord, le LOSC doit déjà composer avec deux joueurs en moins, blessés, dès la 19ème minute de jeu ce qui l’obligé, déjà, à faire rentrer en jeu un joueur à un poste qui n’est pas le sien. Si l’on a ensuite reproché à Bielsa d’effectuer son dernier remplacement tôt dans le match, force est de constater que les difficultés rencontrés par Ballo-Touré, d’autant qu’il avait déjà été averti, ne rendaient en rien absurde cette décision. Enfin, rappelons que le LOSC tient malgré tout le 0-0 dans ces conditions difficiles jusqu’à ce que Mike Maignan ne pète un plomb et lance le ballon sur un adversaire. Sur ces quatre faits de jeu, il semble que les deux premiers puissent davantage trouver leur explication dans un défaut de préparation physique et que le dernier – sans doute particulièrement déterminant – relève d’un manque de sang-froid du gardien lillois sur lequel Bielsa ne peut pas grand chose. A posteriori, on peut juger que le troisième fait, décidé par Bielsa, fût aussi lourd de conséquences. Il semble cependant d’une importance misérable au regard des trois autres. Il est évidemment difficile de déterminer quelle aurait été l’issue du match sans ces imprévus. Certains faits laissent en effet entendre que Lille n’était pas dans un bon jour. Il n’empêche, d’autres faits nous laissent penser que peu de choses auraient pu permettre au LOSC de récupérer le point du match nul, voire, sait-on jamais, de l’emporter.
En mettant ces différents éléments ensemble, l’effectif de Bielsa est-il si absurde ? Il ne nous semble pas. Examinons ses possibilités, sans chercher à évoquer celles où il place des joueurs à des postes où ils n’ont jamais joué :
Arrière droit (1 poste) : Kévin Malcuit ou Edgar Ié
Arrière gauche (1 poste) : Fodé Ballo-Touré, Hamza Mendyl, Junior Alonso
Défenseur centraux (2 ou 3 postes) : Ibrahim Amadou, Adama Soumaoro, Edgar Ié, Junior Alonso
Milieux (1 ou 2 postes) : Yves Bissouma, Ibrahim Amadou, Thiago Maia, Thiago Mendes
Meneur de jeu (1 poste) : Yassine Benzia, Farès Balhouli
Avant-centre (1 poste) : Nicolas Pépé, Ezéquiel Ponce, voire Yassine Benzia
Ailier droit (1 poste) : Anwar El Ghazi, Nicolas Pépé
Ailier gauche (1 poste) : Luiz Araujo
On observe que tous les postes ont deux possibilités, sauf pour l’aile gauche. Or, vous ne vous souvenez pas d’un joueur qu’on a proposé comme offensif pouvant jouer côté gauche et ayant été ôté de l’effectif de Bielsa ? Ben oui, De Préville.
Soulignons aussi que, dans cette liste que nous avons développée, on trouve toujours une alternative sans incriminer ce qui a été reproché à Bielsa. On lui reproche d’avoir aligné Maia arrière-gauche ? Oui, mais Mendyl était blessé, Alonso pris dans l’axe, et Ballo-Touré s’avérait contre-performant (sans vouloir charger Fodé!). A droite, Bielsa a deux choix, mais Malcuit fût blessé et Ié occupé dans l’axe. Pépé est certes le titulaire du poste de n°9, mais l’effectif ne compte – depuis le départ de NDP – que Ponce (2 buts l’an dernier avec Grenade) comme alternative.
Bien sûr, on ne peut pas retirer toute responsabilité, loin de là, à Bielsa dans la construction de son effectif et donc dans les difficultés ensuite rencontrées. Mais le parallèle avec le LOSC de Rudi Garcia champion de France en 2011 pour questionner l’évidence d’une « responsabilité » de l’actuel entraîneur du LOSC. En effet, on observe que l’effectif du LOSC lors de son dernier titre fût également particulièrement quantitativement réduit. Si l’on ne compte pas les jeunes qui n’ont alors jamais joué en équipe première, l’effectif ne compte alors que 17 joueurs de champ, Jerry Vandam compris, lequel n’a alors que 163 minutes de L1 dans les jambes.
Rudi Garcia, hilare après sa bonne blague sur la « perte des valeurs » du club. Pour rappel, ce tweet de Jean-Marie Pfouff
Or, ce qui marque lorsque l’on observe cet effectif, c’est le taux d’absence de joueurs particulièrement faible : le onze titulaire cette saison là n’a un taux d’absences cumulées (5) global de seulement 6,9 % et de 8,2 % en incluant les six premiers remplaçants. Le onze titulaire de Bielsa (en prenant pour base le match de Nantes à cette différence que Pépé est considéré comme l’avant-centre), compte 11,6 % d’absences, le taux s’élevant à 20,3 % en incluant les cinq premiers remplaçants. En fait, on constate que les choix cornéliens auxquels a été de nombreuses fois confronté Bielsa (qui vais-je mettre à tel poste, vu que je n’ai aucun joueur valide?), Garcia n’a pas dû une seule fois se les poser. Était-ce le produit d’un effectif mieux équilibré comme le pensent beaucoup ? Peut-être en partie, mais on observe aussi que Garcia se serait trouvé en position délicate s’il avait dû composer avec un cumul d’absences.
Voulait-on du Bielsa sans Bielsisme ?
Lorsque l’on regarde le bilan du LOSC de Marcela Bielsa après onze journées, on ne peut évidemment pas parler pour l’instant d’un franc succès. Pour autant, lorsque l’on observe les différents aspects sur lesquels il est attesté que Marcelo Bielsa a eu une prise directe, on ne constate aucune surprise par rapport à ce que l’on aurait pu imaginer connaissant ses marottes. En somme, reprocher à Bielsa d’avoir pris les décisions qu’il a prises revient à lui reprocher d’avoir pris les décisions qu’on attendait qu’il prenne.
On ne cherchera pas ici à trancher sur les responsabilités respectives de chacun dans les difficultés actuellement rencontrées par le LOSC, mais on se bornera ici à constater que, s’il fallait en identifier, nombreuses seraient celles qui n’auraient pas pour origine les décisions du technicien argentin lui-même.
D’abord, s’il semble avéré que le recrutement lillois a été intégralement validé par Marcelo Biela, il n’empêche que ces décisions ont été étroitement encadrées par les pré-sélections opérées par Luis Campos. Par ailleurs, si cet effectif semble comporter des choix douteux, il faut souligner qu’il s’agit d’une conséquence plus ou moins nécessaire lorsque l’on décide de transformer de A à Z un effectif. Or, s’il semble que cette stratégie ait été validée par Biela, et qu’elle a peut-être contribué à le décider sur son engagement à Lille, il ne semble pas justifié de lui en attribuer l’entière paternité. Gérard Lopez s’est aussi saisi de cette stratégie pour mettre en scène son volontarisme dans la rupture avec l’ère Seydoux. Or, s’il y a bien un aspect sur lequel Marcelo Bielsa arrivait dans l’inconnu, c’est bien celui-là : jamais les projets dans lesquels il s’était jusque là inscrit ne furent associés à de telles transformations de l’effectif.
Enfin, on pourrait ajouter que ça n’est pas Bielsa qui a décidé que son effectif connaîtrait autant d’absences. D’ailleurs, lorsque l’on regarde les succès passés d’ « El Loco », on observe qu’il avait pu s’appuyer sur un groupe réduit ne connaissant pratiquement aucune absence. Le Bilbao de la saison 2011/2012 reste dans les mémoires, avec une finale d’Europa Ligue et de Coupe du Roi à la clé. Or, on observe que le club espagnol s’est presque appuyé exclusivement sur le même onze au cours de son copieux programme de la seconde partie de saison : entre le 8 janvier 2012 et le 25 mai 2012, Bilbao dispute ainsi 22 matches de Liga, 7 de coupe du Roi, 9 en Europa League, soit 38 rencontres en 138 jours. Ce qui semble alors évident c’est que, avec un tel programme, l’une des conditions de faisabilité résidait dans une parfaite préparation physique. On sait justement que, à Lille, Marcelo Bielsa ne s’est pas montré satisfait du travail de Gabriel Macaya, le préparateur physique : on ne se permettra pas ici de juger du travail de ce dernier, conscients que nous sommes de la part d’imprévisible et de non maîtrisable dans les conséquences de son travail. Il n’empêche, on ne peut manquer de faire remarquer que la préparation physique fût l’un des facteurs pesant négativement sur les performances lilloises, et on voit mal comment on pourrait, sans plus d’argument, en imputer la responsabilité à Bielsa.
Une fois pris en compte ces éléments, on voit qu’il ne reste plus de la critique que le reproche d’ avoir « fait du Bielsa », sans d’ailleurs que soit démontré que « faire du Bielsa » soit la réelle cause des difficultés rencontrées. La tactique utilisée, la volonté de s’appuyer sur un groupe restreint et polyvalent, l’intransigeance du technicien, sont aujourd’hui présentées comme les raisons de l’échec. Mais alors, si c’est le fait de « faire du Bielsa » qui pose problème, alors pourquoi avoir, dans un quasi-consensus, exigé d’avoir Bielsa ? La principale incohérence est là. Si l’on demande à Marcelo Bielsa de faire ce qui lui est spécifique, on ne peut ensuite lui reprocher de le faire.
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On observe une exception notable avec le LOSC de Rudi Garcia l’année du titre qui compte 16 ou 17 joueurs de champ, selon que l’on compte ou non Idrissa Gueye parmi eux.
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Rominigue Kouamé, n’est pas compté dans l’effectif mais est ici considéré comme « jeune », dans la mesure où celui-ci n’avait jamais été convoqué en match avec l’équipe première avant l’arrivée de Bielsa. Ballo-Touré est en revanche considéré comme faisant partie de cet effectif même si le joueur, en provenance de Paris, n’y avait jamais joué avec l’équipe première (une présence sur le banc).
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Si l’on peut douter que la place de Nicolas Pépé soit dans l’axe, on peut en tout cas constater que le choix de Bielsa de le faire jouer à ce poste ne réside pas dans l’absolu manque d’autre solution puisque Ponce a été recruté pour y jouer.
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A ce titre, s’il est vrai que Hamza Mendyl est à nouveau disponible, il revient depuis peu d’une grave blessure, ce qui explique bien sûr la prudence dont fait preuve Marcelo Bielsa par rapport à lui : au regard des difficultés rencontrées pour le poste d’arrière-gauche, on comprend qu’ El Loco », pas si fou, n’ait pas voulu prendre de risque avec celui qui est sans doute sa meilleure arme à ce poste.
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Le taux d’absence est calculé en rapportant le nombre de rencontres pour lesquelles le joueur n’était pas présent sur la feuille de match rapporté sur le nombre total de rencontres.
Posté le 28 octobre 2017 - par dbclosc
Lille/Marseille, au-delà du terrain
Bien sûr, le match de dimanche revêt une importance sportive cruciale. Mais il est aussi porteur d’enjeux parallèles sur lesquels nous nous focalisons ici : peut-être, au vu de l’état de forme des Dogues, parce qu’on a davantage de probabilités d’y être plus à notre avantage que sur le terrain.
Lille/Lens : égalité
« Mais qu’est-ce que Lens vient faire ici ? » vous demandez-vous. Eh bien, dimanche est un grand jour : contre Marseille, le LOSC égalera le nombre de matches joués par Lens en D1/L1. Autrement dit, conséquence logique (rappelons amicalement que Lens est en L2), dès la semaine prochaine, le LOSC passera devant son voisin. Quoi de mieux qu’un déplacement à Metz pour fêter ça ? Si le match à Amiens n’avait pas été interrompu, ce Lille/Marseille aurait constitué le match du « dépassement ».
Le LOSC joue en effet sa 58e saison dans l’élite, et ce Lille/Marseille en constitue son 2120e match, soit le nombre actuel de matches joués par les Lensois, 10èmes au classement des équipes les plus capées à ce niveau. Pour le LOSC, le Top 10 est donc pour 22H50 ! Chute au classement à Lens !
Et tant qu’on y est, statistique amusante, si Lens a plus marqué que Lille en L1, l’écart n’est que de 22 buts : 2972 buts marqués par les Lensois, 2950 pour les Lillois1. Il y a donc fort à parier que Lille dépassera Lens sur ce plan là aussi cette saison, et peut-être dès dimanche, quand Mandanda ira chercher pour la 23e fois le ballon dans ses filets.
Le bâton de Bourbotte de retour au bercail ?
Pour rappel, le bâton de Bourbotte est un trophée virtuel inspiré, au niveau international, du bâton de Nasazzi. Marseille le détient depuis sa victoire à Nice le 1er octobre, Nice qui le détenait depuis sa victoire contre Monaco, etc. Le charme de ce trophée est que tout le monde peut l’obtenir, même très ponctuellement : il suffit de battre le détenteur. Et si on remonte à l’origine du bâton de Bourbotte, on se retrouve à Lille : inventé en 1946, on lui a donné le nom du capitaine de l’équipe alors championne de France : François Bourbotte. Autrement dit, le lien entre le bâton de Bourbotte et le LOSC est historique, et ce serait un juste retour des choses de le voir de nouveau s’arrêter à Lille, qui se classe 8e au classement des équipes qui l’ont le plus détenu (en nombre de matches). Sur les 33 fois où Lille a (re)pris le bâton, Marseille est précisément l’équipe contre laquelle le LOSC a le plus récupéré son dû (3 fois). Notons que l’OM nous l’a aussi le plus piqué (4 fois). Normal, entre deux des équipes qui comptent le plus de matches en L1. D’ailleurs, on l’a perdu pour la dernière fois le 18 décembre 2016, au Vélodrome (0-2), après que nous l’ayons récupéré une semaine avant contre Montpellier (2-0). On a longuement parlé de la carrière de François Bourbotte dans cet article, et toutes les stats relatives au LOSC et au bâton de Bourbotte sont sur le site officiel du trophée.
Le retour de Florian Thauvin, l’enfant gâté
Ne ne nous faites pas dire que cet individu est une raclure : ce n’est pas parce qu’il a eu un comportement indigne d’un joueur professionnel et irrespectueux à l’égard du club qu’il faut pour autant le traiter de déchet. Rappelons les faits : Thauthau signe un contrat de 4 ans et demi au LOSC en janvier 2013, en étant prêté dans la foulée à Bastia pour terminer la saison. Il est même diplomatiquement écarté pour la rencontre Bastia/Lille jouée le 21 avril 2013 (1-2). Et puis l’OM manifeste son intérêt pour cette tête pleine d’eau, intérêt réciproque puisqu’on apprend qu’il s’agit du « club de coeur » de l’autre, que des observateurs surnomment « le traître ». À coups de déclarations dans la presse, le Reynald Pedros du pauvre laisse entendre que le projet du LOSC, sans Ligue des champions, ne l’intéresse plus (quand il a signé en janvier, le LOSC était 11e…). En outre, sa belle deuxième partie de saison en Corse ayant fait monter les enchères, son entourage se montre bien plus gourmand et cherche à renégocier son salaire. Le conflit dure plusieurs semaines, l’OM propose de racheter le contrat d’El Bradefero, qui se met en grève, et quitte finalement le LOSC pour 15 millions. Dans le fond, une belle affaire financière, et surtout une belle tête de con, disent certains, mais nous ne relayons pas ici ces bassesses. Du coup, il a reçu lors de son premier retour sous le maillot de l’OM, en décembre 2013, un accueil mémorable. Insulté dès son arrivée à Lesquin, il est conspué de bout en bout du match, chacune de ses prises de balles déclenchant les huées du public, et tout prend une saveur encore meilleure avec le scénario du match : les Lillois inscrivent le but vainqueur à la 93e, juste après la sortie de celui que certains appellent Judas (pas nous hein). Le gros plan sur son regard dépité, depuis le banc, est classé par de nombreux psychiatres comme un des meilleurs remèdes contre la dépression (0’45 ») :
Bielsa/Garcia : des entraîneurs à la côte élevée… surtout chez l’adversaire
Si Marcelo Bielsa, comme il l’a lui-même reconnu cette semaine, a un peu perdu de crédit après ce début de saison très médiocre, sa côte est intacte à Marseille, où la saison qu’il y a effectuée (plus un match), si elle a été inégale, a au moins permis de voir un football spectaculaire et innovant. La manière qu’a Bielsa de parler de football et la manière dont il l’a mis en pratique ont laissé une forte empreinte, qu’on approuve ou non ses méthodes.
Rudi Garcia, en dépit d’un bien meilleur classement, n’a pas encore convaincu à Marseille, même si le simple fait de ne pas avoir perdu contre Paris a donné le sentiment que l’OM avait gagné sa deuxième Ligue des Champions, ce qui illustre l’incroyable capacité de volatilité des commentaires dans le football à partir d’un seul résultat. De même que Bielsa était porté aux nues après la première journée et la victoire conte Nantes, le voilà désormais voué aux gémonies, sans que le projet n’ait beaucoup changé. À ce titre, on le rejoint assez quand il déclare que les commentaires sur son travail sont souvent jugés à l’aune des résultats sportifs, ce qui peut en effet constituer un point de départ, mais nettement insuffisant pour avoir une vision globale de ce qui se passe à Lille, sauf à se complaire dans l’avis uniquement ponctuel et le retournement de veste. C’est généralement de cette manière que se distinguent les personnes qui n’ont aucun principe, et sont dès lors spécialisées dans le fait d’affirmer tout et son contraire à quelques semaines d’intervalle.
Si, pour le moment, le problème à Lille est surtout d’ordre tactique, l’OM n’est pas pour autant épargné mais c’est surtout c’est la capacité de Rudi Garcia à être d’une mauvaise foi crasse sur l’arbitrage et les performances de son équipe qui ont beaucoup agacé. On a connu ça aussi. Mais on se rappelle surtout qu’on s’est souvent régalés en regardant jouer son équipe, et on ne peut pas lui retirer sa capacité à bien faire jouer offensivement une équipe qui a de bons joueurs. Même si, a posteriori, son empreinte sur le club est bien moins moindre que celles laissées par Halilhodzic ou Puel, on a aimé cette période. Et rien qu’en tant qu’ancien joueur du club (1983-1988), Rudi mérite bien un accueil chaleureux.
Les retours de Dimitri Payet et d’Adil Rami
Si Payet a été sous contrat durant 2 saisons à Lille, on ne peut pas dire que sa première saison ait été une grande réussite. Encore trop maladroit et dans l’ombre d’Hazard, il était loin de l’envergure qu’il a prise ensuite, à Marseille puis en équipe de France. Il avait d’ailleurs été en partie sifflé lors de son premier retour avec le maillot de l’OM, pas nécessairement pour ses performances, mais davantage pour la manière dont il semble avoir considéré le LOSC. On en avait parlé dans cet article, et on n’en change pas un mot : « irrégulier (et assez peu en vue lors de sa première saison), et ayant davantage donné le sentiment de considérer le LOSC comme un tremplin pour sa carrière qu’il ne s’est investi dans le club, il ne laisse pas beaucoup de regrets ». Seuls ses 6 derniers mois ont été d’une grande qualité : il formait avec Kalou et Rodelin un redoutable trio offensif. Bon, aux dernières nouvelles, il serait forfait.
Quant à Adil Rami, on connaît sa trajectoire si particulière, d’employé municipal à Fréjus à l’équipe de France, via le LOSC. Sa bonne humeur, ses belles performances sous le maillot lillois, son but à Lens, son coup-franc dans la lucarne de Janot, son déguisement de mascotte, sont de bons souvenirs. Même si, comme l’a dit Garcia un soir à Monaco, « tu fais chier, Adil », on sera bien content de le revoir, en espérant tout de même qu’il ne retrouve pas complètement son niveau lillois.
Et profitons-en pour penser à ceux qui ont porté les couleurs des deux clubs, en vrac : Bihel, Domergue, Angloma, Pelé (vous avez vu ce super article dans LOSC in the city cette semaine ?), Passi, Galtier, Becanovic, Decroix, Nouma, Ecker, N’Diaye, Brunel, les frères Cheyrou, Pedretti, Moussilou, Bonnart, liste à compléter.
Soutien à Marcelo Bielsa
Vous l’aurez compris, on fait partie de ceux qui ont du temps et qui gardent confiance, ce qui n’empêche pas de s’inquiéter de temps à autre. On a suffisamment marqué nos réserves envers certains de ses prédécesseurs pour ne pas affirmer clairement qu’on est derrière l’entraîneur Argentin. En regardant quelques-unes de ses stats à Marseille, on a vu que si, globalement, la deuxième partie de saison avait été plus moyenne, il y a eu une période creuse de 11 matches, entre les 24e et 34e journées, où l’OM n’a pris que 10 points. On pourra dire que c’est une nouvelle illustration de l’incapacité de Bielsa à offrir des performances autres qu’en dents de scie, mais on peut aussi y voir la promesse de lendemains meilleurs. L’effectif est jeune, inexpérimenté, manque d’automatismes, mais Bielsa n’a jamais été dans de meilleurs conditions pour travailler. Difficile de démêler le vrai du faux dans ces circonstances, mais la presse a relaté cette semaine un début de fronde des joueurs, lassés de ne pas jouer à leur poste. C’est compréhensible, bien sûr. Reste à savoir si le temps qu’exige la concrétisation des fruits du travail résistera à la temporalité imposée par ceux qui aimeraient tout, tout de suite. Joueurs compris. Pour le moment, la direction du LOSC est dans cette optique.
Le journaliste Romain Laplanche, auteur par ailleurs d’un livre sur Marcelo Bielsa2, a transcrit certaines des paroles de la conférence de presse de notre entraîneur cette semaine. À lire et à garder en tête.
On voudrait rappeler quelques faits passés. Globalement, il a fallu 18 mois à Claude Puel, arrivé lors de l’été 2002, pour poser son empreinte sur le jeu et obtenir des résultats satisfaisants. Rappelons-nous que lors de sa première saison, le LOSC a perdu ses deux premiers matches à domicile 0-3, n’a marqué son premier but que lors de la 5e journée, et n’a gagné qu’à la 6e… De janvier à mars 2003, le club a connu une infâme série de 7 défaites consécutives, n’a pris que 14 points sur la phase retour, et ne s’est sauvé qu’à la 37e journée.
Rappelons-nous que pour sa deuxième saison, si Puel a démarré en fanfare (9 points en 3 matches), le LOSC a ensuite enchaîné avec 12 matches sans victoire. Qui regrette aujourd’hui qu’on ait laissé du temps à Claude Puel ?
Quant à Rudi Garcia, rappelons-nous qu’il a placé le LOSC dernier après 3 journées en août 2008. Rappelons-nous que la saison suivante, dans un contexte certes particulier après son éviction-réintégration, le LOSC n’a gagné que 2 fois sur les 10 premières journées. Le 25 octobre 2009, après une nouvelle défaite à Auxerre, le LOSC ne comptait que 10 points en 10 journées. Qui regrette aujourd’hui que le club ait maintenu Rudi Garcia ?
Pour conclure, il n’est pas dans nos habitudes d’entrer dans les considérations directement sportives, le système de jeu, la performance des joueurs, du moins à chaud. D’abord parce qu’assez de conneries sont dites. Ensuite parce qu’il est bien difficile de s’exprimer quand on ne sait pas de quoi sont faites les séances d’entraînement ni quelle est l’ambiance au sein du groupe et l’état de forme de chacun. Et enfin parce qu’on garde, à tort ou à raison, une absolue confiance en Marcelo Bielsa, dont on boit les paroles en conférence de presse (en plus d’une bonne bière). Peut-être qu’on se fait complètement entuber, mais ça vaut le coup d’y croire et d’être patient, même si on a trouvé très drôle la banderole de mercredi soir. Bon, le seul truc qui nous a un peu fait douter, c’est de voir Marcelo en position quasi religieuse lors des tirs aux buts, tenant son crucifix comme s’il constituait son dernier espoir. Si c’est ça, d’accord, on est mal barrés. Ceci étant dit, on va tout de même, une fois n’est pas coutume, suggérer la meilleure composition possible, à nos yeux, pour dimanche et, si je veux, j’ajoute encore des virgules à cette phrase.
Dans les buts : Elisa Launay et Mike Maignan. D’aucuns argueront qu’il n’est pas possible réglementairement d’aligner deux gardiens de buts. Oui, et alors ? Elisa Launay n’est pas gardien de but, elle est gardienne de but, donc c’est bon. Cette petite astuce devrait nous garantir d’encaisser moins, d’autant que Launay, elle, pense davantage à mettre les mains. Mike Maignan, quand il aura fait 3 roulettes et deux sombreros sur les adversaires, sera notre premier relanceur : c’est après tout la meilleure qualité qu’il a démontrée jusque là. Cela nous permet de jouer avec un bloc haut placé.
Arrière droit : Kévin Malcuit, excellent aussi bien défensivement qu’offensivement, du moins quand il joue.
Défense centrale : Maud Coutereels, taulière de la défense féminine. Puissance, jeu de tête, qualité de frappe sur les coups de pied arrêtés, sens du placement : adieu les errements défensifs. À ses côtés, Ibrahim Amadou, pas le plus paumé sur un terrain, prendra du galon.
Arrière gauche : Marine Dafeur. Irréprochable depuis le début de saison, nous avons déclamé notre admiration dans le compte-rendu du dernier match de l’équipe féminine à domicile. Voilà une fille qu’elle est bien. Et une Marine à gauche dans le Nord, c’est un beau pied de nez.
Milieu défensif : Thiago Mendès. La grosse satisfaction du début de saison. Sa blessure à Strasbourg lors de la 2e journée a été fort préjudiciable et explique sans doute en partie le début de saison laborieux. Et en plus, il marque.
Milieu défensive : Silke Demeyere. Est-il vraiment besoin d’argumenter ? MARQUAGE INDIVIDUEL SUR THAUVIN, ça nous rappellera les meilleurs moments de Fernando D’Amico : We moeten niet loslaten, we moeten kwalificeren
Milieu offensif droit : Patrick Collot. Patrick, tu es toujours à Lille, et ta vitesse nous manque. Reviens !
Milieu offensive axiale : Rachel Saïdi. Vision du jeu, qualité de passe : Rachel retrouvera avec nous son poste de prédilection, alors qu’elle est pour le moment cantonnée à gauche par Jérémy Descamps.
Milieu gauche : Luiz Araujo. Encore un peu fébrile physiquement et hésitant dans la dernière passe, mais de belles promesses.
Avant-centre : Ouleye Sarr. Elle court vite, elle a une impressionnante détente, elle est la meilleure buteuse du LOSC, et désormais buteuse également en bleu, sa présence aux avant-postes est indiscutable.
Voilà donc l’équipe que nous suggérons, avec une colonne vertébrale très féminine : nous nous caractérisons avant tout par notre pragmatisme, et on pioche là où ça fonctionne.
Remplaçants : Alonso, Ié, Benzia, Pasquereau, Saint-Sans.
Et maintenant, on va vous avouer un truc qui vous a échappé : notre équipe est composée de 12 éléments. Ils sont beaux les observateurs, z’aviez rien vu ! Mais si c’était ça aussi, la solution ?
FC Notes :
1 En revanche, les Lensois ont davantage encaissé : 3011 buts, contre 2677 pour nous. Leur différence de buts est de -39, contre +273 pour nous. Reste à espérer qu’on n’égale pas Lens sur ce plan là cette saison.
2 Le mystère Bielsa, Solar, 2017
Posté le 5 août 2017 - par dbclosc
Lillois, bourgeois et consommateurs, Lensois, prolétaires et passionnés. Retour sur les mythes des supportérismes différenciés en Nord-Pas-de-Calais.
Encore aujourd’hui, on entend encore parler du RC Lens comme possédant le « meilleur public de France ». A l’appui de cette thèse, le constat que, même en L2, le club du bassin minier accueillait encore 28 896 spectateurs par match, soit presque autant qu’à Lille (29 487) qui s’est pourtant récemment habitué à lutter chaque saison pour une qualification européenne. Un tel écart entre les « raisons objectives » d’aller au stade et le constat d’une similitude des affluences amène alors presque invariablement à la même interprétation : c’est parce que le public lensois est d’une particulière fidélité à ses couleurs, à l’opposé de Lille, la bourgeoise « consommatrice » de football.
Précisons-le d’emblée, pour considérer qu’il faudrait davantage d’abnégation pour aller voir jouer un Racing luttant pour la montée en L1 que pour aller voir jouer le LOSC la saison dernière, il faut sans doute n’avoir rien vu du spectacle proposé alors par les Dogues. En outre, l’incertitude étant un puissant aiguillon à aller au stade, le championnat de L2 de l’an dernier, particulièrement serré, était beaucoup plus incitatif pour les supporters lensois que pour ceux de Lille pour lesquels l’incertitude s’est pour l’essentiel limitée à la détermination de classement final, relégation comme ambitions européennes apparaissant rapidement irréalistes.
Ceci étant dit, le mythe du « meilleur public de France » pour Lens ne repose pas sur le vide absolu et, en contraste, Lille, qui dispose pourtant d’un bassin de population supérieur a pu paraître bien peu passionnée pour le football au regard des affluences constatées depuis la remontée de 1979.
Graphique 1 : nombre moyen de spectateurs par match à Lille et à Lens (1978-2017)
Sur ce graphique, on observe bien une différence flagrante d’affluences entre Lille et Lens, culminant jusqu’à un rapport de 1 à 4 au cours de la saison 1998/1999. Le discours associant Lens à la passion de ses supporters prend d’ailleurs une importance particulièrement forte à la fin des années 1990, quand ses affluences atteignent ses niveaux les plus élevés quand, à Lille, celles-ci ont globalement stagné en dessous des 10 .000 spectateurs par match depuis le début des années 1980.
De même, la bascule entre Lens et Lille au niveau des affluences apparaît arriver bien tardivement puisqu’il faut attendre 2013 pour que les affluences lilloises dépassent celles de Lens : même l’année du doublé, en 2011, les affluences lilloises sont très loin de celles du voisin lensois qui terminait pourtant le championnat à la 19ème place. Nous y reviendrons ensuite longuement, les causes qui expliquent cela sont pourtant loin de se limiter à une passion supérieure de la part des Artésiens par rapport aux Lillois.
Deuxième trait caractéristique du public lensois qui est véhiculé dans les discours publics, ce supportérisme s’ancre dans une tradition ouvrière, c’est-à-dire qu’il se distingue à la fois par son ancrage populaire et par le fait qu’il s’inscrit dans un héritage de long terme.
A Lens, un supportérisme ouvrier encadré et encouragé par la bourgeoisie locale
Afin de se prononcer sur cet héritage spécifique, il est alors opportun de comparer les affluences de Lens et de Lille en remontant plus longtemps en arrière, c’est-à-dire en remontant jusqu’en 1947/1948, saison la plus ancienne sur laquelle nous avons pu obtenir des données.
Graphique 2 : nombre moyen de spectateurs par match à Lille et à Lens (1947-1978)
Ces données sont intéressantes en ce qu’elles nous montrent que la supériorité lensoise en matière d’affluences n’est pas « ancestrale » puisque les clubs des deux villes connaissent en réalité des affluences extrêmement proches jusqu’aux années 1970, Lens prenant l’ascendant à partir de 1974. On pourrait être tentés d’objecter que c’est la supériorité des résultats lillois au sortir de la guerre qui lui permet de concurrencer son voisin lensois en matière d’affluences, mais l’explication ne tiendrait au mieux que jusqu’en 1956, année de la première descente lilloise. On constate en effet que, après cette date et jusqu’aux années 1970, les affluences des deux clubs sont extrêmement proches alors même que c’est le RC Lens qui prend alors l’ascendant en termes de performances sportives, ceci étant particulièrement vrai jusqu’en 1964. Si les résultats constituent un avantage, on devrait alors plutôt conclure que ce sont alors les Lillois qui se montraient alors les plus passionnés.
En réalité, en croisant différents facteurs d’explication, on arrive assez bien à recontextualiser les différentes évolutions constatées dans les affluences de Lille et de Lens. A ce titre, il faut souligner que si le RC Lens bénéficie de la réputation d’être un club « ouvrier », ce qui est vrai à certains égards, il a été à l’origine crée à l’initiative de riches industriels des houilles du Pas-de-Calais qui s’en sont servis dans l’optique d’ « encadrer » les populations ouvrières. Historiquement, cet encadrement du club par cette haute-bourgeoisie industrielle perdure longtemps et explique la manière dont se structure le supportérisme lensois. Ainsi, suivant une logique paternaliste, les industriels voient d’un bon œil le développement du football et ils l’encouragent largement. Par exemple, après la seconde guerre mondiale, ils financent notamment le transport des ouvriers vers le stade, ce qui favorise nécessairement de fortes affluences.
A l’inverse, les dirigeants lillois n’ont alors pas de véritable stratégie d’association avec les sections de supporters, si bien que leur venue au stade est davantage tributaire d’eux-mêmes qu’à Lens. De plus, il faut également souligner que si aujourd’hui résidents roubaisiens et tourquennois ont toutes les chances de s’identifier au LOSC s’ils sont amateurs de football, cela n’était pas le cas à l’époque : le CO Roubaix-Tourcoing est en effet alors un réel concurrent au LOSC, limitant de fait le réservoir potentiel de ses supporters : jusqu’en 1955, ce sont environ 8 000 spectateurs en moyenne qui assistent aux match du CO Roubaix-Tourcoing, soit autant qui ne peuvent assister à ceux du LOSC quand ces deux équipes jouent au même moment. Dans ce contexte, le fait que Lille ait alors un public supérieur en nombre à celui du RC Lens reflète certes l’excellence de ses résultats d’alors mais traduit également son fort ancrage populaire.
Le LOSC champion de France 1953/1954
Si par la suite les courbes des affluences des publics lensois et lillois suivent des évolutions très voisines, ça n’est pourtant pas pour les mêmes raisons. Ainsi, quand arrivent les années 1960, l’industrie charbonnière entre en crise ce qui amène les industriels à moins investir dans le football, ce qui explique alors le déclin des affluences à Lens au cours des années 1960 en dépit de la stabilité des performances de l’équipe. A Lille, le supportérisme ayant été moins structuré par les élites dirigeantes, il en est également moins dépendant. Si Henri-Jooris voit également ses travées se dépeupler dans des proportions analogues à ce qu’on observe chez le voisin, la raison est différente : ici, c’est le déclin sportif qui est essentiellement en cause : Henri-Jooris accueille ainsi environ 12 000 spectateurs par match pendant sa période de gloire, puis environ 8 000 dans les années 1960, quand le club oscille entre D2 et lutte pour le maintien en D1.
L’éphémère et concomitant abandon du statut professionnel à Lens et à Lille en 1969 engendre un fort désinvestissement des supporters. Les deux ogres historiques du foot régional disputent alors leurs rencontres devant 1 200 spectateurs par match. A Lille, le public n’attendait pourtant vraisemblablement que le retour du professionnalisme pour revenir au stade : ils sont ainsi plus de 7 000 par match à venir encourager le LOSC en D2 la saison suivante, puis 10 000 pour leur retour en D1 en 1971/1972, et encore plus de 8 000 les deux saisons suivantes, à nouveau dans l’antichambre de l’élite.
Un volontarisme politique plus fort à Lens
A Lens, l’histoire est différente. Également de retour en D2 en 1970/1971, comme le voisin lillois, le public ne revient que modérément au stade, puisqu’ils sont 2 850 en moyenne cette saison-là, puis 3 200 la saison suivante. Pour autant, l’abandon des travées de Bollaert ne sera que de courte durée. Sous l’impulsion de l’action volontariste d’André Delelis, le maire de Lens, le club trouve de nouveaux moyens dont ne peuvent se prévaloir les Lillois. Le club remonte lors en D1 et les supporters sont incités à revenir au stade, à la fois en raison de la politique municipale, mais aussi en raison de résultats probants. Septièmes de D1 en 1974/1975, le Racing parvient surtout en finale de coupe de France, ce qui lui ouvre la voie à sa première qualification européenne. Deuxièmes de D1 en 1976/1977, les Lensois s’affirment comme le grand club régional, l’année même de la relégation du LOSC en D2. C’est à cette époque que se développe un public au stade Bollaert, pas tant en raison d’un « héritage » qu’en raison d’une ambition municipale conjointe à un renouveau sportif. L’agrandissement du stade dans le cadre de l’Euro 1984 contribue également à augmenter les affluences moyennes, creusant artificiellement l’écart entre les deux clubs.
Depuis qu’elle supporte Lens, Sophie Davant a pris un coup de vieux. Elle s’appelle dorénavant Sophie Daprès
Le LOSC est pour sa part soutenu beaucoup plus modérément par sa municipalité. En parallèle, les résultats sont décevants et les affluences leur sont alors assez directement corrélées. A cette époque, le Racing prend alors pour la première fois l’ascendant en termes de fréquentation du stade. Dans les années 1980, cette domination demeure toutefois toute relative est étroitement liée aux résultats. Ils sont en effet en moyenne plus de 19 000 spectateurs par match à Lens en 1982/1983 quand le club artésien finit 4ème soit plus de 10 000 de plus qu’à Lille qui termine dans le ventre mou pour la quatrième année consécutive. Les supporters lensois ne sont pourtant déjà plus que 7 000 par match six ans plus tard, l’année de la relégation, quand Lille, 8ème, atteint une moyenne de 8 500.
Au début des années 1990, Lens semble avoir pris un léger ascendant sur Lille en matière de soutien populaire. Parmi les raisons qui l’expliquent, c’est, au-delà du soutien municipal, l’existence d’une incertitude qui, liée à l’identification, constitue l’un des principaux moteurs du déplacement au stade. Or, Lille fût particulièrement mal placé en la matière depuis sa remontée de 1978 puisque les Dogues terminaient presque invariablement dans le ventre mou du classement. A l’inverse, Lens, habitué des montagnes russes a alors fait très fort en matière d’incertitude : sur la même période, les Lensois connaissent ainsi qualification européenne, relégation (avec le record du plus faible nombre de points) et remontée dans l’élite.
D’ailleurs, le parcours du Racing en 1990/1991 semble illustrer jusqu’à la perfection les conditions d’un engouement populaire, cumulant déceptions, rebondissements jusqu’à l’espoir d’une issue incroyable. Lors de cette saison, tout commence mal pour nos chers voisins puisqu’au terme de la 10ème journée, ils ne comptent que 7 points, avec 2 victoires, 3 nuls et 5 défaites dans l’antichambre de l’élite, soit un bilan particulièrement piteux pour une équipe qui disputait l’Europe jusqu’à il y a peu. Loin des espoirs que devraient logiquement nourrir un club de cette ampleur, le Racing est alors virtuellement en D3.
Contrairement aux apparences, il y a encore du monde à Lens en L2
Et c’est là que se passe l’incroyable. Jusqu’à une défaite à Guingamp (1-0) lors de la 29ème journée, le RC Lens remonte inexorablement au classement grâce à une série de 18 matches sans défaite, ponctuée de 9 victoires. Malgré cette défaite, le RC Lens reste au contact des barragistes. Cinq solides prestations plus tard, Lens se retrouve barragiste. Dans le contexte des barrages, les affluences sont toujours fortes tant l’enjeu est explicite et l’issue incertaine : à Bollaert, ils seront 40.000 pour voir le Racing battre le voisin valenciennois (1-0) ; 45.000 pour défendre leurs favoris contre Strasbourg (3-1). Ils ne sont « que » 31.000 pour une dernière victoire contre Toulouse (1-0). Mais Lens s’était incliné 4-0 au match aller. Note humoristique au passage, l’un des bourreaux toulousains au match aller n’est autre que Mika Debève, futur historique lensois. Bonne surprise de l’entrée en lice de la DNCG : malgré ce dernier échec, Lens monte malgré tout en D1 du fait des relégations administratives de Bordeaux, Brest et Nice …
Quand tout converge pour légitimer la thèse de la supériorité du public lensois
Bref, le RC Lens remonte en D1 en 1991. C’est au cours de la décennie 1990 que le Racing prend un net ascendant sur son concurrent régional – nous – et s’affirme comme le premier club régional, légitimant la future saillie de Gervais prophétisant notre disparition. A Lens, la progression tranquille vers les sommets, les amenant d’abord en coupe d’Europe (en 1995) puis vers le titre (en 1998) quand le LOSC déclinait, se maintenant péniblement chaque année jusqu’à la descente de 1997.
A ce facteur des résultats, s’ajoute un fort investissement de la marie lensoise que l’on n’a pas à Lille. Se joue sur cette question un avantage lensois : si à Lille le football n’est que l’une des nombreuses attractions culturelles de la ville – voire une attraction culturellement dévalorisée au regard des ambitions de la Mairie – à Lens, le football apparaît comme l’étendard de la ville. Sans vouloir dépeindre Lens comme une ville où il n’y a rien d’autre que le foot, force est de constater que le Racing a tout pour apparaître comme sa plus belle attraction et, ce faisant, comme l’outil idéal pour faire parler de la ville. Sur ce point, le football a beaucoup plus de raisons d’être érigé en priorité municipale qu’à Lille. Fait qui justifie en retour une forte action municipale et, le succès aidant, la venue d’investisseurs contribuant à la communication du club et à la venue de supporters, lesquels ne viennent d’ailleurs alors pas toujours du bassin minier mais aussi souvent des alentours et ce au moins jusque de Lille.
D’autres facteurs variés viennent encore compliquer les velléités de supportérisme à Lille. Ceux qui ont fréquenté Grimonprez-Jooris pourraient par exemple longuement parler des parkings des alentours où l’on n’allait qu’au risque de s’y embourber les soirs pluvieux. Bref, tous ces « avantages » qui vous incitent davantage à écouter le match de votre poste radio plutôt qu’à le suivre au stade …
Bref, un ensemble de facteurs vont faire que, vers la fin des années 1990, ce sont jusqu’à quatre fois plus de supporters qui se déplacent au stade à Lens qu’à Lille, record historique qui ne sera plus ensuite battu.
Avec la fantastique épopée losciste de la bande à Vahid puis celle de la première qualification européenne les supporters lillois retrouveront des raisons d’aller au stade. Cette motivation renaissante sera pourtant contrariée, d’abord par la petitesse de Grimonprez-Jooris, puis encore davantage par le déménagement dans le fort peu sexy Stadium Nord. Fort logiquement, l’arrivée dans le nouveau Stade, plus grand, plus beau et tout nouveau entraîne une explosion du nombre de spectateurs présents.
Parallèlement, le contexte lensois favorise le déclin de sa moyenne de spectateurs. D’abord, les résultats déclinent au cours des années 2000 avant que la situation sportive ne devienne franchement chaotique. Le creux de la saison 2014/2015 ne constitue pas non plus un mystère : cette saison-là, le Racing ne joue pas à Bollaert mais se fait héberger chez son « voisin » amiénois au Stade de la Licorne, dont la capacité est bien moindre.
Entre nous, on ne comptait pas vous l’acheter de toute façon
Bref, fait que l’on n’a plus observé depuis le milieu des années 1950, cela fait maintenant cinq saisons de suite que le public est plus nombreux à Lille qu’à Lens. Là encore, comme quand on claironnait que Lens était « le meilleur public de France » en comparaison de Lille, où le public était censé être moins passionné, il y a des raisons objectives à cet état de fait. Le vent a tourné et, qui sait, peut-être qu’un jour des commentateurs audacieux et en recherche de formules fortes défendront, comme ils l’avaient fait jadis avec Lens, que le LOSC a « le meilleur public de France ». Si on l’entend, on s’en réjouira, mais on se dira aussi que, décidemment, certains aiment bien se construire des légendes.
Posté le 18 avril 2017 - par dbclosc
LOSC et présidentielle : pour qui voter ?
Une nouvelle semaine commence. Celle-ci est particulière : elle s’achèvera dimanche (jusque là, c’est pareil que les autres) par le premier tour de l’élection présidentielle. Les dernières avancées en sociologie électorale ont bien montré l’importance croissante de la variable footballistique dans le choix des électeurs : cela signifie que les supportrices et supporters de foot considèrent que la défense des intérêts de leur club favori est devenu un critère déterminant de leur vote. Autrement dit, et c’est une variable que les commentateurs politiques prennent rarement en compte, entre 2/3 et 3/4 de l’électorat vont voter en fonction de ce qu’ils considèrent comme bon pour leur club, et ce critère arrive bien avant d’autres comme « l’économie », « les inégalités », « l’éducation », considérés comme « secondaires » voire « nuisibles » au débat public. Nous avons commandé une étude auprès de notre institut de sondage partenaire *troufinionway* qui illustre cette tendance nouvelle.
Dès lors, les supporters/trices sont très attentifs au meilleur avenir qui soit pour leur club de cœur. Dans ce monde interconnecté et multipolaire, nous sommes en effet sevrés d’informations. Et, paradoxalement, cette surinformation nous embrouille plus qu’elle ne nous éclaire. Il faut alors savoir démêler le vrai du faux et ne retenir que les informations essentielles – putain, comme je sais écrire des banalités, on dirait du Macron ! Votre site favori vous les offre. Sur DBC, bien entendu, on supporte le LOSC, et nous avons pour ambition de vous aider à faire votre choix dimanche, si toutefois vous comptez aller voter. Fidèles à notre réputation incorruptible et totalement neutres, nous ne donnerons aucune consigne de vote, mais souhaitons simplement porter à votre connaissance quelques éléments qu’il serait bon d’avoir en tête avant de pénétrer dans l’isoloir. Vous trouverez donc quelques conseils, parfaitement contradictoires, mais prenez ce qui vous intéresse le plus.
Observons d’abord comment s’est comporté le LOSC quand il jouait en même temps que se déroulait une présidentielle depuis l’après-guerre, à 5 jours près (parfois, y a pas de match le jour même du scrutin : donc on prend le match le plus proche, à 5 jours près ; davantage, ça n’aurait pas de sens, électoralement parlant).
Depuis la Libération, la France a connu 12 élections présidentielles (2 sous la IVe République, en 1947 et en 1953), et 10 sous la Ve République (1958, 1965, 1969, 1974, 1981, 1988, 1995, 2002, 2007, 2012). Chronologiquement, les trois premières élections d’après-guerre sont particulières, puisqu’elles se font au suffrage universel indirect, à un seul tour (sauf celle de 1953, qui se finit au 13e tour, c’est compliqué à expliquer constitutionnellement donc on s’en passera). Les 9 suivantes se sont déroulées sur 2 tours, au suffrage universel direct1, c’est à dire deux dimanches, c’est-à-dire deux matches. À partir de ces données, on peut se poser plusieurs questions :
_Laquelle, de la IVe ou de la Ve République, offre des élections présidentielles favorables au LOSC ?
_Le LOSC préfère-t-il l’élection au suffrage universel direct ou indirect ?
_Le LOSC est-il meilleur au premier ou au deuxième tour ?
_Les résultats du LOSC varient-ils en fonction de la couleur politique du président élu ?
_Vaut-il mieux voter pour une présidentielle en D2 ou en D1 ?
En jaune : LOSC en D2
On peut tirer de ces données plusieurs enseignements et graphiques.
1. Sur 12 scrutins, dont 9 à deux tours, soit 21 votes, le LOSC s’impose à 8 reprises, perd 5 fois, fait 4 nuls, tandis qu’il n’y a pas de match 4 fois. La D2 nous immunise de la défaite. Les plus pessimistes argueront que, lors d’une telle élection, le LOSC gagne moins d’une fois sur deux, car il est des week-end sans match. Certes. Mais en retirant la variable « pas de match », cela revient à considérer que quand le LOSC joue un jour de présidentielle, il gagne une fois sur 2. C’est donc une élection traditionnellement favorable pour nos couleurs (footballistiques). On peut donc être résolument optimiste pour cette année, où nous jouons lors des deux tours. Et ce d’autant plus que nous remarquons que le LOSC ne perd jamais à domicile dans ce contexte : Guingamp et Metz n’ont qu’à bien se tenir !
Conseil 1 : que tu ailles voter ou non cette année, sois tranquille : la veille, le LOSC aura gagné ou fait match nul. Tu peux donc ranger ton vote protestataire et plutôt voter pour les candidats traditionnels des partis dominants : Hamon, Macron, Fillon.
2. La IVe République est éminemment Losciste : il se dit d’ailleurs que les rédacteurs de la Constitution l’avaient pensée comme telle : aucune défaite ! En revanche, la Ve République est plus contrastée : 7 victoires, 3 nuls, 5 défaites. Dans le même ordre idée, on voit que les 3 premiers scrutins, indirects, ne donnent aucune défaite pour Lille.
Conseil 2 : pour un retour à la IVe République à un scrutin indirect et à un LOSC invincible, vote pour les candidats conservateurs, qui cultivent la nostalgie du passé : Dupont-Aignan, Fillon, Le Pen, Asselineau.
3. Quand un candidat de centre-droit (Coty, Giscard) est en tête, le LOSC fait des performances très diverses : 1 nul, 1 défaite, 1 victoire.
Quand un candidat de droite (De Gaulle, Pompidou, Chirac, Sarkozy) est en tête, le bilan lillois est assez défavorable (2 victoires, 3 nuls, 3 défaites).
Quand un candidat de gauche (Auriol, Jospin, Mitterrand, Hollande) est en tête de scrutin, le LOSC gagne 5 fois sur 7 – en fait, 5 fois sur 6, car il y a un scrutin sans match).
Conseil 3 : Vote Arthaud, Hamon, Mélenchon ou Poutou.
4. Si tu aimes Franck Béria.
Conseil 4 : Vote Macron. Comme lui, Franck Béria a été formé à droite, avant de se révéler à gauche, et maintenant on a un peu de mal à le situer : parfois dans l’axe, un peu à gauche, un peu à droite, peut-être bien qu’il n’est nulle part.
5. Les seconds tours réussissent bien mieux au LOSC : Lille remporte 5 victoires, fait 2 nuls et perd 2 fois lors de ces seconds tours. Les premiers tours sont souvent beaucoup plus décevants : 2 victoires, 3 défaites et surtout 4 premiers tours où on ne joue pas. Il est difficile d’interpréter le fait qu’on joue particulièrement peu les week-ends de premier tour : doit-on se dire que c’est tant mieux, vu qu’on perd souvent quand on joue ? Doit-on se dire, plutôt, qu’il ne faut pas s’étonner qu’on gagne peu ou qu’on joue peu ?
Conseil 5 : Les premiers tours étant hostiles au LOSC, abstention le 23 avril.
6. A chaque fois qu’on joue Sochaux (deux fois), on perd. Le message est clair : Sochaux, c’est Peugeot, donc c’est ouvrier. Les défaites du LOSC contre Sochaux symbolisent donc le renouveau ouvrier.
Conseil 6 : Si à l’avenir, on jouait Sochaux un week-end de présidentielles, vote Poutou, Arthaud, ou, a minima, Mélenchon, pour calmer un peu la colère ouvrière.
7. On remarque que lors de la seconde élection de F. Mitterrand, en 1988, le LOSC bat Laval – un bien beau symbole au demeurant. Laval, c’est la collaboration, la compromission avec l’ennemi.
Conseil 7 : Barrage à l’extrême-droite au second tour.
Il est également de tradition, à chaque élection, de présenter les cartes du vote par région et/ou par département. A DBC, nous ne faisons pas exception à la règle, et te proposons la carte des résultats du LOSC lors des élections présidentielles.
Il y a une relation extrêmement nette entre la position géographique de l’adversaire les week-ends de présidentielles et les résultats du LOSC : dans un petit Est, le LOSC gagne une seule fois, fait 3 nuls et perd 5 fois. Dans un large Ouest, Lille l’emporte 7 fois et fait 1 match nul. La statistique est très encourageante pour le match de Guingamp, elle est plus inquiétante en ce qui concerne le match de Metz. Sur ce dernier point, nous remarquons que le LOSC n’a jamais perdu (nous disons-bien « jamais ») contre un club lorrain lors des week-ends d’élection présidentielle. Mais n’a jamais gagné non plus.
Il y a également une relation entre l’écart au second tour et les résultats du LOSC. Quand l’écart au second tour entre les candidats est fort, Lille réaliser presque toujours de bons résultats. Au-dessus de 53 % pour le vainqueur, Lille l’emporte 3 fois pour 1 match nul ; Lille gagne 2 fois mais fait 1 nul et perd 2 fois à 53 % ou moins.
Lors des premiers tours, le LOSC l’emporte les deux fois où un candidat de gauche arrive en tête et perd les trois fois où c’est un candidat de droite.
Conseil 8 : En somme, si tu veux que le LOSC batte Guingamp, vote plutôt Mélenchon (ou Hamon si tu penses qu’il a encore une chance) ou Macron si tu trouves qu’un match nul est un bon résultat. Si tu privilégies une défaite, soutiens plutôt Le Pen ou Fillon. Ou Jean Lassalle si tu penses que, au regard de ses origines du sud-ouest il est un peu barcelonais et donc capable d’une incroyable remontada.
Il y a une autre donnée à prendre en compte. Voici la liste des référendums nationaux organisés en France depuis la Libération, ainsi que le résultat du LOSC correspondant.
On en tire le camembert suivant :
Nous constatons que l’organisation de référendums favorise le LOSC, qui ne compte que 3 défaites en 13 matches, et 7 victoires, dont une fameuse contre Lens en 2000. Ce paramètre nous invite à favoriser les candidats qui indiquent leur intention d’organiser de telles consultations populaires. Et ils sont quelques-un.es à en proposer, pour des motifs très divers (Frexit, assemblée constituante, vote des étrangers…). En fait, tous les candidats évoquent le recours au référendum dans leur programme, hormis Nathalie Arthaud, Philippe Poutou, Emmanuel Macron et Jacques Cheminade.
Conseil 8 : Ce qui nous laisse un large choix entre Mélenchon, Hamon, Dupont-Aignan, Asselineau, Le Pen, Fillon et Lassalle. Le quinquennat 2017-2022 s’annonce sous un bon jour pour le LOSC (même si on note que le favori des sondages, Macron, ne parle pas de référendum. En revanche, il a parlé de « refaire un dôme », ce qui n’a rien à voir, à moins que ce ne soit une allusion à notre toit rétractable).
Vous avez désormais toutes les données en main. Quelle que soit l’issue du scrutin, nous resterons attentifs, durant tout le quinquennat, aux évoluions institutionnelles et politiques et leur corrélation avec les résultats du LOSC. C’est là une démarche à la fois sportive et citoyenne que nous essayons d’alimenter chaque jour sur ce blog. Vive le LOSC, et vive la France.
FC Note :
1 Depuis une réforme constitutionnelle de 1962, mise en pratique pour la première fois en 1965. Révise ton droit constitutionnel avec DBC, bientôt en librairies.
Posté le 5 février 2017 - par dbclosc
Et si la politique de Gérard Lopez c’était vingt ans de LOSC (1997-2017) qu’on assassine ?
Cet article – critique à l’égard du mercato lillois – a été écrit avant la défaite d’hier contre Lorient (0-1). Mais, même si le LOSC avait gagné, cela n’aurait rien dû changer à l’analyse que nous proposons ici : nous argumentons sur le fait que le mercato et, plus généralement, la « stratégie Lopez » ne nous convainc pas et un match, quelle qu’en soit l’issue, ne dit rien de la pertinence d’une stratégie qui doit être saisie à travers la rationalité du propos.
Pas moins de sept recrues ! Jamais le LOSC n’avait autant recruté de joueurs lors d’un mercato hivernal. Quoi qu’en penser ? A vrai dire, on n’est pas hyper optimistes quant à cette frénésie de recrues, on t’expose pourquoi, sans oublier de faire quelques détours par le passé pour trouver quelques (menues) raisons d’y croire. Pour être tout à fait sincère, on en trouve peu des raisons d’espérer. A DBC, on a vraiment l’impression que ce LOSC qu’on nous propose nous annonce la mort d’un LOSC qui s’est progressivement construit depuis bientôt vingt ans et la relégation de 1997. Depuis cette date, Lille s’était progressivement construit, d’abord sous les ordres de Vahid puis grâce au duo Puel-Seydoux et tous leurs camarades. On misait sur les jeunes, sur les joueurs volontaires, et Garcia a fait fructifier tout ça avec l’incorporation de quelques pépites, bonnes affaires (Gervinho, Sow, etc.), jeunes formés au club (Hazard, Cabaye, Debuchy, etc.) ou profils entre les deux (Chedjou, Rami). Là, ça n’est plus ça : on achète des « jeunes à forts potentiels » dans l’optique de les revendre pour faire une plus-value. Est-ce comme ça qu’on construit une équipe ?
Gégé Lopez se met en scène
En apprenant que le LOSC avait recruté sept joueurs, il est certain qu’on se dit a priori que Gégé tient là une promesse qu’il avait faite : il va investir le Gégé ! Hé oui, c’est déjà prouvé, Gérard Lopez est prêt à mettre la main à la poche (en empruntant ?) pour investir dans des joueurs d’avenir, tranchant déjà avec la politique de Michel Seydoux qui n’a jamais goûté les investissements coûteux. D’ailleurs, les rares fois où il s’est décidé, on ne peut pas dire que ça ait été payant (Marvin Martin, ça te dit quelque chose ? Moi non, me souviens pas d’l'avoir vu).
Bref, sept éléments recrutés, c’est beaucoup et on serait même tentés de dire que c’est trop. C’est trop, parce qu’avant de construire une équipe, Gérard Lopez nous exhibe ostensiblement sa capacité d’investissement. Comme si pouvoir se payer des joueurs était une finalité en soi. On y voit au contraire une faiblesse : Lopez balaye le passé, effaçant au passage un peu de notre identité. Le LOSC qu’on a connu, symbolisé par les périodes Vahid et Puel, s’est construit avec succès sur des projets de long terme, avec des recrutements souvent gratuits mais longuement réfléchis dans une stratégie sportive plus que spéculative. Avec Lopez, c’est tout le contraire : il veut aller vite, achète à tout va, pense déjà aux reventes et nous nous promet un avenir doré là où Vahid nous promettait du sang et des larmes. Alors, vous êtes sûrs de vouloir jeter Vahid ? Parce que, là, c’est ce qu’on fait …
Anwar El Ghazi avec le maillot du LOSC
Insistons aussi sur cette dimension fortement spéculative autour du recrutement des joueurs qui tranche avec ce que l’on a connu par le passé. On peut espérer que cette stratégie, proche sur ce point de celle adoptée à Monaco, porte ses fruits. Il n’empêche, c’est une stratégie qui, même si elle était efficace, ne nous convient pas bien à DBC : on pense les joueurs comme des produits, misant sur d’importantes plus-values sur certains, lesquelles remboursent les inévitables échecs. Le problème éthique réside notamment dans le fait qu’un tel système sacrifie certains (ceux qui ne trouveront pas leur place et risquent d’avoir du mal à rebondir ensuite) et porte aux nues ceux qui réussissent, et ce uniquement parce qu’ils « rapportent ». Nous, on préfère les speculoos à la spéculation sur les êtres humains …
On a d’ailleurs bien envie de se planter, mais on a de très sérieux doutes sur le caractère qualitatif du recrutement. On t’expose rapidement notre avis là-dessus.
Un recrutement qualitatif ?
La tête d’affiche du recrutement lillois, c’est Anwar El-Ghazi, arrivé tout droit de l’Ajax. Un talent incroyable nous dit-on et, déjà, un international batave. Sauf que même pour LA recrue du mercato, on peut émettre quelques doutes. Certes, il vient de l’Ajax, mais ça n’est plus l’Ajax des années 1990 qui dominait l’Europe mais plutôt celui qui se fait éliminer en tour préliminaire de C1 par Rostov (1-1, 4-1). De plus, s’il est parti, c’est aussi parce qu’il n’apparaissait plus tellement indispensable là-bas, perdant même sa place de titulaire au profit de Bertrand Traoré (1). Cette saison, il n’a tout simplement pas marqué le moindre but en Eredivisie. Sans doute la faute à l’incroyable solidité des défenses de l’élite néerlandaise.
Dans le même profil de « grand talent » incompris, Farès Balhouli n’est pas mal non plus. On l’annonçait comme un vrai espoir quand il débuta avec Lyon contre le PSG à 18 ans tout juste en 2013. On assura de même, quand il décida de se relancer avec Monaco en 2015. Une saison et 175 minutes de L1 plus tard, il relance une nouvelle fois sa carrière au Standard de Liège. Quatre mois plus tard, il quitte Liège sans avoir joué la moindre minute pour encore se relancer, cette fois chez nous. On lui souhaite de ne pas se relancer pour la quatrième fois de sa carrière dès l’été prochain. Parce que cette fois, ça risquerait plutôt d’être à Laval ou à Créteil.
Xeka, nous dit-on, c’est un futur grand. Il était titulaire à Braga, ajoute-t-on. Là, encore, c’est vrai, mais on voudrait encore préciser que le 23 octobre 2016, il y a trois mois, un mois avant ses 22 ans, il n’avait pas encore joué une seule minute dans l’élite lusitanienne. Comme quoi, il est peut-être très bon, mais le moins que l’on puisse dire c’est que cela n’avait pas sauté aux yeux de ses entraîneurs et des différents observateurs du foot lusitanien. Alors, qui sait ? Mais ne nous faisons pas non plus trop de films.
On a plus envie de croire en Ricardo Kishna, Junior Alonso, Gabriel et Agim Zeka (2). Enfin, disons que si on n’est pas impressionnés par leurs CV, on n’a pas encore de raisons de croire qu’ils vont nous décevoir. Junior Alonso, est lui déjà international paraguayen, et on l’imagine bien s’imposer, dans l’axe, voire à gauche. Kishna n’a pas encore montré grand-chose, si ce n’est une satisfaisante demi-saison comme titulaire avec l’Ajax (en 2014/2015) et un an et demi passé sur le banc de la Lazio, un peu sur le terrain (1013 minutes toutes compétitions confondues), et deux buts. Pas terrible, mais sait-on jamais. Gabriel vient lui de D2 brésilienne, comme Schmitz avant lui. Et Zeka l’Albanais a trois matches de D1 albanaise dans les jambes, mais il était prévu qu’il débute avec la réserve.
Niveau Scrabble, ce mercato va nous rapporter des points, c’est sûr
On souhaite bien sûr seulement du bon à ces joueurs. On veut juste dire que, en l’état, on n’a pas vraiment de raisons de croire dans le « Grand Soir ».
Recruter des jeunes plutôt que les former
Mais tu me diras : « oui, euh … ! Mais, ils sont jeunes, euh … ! C’est un projet tourné vers l’avenir, euh … ! Hein, euh … ! ». Ce à quoi je te répondrais : 1) que ton objection est un peu décousue ; 2) que ce recrutement traduit en effet une forte valorisation des jeunes, mais, tu auras remarqué, en post-formation plutôt qu’en formation. A la limite, recruter des jeunes de 20-21 ans, c’est encore pire que de recruter des joueurs de 28 ans en matière de chances pour les jeunes du centre. Parce que, par exemple, quand Soumaoro arrive aux portes de l’équipe première il y a trois ans, il peut légitimement se dire que si il n’est pas aussi fort que Basa et Rozenhal, il a quand-même dix et douze ans de moins et une marge de progression supérieure à ses aînés.
Autrement dit, dans ce nouveau schéma, les jeunes formés au club ne sont plus en concurrence avec des joueurs de métier qui sont à leur sommet, voire sur le déclin, mais avec des jeunes qui ont en principe une forte marge de progression et qui sont a priori meilleurs qu’eux (sinon on ne voit pas bien pourquoi on aurait fait des transferts onéreux pour les recruter si on avait déjà aussi bien ou mieux pour pas un rond). Et là, dans un tel schéma, on ne voit pas trop bien quelles pourraient être les chances des jeunes formés au club de s’imposer. Les Cabaye et autres Debuchy se seraient-ils imposés si on avait eu une telle stratégie dans les années 2000 ? Pas sûr. Surtout, s’ils avaient ainsi percé ça n’aurait certainement pas été chez nous.
Alors, un projet d’avenir ? Un projet qui empêchera à nos jeunes de percer avec notre équipe première et qui consiste à acheter des jeunes pour les revendre deux ans plus tard, est-ce vraiment ce qu’on peut appeler un projet d’avenir ?
En 2004, le LOSC avait déjà recruté massivement au mercato d’hiver
Ceci étant, rappelez-vous les copains, en janvier 2004, le LOSC, alors pas très bien parti, recrutait cinq joueurs au mercato hivernal ! Moins que cette année, mais c’était alors le record. Les joueurs en question ? Youssef Sofiane, Ali Lukunku, Efstathios Tavlaridis, Milenko Acimovic et Dante. Si les deux premiers ne réussiront pas, c’est le moins que l’on puisse dire, les deux suivants se révéleront comme des bonnes pioches, quand le dernier, faute de s’imposer avec Lille, fera une belle carrière, qu’il poursuit aujourd’hui à Nice après avoir porté les couleurs du Bayern de Munich (et non celui de Monique) et de l’équipe nationale du Brésil.
Alors, un bon présage pour l’avenir ? On l’espère, mais à vrai dire, il faut bien des exemples comme ceux-ci pour nous inciter à un peu d’optimisme …
Précisément, ce seul signe nous incitant à l’optimisme, c’est celui d’une époque dont Gégé ne veut plus. En somme, c’est un peu de nous dont il ne veut plus. De ces vingt dernières années qui ont construit une nouvelle mémoire collective du LOSC, à la fois différente de son glorieux passé et dans son prolongement.
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Entre le 24 août et la fin de l’année 2016, l’Ajax dispute 23 rencontres mais El Ghazi n’en débute que 4. Et encore, parmi ces quatre rencontres disputées, deux ont eu lieu en coupe, quand l’entraîneur faisait tourner. Qu’Anwar ait joué contre la grande équipe de Kozakken Boys (3ème division hollandaise, qui doit plutôt correspondre en niveau réel à une équipe de CFA ou CFA2) ne montre en rien une grande confiance de son entraîneur à son égard.
- On soulignera aussi qu’on a d’autant moins de réserves à l’égard de Gabriel et Alonso que leurs recrutements vient combler un manque : en défense, les plus ou moins jeunes joueurs (on a été jusqu’à 26 ans) sont denrée rare, puisqu’on ne compte qu’un central (Soumaoro), deux latéraux gauche (Mendyl et Koné), un droit (Corchia). Pour la même raison, on n’est moins convaincus que les recrutements de Balhouli, Kishna et El Ghazi soient tous nécessaires : pour trois à quatre postes d’offensifs, et sans compter Lopes, en prêt, Lille compte déjà dans ses rangs Sliti, Benzia, Terrier, De Préville et, bientôt, Alexis Araujo de retour de prêt. Xeka, à ce titre, complète utilement le milieu de terrain (aux côtés d’Amadou et Bissouma).
Posté le 17 octobre 2016 - par dbclosc
Hélas, Aulas nous lasse. Pourquoi Jean-Miche fait (injustement) du LOSC le responsable de la fragilité de l’indice UEFA français
En 2012, et comme à son habitude, Jean-Michel Aulas analysait les performances lilloises en coupe d’Europe avec beaucoup de nuances et de contextualisation, ce qui lui permettait de dresser un « constat » un poil sévère à l’encontre de notre club de cœur : « La perte de l’indice est due exclusivement à la Ligue Europa et pas à la Ligue des Champions. (…) Ces cinq dernières années, Lyon a emmagasiné 40-45 % des points de cet indice. La Ligue Europa nous a trahis. Ne pas la jouer, comme Lille l’a fait l’année dernière, c’est monstrueux ! »
Bon, tu l’as compris, Jean-Miche fait de notre équipe chérie la responsable du très discutable déclin français au niveau européen. On va te montrer que cette responsabilité est loin d’être attestée pour ensuite t’expliquer les causes de cette prise de position de Jean-Miche ainsi que les causes de l’évolution de la stratégie de nos Dogues en matière de compétition européenne. En gros, derrière le ton de l’évidence, Jean-Miche masque qu’il nous demande de défendre ses propres intérêts.
La « responsabilité » lilloise dans la fragilisation de l’indice UEFA de la France
Premier constat : Jean-Miche pointe du doigt le LOSC comme le responsable (comme le suggère l’utilisation de l’adjectif « monstrueux » précédé du présentatif « c’est ») du « déclin » français à l’indice UEFA ciblant son « échec » lors de l’Europa League 2010/2011. Lille n’aurait « pas joué », référence faite à la stratégie qu’avait adopté Rudi Garcia en 16ème de finale de la compétition en alignant une équipe-bis.
Or, le parcours lillois cette saison-là n’est pas aussi « monstrueux » que Jean-Miche veut bien le dire. Lille passe d’abord le tour préliminaire, passe son tour de poules et, certes, échoue en 16ème contre le PSV. Certes, Garcia a mis son équipe-bis pour ces matches, mais il faut également souligner que cette équipe-bis était suffisamment solide pour qu’on n’assimile pas cette stratégie à un sabordage pur et simple : au match aller, l’équipe alignée est la suivante : Landreau – Debuchy, Chedjou, Rozenhal, Emerson – Vandam, Dumont, Gueye – Frau, De Melo, Obraniak. Tu avoueras qu’en termes d’équipes en bois on a trouvé pire.
On peut bien sûr discuter de la stratégie de Garcia, mais il n’a finalement rien fait d’autre que de privilégier le championnat et la coupe (ce qu’il a bien fait puisque le LOSC remporte ces compétitions) plutôt que tenter de « faire un coup » en coupe d’Europe, « coup » dont les chances de réussites sont très aléatoires (1). En 2011, le bilan de Garcia parle en tout cas pour lui. Personne ne sait ce qui se serait passé s’il avait décidé de jouer l’Europe à fond, mais l’honnêteté intellectuelle impose de rappeler que cette stratégie a abouti à la conquête de deux titres.
Constat n°2 : Jean-Miche juge donc le comportement des Lillois « monstrueux » quant à l’indice UEFA français. Or, il étaye finalement une thèse sur le LOSC à travers un seul et unique exemple, la double confrontation avec le PSV en 2011. Or, à l’époque où il tient ces propos, le LOSC a toujours tiré vers le haut l’indice français.
Lecture : en 2001/2002, la performance du LOSC génère 0,804 point de plus à l’indice UEFA français que la moyenne des autres clubs français engagés. Le fait que ce solde soit positif de 2001/2002 à 2011/2012 montre que le LOSC tire alors l’indice français sur cette période tandis que le fait qu’il soit négatif depuis 2012/2013 montre que le LOSC le tire alors vers le bas depuis cette date.
On le voit sur ce graphique, si les résultats du LOSC tirent l’indice UEFA français vers le bas à partir de 2013, il le tirait au contraire vers le haut depuis ses débuts européens jusqu’en 2012. En gros, au moment au Jean-Miche dézingue le LOSC sur son apport négatif, dans la vraie vie nos Dogues avaient fait exactement l’inverse.
Constat n°3 : au-delà du LOSC, Jean-Miche pointe la responsabilité des clubs qualifiés en Ligue Europa. Or, s’il a raison de dire que l’indice UEFA français est étroitement dépendant des performances en Champions League, il oublie fort malheureusement de souligner que c’est très largement un effet réglementaire : les clubs qui disputent la C1 bénéficient en effet d’un indice majoré par rapport aux clubs qui jouent l’Europa League.
De plus, le système est fait de manière à donner un effet incitatif à la motivation beaucoup plus fort pour des raisons simplement économiques. En effet, un club qui dispute la C1 connaît une très forte incitation à aller le plus loin possible tant les gains potentiels sont forts. Inversement, un club dans la situation de Lille, c’est-à-dire disputant la Ligue Europa et le titre n’a qu’un intérêt faible d’un point de vue économique à passer un ou deux tours de plus en compétition européenne mais un grand intérêt à assurer une qualification en phase de poules de Ligue des champions.
Constat n°4 : quand on a lu l’affirmation de Jean-Miche selon laquelle l’OL contribuerait à « 40 à 45 % » de l’indice UEFA français, on t’avoue qu’on a été un peu sceptiques. Mais on t’avoue aussi que ça nous a emmerdé d’aller vérifier, donc on s’est contenté d’aller voir la contribution de l’OL depuis 2011. Et elle est de 17 %.
Ça ne nous permet pas de dire si Jean-Miche a exagéré les mérites de son club en 2012, mais ça nous permet au moins de dire que, sur la base des critères énoncés par lui-même, son club est sur une pente descendante.
De quoi qu’y s’mêle ? Un éclairage sur les causes du cassage de c**** de Jean-Miche
Mais, me diras-tu, « de quoi qu’y s’mêle » le Jean-Miche ? Qu’est-ce qu’il vient nous emmerder à nous dire ce qu’on doit faire en Coupe d’Europe ? Est-ce que, bon, bordel, on peut pas avoir des résultats de brins en compétition européenne si ça nous chante ?
En fait, c’est tout simple, c’est juste que Jean-Miche a un intérêt direct à ce que les clubs qui disputent l’Europa League fassent de bonnes perfs, et d’autant plus aujourd’hui avec un PSG devenu presque intouchable et un Monaco qui émerge comme un concurrent plus que sérieux.
En fait, le gros truc que tu dois retenir, c’est que, à la limite, si la France est 4ème, 5ème ou 6ème, ça change assez peu de choses, et que, par contre, il est crucial pour Jean-Miche que la France ne tombe pas à la 7ème place.
Concrètement, être 6ème plutôt que 4ème ou 5ème, ça ne change que le fait que le troisième représentant en C1 du 6ème doive jouer un tour préliminaire de plus que les 4ème ou 5ème avant d’arriver à la si lucrative phase de poules de C1. En revanche, être 7ème n’octroie plus que deux places en C1, dont une seule qualification directe. L’enjeu est alors primordial pour un club comme Lyon dont le positionnement hiérarchique en France le place comme un concurrent à Monaco pour la deuxième place.
Pognon, Position et Prise de Position : le PPPP
Pour bien comprendre les Prises de Position de Jean-Miche, il faut resituer sa Position et ce que ça implique en termes de pognon : appelons-ça, le PPPP. Et c’est là qu’on comprend qu’avant d’être une prise de position dictée par des considérations sportives, ce qui guide Jean-Miche, c’est la question du modèle économique lyonnais au regard de la hiérarchie nationale actuelle.
Or, dans la stratégie économique de Jean-Miche, les revenus de la C1 sont essentiels (2). Pour Lyon, chaque échec à la qualification en C1, mais également chaque résultat en C1 une fois qualifié, a de très importantes répercussions économiques. Aujourd’hui, pour Lyon, la situation est favorable bien que précaire : terminer deuxième du championnat suffit et une troisième place serait sans doute suffisante pour atteindre ensuite la phase de poules. Mais si la France passait à la 7ème place, la situation des Lyonnais serait en revanche très délicate puisque la deuxième place en championnat deviendrait un enjeu primordial et pas nécessairement suffisant, cette place ne qualifiant pas directement pour la phase de poules.
Et là où on comprend le particulier intérêt de Jean-Miche pour la question, c’est qu’il est précisément le président du club français dont la stratégie économique est la plus dépendante de la C1. Pour Paris, la question se pose moins, d’une part parce que ses chances d’échouer à la 3ème place sont faibles et parce que ses sources de financement sont presque infinies. Pour Monaco, le renouveau est encore trop récent pour que leur stratégie économique soit dépendante d’un parcours en C1.
Le LOSC, le PPPP et paradoxe européen
Pour les autres prétendants européens, comme notre LOSC, la dépendance à la C1 n’existe pas en tant que telle pour la simple raison qu’il leur apparaîtrait déraisonnable de pouvoir tabler sur une qualification systématique pour cette compétition. Si le LOSC semble être sur une pente légèrement descendante quant à sa place dans la hiérarchie nationale, il n’empêche que même à son « sommet », c’est-à-dire schématiquement entre 2009 et 2012, le LOSC ne pouvait espérer raisonnablement s’appuyer sur la C1 comme source régulière de financement.
On n’est pas en train de te dire que l’enjeu européen est nul pour le LOSC, mais simplement que sa position dans la hiérarchie nationale associée à l’organisation actuelle des compétitions européennes impose aux dirigeants de ne voir dans les compétitions européennes qu’un éventuel bonus et non un élément essentiel.
C’est donc aussi à l’aune de cette position qu’il faut lire le rapport des Loscistes aux compétitions européennes. D’abord vécu comme une chance et une récompense au début des années 2000, l’Europe était jouée ainsi, c’est-à-dire comportant une forte dimension de prestige qui était au principe de la motivation des joueurs et de l’entraîneur.
Mais quand la position du LOSC se stabilise dans le haut de la hiérarchie nationale, vers la fin des années 2000, son rapport à l’Europe a alors sensiblement évolué et devient en apparence paradoxal sur certains aspects. La qualification en Ligue des champions devient un objectif qui n’est plus déraisonnable tandis que jouer à fond la Ligue Europa ne présente qu’un intérêt restreint. Le LOSC est alors dans une situation paradoxale, celle d’un club qui a davantage intérêt à se battre pour se qualifier en coupe d’Europe qu’à faire bonne figure dans la compétition européenne qu’il disputera.
C’est à l’aune de cette position, relativement récente, qu’il faut lire les performances lilloises en coupe d’Europe en 2010/2011. Au-delà des considérations sportives, quand le championnat avance et que le LOSC se trouve bien placé, la qualification en C1 apparaît de plus en plus comme une option qu’il ne faut pas rater. Pour dire les choses clairement, passer deux tours de plus en Ligue Europa n’aurait pas rapporté plus de 2 millions d’euros supplémentaires quand une qualif’ en phase de poules de la C1 assurerait un revenu de 20 à 30 millions d’euros droits TV compris. Dans cette optique, prendre le risque de rater sa fin de championnat pour faire un beau parcours semble déraisonnable (3).
Il faut aussi resituer la stratégie du LOSC vis-à-vis de la Ligue Europa en 2010/2011 dans l’expérience récente du club. La saison précédente, les Dogues s’étaient investis corps et âmes en coupe d’Europe, mais cet investissement avait alors été lu comme une cause au moins partielle du fait que le LOSC avait échoué sur le fil à se qualifier en C1. Suivant la logique égocentrée de Jean-Miche, Lille aurait quand-même dû jouer la C3 à fond en 2011. Suivant la logique des dirigeants de Lille, qui pensent constater avoir perdu 30 millions d’euros à cause du surinvestissement en coupe d’Europe, l’attente de Jean-Miche semble moins adaptée.
Ressources des compétitions européennes et stratégies économiques
Ligue Europa et Ligue des champions, deux compétitions européennes, mais dont les bénéfices éventuels sont extrêmement divergents ce qui conditionne largement les stratégies des clubs. La spécificité de la C1 tient ainsi à ce qu’elle génère de telles ressources qu’elle peut inciter certains clubs qui y participent régulièrement à penser ces ressources comme des revenus structurels là où les revenus de la Ligue Europa sont trop faibles et aléatoires pour être pensés comme une source de financement régulière et primordiale.
En effet, imaginons qu’un club dont le budget habituel est de 70 millions d’euros participe à la C1, il se retrouve alors doté d’une ressource supplémentaire inhabituelle d’environ 30 millions d’euros. Si la prudence voudrait que ces 30 millions d’euros soient traités comme une cagnotte dans laquelle on puise avec prudence, un tel revenu incite cependant à piocher allègrement pour investir et consolider la place acquise. Le budget augmente alors plus ou moins mécaniquement et il est alors primordial que les recettes se développent aussi à un niveau plus élevé. Un tel club sera alors fortement incité à budgéter en misant sur des revenus réguliers de la C1, par exemple 15 millions par an en misant sur une participation à la Ligue des champions un an sur deux.
Or, c’est bien le problème d’appliquer une telle logique au sport ou l’aléa est une composante caractéristique mais aussi (en principe) valorisée. Paraîtrait même que l’incertitude du sport serait « glorieuse ». Problème du gestionnaire, il doit tout faire pour que cet aléa soit réduit. Cette contradiction, elle est particulièrement forte pour un club comme l’Olympique lyonnais. Pour des clubs comme le Real ou le Bayern, cette pression sur la stratégie est moins forte notamment parce qu’ils bénéficient de ressources symboliques et financières qui leur donnent un peu plus de garanties quant à la pérennité structurelle (4). Elle est également moins forte pour des clubs un cran en dessous, comme le LOSC, lesquels ne peuvent actuellement pas tabler sur de fortes ressources de la C1.
L’OL de Jean-Miche s’est en revanche construit sur l’anticipation de ressources pensées comme structurelles issues de la Ligue des champions. Lyon est donc dans un équilibre particulièrement fragile et les importantes fluctuations budgétaires du club rhodanien sont à la fois le fruit de cette fragilité et de l’entêtement de Jean-Miche à engager son club dans cette stratégie (Dans l’espoir que l’OL évolue vers une sécurisation de sa position). Cette sécurisation passe alors aussi par la voie politique en essayant d’influer sur des réformes réglementaires limitant les chances des poursuivants de pouvoir les concurrencer.
Un dernier mot tout de même sur la stratégie du LOSC pour ne pas se méprendre sur l’interprétation de notre analyse. En 2010/2011, une éventuelle qualification en C1 relève bien sûr d’un grand intérêt. Mais l’idée est alors moins d’espérer des ressources structurelles de cette compétition que de trouver une solution temporaire à la faiblesse des revenus de la billetterie du Stadium Nord en attendant la manne qu’est censée apporter le Grand Stade. Or, en 2012, l’arrivée dudit Grand Stade impose un changement stratégique : en cause, le Grand Stade ne génère pas les revenus espérés mais devient au contraire un boulet. La qualification en C1 à l’issue de la saison 2012/2013 devient alors essentielle, mais la situation financière limite les possibilités d’investissement et, parallèlement, les chances de se stabiliser dans le top 3 national. En conséquence, Lille doit vendre chaque année à un niveau plus ou moins équivalent à ce que rapporte une participation à la C1.
Jean-Miche dénonce donc le LOSC alors même que c’est un système dont il n’a cessé d’encourager le développement qui explique la prise de position lilloise. Au début des années 2000, Lyon est devenu le club dominant en France et faisant bonne figure sur la scène européenne. Jean-Miche a milité pour un système favorisant la concentration des ressources dans les mains des plus gros clubs européens. C’est donc un système qui bénéficie aux gros, mais, pour qu’il marche bien, il faut que les clubs qui les suivent dans la hiérarchie, comme par exemple le LOSC, réalisent aussi de bonnes performances en Ligue Europa pour consolider la place nationale. En définitive, ce que Jean-Miche reproche aux Dogues, c’est de défendre ses intérêts alors que, de son point de vue, c’est ceux de l’OL qu’ils devraient servir. Et tu as compris que cet OL qu’il faudrait servir, ça n’est pas l’Olympique Lillois.
(1) On peut certes supputer que l’équipe-type aurait mieux fait mais il faut aussi souligner que même ainsi une éventuelle qualification en quart de finale aurait été une performance extrêmement satisfaisante. Mettre l’équipe-type n’aurait donc sans doute pas permis une amélioration extrêmement forte de l’indice UEFA français.
(2) Pour donner un ordre d’idée, une équipe qui dispute la phase de poule de Ligue des champions touche 12 millions d’euros si elle perd tous ses matches ; elle touche 15,5 millions et demi si elle finit troisième de son groupe en gagnant 2 matches et en faisant un nul auxquels il faut ajouter les revenus ultérieurs du reversement en Ligue Europa ; elle touche 22,5 millions si elle est éliminée en huitièmes de finale avec 3 victoires, 1 nul et 2 défaites en poules ; 28,5 millions en étant sortie en quart de finale ; 35,5 en demi-finale ; 46 en finale ; 61 si elle remporte la compétition. Ces chiffres montrent donc qu’un club comme l’OL peut raisonnablement anticiper un revenu annuel de 20 millions de la C1 auxquels il faut ajouter les droits TV. Or, ces droits TV dépassent largement les primes de résultats : Lyon aurait ainsi empoché 41 millions d’euros au total en 2015/2016 au titre de la C1 malgré un parcours extrêmement décevant.
(3) Aujourd’hui, un club éliminé en 16ème de finale de Ligue Europa en terminant premier de son groupe empocherait environ 5 millions d’euros hors droits TV quand un demi-finaliste toucherait un peu plus de 8 millions et un finaliste perdant un peu moins de 12 millions. Autrement dit, en matière financière, il y a davantage d’intérêt à perdre tous ses matches en phase de poule de C1 qu’à atteindre la finale de la C3.
(4) On n’est pas en train de dire que les revenus de la C1 ne sont pas d’une grande importance pour ces clubs mais on veut en revanche insister sur le fait qu’un ensemble de raisons fait qu’il est pour eux très improbables d’échouer sportivement dans des proportions qui remettraient en question leur stratégie économique.
Posté le 27 septembre 2016 - par dbclosc
L’affaire Camataru (1987) : de la propagande de Ceausescu ? Vraiment ?
Une fois n’est pas costume, aujourd’hui nous ne te parlons pas du LOSC, mais de l’ « affaire Camataru ». En 1987, Rodion Camataru remporte le soulier d’Or notamment grâce à 20 buts en 6 matches (non, non, il n’y a aucune faute de frappe). En Europe de l’Ouest, on soupçonne alors un arrangement géré tout en haut de l’Etat dirigé par Nicolae Ceausescu. Notre analyse te montre que si tout n’a pas été net net, il n’y a vraisemblablement aucune propagande à voir derrière.
En 1987, le Roumain Rodion Camataru, joueur du Dinamo Bucarest, remporte le soulier d’or européen avec 44 buts inscrits sur la saison 1986/1987, soit 5 de plus que l’Autrichien Anton Polster. Si ce titre fait polémique, c’est que, en Europe de l’Ouest, on soupçonne un trucage de Roumanie visant à servir la propagande communiste par un nouvel « exploit ». En d’autres termes, derrière la performance de Camataru se cacherait l’ombre du dirigeant Ceausescu.
Mais pourquoi donc de tels soupçons me demandes-tu à l’instant ? C’est vrai, quoi, pourquoi un Roumain ne pourrait-il pas claquer 44 buts dans le championnat roumain sans qu’on le soupçonne de triche ? Après tout, l’explication ne résiderait-elle pas dans la faiblesse relative des défenses roumaines ?
Tu vas le voir, t’es en partie dans le vrai, mais il est également exact qu’il y a une petite escroquerie dans la perf de Camataru. Il faut dire qu’il n’a pas seulement marqué 44 buts : il en a marqué 20 lors des 6 dernières journées de championnat !
Contextualisation : la situation dans le championnat roumain à 6 journées de la fin
En 1986/1987, il n’y a que deux sérieux prétendants au titre en Roumanie. Le Steaua (« l’Etoile ») et le Dinamo, tous deux de Bucarest. Après 28 journées, de lutte pour le titre, il n’y en a quasiment plus. Le Steaua compte en effet 10 points d’avance sur son rival. Certes mathématiquement, le titre est encore envisageable, mais il faut bien dire qu’il est très peu probable que le Steaua ne parvienne pas à acquérir les 3 points en 6 matches suffisants au titre après avoir écrasé le championnat, remportant 22 matches et faisant 6 nuls sans perdre une seule rencontre jusque-là. Bref, le titre est déjà acquis pour le Steaua.
Bref, pour les joueurs du Dinamo, la seule ambition réside dans les titres d’honneur. A commencer par le titre de meilleur buteur pour l’avant-centre local Rodion Camataru. Celui-ci est premier avec 24 unités devant Piturca, le buteur du Steaua. Les interviews de l’époque le montrent, avant le titre de meilleur buteur européen, c’est la concurrence locale qui fait des performances de buteurs de Camataru un enjeu important. Dans ces circonstances, c’est toute l’équipe du Dinamo qui se met au service de Camataru.
Deuxième élément de contexte : le championnat roumain est assez offensif et le Rapid n’a pas attendu la fin de championnat pour marquer beaucoup de buts. Même largué pour le titre, le Dinamo a déjà marqué 63 buts en 28 rencontres, soit 2,25 par match.
Un Dinamo hyper-offensif au service presque unique d’un avant-centre
Une troisième remarque s’impose pour bien comprendre l’ « exploit » de Camataru : au cours des 6 dernières journées, si le Dinamo marque beaucoup et même davantage, ce qui distingue son parcours de fin de championnat, c’est surtout une défense à la ramasse. Alors que le Dinamo encaisse moins d’un but par match sur les 28 premières journées (ils en ont alors encaissé 26), ils s’en prennent 20 sur les 6 derniers matches (3,33 en moyenne). L’attaque fait mieux (21 buts inscrits, soit 3,5/match), mais la plus-value est très nettement moins importante que la moins-value défensive. Et les résultats se dégradent : 1 victoire, 2 nuls et 3 défaites, sans que cela ne puisse s’expliquer par le niveau des équipes d’en face.
Ce qui est flagrant, c’est que le Dinamo a alors sacrifié ses résultats au profit de l’avant-centre Camataru. Le Dinamo se lance dans un jeu hyper-offensif, quitte à encaisser beaucoup de buts, avec pour finalité de faire scorer Camataru. Rappelons deux totaux déjà évoqués : le Dinamo met 21 buts en 6 rencontres, dont 20 par le seul Camataru ! C’est ça qui permet de dire que le Dinamo n’a pas seulement joué hyper-offensif : il a joué hyper-offensif, d’accord, mais au profit exclusif de la performance de Camataru !
Une escroquerie d’accord, mais de la propagande coco, non
Si Camataru réussit à marquer autant, ça n’est certainement pas parce qu’il avait le niveau pour le faire dans des circonstances « normales ». Donc, en ce sens, il y a bien une escroquerie, puisque si les joueurs du Dinamo ont mis en place cette stratégie, c’est parce qu’ils n’avaient rien à perdre à la mettre en place et tout à gagner : un titre de meilleur buteur du championnat roumain, voire un soulier d’Or !
Or, le principal concurrent de Camataru, Polster, ne pouvait pas se payer ce luxe, son club luttant pour le titre jusqu’à la dernière journée (pour finalement le perdre au goal-average, c’est con, hein ?) Dans des contextes similaires, Camataru n’aurait sans doute eu aucune chance.
Comprends-moi bien, cher(e) ami(e), je ne suis pas en train de contester que Rodion Camataru était, au moins à l’échelle du championnat roumain, un excellent buteur. Force est simplement de constater que là où Polster a dû faire avec un contexte où ses coéquipiers ne pouvaient pas servir Polster avec davantage d’attention que d’habitude, Camataru a bénéficié pendant six matches d’un système de jeu entièrement dévoué à sa réussite.
Mais si un club s’est dévoué à la réussite de Camataru, ça n’est pas un pays entier qui a été dans la même optique, voire un État, comme ont pu le laisser entendre (voire plus) les commentateurs occidentaux de l’époque. Les résultats des adversaires du Dinamo à l’époque montrent très clairement qu’ils n’ont pas « levé le pied » pour laisser Camataru marquer. Simplement, quand la deuxième équipe roumaine joue tout pour l’attaque, forcément, elle marque beaucoup.
Alors, malhonnête Camataru ?
Après, s’il ne faut sans doute pas voir de propagande d’Etat dans cette affaire, ça n’empêche pas qu’on voit dans cette situation une pratique qui n’est pas des plus éthiquement irréprochable. Certes, c’est sans « tricher » au sens étroit du terme, mais c’est tirer profit d’un contexte qui autorise à mettre en place une stratégie auxquels les concurrents n’ont pas accès. Et on ne peut pas dire qu’il l’admette réellement.
Anton Polster a en effet de très bonnes raisons de se juger spolié d’un soulier d’or bien mérité. En conditions « normales », il était largement en avance. Puis, dans les circonstances particulières de la fin de saison roumaine, il se fait bouffer 14 buts en 6 matches malgré ses 6 buts supplémentaires.
Pour l’anecdote, en 1989, c’est un autre Roumain du Dinamo, Dorin Mateut, qui remporte le trophée, avec 43 buts. Dans ce cas, s’il y a quelque chose à redire, ça n’est pas dans une stratégie particulière des joueurs du Dinamo, mais dans la facilité générale qu’il y a à marquer dans ce championnat, ce qui crée un autre déséquilibre avec les concurrents. Fait peut-être mondialement inédit, le Dinamo termine en effet le championnat avec 30 victoires, 2 nuls et 2 défaites sans gagner le titre, le Steaua finissant avec 31 victoires et 3 nuls. Et encore, pour insister sur l’écrasante supériorité des deux clubs de la capitale roumaine sur leurs concurrents, soulignons que les performances de ces deux équipes auraient encore sans doute été plus impressionnantes si elles n’avaient pas toutes deux lâché le point du match nul lors d’une dernière journée sans enjeu puisque le titre était acquis au Steaua.
Détaillons encore. Après 33 journées, et en retirant les matches entre le Steaua et le Dinamo, les victoires de ces deux équipes sont presque systématiques : 30 victoires, 1 nul, 0 défaite pour le Steaua et 30 victoires, 0 nul et 1 défaite pour le Dinamo. Même le Victoria, 3ème du championnat ne fait pas illusion, perdant ses 4 matches contre le duo, marquant quand-même 5 buts, mais en encaissant 14.
Voilà. Alors, certes, le régime de Ceausescu n’a pas été toujours net-net et quand on lit les propos enchanteurs de Camataru sur celui-ci, on a quand-même un peu tendance à croire que ça n’est pas sans lien avec une petite crainte en cas de critique trop appuyée à l’endroit du régime. Par contre, la polémique voyant une propagande d’Etat du régime roumain relève du fantasme occidental comme d’autres ont fleuri à son propos. On se souvient bien sûr du faux charnier de Timisoara (1) mais il y a eu bien d’autres histoires. La plus croustillante ? Certainement la rumeur selon laquelle Ceausescu aurait souffert d’une leucémie et qu’il faisait alors enlever des camarades afin de récupérer leur sang à son profit. Un habile mélange entre Staline et Dracula en somme.
Ne prends pas froid.
Bisous.
(1) A l’époque, les télés occidentales montrent les images hallucinantes d’un charnier de 5000 individus à Timisoara. On se rendra compte rapidement que ce charnier n’a jamais existé et que les images sont le fruit d’un habile montage réalisé à partir de 4 ou 5 cadavres, d’ailleurs de personnes même pas tuées par le régime roumain.
Posté le 4 septembre 2016 - par dbclosc
4-4-2, 5-3-2 et 4-3-3 : qu’est-ce que ça veut bien dire ? L’illustration à travers les systèmes tactiques de G. Heylens (1984-1989).
Georges Heylens arrive pour coacher le LOSC en 1984/1985. Il initie alors une pluralité de systèmes tactiques très différents au gré des circonstances et notamment des qualités particulières des joueurs à sa disposition. On constate une très grande diversité dans ces systèmes, mais aussi un glissement progressif général réduisant l’importance des joueurs offensifs latéraux (ailiers et faux-ailiers) au profit de profils d’attaquants axiaux.
On te décrypte différents cas de systèmes tactiques utilisés par ce bon vieux Georges, du 3-5-2 qui est peut-être en réalité un 5-3-2 voire un 4-2-2-2 au 4-3-3 sans ailiers.
Le 3-5-2 qui est aussi un 5-3-2 et presque la même chose qu’un 4-4-2
Lorsqu’il arrive aux commandes du LOSC, en 1984, Georges Heylens expérimente un 3-3-2-2, expérience qu’il réédite en 1986/1987. Présenté comme cela, c’est un schéma tactique à quatre lignes, composé d’une défense à trois, d’une ligne de trois milieux défensifs, de deux milieux offensifs excentrés et de deux attaquants axiaux, on peut qualifier ce système de 3-5-2 mais il est tout aussi exact de le qualifier de 5-3-2 : les deux milieux défensifs latéraux ont en effet une fonction tout à fait équivalente à celle d’arrières latéraux puisqu’ils sont le dernier rideau défensif sur les côtés, les trois défenseurs s’étalant sur l’axe. En voici un exemple usité en 1986/1987.
On remarque que, dans cette équipe, on serait tentés de dire qu’il s’agit d’un 3-5-2, puisque les milieux défensifs latéraux sont milieux de terrain de métier. Pour autant, on peut sur les mêmes arguments défendre l’interprétation qu’il s’agit d’un 5-3-2, puisque dans le système expérimenté en 1984/1985, les deux milieux latéraux sont en revanche arrières latéraux de métier.
Ce 3-5-2/5-3-2 est en réalité presque équivalent à un autre système tactique fréquemment utilisé par G. Heylens, le 4-4-2. Un 4-4-2, certes, mais pas n’importe lequel et, en l’occurrence, un 4-2-2-2. Ce système est en effet très proche, puisqu’il est composé de deux attaquants axiaux, de deux milieux offensifs excentrés, de deux défensifs latéraux et de quatre défensifs axiaux. Présenté ainsi, les deux systèmes sont strictement équivalents. La seule différence est que 3-5-2/5-3-2 est composé de trois défenseurs centraux et d’un milieu défensif axial et que le 4-2-2-2 comporte deux défenseurs centraux et deux milieux défensifs centraux. On en trouve un exemple dans ce 4-2-2-2 qui date de la saison 1987/1988.
En pratique, cette différence est extrêmement subtile : en effet, dans le système à trois défenseurs centraux, l’un d’entre eux, ici Eric Péan, joue comme libéro, c’est à dire dans un rôle de défenseur qui a pour fonction de prendre des libertés offensives et de monter plus haut, doublant le poste de milieu axial, exactement comme dans un 4-2-2-2.
Un 4-4-2 qui n’a aucun rapport avec un 4-4-2
Bref, si on peut appeler 3-5-2, 5-3-2 et 4-4-2 un quasi-même système, on peut également relever que ce 4-4-2 est extrêmement différent d’autres types de 4-4-2. Avec le 4-2-2-2, le milieu défensif est composé de deux joueurs à la récupération, dont l’un alterne dans un rôle de relayeur. Ce dernier combine avec les deux milieux offensifs, en fonction de faux-ailiers, lesquels ont notamment pour rôle d’assurer les centres pour les attaquants axiaux.
Le 4-4-2 utilisé par le LOSC presque systématiquement avec Abedi Pelé à partir d’octobre 1988 est en revanche un 4-1-2-1-2. En gros, il y a un seul récupérateur (Alain Fiard), lequel combine avec les deux milieux relayeurs, plutôt excentrés (Périlleux et Angloma), ces derniers pouvant jouer avec le meneur de jeu (Pelé) ou centrer pour les attaquants axiaux. Comme on le voit sur cet exemple de 1988/1989, le milieu de terrain est composé d’un losange placé entre la défense et l’attaque. En termes de profils, ce système impliquait d’avoir un bon meneur de jeu technique et bon buteur ce qu’exige plus ou moins nécessairement la position d’offensif axial.
C’est sans doute principalement en raison de l’exigence au poste de meneur que G.Heylens a attendu l’arrivée de Pelé pour l’instituer. On pourrait presque dire que l’arrivée de Pelé a « imposé » à ce bon vieux Georges la mise en place de ce système. Le profil particulier de Pelé impliquait une réorganisation tactique et les caractéristiques de l’effectif à disposition du coach belge impliquait plus ou moins nécessairement cette organisation. En effet, en matière offensive, l’effectif était pléthorique en matière d’attaquants axiaux mais était aussi dépourvu d’ailiers ou de faux-ailiers. En parallèle, cette réorganisation réhabilitait les profils de milieux de terrain de couloir, permettant à Jocelyn Angloma de retrouver sa place dans le onze.
Le 4-3-3 sans ailiers
Ce 4-1-2-1-2 prit donc la suite du tout jeune 4-3-3 que Georges Heylens avait initié en début de saison. Pour resituer les causes de ce nouveau système de jeu, il faut évoquer la saison précédente. En 1987/1988, le LOSC joue souvent en 4-4-2 avec Vandenbergh et Desmet dans l’axe de l’attaque. Or, au cours de cette saison, Gaston Mobati s’affirme comme un attaquant d’une valeur bien trop importante pour rester sur le banc d’un club comme Lille. Problème : ni Vandenbergh ni Desmet ne semblent pouvoir être placés sur le banc des remplaçants.
En conséquence, en toute fin de saison, Heylens initie un système a priori improbable en alignant ses trois attaquants axiaux à Saint-Étienne (défaite 4-3) puis contre le Matra Racing (5-0). L’avalanche de buts semble confirmer le bien fondé de cette réorganisation stratégique. En 1988/1989, le stratège belge semble désormais convaincu de la pertinence de cette réorganisation tactique, comme le confirme le recrutement de Roger Boli, substitut de valeur devant.
Étonnant un 4-3-3 sans ailiers, non ? Ce système diffère alors radicalement du 4-3-3 de José Arribas à la fin des années 1970. A l’époque, devant la défense à quatre, on trouvait deux milieux défensifs et, devant, Simon était à la mène derrière le trio offensif composé de l’avant-centre Pleimelding et des ailiers Cabral et Olarevic, soit un 4-2-1-3. Ici, le 4-3-3 du début de saison 1988/1989 est plutôt un 4-3-1-2.
Vandenbergh joue alors en « faux 10 ». La particularité de ce système est que Vandenbergh alterne entre un rôle de meneur derrière les deux attaquants et un rôle d’avant-centre, quand les deux attaquants alternent entre axe de l’attaque et redéploiement sur les ailes. Dans un apparent paradoxe, ce sont donc les deux attaquants axiaux qui centrent le plus souvent. En parallèle, ce rôle de centreur est moins attendu des milieux de terrains. C’est sans doute pour cela que Jocelyn Angloma sort du onze avec le 4-3-3, Josse étant typiquement le milieu de terrain qui « prend le couloir » (c’est pas pour rien qu’il s’est ensuite reconverti avec succès comme latéral droit). C’est aussi probablement en raison de ce profil qu’il retrouve sa place avec l’arrivée de Pelé. L’arrivée de Pelé a donc eu plusieurs effets : sortir Mobati de l’équipe, certes, mais aussi Da Silva, qui perd du temps de jeu au profit d’Angloma. Heylens a aussi utilisé souvent un autre 4-3-3 : avec un avant-centre, deux joueurs en fonction d’ailiers, mais à la différence du système d’Arribas, sans meneur de jeu véritable, c’est à dire avec un milieu en ligne à trois joueurs.
Bref, des systèmes très différents pour le LOSC d’Heylens. Une constante à ces différentes évolutions, c’est la relation entre les qualités particulières des joueurs et le système mis en place. On met en place un système selon les qualités des joueurs et leur complémentarité, mais on recrute aussi des joueurs selon leur correspondance au système que l’on imagine. Ainsi, l’animation offensive lilloise repose d’abord très largement sur des joueurs à l’aise sur les ailes, à l’image de joueurs comme Didaux et P. Plancque puis évolue progressivement vers le recrutement de joueurs plus à l’aise dans l’axe que sur les débordements.